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Parcours législatif : les nouvelles missions du pharmacien

III. L’adhésion thérapeutique à l’officine

III.1. Parcours législatif : les nouvelles missions du pharmacien

Comme nous l’avons vu, le pharmacien d’officine occupe une place centrale dans le parcours de soin du patient, et l’officine constitue un endroit propice à la détection de l’inobservance des patients.

C’est en juillet 2009, grâce à la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoire (HPST) que le pharmacien d’officine a été reconnu professionnel de santé à part entière, avec un élargissement de ses missions qui ont été définies trois ans plus tard avec la convention pharmaceutique.

III.1.1. Loi HPST

La loi HPST n’a aucunement entendu modifier les modes d’exploitation de la pharmacie. En revanche, elle a pris acte du besoin d’assurer la proximité d’un service de soins aux patients. C’est en effet sur un double constat d’une désertification médicale et de la nécessité de réorganiser la chaîne de soins, que dans une logique de rationalisation des coûts, cet ensemble législatif a mis en place une organisation des professionnels de santé auprès du patient intégrant le pharmacien d’officine comme un acteur essentiel, susceptible de devenir en pratique, un véritable pivot. 140

La loi HPST a ouvert la voie à une évolution essentielle du rôle du pharmacien ; deux articles de cette nouvelle loi portent sur les changements du métier du pharmacien, les

articles 38 et 84.

III.1.1.1. Article 38

Cet article définit le pharmacien comme professionnel de santé et l’intègre dans le système de santé. Il énonce clairement les missions des pharmaciens d’officine qui apparaissent depuis dans le code de la santé publique. Ainsi les pharmaciens d’officine : 140

- Contribuent aux soins de premiers recours 


- Participent à la coopération entre professionnels de santé 


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- Concourent aux actions de veille et de protection sanitaire organisées par les professions de santé

- Peuvent participer à l’éducation thérapeutique et aux actions

d’accompagnement de patients 


- Peuvent assurer la fonction de pharmacien référent pour un établissement qui ne dispose pas de Pharmacie à Usage Intérieur (PUI) 


- Peuvent, dans les cadres de coopérations prévues par le CSP, être désignés comme correspondants au sein de l’équipe par le patient. À ce titre ils peuvent, à la demande du médecin ou avec son accord, renouveler périodiquement des traitements chroniques, ajuster, au besoin, leur posologie et effectuer des bilans de médications destinés à en optimiser les effets.

- Peuvent proposer des conseils ou des prestations destinées à favoriser l’amélioration ou le maintien de l’état de santé des personnes. 


Le pharmacien n’est donc plus restreint à la dispensation au détail des médicaments, et à l’exécution de préparations magistrales et officinales, car il participe maintenant aux soins de premier recours, à l’éducation thérapeutique et aux actions d’accompagnement des patients afin de rendre leur adhésion thérapeutique la plus efficiente possible. 140 - 142

III.1.1.2. Article 84

Cet article traite des modalités de prise en charge de l’éducation thérapeutique du patient (ETP). Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), « l’éducation thérapeutique vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique ». 141, 143 L’ETP fait partie intégrante et de façon permanente de la prise en charge du patient. Elle comprend des activités organisées de sensibilisation, d’informations, d’apprentissage de la gestion de la maladie et de soutien psychosocial. Son but est d’aider les patients (ainsi que leurs familles) à comprendre leur maladie et leur traitement, à collaborer avec les soignants, et à maintenir ou améliorer leur qualité de vie. L’ETP s’adresse à toute personne ayant une maladie chronique, quels que soient son âge, le type, le stade et l’évolution de sa maladie. 144

En pratique, elle se compose de quatre étapes : 145 - Elaboration d’un diagnostic éducatif initial

- Définir avec le patient les compétences à acquérir (programme personnalisé) - Planifier et dispenser les séances d’éducation thérapeutique, individuelles ou

collectives, dans un lieu adapté

- Evaluation individuelle : mise en évidence des transformations survenues chez le patient, des compétences acquises... 


