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Chapitre 5 Description du dispositif hybride

5.2. Les paramètres du dispositif hybride

Avant de passer à la présentation des paramètres de ce dispositif, je dois préciser que je me suis appuyée sur ceux décrits par Nissen (2006), mais aussi par Degache et Nissen (2008).

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La mise en place du dispositif hybride expérimental suppose un changement des modalités d’apprentissage actuelles, du moins pour les trois groupes d’apprenants qui y participent. Les dispositifs hybrides, tels qu’ils se définissent, permettent de proposer une nouvelle modalité d’apprentissage panachant des séances en classe et en autoformation3ayant comme support une plateforme en ligne. Charlier, Deschryver et Peraya (2006 : 469) définissent les dispositifs hybrides comme « des dispositifs articulant à des degrés divers des phases de formation en présentiel et des phases de formation à distance, soutenues par un environnement technologique comme une plate-forme de formation. »

Nissen (2007 : 132) définit l’autoformation dans les dispositifs hybrides, selon les caractéristiques suivantes :

- la non-présence physique de l'enseignant,

- la proposition d'un parcours structuré avec des ressources variées, - l'atteinte des objectifs prévus,

- la gestion de ses temps et rythme d'apprentissage par l'apprenant,

- la nécessaire motivation de l'apprenant qui prend des responsabilités dans son apprentissage.

A distance, les processus d’enseignement et d’apprentissage sont séparés dans le temps et l’espace (diachronie), alors qu’en présentiel, tout le monde travaille la même chose en même temps (synchronie).

Les cours en présentiel continuent à être les mêmes qu’auparavant, ils sont donnés à raison de trois heures par semaine (deux fois 1h30). Il s’agit donc de proposer une autoformation complémentaire, afin de permettre d’augmenter le volume d’activité des apprenants, sans que la progression et le volume horaire des cours en présentiel n’en dépendent directement. Nissen (2007 : 131) s’exprime sur ce paramètre en ces termes : « […] la composante non présentielle augmente le volume d'activité par rapport au présentiel […]. L'avantage de combiner les deux modalités d'apprentissage, à distance et en présentiel, est de pouvoir profiter ainsi des avantages de chacune des deux. »

La mise en place de la plateforme Moodle, dans le cadre d’un dispositif hybride, correspond également à une volonté de créer un accompagnement de l’enseignement hors de

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la classe, afin de soutenir le processus d’enseignement/apprentissage. L’objectif de ce projet n’est pas de poursuivre la formation dispensée en présentiel, mais bien de proposer un soutien linguistique et pédagogique aux apprenants. Tous les contenus présents sur la plateforme ont donc déjà été abordés lors des cours à l’académie. Ils sont principalement au service de l’entraînement à la compréhension orale et visent donc l’acquisition de compétences orales. Ils viennent renforcer le travail déjà réalisé en présentiel en compréhension et production orales. En effet, il a été choisi de réaliser le travail sur la production orale lors des cours en présentiel, alors que celui sur la compréhension orale s’effectue dans les deux modalités, en présentiel et à distance. Ce choix méthodologique est d’ailleurs souvent effectué lorsque les formations hybrides mises en place visent un travail sur les compétences orales comme le souligne Nissen (2007 : 134) :

[…] des préférences pour travailler certains de ces aspects plutôt dans une des deux modalités – à distance ou en présentiel – que dans l'autre se dessinent. Ainsi, certains contenus et certaines activités sont plus faciles à aborder en présentiel. Il s'agit là de l'expression et de la communication orales, que l'on peut y pratiquer dans une situation plus habituelle, en face à face, sans qu'il y ait besoin d'un environnement numérique pour les médiatiser. D'autres éléments sont au contraire proposés de préférence à distance. Ainsi, Internet représente une source précieuse pour la recherche d'informations, à condition que l'on maîtrise les procédures de recherche.

Dans le cadre du dispositif expérimental, il s’agit bien de soutenir le processus d’apprentissage de compétences de compréhension et de production orales, d’aider les apprenants les plus faibles à progresser, et de permettre aux autres de compléter leur apprentissage. Des objectifs communicatifs (compréhension et production orales), linguistiques (grammaire, lexique et phonétique), et interculturels sont visés par l’ensemble du dispositif. Les apprenants peuvent s’entraîner à la compréhension de la langue orale sur la plateforme en ligne, mais aussi lors des activités réalisées en cours (écoutes de documents audio et visionnages de vidéos). En présentiel, le travail est centré sur la compréhension et la production orales lors d’interactions entre apprenants (tâches en petits groupes), ou encore entre les apprenants et l’enseignant. Bien sûr les compétences écrites ne sont pas mises de côté, elles sont également travaillées. Des entraînements à la production orale sont également menés grâce à la lecture à voix haute des documents écrits présents dans le livre de cours, mais aussi de monologues oraux, ou encore grâce à la réalisation d’exercices de phonétique, afin d’améliorer la prononciation, et de travailler le rythme et la prosodie. Comme Nissen (2007 : 130) le signale, les activités :

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peuvent s'agencer de manière diverse, et traiter des contenus et compétences différentes, ou bien traiter les mêmes mais les reprendre d'une autre manière. Elles peuvent exister de manière parallèle avec des liens entre les deux modalités de formation ou bien se succéder dans le temps par périodes et selon des durées variables.

Les activités en ligne permettent de revoir et retravailler les notions abordées en présentiel. Elles donnent la possibilité aux apprenants de renforcer leurs acquis, de s’exercer à nouveau grâce à des tâches complémentaires, ou encore de se rendre compte des savoirs non acquis qu’ils doivent donc revoir, ou pour lesquels l’enseignant doit fournir des explications complémentaires.

