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On n’en parle pas

Dans le document tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008 (Page 67-82)

On a notamment vu dans les chapitres précédents comment une visibilité médiatique et politique croissante du handicap, conjuguée à une sur-visibilité du handicap moteur, pouvait conduire certaines personnes à accepter de me parler des difficultés intellectuelles d’un enfant ou adolescent qui leur est proche. Est-ce à dire que je n’ai rencontré que des personnes engagées dans la lutte pour la reconnaissance du handicap mental, portant des revendications pour les enfants « différents » et profitant de mon enquête pour faire entendre leur voix qu’ils jugeraient trop peu audible ? Oui et non. Pour mieux comprendre ce que portent les discours que j’ai pu recueillir, il faut tâcher de cerner au maximum par qui ils sont tenus et quels sont ceux qui me sont restés inaccessibles.

A. En parler ou pas

Comme on le verra plus en détail au prochain chapitre, le champ du handicap s’est largement constitué en s’appuyant sur les initiatives privées de personnes handicapées et de leurs parents. Il existe donc dans ce champ une tradition d’engagement, voire de militantisme, auquel une enquête, qu’elle soit journalistique ou sociologique, donne un moyen d’expression. La façon dont j’ai contacté les personnes qui ont accepté de me parler accentue cette sélection par l’engagement : le choix d’ABC École (une école atypique, chère, pratiquant un volontarisme scolaire opposé au laxisme supposé des instituts spécialisés) comme l’adhésion aux Papillons Blancs de Paris sont la preuve d’une démarche volontaire de prise en main du destin de l’enfant. Il faut pourtant se garder de penser que tous mes enquêtés sont des militants. Peu d’entre eux ont réellement une activité militante et certains y sont même assez allergiques, comme le père de Pierre-Yves (troubles de type aphasique, lenteur, difficultés de compréhension), Christophe Héry (enseignant, comme sa femme)1 :

« (hésite) On n’est pas très associations, sans doute (hésite) en arrière-plan, y’a le refus de reconnaître le handicap, y’a un certain scepticisme sur les informations qu’ils pourraient nous apporter puisqu’on avait des tuyaux par ailleurs sur les écoles. (hésite) (dit doucement) Ma femme a longtemps, je pense, refusé de reconnaître le handicap et par exemple n’a pas voulu qu’on demande (cherche ses mots) des subsides financiers

1 Je rappelle qu’un tableau récapitulatif, présenté à la fin de cette partie et aussi en annexe, permet de se remémorer les caractéristiques essentielles de chaque cas. On trouvera également en annexe un glossaire des cas, qui permet de savoir à quelles pages un même cas a été utilisé.

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accordés pour les parents d’enfants handicapés, je pense que c’est un peu la même démarche. Alors bon, on finit par en demander… (s’arrête)

Et vous, de votre côté, vous voyiez les choses différemment ?

Ben pour moi, un sou c’est un sou, j’aurais bien fait la démarche un peu plus tôt. C’est vrai que les associations, je n’avais pas très envie de m’y mettre parce qu’après c’est toujours de la paperasse, des réunions et finalement, y’a assez peu de concret, je pense.

Puis c’est des projets à très long terme finalement, des associations qui ont peut-être… (se reprend) alors je me suis dit qu’elles pouvaient avoir un intérêt à long terme mais finalement, (cherche ses mots) on a très longtemps vécu en envisageant les problèmes à court terme et en espérant (cherche ses mots) trouver un remède qui le sortirait définitivement du groupe des enfants handicapés. Bon, ce qui était une vision fausse, évidemment. (…) (hésite) Bon, on a pu rencontrer d’autres familles à l’occasion de la journée… (hésite) une espèce de fête de l’école, et puis de la petite association de parents d’élèves qui se crée en parallèle avec l’école, donc ça évidemment, c’est à la fois casse-pieds parce que finalement, on n’a pas envie d’investir dans ces écoles (hésite) qui rappellent des problèmes et qui confrontent au handicap. En même temps, je pense que c’est relativement bien pour Pierre-Yves qu’il y ait la fête de l’école et puis c’est utile qu’on connaisse un peu d’autres parents même si les échanges ne sont pas très suivis.