Des programmes d’éducation thérapeutique répondant à un cahier des charges sont mis en œuvre au niveau local, après une autorisation de l’Agence Régionale de Santé (ARS). 145

Les ARS sont issues de la loi HPST. Elles sont venues remplacer les agences régionales de l’hospitalisation, et les Directions Régionales et Départementales des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS et DDASS), tout en reprenant les missions des groupements régionaux de santé publique ainsi que les missions régionales de santé. Les ARS ont deux grandes missions : 142

- Mettre en œuvre au niveau régional la politique de santé publique en liaison avec les autorités compétentes dans les domaines de la santé au travail, universitaire et scolaire, ainsi que de la protection maternelle et infantile.

- Réguler, orienter et organiser l’offre de services de santé afin de répondre aux besoins en matière de soins et services médicaux.

Après autorisation par les ARS, ces programmes d’ETP sont ensuite proposés au malade par le médecin prescripteur et donnent lieu à l’élaboration d’un programme personnalisé en fonction de chaque patient. Leur évaluation se fait par la HAS. Beaucoup de ces programmes sont maintenant en place et sont gérés par une équipe pluridisciplinaire (médecins, pharmaciens, infirmiers et autres professions paramédicales). 142, 145

À ces programmes s’ajoutent des actions d’accompagnement afin de soutenir ou d‘assister les malades et leur entourage dans la prise en charge de leur pathologie et leur adhésion thérapeutique, notamment pour les pathologies chroniques. Actions d’accompagnement dans lesquelles le pharmacien d’officine occupe une place importante.

III.1.2. Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2012

Avec l’article 39 du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) de 2012 le processus d’application de la loi HPST s’est mis en marche, devenue par la suite l’article 74 de la Loi de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS) pour 2012 parue le 21 décembre 2011 au Journal Officiel (JO). Cet article de loi vient modifier le code de la sécurité sociale en ajoutant plusieurs points à l’article L.162-16-1. Ces ajouts traitent principalement de trois éléments : 146

- Apparition d’un honoraire de dispensation indépendamment de la marge sur le médicament

- Rémunération versée par l’Assurance Maladie en contrepartie d’engagements individualisés portant sur l’accompagnement thérapeutique, la rémunération à la performance en particulier sur la délivrance de médicaments génériques, la participation à des actions de dépistage ou de prévention et les actions favorisant la continuité et la coordination des soins

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La publication de la LFSS pour 2012 et ses nouvelles modifications ont donné lieu à des négociations entre les principaux syndicats d’officine et l’Assurance Maladie, qui ont ainsi permis la rédaction et la signature de la convention nationale pharmaceutique en 2012.

III.1.3. Convention pharmaceutique de 2012 et ses avenants

La nouvelle convention nationale des pharmaciens a été signée le 4 avril 2012 entre l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM) et les trois syndicats des pharmaciens : la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France (FSPF), l’Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine (USPO) et l’Union Nationale des Pharmacies de France (UNPF). Publiée au JO du 6 mai 2012, la convention est entrée en vigueur le 7 mai 2012. Cette convention remplace la convention de 2006, a une durée de validité de 5 ans, et le choix est libre au titulaire d’officine de suivre cette convention ou non, de plus seuls ces derniers sont conventionnés, les adjoints se doivent de respecter le choix des titulaires. 147

Cette nouvelle convention marque une véritable évolution du métier de pharmacien avec l’ambition de revaloriser son rôle en santé publique et de faire progresser la santé. Cette reconnaissance du rôle du pharmacien se traduit par la création de modes de rémunération diversifiés portant notamment sur des engagements individualisés de qualité, d’efficience et de modernisation.