Par ailleurs, les ressources disponibles sur la plateforme doivent permettre d’augmenter sensiblement le temps d’exposition des apprenants à la langue cible. Il s’agit ici d’un aspect très important dans ce projet, puisque dans sa langue maternelle, un locuteur natif consacre 45% de son temps à des activités langagières de compréhension orale (Desmet & Héroguel, 2005). La compréhension orale est donc la compétence langagière la plus importante et sur laquelle l’accent doit être mis lors de l’apprentissage. Perrin (2000) insiste sur l’importante de la fréquence de ce contact avec la langue cible pour l’acquisition de compétences en langue étrangère :

[…] l'acquisition de la compétence langagière réelle est affaire de confrontation individuelle de l'apprenant, à dose suffisante, et suffisamment régulière, avec la langue qu'il désire maîtriser. Aucun enfant ne s'est jamais mis à parler sa langue maternelle sans passer par plusieurs milliers d'heures d'écoute active. Personne ne peut espérer bien parler une langue seconde sans se donner les moyens de bien la comprendre. Ce qui suppose que l’on « s'expose » personnellement, en situation de réception attentive, au discours authentique et suivi de nombreux locuteurs de la langue-cible.

En ce qui concerne la modalité présentielle, les cours donnés ne peuvent, en aucun cas, se voir affectés par la mise en place du dispositif. Ce paramètre s’explique par le simple fait, qu’il ne s’agit pas d’une offre de cours que l’Instituto Hispano Francés ait faite à des clients désireux de suivre une autoformation complémentaire. En effet, il a été proposé à trois groupes d’apprenants hispanophones de niveau débutant de participer à ce dispositif expérimental, l’utilisation de la plateforme ne peut donc pas être imposée. La modalité à distance ne doit donc pas être un prérequis pour les séances se déroulant en présentiel. Par conséquent, le lien présentiel/distance est faible, c’est-à-dire que si le travail à distance n’est pas réalisé, les cours en présentiel ne s’en ressentent pas. Les apprenants sont donc libres dans

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l’utilisation qu’ils font de la plateforme, des activités qu’ils réalisent parmi celles proposées et du temps qu’ils y passent. Cependant, il existe une forte cohésion entre les contenus des cours en présentiel et ceux disponibles en autoformation. Les contenus en ligne sont donc en étroite relation avec ceux abordés dans les quatre premiers dossiers du livre de cours Alter Ego, Méthode de français 1. Ainsi, la modalité en présentiel est dominante dans ce dispositif, comme Neumeier (2005 : 167) le préconise :

L’un des deux modes de formation qui sont combinés dans la formation hybride doit toujours être dominant si l’on veut pouvoir clairement exposer aux apprenants les objectifs d’apprentissage, l’organisation du dispositif et les activités à réaliser - ou autrement dit le scénario pédagogique.

Dans le cadre de dispositifs hybrides, Nissen (2007 : 136) souligne l’importance de la formulation d’objectifs par les apprenants : « L'étudiant est davantage guidé sur les activités à faire et les ressources à utiliser. S'il peut formuler des objectifs, ceux-ci ne sont pas globaux mais porteront sur l'objectif ou la thématique d'une activité donnée. »

Dans le cas de ce dispositif, les objectifs visés et explicités sont un soutien au processus d’apprentissage en vue d’une meilleure compréhension de la langue à l’oral, et une amélioration de la production orale en français. Il s’agit d’aider les apprenants à acquérir des compétences orales en tant que locuteur s’exprimant dans la langue cible.

Cette autoformation a pour support une plateforme Moodle sur laquelle les apprenants ont à leur disposition des ressources extraites d’Internet, mais aussi d’autres que j’ai créées. Ce dispositif appartient donc à une catégorie de dispositifs hybrides spécifiques dans lesquels les « supports, activités et tâches proposés à distance fonctionnent comme un système de libre-service auquel les étudiants ont recours s'ils le souhaitent. » (Nissen, 2007 : 132). Il s’agit d’un dispositif qui incite les apprenants à prendre des initiatives dans leur apprentissage. Des ressources supplémentaires en ligne sont mises à leur disposition, elles viennent compléter les cours en présentiel, libre à eux de les réaliser ou non.

Dans le cadre de ce projet, un autre intérêt de la médiatisation de ressources est de donner l’opportunité aux apprenants d’étudier à leur rythme en leur fournissant des aides, tel que Nissen (2007 : 134) le souligne :

La compréhension, et surtout la compréhension orale, peut également être travaillée au rythme de l'étudiant, avec les fichiers et aides à la compréhension mises à disposition dans le dispositif. Ces aides peuvent prendre la forme de dictionnaires, d'exercices aidant l'étudiant à repérer les éléments essentiels du document audio ou vidéo, ou la proposition de documents écrits qui

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portent sur le même sujet et qui permettent ainsi à l'étudiant de comprendre le contexte de l'événement et de préparer son écoute.

Ces aides doivent servir de soutien au travail que les apprenants réalisent seuls chez eux.

En plus d’une aide à l’acquisition de compétences de compréhension orale, le travail en ligne à pour but de soutenir les apprenants dans leur apprentissage, afin de vaincre un possible découragement qui peut émerger en début d’apprentissage d’une langue. De plus, celui-ci se donne également pour objectifs de développer l’autonomie des apprenants. Il s’agit ici de différents types d’autonomie : langagière, technique, psychoaffective, métacognitive, et sociale. C’est une des autres raisons pour lesquelles un dispositif hybride a été mis en place pour des apprenants débutants. En début d’apprentissage d’une langue comme le français, les possibilités de découragement sont assez importantes, le dispositif a donc pour but de soutenir cet apprentissage comme le commente Nissen (2007 : 136) « […] les formations hybrides cherchent à rendre l'apprenant actif et à l'aider à empêcher ou bien à vaincre le découragement. »