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5.9.1 Importance de la filière cacao

Après avoir doublé sa production en 2009-2010, le Pérou détient aujourd’hui la troisième place parmi les grands producteurs de cacao d’Amérique latine avec 85 000 t de cacao en 2015-2016 (ICCO 2016c : Tableau 4). 45 000 cacaoculteurs travaillent sur des plantations d’environ 2 ha et une superficie totale d’exploitation de 90 000 ha. Au cours des dernières années, le rendement moyen à l’hectare a considérablement augmenté pour atteindre environ 650 kg. Environ 20 % des cacaoculteurs sont membres de groupements de producteurs ou de coopératives. Étant donné la petite taille des plantations, la plupart des cacaoculteurs passent environ la moitié de leur temps de travail à la production de cacao et le reste à d’autres cultures ou à un travail rémunéré extérieur (Technoserve 2015 : 7).

Bien que le Pérou ne contribue que pour 2 % à la production mondiale de cacao (ICCO 2016c : Tableau 4), la part du pays dans le marché mondial augmente. Entre 2006-2007 et 2014-2015, les exportations de cacao en tonnes ont décuplé, atteignant 53 900 t en 2014-2015 (ICCO 2016c : Tableau 13).

Dans les années 1980, les cacaoyers ont été en partie remplacés par des plantes de coca pour la production de cocaïne. De plus, dans les années 1990, les plantations de cacao ont souffert de divers ravageurs et maladies. Traditionnellement, le Pérou possède une grande part de cacao fin (FFC). Toutefois, la diversification vers des qualités inférieures comme le CCN-51 a entraîné l’érosion génétique des variétés indigènes et hybrides

48 Renforcer la compétitivité de la production de cacao et augmenter le revenu des producteurs de cacao en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale (Eskes 2011 : 102). L’ICCO classe 75 % de la production péruvienne de cacao dans la catégorie FFC.

5.9.2 Cadre institutionnel

Le gouvernement péruvien a favorisé la croissance des exportations agricoles avec le lancement d’une série de mesures incitatives, notamment une détaxe à l’exportation et diverses exemptions fiscales ou réductions d’impôts aux entreprises qui opèrent dans le secteur péruvien de l’Amazonie (CFT et al. 2011 : 102). Les mesures sont axées sur l’augmentation du revenu que les planteurs tirent de cultures telles que le cacao et sur la manière dont le cacao peut devenir attrayant et rentable par rapport à la coca. Depuis 1985, la promotion de la culture du cacao constitue l’un des principaux piliers du programme de développement alternatif du gouvernement péruvien. Par le biais de sa Commission nationale pour le développement et la vie sans drogues DEVIDA, le gouvernement a mis en place un programme cacao qui promeut les activités visant à convaincre les producteurs de coca de passer à la culture du cacao (Int. 79-82).

L’Alianza Cacao Pérou (ACP18) comprend des négociants en cacao et des investisseurs internationaux. Elle fournit une assistance technique aux producteurs. Le but principal de l’ACP et d’assurer un transfert de technologie vers 15 000 producteurs et de créer 28 000 nouveaux hectares de plantations de cacao, ainsi que de fournir des semences améliorées. Pour encourager les producteurs de cacao à participer à leurs programmes, l’ACP délivre des prix aux cacaoculteurs qui produisent la meilleure qualité de cacao ; ce prix s’appelle Cacao de Oro (Cacao d’or) (GAIN 2014 : 5).

5.9.3 Particularités de la filière cacao péruvienne

Les chiffres concernant le degré d’organisation de la filière cacao varient dans le temps et sont en général bas (Int. 79, 81). Alors qu’en 2009 on estimait à 30 % les familles de producteurs organisées dans des groupements s’occupant du marketing et de la commercialisation du cacao, des chiffres plus récents suggèrent qu’il n’y en a que 20 % (IICA 2009 : 13 ; Technoserve 2015 : 7). Beaucoup de ces groupements de producteurs sont rattachés à l’Association péruvienne des producteurs de cacao (APPCACAO). En 2007, cette organisation a réuni 17 des 22 groupements de producteurs qui ensemble représentaient approximativement 9 500 familles de cacaoculteurs (APPCACAO, non daté).

Les prix du cacao ont considérablement augmenté ces cinq dernières années parce que la qualité du cacao péruvien est de plus en plus reconnue. Selon l’ACP, une tonne de cacao péruvien FFC a été vendue en 2014 à plus de USD 3 000/t. Les Péruviens tentent de devenir exportateurs de cacao de haute qualité pour approvisionner les fabricants de chocolat internationaux qui sont prêts à payer plus pour un meilleur produit. En 2014, les exportations totales de cacao ont rapporté USD 152 millions, soit 3 % des exportations agricoles totales (Banco Mundial 2016 : 5).

