• Aucun résultat trouvé

PARTIE 5 : Résultats

1.2. L’expérience vécue en vidéo-formation : une inclination réflexive vers les moments de

1.3.1. Les pairs comme aide à la compréhension de la situation visionnée

Lors de la conception du dispositif de formation et des différentes ressources à retenir en début de formation, un choix s’est porté sur l’introduction de formats de travail collectifs entre les étudiants, en dyades et en grand groupe. Il ressort que les situations de visionnement croisé

186

en dyades (binôme E1 et E2) sont apparues comme pouvant constituer une aide pour les étudiants afin de connecter les pratiques filmées visionnées (celles des pairs ou d’un enseignant chevronné) à leurs propres pratiques d’enseignement. Pour rappel, au cours de ces moments de visionnement croisé d’une vidéo d’un des deux étudiants constituant la dyade (E1 et E2), l’étudiant (E1) cherche à décrire dans un premier temps la situation de classe vidéoscopée animée par un pair (E2) pendant que ce pair cherche à décrire sa propre pratique qu’il visionne lui aussi. Ils réalisent conjointement cette analyse vidéo en retranscrivant en direct leur description sur leur ordinateur personnel, sans échanger entre eux conformément aux consignes de travail données par le formateur. Puis, dans un deuxième temps, les deux étudiants échangent leur analyse : l’étudiant (E1) expose en premier à E2 son analyse écrite portant sur ce qu’il a observé et interprété sur la vidéo ; puis E2 (l’auteur de la vidéo) adresse à son tour à E1 l’analyse écrite qu’il a faite de sa propre vidéo (la vidéo de E1).

L’étude des traces écrites des analyses produites par les étudiants sur leur ordinateur fait ressortir deux types d’analyse de la vidéo commune qu’ils visionnaient. Ces deux types d’analyse montrent des points de convergence, mais aussi de divergence qui les rendent complémentaires :

(a) Les traces écrites de l’étudiant E1 lorsqu’il analysait la vidéo du pair, montre une analyse essentiellement descriptive, factuelle et en « extériorité ». Les préoccupations-types et perceptions-types, qui caractérisent cette activité d’analyse en formation, sont résumées à partir d’exemples singuliers issus des journaux de bord des étudiants (Tableau 12) :

Extraits de journaux de bord Préoccupations qui animent les

étudiants lorsqu’ils analysent la vidéo d’un pair

Manon (E1), moment d’explication des consignes (Mathieu, E2) :

E1 : « Arrêt des élèves lors de l'exercice précédent pour en introduire un nouveau (élèves calmes, écoutent) ; démonstration avec tout le monde autour et un élève qui joue avec Mathieu, explication de l'évolution des consignes précédentes. Elèves attentifs, impliqués. Interactions avec les élèves (réexplications). Centration un peu longue sur une seule table (pendant ce temps d'autres élèves ne suivent pas les consignes et font des échanges). Beaucoup de consignes : « service cadeau », « jouer sur toute la table pour écarter le tapis ensuite », « ne pas s'occuper des petites zones », « lancer la balle

- Décrire tout le déroulement de la séquence visionnée

- Identifier et noter ce que font les élèves durant les consignes

- Ecouter attentivement et retranscrire toutes les consignes énoncées afin d’évaluer leur efficacité

au service avec la main ». Beaucoup de réexplications sont faites »

Martin (E1), moment d’appel (Benjamin, E2) : E1 : « Lors de l’appel Benjamin est face aux élèves, debout et les élèves assis devant lui. Il est dos au couloir arrivant des vestiaires du coup il ne voit pas les élèves arriver »

- Décrire l’organisation spatiale de la situation

- Décrire le positionnement corporel de Benjamin

Amélie (E1), moment d’explication des consignes (Maéva, E2, Annexe 7) :

E1 : « 3 élèves lancent les ballons, tout un groupe de filles mettent longtemps à se lever. Maéva les reprend. Les élèves de gauche mettent 20 secondes pour se lever. Elle siffle et redonne les consignes : « mettez-vous par 3 », « prenez des dossards ». »

- Décrire le déroulement précis de la situation et les interactions enseignants/élèves

- Identifier toutes les consignes que donne Maéva pour mettre en activité les élèves

Tableau 12 : Préoccupations qui animent les étudiants lorsqu’ils analysent la vidéo d’un pair (extraits de leur journal de bord)

(b) Les traces écrites de l’étudiant E2 lorsqu’il analysait sa propre vidéo, révèle une analyse beaucoup moins descriptive (en extériorité) mais davantage centrée sur son propre vécu émotionnel de la situation de classe, selon une posture en intériorité (Tableau 13).