Cette convention avait plusieurs objectifs, avec notamment celui de développer la coordination des soins, les nouvelles missions des pharmaciens ainsi que l'ensemble des dispositifs mis en place dans l'intérêt du patient. Ces dispositifs peuvent porter sur la dispensation, la participation à des actions de dépistage ou de prévention,

l'accompagnement de patients atteints de pathologies chroniques. Ils peuvent

également consister en des actions destinées à favoriser la continuité et la coordination des soins ainsi qu'en toute action d'amélioration des pratiques et de l'efficience de la dispensation. 141, 147

Depuis sa signature, la convention a fait l’objet de 8 avenants pour promouvoir l’évolution d’un certain nombre de mesures contenues dans le premier texte, dont trois portent sur les mesures d’accompagnement de patient : 148-150

- L’avenant numéro 1 entré en vigueur suite à l’arrêté du 24 juin 2013 relatif à l’accompagnement des patients chroniques sous AVK, point de départ officiel des entretiens pharmaceutiques.

- L’avenant numéro 4 entré en vigueur le 3 décembre 2014 relatif à l’accompagnement de certains malades chroniques (asthme avec prescription de corticoïdes inhalés).

- L’avenant numéro 8 entré en vigueur le 29 juin 2016, portant sur l’extension d’accompagnement des patients chroniques à l’ensemble des anticoagulant oraux direct (AOD) et à l’ensemble des asthmatiques adultes sous corticoïdes inhalés.

Ce parcours législatif a donc permis de faire évoluer le statut du pharmacien d’officine, le faisant ainsi devenir un professionnel de santé à part entière, utile et nécessaire pour une prise en charge personnalisée et optimale du patient.

Pour résumer, au vue des informations qui ressortent de la convention pharmaceutique, le nouveau rôle du pharmacien d’officine est de contribuer aux soins de premier recours, participer à la coopération entre professionnels de santé, participer à la mission de service public de la permanence des soins, concourir aux actions de veille et de protection sanitaire organisées par les autorités de santé et participer à l’ETP et aux actions d’accompagnement des patients. À ce titre, le pharmacien d’officine devra s’investir dans « des actions de prévention, de dépistage, d’éducation pour la santé, de suivi personnalisé des traitements, de relais de prescription, de développement de la médication officinale » grâce au conseil reconnu comme un acte. 141, 147

L’un des points importants de ces mesures législatives est la possibilité pour le pharmacien d’officine de participer à l’éducation thérapeutique et aux actions d’accompagnements de patients. Les avenants de la convention pharmaceutique de 2012 ont permis de mettre en place des premiers programmes d’accompagnement des patients sous AOD mais également les patients asthmatiques via la réalisation notamment d’entretiens pharmaceutiques. 148 - 150

Ces actions d’accompagnement à l’officine pouvant être proposées chez toutes personnes souffrant de maladies chroniques. Elles peuvent donc également s’appliquer pour le patient goutteux. L’observance du patient goutteux étant particulièrement mauvaise et l’application des recommandations de prise en charge et d’éducation du patient sur sa maladie n’étant pas toujours mise en œuvre dans les cabinets de médecine générale (par manque de temps bien souvent du fait des salles d’attente encombrées, conséquence notamment de la désertification médicale), ces actions d’accompagnement à l’officine peuvent se révéler bénéfiques pour les patients goutteux.

Le pharmacien d’officine comme nous l’avons vu est un interlocuteur de choix, écouté par les patients, accessible grâce à sa proximité et son accès sans rendez-vous. C’est aussi un professionnel de santé confirmé grâce à sa formation scientifique initiale mais également grâce aux nouvelles missions qui lui ont été attribuées par les textes législatifs. Il représente donc un encadrement supplémentaire utile pour accompagner un patient goutteux dans sa prise en charge, l’éducation de sa maladie et de son traitement et construire ainsi avec lui un véritable projet thérapeutique encourageant son adhésion. Nous allons voir par la suite que cet accompagnement officinal peut se réaliser de plusieurs manières.

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