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Outils Renault sur l’optimisation du chargement

IV. Mise en œuvre des modèles proposés

12. Outils Renault sur l’optimisation du chargement

12.1. La recherche opérationnelle chez Renault

Depuis les années 1990, la recherche opérationnelle est utilisée chez Renault pour résoudre différents problèmes d’optimisation combinatoire, utilisant principalement le logiciel CPLEX.

Un pôle recherche opérationnelle a été institué à la direction des Systèmes d’Information de Renault en 2003, avec des spécialistes sur le domaine, mais aussi avec des compétences en logistique, domaine d’application majeur des modèles. Ci-dessous nous décrivons brièvement quelques sujets de recherche qui ont abouti, d’une part, à des développements de logiciels et d’autre part à des communications scientifiques :

▪ La planification industrielle vise à déterminer les fabrications qui seront demandées aux usines, sur la base des prévisions de la direction du Marketing. Il faut prendre en compte plusieurs contraintes, dont la plus importante est celle de la capacité de production des usines. Afin de traiter les milliers de chiffres qui représentent ces prévisions par modèle, par version, par équipement lourd et proposer une planification mensuelle sur un horizon de deux ans, un algorithme de goal programming basé sur la programmation linéaire a été développé. Communication scientifique associée : Brenaut (2004).

▪ Ordonnancement de la production des chaînes de montage : le problème consiste à construire le « film véhicule » d’une journée de fabrication, c’est-à-dire trouver l’ordre idéal dans lequel les véhicules doivent être fabriqués, en intégrant des contraintes comme le fait d’avoir des rafales de véhicules de même couleur les plus longues possibles et des véhicules difficiles à assembler le plus espacés possible.

L’équipe Renault a développé un algorithme de recuit simulé mais a également lancé un défi universitaire pour avoir d’autres types de solution. Publication scientifique associée : Solnon et al. (2008).

▪ Distribution des véhicules finis : cette activité est sous-traitée à des affréteurs, qui doivent faire appel à des flottes de camions, localisées dans différentes zones géographiques. Afin de défier les prix proposés par les affréteurs, l’équipe de l’ingénierie logistique du transport aval base sur les coûts d’une localisation et d’un dimensionnement optimaux des flottes disponibles, calculés à l’aide d’une modélisation qui se base sur la décomposition du problème en sous-problèmes traitables et une méthode de résolution basée sur la programmation linéaire et des heuristiques. Deux communications scientifiques sur ce sujet : Bricard (2006) et Nguyen & Brenaut (2011).

▪ Tournées de véhicules : nous avons décrit l’activité de conception du plan transport dans la Section 2.3.1. Pour rappel, sur la base des volumes prévisionnels il faut établir les parcours logistiques des fournisseurs. Il peut s’agir d’un transport direct,

en collectage ou en ramassage par un centre de groupage. Un algorithme heuristique a été développé, basé sur le regroupement des fournisseurs en clusters géographiques et l’exploration intensive de ces clusters pour construire les meilleures solutions. Communication scientifique associée : Nguyen (2012).

▪ Optimisation du chargement : expliquée en détails dans la section suivante.

12.2. Algorithmes d’optimisation du chargement de camions et de conteneurs

Une des fonctions des superviseurs transport est l’analyse des taux de remplissage des camions transportant les pièces des fournisseurs vers les sites Renault. Il s’agit d’optimiser la constitution des piles de palettes de pièces, et le placement de ces piles dans un camion. Pour ce faire, un algorithme heuristique avec une exploration arborescente à profondeur limitée a été développé, ainsi qu’un outil de visualisation 2D et 3D des plans de chargement. Plus récemment, l’algorithme a été adapté au chargement des conteneurs, opération qui inclut beaucoup plus de contraintes que le chargement de camions (diversité de types d’emballages plus importante, piles plus complexes, entre autres). Communications scientifiques associées : Nguyen & Brenaut (2013) et Bricard (2017).

Ces travaux ont abouti à des développements de deux prototypes de simulation de chargement, contenant les algorithmes décrits, ainsi qu’un module de visualisation. La Figure 34 décrit le fonctionnement de ces outils. Les données d’entrée principales sont la liste d’emballages à charger, accompagnée de leurs dimensions et poids, les capacités des camions à utiliser et des paramètres utilisateurs sur les constructions des piles, utilisés comme des contraintes supplémentaires à celles dans l’outil. Les contraintes principales concernent la capacité des camions et des conteneurs, tout comme des règles de gerbabilité des emballages. Des algorithmes heuristiques sur le chargement des camions et des conteneurs vont permettre de définir leur contenu et de présenter les résultats dans des fichiers Excel. Le module de visualisation 2D/3D permet à l’utilisateur d’analyser la configuration des piles et du chargement, tout comme faire un export PDF pour le partager avec les équipes opérationnelles.