Extraits de journaux de bord Préoccupations qui

animent les étudiants lorsqu’ils analysent leur

propre vidéo

Mathieu (E2), moment d’explication des consignes (Manon, E1) :

E2 : « Je donne les consignes en regardant les élèves quand je n’écris pas au tableau. J’ai l’impression d’avoir du mal à m’exprimer correctement pour que les élèves comprennent. Je répète plusieurs fois la même chose pour être sûr que tout le monde a bien compris [...] Je n’étais pas très à l’aise devant les élèves, j’avais peur de dire des bêtises et de l’image que les élèves allaient se faire de moi. Ce qui m’a le plus gêné c’est la manière de m’exprimer. Peur d’utiliser des mots que les élèves ne comprennent pas, ou la façon dont je fais mes phrases … »

- Cherche à décrire ses émotions, son ressenti son mal-être

- Tente de redécrire comment il a vécu la situation

- Exprime la peur d’être incompris par les élèves (peur qu’il ressentait lors de ce moment de classe) Benjamin (E2), moment d’appel (Martin, E1) :

E2 : « En décrivant à Martin, je me suis centré directement sur la façon dont moi j’ai vécu la situation…J’étais mal à l’aise, je ne voyais rien et je n’étais concentré que sur mon cahier pour ne pas faire d’erreur de prononciation. Finalement, je me suis quand même trompé et tous les élèves ont rigolé. J’ai vraiment eu l’impression de ne pas être compétent »

- Veut décrire comment il a vécu la situation

- Essaie de faire comprendre son malaise - Faire comprendre à Martin son appréhension lors de l’appel

188

- Montrer que la situation est inconfortable pour lui alors que cela ne se voit pas sur la vidéo

Maéva (E2), moment d’explication des consignes (Amélie, E1, Annexe 8) :

E2 : « A partir de ce moment je commence vraiment à m’énerver car on perd beaucoup de temps de pratique « vous avez quel âge pour ne pas réussir à faire les équipes de 3 ??? ». Ensuite les problèmes de groupes sont enfin réglés mais les élèves ne sont toujours pas dans la situation. Je m’agace en leur demandant de prendre des dossards car certains groupes n’en ont toujours pas. Je commence à leur parler de façon agressive. J’accompagne le groupe du fond car je veux être sûre qu’ils commencent la situation. Je suis énervée car je me rends compte que certains n’ont pas compris la situation alors que j’ai fait une explication suivie d’une démonstration. Je leur parle de façon agressive et on sent mon impatience. Je reste donc vers ce groupe en étant dos au reste de la classe et je leur donne toutes les indications pour qu’ils se lancent sur la situation. Ça fait 5 minutes que j’ai lancé la situation et les groupes sont enfin en activité. Je suis énervée d’un côté car les élèves sont mollassons et nonchalants »

- Montrer son énervement à Amélie

- Exposer son agacement - Expliquer qu’elle a essayé plusieurs choses mais que cela ne fonctionne pas - Expliciter qu’elle envisage de nombreuses choses, elle réfléchit - Dévoiler qu’elle se sent démunie

Tableau 13 : Préoccupations qui animent les étudiants lorsqu’ils analysent leur propre vidéo de classe (extraits de leur journal de bord

