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Papiers-valeurs et droits-valeurs a) Papiers-valeurs

PRODUITS STRUCTURÉS COMME VALEURS MOBILIÈRES

1. Papiers-valeurs et droits-valeurs a) Papiers-valeurs

Sont des papiers-valeurs “tous les titres auxquels un droit est incorporé d’une manière telle qu’il soit impossible de le faire valoir ou de le transférer indépendamment du titre” (art. 965 CO). Le système juridique suisse ne prévoit pas de numerus clausus des papiers-valeurs4, sous réserve des cas dans lesquels la loi interdit la forme de papier-valeur5. Ceux-ci sont ainsi créés selon la volonté de l’émetteur, qui se confond en général avec le débi-teur, par le rattachement d’une clause de présentation double à un titre de créance6. De fait, les papiers-valeurs prennent les formes les plus variées et peuvent se distinguer en fonction de nombreux critères.

Le mode de transfert et de légitimation du bénéficiaire sont les carac-téristiques principales des papiers-valeurs que l’on distingue alors en trois catégories : les papiers-valeurs au porteur, les papiers-valeurs à ordre et, enfin, les papiers-valeurs nominatifs7.

On peut également les différencier en fonction des droits qu’ils incor-porent (droits de sociétariat, droits de créance ou droits réels)8. S’agis-sant des papiers-valeurs incorporant des droits de créance, généralement payables à moyen ou long terme et portant intérêt, on citera notamment les obligations, les reconnaissances de dettes, les parts de placements collectifs contractuels, mais également les instruments dérivés9.

Un autre critère permet de considérer, d’une part, le papier-valeur unique et, d’autre part, les papiers-valeurs émis en grand nombre10. Dans ce second cas, les papiers-valeurs sont émis en série par un même émetteur.

Ils incorporent les mêmes droits de créance qui se fondent sur des rap-ports juridiques multiples mais identiques entre chacun des bénéficiaires et l’émetteur11. Ces papiers-valeurs se caractérisent ainsi par leur fongi-bilité qui facilite leur circulation. Au contraire, le papier-valeur unique incorpore un droit qui n’est pas lié de quelque façon que ce soit aux droits incorporés dans des papiers-valeurs du même genre12.

Sur les marchés financiers, on a depuis longtemps rationalisé le traite-ment des opérations de négoce des papiers-valeurs en prévoyant leur mise en dépôt collectif, leur dématérialisation progressive et le remplacement du transfert physique par des inscriptions comptables. Cette pratique sou-levait de nombreuses incertitudes juridiques auxquelles le législateur a

s’ajoute la clause à ordre caractéristique de ce type de papier-valeur. Le transfert n’est alors valable que par endossement complet avec remise du titre (art. 967 al. 2 CO, 968 CO et 1004 CO). La clause de légitimation double et l’inopposabilité des exceptions en cas de transfert du titre sont des mécanismes juridiques qui facilitent le transfert du titre au porteur ou à ordre et ainsi sa négociabilité. On parle alors de papiers-valeurs de foi publique (Wertpapiere öffentlichen Glaubens) ou parfaits (vollkommene Wert-papiere). Le papier-valeur nominatif (Namenpapier, Rektapapier) présente une clause de présentation double, caractéristique commune à tous les papiers-valeurs (art. 965 CO) mais pas de clause de légitimation double puisqu’il a été créé au nom d’une per-sonne déterminée (art. 974 CO). Le porteur d’un titre nominatif ne bénéficie ni de la purge des exceptions, ni de la protection accordée à l’acquéreur de bonne foi, ce qui rend sa circulation difficile. Voir CR-CO II - Bohnet (2008), Art. 965 CO, p. 2212, N. 3, 12 ; Meier-Hayoz / von der Crone (2000), p. 64 ; Petitpierre-Sauvain (2006), p. 40 ss.

8 Meier-Hayoz / von der Crone (2000), p. 6 ; Petitpierre-Sauvain (2006), p. 32 ss.

9 Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur les bourses et le commerce de valeurs mobilières du 24 février 1993, p. 1295.

10 Rohr (1990), p. 37.

11 Ibidem ; Petitpierre-Sauvain (2006), p. 320, N. 1054.

12 Rohr (1990), p. 37.

remédié par l’adoption de la loi fédérale sur les titres intermédiés13. Cette loi régit le mode de disposition et de conservation, par des dépositaires, des papiers-valeurs et des droits-valeurs émis en grand nombre. Le sys-tème ainsi mis en place repose sur trois notions centrales : le dépositaire, le compte de titres et le titre intermédié. Par titres intermédiés au sens de l’art. 3 LTI, on entend les créances et les droits sociaux fongibles à l’encontre d’un émetteur qui sont inscrits au crédit d’un compte de titres (let. a) et dont le titulaire du compte peut disposer selon les dispositions de la LTI (let. b)14. Les papiers-valeurs fongibles qui ne souffrent pas de restriction à leur transfert et qui sont inscrits sur un compte de titre constituent dès lors des titres intermédiés.

