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Pour servir sa fonction stratégique et mieux assurer sa fonction régulatrice, l’État doit enfin améliorer ses outils de mesure et d’analyse.

Si le ministère des sports dispose d’un certain nombre de données socio-économiques sur l’activité sportive, il n’existe pas de compte satellite du sport46. La Commission européenne en a souhaité l’élaboration au niveau européen, mais se heurte à un manque de volonté des États membres, Eurostat ayant pour sa part refusé en 2011 de prendre en charge le projet.

La France s’est engagée dans cette démarche en 2007, sans résultats significatifs à ce jour. Les enquêtes actuelles ne donnent qu’une image incomplète de la situation. Certaines entreprises ont par exemple des activités secondaires qui sont liées au sport mais qui ne sont pas prises en compte dans le système statistique. De même, les apports financiers des ménages sont mal connus et mériteraient de faire l’objet d’études pour isoler la part correspondant à l’activité sportive ou à l’assistance à des manifestations sportives.

D’une manière générale, l’impact économique du sport reste mal mesuré, qu’il s’agisse de la rentabilité socio-économique d’investissements sportifs ou des effets de la pratique sportive sur la santé47, l’employabilité ou la cohésion sociale. Le développement de la connaissance dans ces domaines viendrait utilement à l’appui des politiques publiques mises en œuvre, en permettant de mieux les orienter.

Dans le même registre, l’analyse des effets économiques de l’organisation de grands évènements sportifs et leur bilan coûts/avantages mériteraient d’être approfondis, afin d’éclairer les décisions de candidature à l’accueil de ces grands évènements.

Le ministère des sports ne disposait pas jusqu’à une date récente de service statistique et d’étude. Il s’appuyait principalement sur la mission des études, de l’observation et des statistiques (MEOS), créée en 1999 et rattachée à la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, qui produit, sur la base d’un programme annuel, des statistiques récurrentes et des enquêtes spécifiques. Le ministère a cherché tout récemment à développer sa capacité d’analyse en créant, en avril 2012, une mission d’observation du sport : l’articulation de ses

46 Selon la définition de l’INSEE, un compte satellite est un cadre de présentation des données de l’économie d’un domaine particulier en relation avec l’analyse économique globale du cadre central de la comptabilité nationale. L’éducation, la santé, la protection sociale, l’environnement et le tourisme en sont des exemples.

47 Le gouvernement s’est engagé dans une action de promotion du sport santé.

travaux avec ceux de la mission des études, de l’observation et des statistiques devra être précisée par la direction des sports, l’existence de deux services statistiques distincts étant peu justifiée.

Le ministère des sports a développé depuis 2005 une base de données, le recensement des équipements sportifs, espaces et sites de pratique (RES), qui est notamment utilisé par le centre national pour le développement du sport pour instruire les demandes de subventions d’équipements. Afin d’affiner la pertinence des décisions, il apparaît toutefois nécessaire d’améliorer l’appréciation qualitative des équipements et d’acquérir une connaissance plus fine des besoins. Le ministère des sports s’est engagé dans cette démarche sans que celle-ci ait pu jusqu’à présent aboutir : un schéma de cohérence territoriale de l’offre d’équipements sportifs (SCOTOES) est en cours d’élaboration, et la réalisation de diagnostics territoriaux approfondis (DTA) a été lancée à titre expérimental dans certains territoires par les services déconcentrés.

Enfin, si le programme 219 « Sport » du budget de l’État fait l’objet d’une mesure de performance à travers une batterie d’indicateurs, les pratiques sportives menées dans le cadre de l’enseignement secondaire ou des établissements d’enseignement supérieur restent à l’écart de cette démarche, alors même qu’elles représentent globalement l’investissement financier le plus important de l’État. Il conviendrait dès lors que les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche se dotent d’indicateurs pour mesurer respectivement, au regard des objectifs qui leurs sont assignés, les résultats de l’éducation physique et sportive dans l’enseignement scolaire et la performance des services universitaires des activités physiques et sportives (SUAPS).