L’analyse croisée a été vécue par les étudiants comme un moyen d’accéder au ressenti de celui qui enseigne et ainsi de mieux comprendre l’interaction enseignant/élève qui leur a été demandé d’observer : « Le fait de voir l’analyse de celui qui enseigne me permet de prendre conscience de son ressenti, ça me précise le contexte du moment. Je peux savoir ce qu’elle ressent à ce moment-là, car elle ressent des choses qu’on ne peut pas voir sur la vidéo, c’est comme si j’avais toutes les cartes en mains pour être dans la situation ». (Trace écrite du journal de bord de Yannick). Bien que ces deux analyses diffèrent en partie, alors même qu’elles portaient sur une même vidéo, leur « confrontation » apparaît comme un catalyseur pour la compréhension de la situation visionnée et cela pour les deux étudiants de la dyade (a, b) : (a) Pour l’étudiant E1 analysant la vidéo du pair, le croisement de son analyse avec celle de son pair, lui permet d’interpréter et d’analyser la vidéo qu’il visionne sous un nouvel angle. Il peut accéder aux motifs d’action d’E2, aux raisons qui l’on poussé à agir de cette façon dans la situation. Ainsi, E1 construit de nouvelles connaissances lui permettant de mieux comprendre la situation de classe, notamment l’activité de l’enseignant dans la classe (Tableau 14).

Extrait de journal de bord Connaissances

Mathieu (E1), moment d’explication des consignes (Manon, E2) :

E1 : « L’analyse de Manon m’a aussi permis de voir qu’il n’y avait pas que ma manière d’analyser qui montrait que j’étais mal à l’aise mais qu’il pouvait aussi y avoir ma façon d’être au niveau de la posture et de mes positionnements. Alors que moi je n’avais pas du tout perçu cela, je n’avais pas prêté attention à cela en regardant ma vidéo tout seul »

En croisant son analyse avec Manon, Mathieu se rend compte qu’il est possible d’analyser différemment l’explication des consignes : il construit des connaissances relatives à l’importance du positionnement corporel et de l’aménagement de l’espace

Martin (E1), moment d’appel (Benjamin, E2) : E1 : « Ecouter l’analyse de Benjamin m’a permis de comprendre pourquoi il était comme ça pendant l’appel mais aussi que ce moment était difficile pour lui alors qu’en voyant la vidéo on ne croirait pas »

Martin saisit les raisons expliquant le comportement de Benjamin. Il accède à ce que ce dernier ressent dans la situation, ce qui lui permet de découvrir que les aspects subjectifs (non visibles à la vidéo) sont importants à connaître si on veut comprendre la façon d’enseigner de Benjamin

Amélie (E1), moment d’explication des consignes (Maéva, E2):

E1 : « L’analyse de Maëva m’a permis de conforter mon analyse. Je connais bien Maëva donc j’ai pu percevoir des choses sur son comportement grâce à cela. Grâce à cette confrontation, j’ai fait ressortir un « geste professionnel » : adapter le degré d’autonomie et de cadrage des élèves en fonction de la situation (APSA, sécurité…) et du type d’élèves (âge, personnalité, ambiance de classe…) »

Amélie comprend grâce à l’analyse de Maéva que l’explication des consignes nécessite de cadrer différents aspects : organisation des espaces, constitution des équipes, placement par rapport au groupe et consignes différenciées selon les élèves

Tableau 14 : Exemples de connaissances construites par les étudiants lorsqu’ils analysent la vidéo d’un pair (extraits de leur journal de bord)

(b) Pour l’étudiant E2, auteur de la vidéo visionnée, le croisement des analyses l’amène à réinterpréter sa propre activité d’enseignement, à l’envisager selon un nouvel angle, qui lui permet de construire une nouvelle façon d’analyser sa pratique et d’envisager la mise en œuvre de gestes professionnels lors du face à face pédagogique (Tableau 15) :

Extrait de journal de bord Connaissances

Manon (E2), moment d’explication des consignes (Mathieu, E1) :

E2 : « Le fait d’avoir le point de vue de

Mathieu sur sa vidéo ça m’a permis de

Manon comprend grâce au point de vue de Mathieu que même s’il a l’air à l’aise, il est tendu et que cela influe sur sa façon de réaliser l’explication des consignes. Pour

190

comprendre pourquoi il hésitait sur les consignes. Il n’était pas à l’aise dans l’APSA et il était stressé même si à la vidéo cela ne se voit pas. Je me dis qu’il faut parfois être capable de cacher ce qu’on ressent »

enseigner, il faut parfois être capable de cacher ses émotions.