Donc ça oui, c’est un plus tout en étant un peu… (se reprend) même si on y va en traînant les pieds. »

Lorsque Christophe Héry se met à parler de la question des associations, son premier réflexe est d’expliquer son attitude et celle de sa femme par leur rapport plus général au handicap de leur fils. En substance, il oppose une attitude d’investissement dans le champ du handicap à une attitude de fuite hors de ce champ. La première consiste à considérer le handicap comme le font la plupart des associations, c’est-à-dire comme une limitation définitive que la société a le devoir de compenser au maximum. Elle offre des avantages en termes de réseaux de sociabilité, d’informations et d’accès à des prestations financières (l’UNAPEI gère par exemple des assurances spécifiques pour les personnes handicapées, les

« rentes-survies », créées en 1963). Elle contraint en revanche à donner de son temps pour des activités qui ne sont pas toujours exaltantes (« de la paperasse, des réunions »). La seconde consiste au contraire à rester le plus éloigné possible du monde du handicap, avec éventuellement l’espoir que l’enfant rattrape son retard. Selon Christophe, sa femme a longtemps adopté la première attitude tandis que lui aurait aimé mêler les deux en profitant des avantages offerts par le système de prise en charge du handicap (« un sou c’est un sou ») tout en le fréquentant le moins possible et en essayant d’en faire sortir Pierre-Yves le plus vite possible. Il reste en tous les cas dans une logique individualiste de recherche d’un intérêt

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immédiat pour son fils et admet avec franchise qu’œuvrer à long terme pour autrui n’est pas leur priorité.

Même si Christophe explicite particulièrement clairement sa distance par rapport à une activité militante dans le champ du handicap, les raisons qu’il en donne s’appliquent tout à fait à bien d’autres personnes rencontrées durant l’enquête. Mes enquêtés ne sont donc pas tous, loin s’en faut, des militants du handicap, ni même forcément des personnes engagées d’une façon ou d’une autre dans cette lutte. Ils se sentent simplement « impliqués » par certains aspects au moins de la question et veulent apporter leur témoignage, faire entendre leur voix, souligner les difficultés qu’ils rencontrent ou encore donner à voir leur manière de faire, lorsqu’elle leur semble susceptible d’être érigée, au moins en partie, en modèle. C’est de cette volonté qu’ils tirent une envie et une légitimité à parler.

Une conséquence directe de cette position est que la plupart d’entre eux ont privilégié dans leur discours les aspects de prise en charge institutionnelle, la critique du système en place, les problèmes administratifs dans lesquels ils sont empêtrés. C’est particulièrement flagrant chez les pères, généralement beaucoup plus loquaces sur ces sujets que sur les relations familiales et l’entraide autour de l’enfant. Denis Longin, le père de Fanny, en est un parfait exemple. Je l’ai contacté après l’avoir aperçu lors d’un entretien chez son ex-compagne, Catherine Loski, qui m’avait donné ses coordonnées en me disant qu’il accepterait sûrement de me parler, mais qu’il n’était pas très bavard. Le 11 novembre 2002, j’ai donc rendez-vous dans la banque où travaille Denis ; il me propose, comme convenu, de m’emmener dans un petit restaurant marocain du quartier qu’il connaît bien. Sur le chemin du restaurant, il commence à me parler de la prise en charge du handicap en général. Une fois installés, l’entretien commence donc sur ce point et Denis se montre plus bavard que ne l’avait laissé entendre Catherine Loski. Il me développe longuement l’idée d’un manque de structures pour les enfants handicapés, surtout à Paris, et le fait que selon lui, l’Éducation Nationale est foncièrement contre le développement de l’intégration des enfants handicapés dans les écoles ordinaires, malgré le discours officiel. Cette loquacité s’estompe peu à peu, jusqu’à s’approcher du mutisme lorsque j’aborde des sujets familiaux plus délicats :

« Oui, donc quand Fanny vient chez vous, déjà elle reste plusieurs jours en général ? Ouais.