Figure 34. Fonctionnements des prototypes d’optimisation de chargement chez Renault

Le premier travail que nous avons effectué avec les outils d’optimisation de chargement a été d’évaluer les approximations sur le nombre de camions fourni par notre modèle. Nous nous sommes basés sur les résultats obtenus dans la Section 6.3. par l’approche proposée, pour la plateforme AILN # 1. Les résultats de l’évaluation des approximations sont présentés dans la Figure 35. En moyenne, en ce qui concerne le chargement des camions (transport amont), l’approximation obtenue avec l’outil d’optimisation est 13% au-dessus de l’approximation fournie par CPLEX. En aval, cette valeur est de 17% pour le chargement de conteneurs (transport aval). Comme expliqué précédemment, en aval des AILN la diversité d’emballages est beaucoup plus importante qu’en amont, ce qui fait que la construction des piles est plus complexe, d’où une approximation CPLEX qui est moins précise que pour le transport amont.

Les résultats de ce travail nous ont amené, d’un point de vue modélisation, à proposer une approche qui combine l’utilisation des modèles CPLEX et des outils d’optimisation de chargement. Ceci sera présenté dans le chapitre suivant.

D’un point de vue industriel, suite aux tests opérationnels présentés dans la Section 11.1., il a été décidé de développer un prototype pour continuer les tests. Sur la base du modèle CPLEX et en intégrant également des contraintes sur l’activité interne de l’AILN. Nous avons rédigé les spécifications de l’outil, suivi son développement et piloté sa mise en place dans l’AILN. Nous présentons ce travail dans la section suivante.

Figure 35. Résultats de l’évaluation des approximations du modèle proposé en utilisant les outils d’optimisation de chargement disponibles chez Renault

12.3. Prototype d’optimisation du transport amont et du lissage de l’activité

Pour donner suite au test opérationnel sur le transport amont (Section 11.1.), l’outil d’optimisation du chargement de camions a été enrichi pour inclure les besoins de l’AILN. Sous notre pilotage, le pôle recherche opérationnelle a développé un nouvel outil. La Figure 36

présente le fonctionnement de ce nouveau prototype, affichant en rouge les nouveautés par rapport à l’outil existant. Une notion de dates a été incluse, afin de proposer un programme de réception optimisé. Le programme de réception issu du système d’information AILN fait donc parti des données d’entrée. De même, le plan du transport amont fait partie des contraintes et doit être respecté par l’outil. Finalement, les algorithmes heuristiques ont été enrichis avec un objectif secondaire : celui de lisser la charge de travail à l’AILN. Si pour une pile d’emballages il y a deux camions candidats pour son placement, l’algorithme choisit le camion positionné dans le jour où le volume total (m3) de réception est le plus bas. Cela permet de fournir un résultat avec un nombre minimum de camions à charger et avec une charge de travail lissée dans les différents jours de la semaine.

Figure 36. Fonctionnements du prototype d’optimisation du programme de réception et lissage de l’activité AILN Suite au développement, plusieurs simulations ont été réalisées afin de valider les résultats.

La Figure 37 présente les résultats d’une des semaines analysées, pour laquelle le prototype propose 35 camions de moins que le système d’information Renault, avec une charge en réception presque parfaitement lissée. Après cette validation, les tests ont démarré. La procédure est restée inchangé, mais au lieu d’utiliser CPLEX pour le calcul du programme de réception optimisé, on utilisait le nouvel outil (revoir Figure 31). Le périmètre du test a été élargi, passant du 15% du volume hebdomadaire à environ 40% (3000 m3), englobant la plupart de circuits directs et collectage (18 circuits et 30 fournisseurs).

Figure 37. Comparaison entre le programme de réception généré par le système d’information Renault et celui proposé par le nouvel outil d’optimisation

Les résultats du test, réalisé sur 16 semaines, sont présentés dans la Figure 38. En utilisant le prototype d’optimisation, des dépenses à hauteur de 130.000 euros ont été potentiellement évitées, en ce qui concerne le transport amont. Par rapport à l’activité interne, les gains n’ont pas encore été mesurés, notamment car nous travaillons avec une partie de la volumétrie et non pas la totalité. Une analyse plus poussée sera faite dans la continuité de ce travail. D’autre part, une implication renforcée des équipes des AILN a été mise en place afin d’analyser les écarts entre la commande et les réceptions réelles, afin d’analyser et de minimiser les écarts, causés par les trois raisons listées dans la Section 11.1.3. Les erreurs d’approximation du nombre de camions sont moins fréquentes et sont corrigées sur la base des échanges avec les fournisseurs.

Grâce aux bons résultats obtenus avec ses tests, un projet d’évolution du système d’information Renault a été validé pour automatiser l’optimisation du programme de réception, sur la base des algorithmes développées par le pôle recherche opérationnel. Nous avons eu l’opportunité de piloter le développement et de déployer la nouvelle version dans trois AILN.

Figure 38. Synthèse des résultats du test sur le transport amont pour l’AILN Renault # 1, en utilisant le nouvel outil d’optimisation

Test optimisation transport amont v2 - AILN Renault # 1

Modèle Renault Outil optimisation Résultats réels