Benjamin (E2), moment d’appel (Martin, E1) :

E2 : « Ce que m’a dit Martin sur ma vidéo m’a permis de prendre en compte les aspects concrets comme le placement des élèves et moment où débuter l’appel, il faut bien attendre tous les élèves »

Benjamin comprend que pour l’appel il faut attendre que tous les élèves soient sortis des vestiaires et qu’il doit penser en amont la façon de les regrouper pour l’appel.

Maéva (E2), moment d’explication des consignes (Amélie, E1) :

E2 : « En échangeant avec Amélie, je me rends compte que j’aurai dû organiser mes consignes différemment, ne pas laisser les élèves prendre les ballons tant que je n’avais pas fini de parler. Pour mon prochain stage, je pense expliquer, démontrer, puis faire prendre les ballons. C’est sur quoi je me suis arrêté avec Amélie »

Maéva comprend que ses difficultés s’expliquent par la façon dont elle a organisé sa passation des consignes et donc donc mieux l’agitation des élèves. Elle construit donc avec Amélie une façon de fonctionner qu’elle veut adopter pour le prochain stage.

Tableau 15 : Exemples de connaissances construites par les étudiants lorsqu’ils analysent leur propre vidéo (extraits de leur journal de bord)

L’aide des pairs lors de l’analyse croisée, pour mieux comprendre l’activité de l’enseignant dans la classe, s’est aussi confirmée lors des entretiens d’autoconfrontation (EAC) portant sur l’enregistrement audiovisuel de la situation de formation en visionnement croisé (par dyade). L’extrait suivant de l’EAC de Benjamin sur le moment de l’appel, illustre le rôle du pair pour aider les étudiants à transformer leur façon d’interpréter une situation de classe (Tableau 16).

Temps Description des actions de Benjamin lors du visionnement croisé Description des communications de Benjamin et Martin

Verbatim d’entretiens d’auto-confrontation de l’enseignant (expérience vécue lors de la situation de visionnement croisé en formation) 0:17:12.4 Benjamin se tourne

vers Martin qui vient de finir de visionner la vidéo de Benjamin

B : « Bon alors dis-moi comment toi tu analyses ma vidéo » M : « Ben…les élèves sont assis devant toi,

Chercheur : Avec un autre camarade, est-ce que ça t'a apporté quelque chose? Est-ce que c'est quelque chose qui a contribué à faire évoluer ton appel ou..?

Benjamin : oui... ça m’aide à transformer mon analyse dans un premier temps, parce que j'étais avec Martin, je lui ai montré ma vidéo

0:18:57.4 0:19:51.3 Martin explique comment il analyse la situation, Benjamin est attentif et hoche parfois la tête regroupés…Enfin on ne voit pas tout au fond [montre une partie de l’écran] mais on a l’impression qu’ils sont tous devant toi, groupés. Par contre, pendant que tu fais l’appel, on en voit certains qui arrivent dans ton dos et s’asseyent sans rien dire…sans

s’excuser… On a l’impression qu’ils défilent dans ton dos et tu ne leur dis rien…Sinon on voit que cela se passe bien, ils écoutent….

d'appel et j'ai directement interprété, alors que lui il était d'abord sur les aspects observables et puis après sur l'interprétation et au premier visionnement on n’a pas parlé de remédiation pour l'instant on était seulement sur la description.

Chercheur : C'est-à-dire que quand tu dis ça n’a pas transformé ma pratique mais ça m'a apporté une analyse autre.