Un vaste réseau de petits collecteurs opère pour les grandes agroentreprises qui transforment les fèves de cacao pour le marché national et international. Ce système traditionnel de collecte est critiqué car il ne fait pas la distinction entre les qualités de graines (taux d’humidité, degré de fermentation, etc.) puisque celles-ci sont destinées uniquement à la production de beure ou de chocolat de basse qualité à l’intention du marché national. Lorsque le cacaoculteur reçoit un prix identique pour l’ensemble de sa production, il n’a aucune raison d’améliorer la qualité de ses produits. De plus, les variétés sont mélangées ; cela a un effet négatif sur les niveaux de qualité et entraîne une diminution supplémentaire du revenu des cacaoculteurs (Int. 79 ; Technoserve 2015 : 16). D’un autre côté, les groupements de producteurs qui s’attèlent au problème et tentent de remédier aux inconvénients du système traditionnel de collecte ont décidé

18 NdT : ACP = Alianza Cacao Peru – Alliance péruvienne pour le cacao

49 Renforcer la compétitivité de la production de cacao et augmenter le revenu des producteurs de cacao en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale d’être actifs sur le marché en explorant des voies directes de commercialisation du cacao et de ses produits dérivés principalement pour le marché international. Cette démarche implique souvent une certification pour un cacao de culture biologique ou de commerce équitable.

5.9.4 Points forts et points faibles

Tableau 14 : Points forts et points faibles de la filière cacao péruvienne

Points forts Points faibles

Importance majeure de la filière cacao pour la lutte du pays contre la production de coca.

« Tarif andéen préférentiel » pour la promotion des exportations de cacao vers les États-Unis.

Incertitude quant aux politiques futures

Exemptions et réductions d’impôts pour les entreprises qui investissent en Amazonie péruvienne.

Échange limité entre les institutions publiques, privées et non gouvernementales.

Programmes de formation spécifique pour encourager les jeunes à devenir cacaoculteurs.

Risque potentiel de concurrence avec la filière illégale du coca.

Droits fonciers et de propriété

relativement bien réglementés. Les mauvaises infrastructures dans certaines régions productrices de cacao augmentent les coûts.

La production de cacao au sein de systèmes agroforestiers pourrait protéger les forêts.

Seule une partie du cacao certifié se vend avec prime.

Forte volatilité des prix du cacao.

Pression des intermédiaires sur les prix bord-champ et mélange de différentes qualités.

Cacaoculteurs peu organisés en groupements.

Accès limité des cacaoculteurs aux services financiers.

Conditions naturelles adéquates aux systèmes agroforestiers ; intérêt croissant pour la préservation de la biodiversité.

Empiètement sur les zones forestières et artisanat minier qui restreint/bloque les systèmes agroforestiers.

50 Renforcer la compétitivité de la production de cacao et augmenter le revenu des producteurs de cacao en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale

6 FACTEURS CRUCIAUX DANS LA FILIÈRE CACAO ET RECOMMANDATIONS

L’analyse dans le dernier chapitre relate l’évolution et l’importance socio-économique de la filière cacao dans les huit principaux pays producteurs. Le degré de régulation de la filière varie selon les pays. Il prend ses racines dans l’histoire de la production de cacao et dans son importance pour l’économie nationale de chacun de ces pays. Ces évolutions ont eu lieu dans un environnement où l’on observe une concentration croissante sur le marché des activités de négoce et de transformation, alors que la majorité des petits planteurs n’est pas organisée en groupements comme il serait nécessaire de le faire.

Il n’est pas toujours simple de faire la distinction entre les facteurs qui sont bénéfiques et ceux qui constituent un obstacle à la durabilité de la filière. Certaines politiques et interventions peuvent apporter des améliorations dans l’existence des cacaoculteurs lorsqu’elles sont correctement mises en place ou, dans le cas contraire, constituer pour ces derniers un poids supplémentaire. De plus, selon le développement général de leur économie nationale, les cacaoculteurs d’une région peuvent avoir besoin de mesures de soutien spécifiques qui sont superflues pour le reste du pays. Le présent chapitre décrit les paramètres et les facteurs les plus importants qui peuvent être bénéfiques ou nuisibles à la compétitivité de la filière cacao et par conséquent aux moyens d’existence des cacaoculteurs. Chaque facteur identifié comme crucial fera l’objet de recommandations développées pour inciter la filière cacao à accroître ses efforts pour améliorer la vie des cacaoculteurs. Il faut cependant noter que toutes les recommandations ne s’appliquent pas à tous les pays étant donné l’importance variable de la filière dans les économies nationales des pays producteurs, de l’impact du revenu et des taxes d’exportation ainsi que des passés différents du secteur du cacao.

Les facteurs cruciaux et les recommandations sont structurés en partant d’une macro perspective ou politique et en évoluant vers une micro perspective. On trouve dans chaque recommandation des suggestions sur la manière dont les différents acteurs de la chaîne de valeur pourraient apporter une contribution. Les différentes recommandations faites pour la filière sont interdépendantes puisqu’aucune recommandation ne pourra à elle seule apporter de changement significatif. La filière cacao a besoin d’une approche globale si l’on veut améliorer l’existence des cacaoculteurs et maintenir son caractère compétitif face aux autres cultures.