b) Droits-valeurs

Comme mentionné plus haut, on a renoncé pour des raisons de rationalisa-tion et de globalisarationalisa-tion des marchés financiers depuis longtemps au trans-fert de possession du titre. Celui-ci a été remplacé par l’enregistrement comptable des droits de créances ou de participation qu’il incorpore15. Au surplus, le titre lui-même s’est trouvé progressivement dématérialisé. On distingue trois formes de dématérialisation des papiers-valeurs16 : la créa-tion auprès d’un dépositaire d’un dépôt collectif (Sammeldepot, Sammel-verwahrung)17 rassemblant l’ensemble des papiers-valeurs d’une même

13 Loi fédérale sur les titres intermédiés du 3 octobre 2008 (LTI ; RS 257.1). La LTI est entrée en vigueur le 1er janvier 2010. Pour une présentation du système de détention intermédiée : Thévenoz (2004) ; Brunner (1996) ; Favre (2003), Message du Conseil fédéral relatif à la loi fédérale sur les titres intermédiés et à la Convention de La Haye sur les titres intermédiés du 15 novembre 2006. Pour une présentation générale de la LTI, cf. notamment Thévenoz (2005) ; Kuhn (2006) ; Kunz (2007) ; Hess / Friedrich, p. 103 ; Leibenson (2013).

14 Gomez Richa / Veuve (2010).

15 Zobl / Kramer (2004), p. 197, N. 540.

16 Message du Conseil fédéral relatif à la loi fédérale sur les titres intermédiés et à la Convention de La Haye sur les titres intermédiés du 15 novembre 2006, p. 8825 s. ; BSK-OR II - Furter (2008), Art. 965 CO, p. 2266 ss, N. 19 ss.

17 Ce mode de conservation des titres est également appelé détention intermédiée.

Pour une présentation de ce mode de détention des titres, voir art. 972a CO, éga-lement Message du Conseil fédéral relatif à la loi fédérale sur les titres intermédiés et à la Convention de La Haye sur les titres intermédiés du 15 novembre 2006, p. 8823 ss ; Kuhn (2006), p. 127 ss ; Meier-Hayoz / von der Crone (2000), p. 325 s.

émission, l’émission d’un certificat global (Global-, Sammelurkunde)18 conservé chez un dépositaire ou, enfin, les droits-valeurs dématérialisés pour lesquels l’émetteur renonce à tout support matériel19.

Cette dématérialisation des papiers-valeurs a donné naissance à une nouvelle notion juridique : le droit-valeur (Wertrecht), c’est-à-dire un droit ayant les mêmes fonctions que le papier-valeur mais pour lequel le support physique fait défaut ou ne fait pas l’objet de transfert de posses-sion (art. 973c al. 1 CO). Le législateur a tenu compte de cette évolution en incluant dès 1995 les droits-valeurs parmi les catégories de valeurs mobilières20. La notion de droits-valeurs au sens de l’art. 2 let. a LBVM englobe ainsi toutes les formes de dématérialisation des papiers-valeurs21, pour autant qu’il s’agisse de droits-valeurs standardisés et émis en grand nombre.

Selon la doctrine majoritaire, les droits-valeurs constituent des créances contractuelles soumises au droit des obligations. Les droits réels et le droit des papiers-valeurs ne leur sont pas applicables22. Ils en dé-coulent que, le transfert des droits-valeurs est soumis aux règles générales sur la cession de créance (art. 164 ss CO), que le nantissement obéit quant

18 Un certificat global est un papier-valeur qui représente un nombre déterminé de titres d’une émission, voire l’intégralité de l’émission. L’originalité du certificat global réside dans l’incorporation dans un titre unique d’un certain nombre de droits de créance et autres qui restent néanmoins indépendants les uns des autres, Meier-Hayoz / von der Crone (2000), p. 331 s. Voir également l’art. 973b CO, Message du Conseil fédéral relatif à la loi fédérale sur les titres intermédiés et à la Convention de La Haye sur les titres intermédiés du 15 novembre 2006, pp. 8891 s. et 8834. On distingue le certi-ficat global technique du certicerti-ficat global durable. Dans le premier cas, l’investisseur a le droit absolu d’exiger l’impression et la livraison d’un certificat individuel ; dans le second, le certificat incorpore tous les droits négociables découlant d’une émission, l’investisseur n’a qu’un droit de copropriété réel et seul le chef de file ou l’émetteur a le droit d’exiger l’impression de titres individuels, SIX Swiss Exchange, Directive concernant la fome des valeurs mobilières 2014, art. 5.

19 BSK-OR II - Furter (2008), Art. 965 CO, p. 2268, N. 24.

20 Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur les bourses et le commerce de valeurs mobilières du 24 février 1993, p. 1295 ; BSK-BEHG/FINMAG - Daeniker / Waller (2011), Art. 2 let. a-c LBVM, p. 483, N. 8.

21 Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur les bourses et le commerce de valeurs mobilières du 24 février 1993, p. 1295.

22 Kommentar BEHG - Zobl (2000), Art. 2 let. a LBVM, N. 10 ; Zobl / Kramer (2004), p. 197, N. 540 ; contra Brunner (1996), p. 204 ss.

à lui aux règles sur la mise en gage de créances (art. 900 al. 1 CC)23. Enfin, l’acquisition de bonne foi de tels droits est exclue24. L’application de ces règles devrait désormais constituer l’exception suite à l’entrée en vigueur de la LTI. Celle-ci régit, en effet, les modes de disposition et de conserva-tion des titres intermédiés dont le sous-jacent est un droit-valeur fongible, librement transmissible, inscrit sur un compte de titre.

2. Dérivés