Benjamin : Eh ben il m'a mis en évidence que moi j'analyse ma vidéo de manière... enfin c'est plutôt subjectif pour analyser parce que je suis directement dans l'interprétation mais je n’'ai pas pensé à décrire de manière objective, enfin si c'est possible, enfin de décrire moment par moment, voilà, parce que lui ce qu'il m'a fait remarquer c'est que quand on regarde un appel ben on ne voit quasiment rien quoi, il n’y a rien de choquant mais pour moi qui ai vécu le moment il y a des trucs qui sont importants. Donc Martin là sur le coup il m'a aidé à transformer mon analyse du moment,

(...) en fait ça me permet de sortir un peu de ce que je vois tout de suite euh,... alors qu'avec Martin on regarde tout et on se dit bah finalement il n’y a pas grand-chose, là tu fais ci, là tu fais ça. C'est très objectif et c'est bien pour commencer je trouve l'analyse.

Préoccupations : expliquer, décrire son vécu de la situation ; analyser en identifiant des éléments objectifs de la situation ; volonté d’améliorer ses propres modalités de fonctionnement

Emotions : satisfaction liée au fait d’enrichir son analyse

Representamen : amélioration de sa façon de percevoir la situation ; perception de l’activité de tous les élèves grâce aux apports de Martin

Connaissances : possibilité d’analyser une situation à partir d’aspects descriptifs ; intéressant d’analyser la situation à partir d’aspects à la fois objectifs et subjectifs

Tableau 16 : Description de l’activité de Benjamin en situation de visionnement croisé avec Martin (extrait d’EAC de Benjamin à propos de ses échanges avec Martin)

Cet extrait ci-dessus de l’EAC de Benjamin montre que son analyse est centrée sur des aspects émotionnels, mais qu’elle ne s’ouvre pas sur la manière dont sont placés les élèves face à lui, ni sur son propre positionnement corporel, par exemple. Lors du premier visionnement de sa vidéo, il ne fait jamais allusion aux aspects corporels et sémiotiques des gestes qu’un enseignant peut mettre en œuvre lors de l’appel, pour cadrer l’attention des élèves (positionnement corporel et spatial face au groupe). C’est l’apport de l’analyse d’un pair (Martin) qui lui permet d’ouvrir une « nouvelle fenêtre » perceptive et d’analyser la situation sous un nouvel angle. Le retour sur son propre vécu pour le ré-analyser, lui permet de se

192

détourner de l’engagement émotionnel qui caractérisait son activité en classe et en formation lors du visionnement en doublette. En découvrant l’analyse contrastée qu’un pair fait sur sa propre pratique, Benjamin parvient à décentrer son regard en prenant en compte les actions des élèves pendant le temps où l’enseignant explique les consignes : « Il y a des choses qui pour

moi n’existent pas à ce moment, parce que je suis préoccupé par autre chose » (Extrait d’EAC

de Benjamin en fin de formation).

En conclusion, l’usage des différentes ressources (à savoir le visionnement croisé, et vidéos de soi) a aidé les étudiants à mener une analyse plus précise relative à différents aspects d’une situation d’enseignement. L’analyse croisée (visionnement avec un pair d’une situation) a permis aux étudiants de réaliser une analyse moins centrée sur leur ressenti. Un déplacement des préoccupations des étudiants s’est opéré, de la description du vécu « émotionnel » à la description des aspects observables. Lorsqu’ils se regardent enseigner à la vidéo, les étudiants restent centrés sur leur propre vécu subjectif : ils expriment comment ils ont vécu et ressenti ce moment en classe en insistant quasi exclusivement sur des aspects émotionnels et perceptifs. Les étudiants restent orientés vers une recherche d’exhaustivité centrée sur leur propre ressenti, ils cherchent à décrire en continu la façon dont ils ont vécu la situation : « J’ai fait une analyse chronologique car je voulais une analyse très détaillée avec beaucoup de précision. Je voulais ne rien oublier. L’analyse est très centrée sur moi, mes sentiments et mes ressentis. Je fais essentiellement des jugements négatifs, je me focalise sur ce qui ne va pas et j’ai du mal à déceler les compétences positives » (Trace écrite du journal de bord de Maéva, Annexes 8). Dans ces situations de visionnement croisé, autrui joue un rôle d’artefact cognitif, facilitant pour les étudiants le passage d’une analyse en intériorité à une analyse en extériorité.

1.3.2. Le visionnement collectif : le groupe comme aide pour comprendre l’activité visionnée