__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS _________

Confrontés à des problématiques communes, les États européens ont fait des choix d’organisation différents, liés à leur histoire institutionnelle et à leurs caractéristiques propres.

En France, l’État intervient directement de façon importante dans les activités sportives. Sa stratégie doit toutefois être adaptée à un environnement évolutif. Les moyens limités dont il dispose imposent qu’il les concentre sur des priorités resserrées, au service de ses deux grands objectifs : le développement du sport pour tous, l’excellence du sport de haut niveau. Cette concentration des moyens doit se faire en coordination et en complémentarité avec les différents acteurs du sport.

Les questions liées à l’intégrité des compétitions et à la probité des sportifs ont pris une importance croissante avec le développement des enjeux financiers liés au sport de haut niveau et au sport professionnel, et se répercutent sur l’image générale du sport. Le traitement de ces questions relève fondamentalement du rôle de régulation de l’État, qui doit renforcer sa lutte contre les dérives. Les réponses nationales, nécessaires, doivent toutefois être complétées, et la France doit intervenir en faveur d’un renforcement des dispositifs internationaux de prévention et de sanction, notamment en matière de dopage, de paris sportifs et de contrôle de gestion des clubs.

Enfin, l’État doit développer ses instruments de mesure et d’évaluation. L’élaboration d’un compte satellite du sport permettrait d’approfondir les données socio-économiques disponibles. L’impact de la pratique sportive sur la santé, sur l’employabilité, sur la cohésion sociale reste également insuffisamment mesuré. L’expertise des besoins, notamment en équipements, mérite d’être affinée. Le sport scolaire et le sport universitaire doivent enfin être intégrés dans la mesure de la performance des politiques sportives.

La Cour émet les recommandations suivantes :

1. définir des priorités resserrées pour les interventions de l’État, s’inscrivant dans les objectifs du développement de la pratique sportive et de l’excellence du sport de haut niveau ;

2. mettre en place une instance nationale et régionale consultative qui associe l’ensemble des différents acteurs du sport à la définition des politiques ;

3. promouvoir la mise en place d’instruments internationaux coordonnés, notamment en matière de réglementation des paris sportifs et de contrôle des clubs professionnels ;

4. développer les outils de mesure et d’analyse :

en unifiant la mission des études, de l’observation et des statistiques et la mission d’observation du sport ;

en élaborant un compte satellite du sport ;

en mesurant les effets de la pratique sportive sur la santé, sur l’employabilité et sur la cohésion sociale ;

en achevant l’élaboration du schéma de cohérence territoriale de l’offre d’équipements sportifs (SCOTOES).

Chapitre II Le développement du sport pour tous

Les crédits consacrés par l’État au développement du sport pour tous s’élèvent à 387,46 M€48, auxquels il convient d’ajouter 3,5 Md€

correspondant à la rémunération des enseignants d’éducation physique et sportive (EPS). Il s’agit d’une politique partagée avec les collectivités territoriales, qui apportent l’essentiel du financement des clubs et des équipements.

Le projet annuel de performances (PAP) de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », annexé au projet de loi de finances pour 2012, précise que l’objectif n° 1 du programme 219 « Sport » est

« d’accroître la pratique sportive, notamment au sein des clubs, en apportant une attention particulière aux publics prioritaires ». Les résultats globaux en matière de pratique sportive situent la France dans la moyenne européenne, mais des inégalités d’accès demeurent marquées.

Cette situation, qui fonde la légitimité de l’intervention de l’État, illustre l’insuffisante performance des politiques menées : elle appelle une réforme profonde du centre national pour le développement du sport afin d’en faire l’instrument d’une politique efficace de réduction des inégalités d’accès au sport ; elle invite également à mieux associer le sport scolaire et universitaire à la politique de développement du sport.

48 Dépenses imputées à l’action n° 1 du programme « Sport », y compris les dépenses de soutien, auxquelles s’ajoute la part des crédits du centre national pour le développement du sport consacrée au sport pour tous.

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