Ça se passe comment ? Plutôt le week-end, plutôt………… ? Ben c’est le week-end, (hésite) le week-end, les vacances.

Et qui est-ce qui s’occupe d’elle à ce moment-là ?

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Ben tout le monde et personne. Enfin moi un peu plus que les autres quand même mais (hésite) elle a envie de jouer avec sa sœur, elle joue avec sa sœur, hein ! Elles s’amusent bien toutes les deux.

Parce qu’elle a une petite sœur, c’est ça ? Oui.

Et avec votre nouvelle compagne ? Vous avez une nouvelle compagne, c’est ça ? Oui.

Et y’a, si j’ai bien compris, une grande demi-sœur ? Oui.

D’un premier mariage ?

Oui, vous avez pris des notes, là (rires) ! »

Si beaucoup de personnes ont donc accepté de me parler, cela ne signifie évidemment pas qu’elles ont aussi accepté de me parler de tout. Les difficultés intellectuelles rencontrées par un enfant ont un retentissement sur beaucoup de plans (organisation domestique, relations familiales, budget du ménage, relations avec les professionnels), ce qui en fait un sujet intéressant pour le sociologue, mais aussi délicat pour les enquêtés. La construction médiatique et politique du handicap que l’on a évoquée précédemment a rendu légitime, admis, quasi-public un discours sur les problèmes de prise en charge des enfants handicapés (en particulier mentaux) et explique en partie que j’aie eu si peu de difficultés à trouver des personnes disposées à « témoigner ». Mais d’autres aspects du problème n’ont pas acquis cette visibilité publique et restent des sujets intimes, dont il peut être difficile de parler ou que l’on n’estime pas dignes d’intérêt pour un sociologue. Selon sa position, on ne répartit pas forcément de la même façon les sujets entre le dicible et l’indicible, le légitime et l’illégitime, l’intéressant et l’anecdotique, le privé et le public. Les hommes ont ainsi plus tendance à estimer que les questions majeures concernent la prise en charge institutionnelle du handicap et que le sociologue se fait voyeur lorsqu’il cherche à aborder des questions familiales, domestiques. Selon les cas, le sociologue est aussi plus ou moins assigné à une fonction de journaliste (rendre publiques les difficultés des parents d’enfants handicapés mentaux) ; lorsque sa position est plus ambiguë et se rapproche par certains aspects de celle d’un psychologue, comme par exemple chez les Courgeon (qui sont prothésiste dentaire et agent de sécurité) dont on a parlé au chapitre précédent, les aspects privés sont plus facilement abordés, ci-dessous par Jean-Jacques, le père d’Anaïs (qui a des difficultés intellectuelles et des troubles du comportement dus à une méningite) :

« J’ai fait une grosse dépression nerveuse, j’étais très malade. Je me soigne toujours.

Faut rentrer dans ma vie privée, là ?

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(rires) Non non, enfin comme vous voulez.

Non non, je sais pas, c’est pas dans votre… On parle d’Anaïs ? Ah ! ça se peut que mon comportement peut jouer sur elle aussi. Disons que j’ai pas un caractère facile non plus, je suis pas un gars simple. J’ai encore du mal à savoir qui je suis vraiment. C’est vrai, hein ! (…) (5 minutes plus tard) Mais j’avais une période, j’en pouvais plus, j’étais presque suicidaire. Ben puisqu’on y est, je vais vous parler de ma vie privée, tant pis. J’ai fait une grosse dépression en 98, l’année du mariage et je suis toujours malade. Je suis sous Hyderoxa, Sérestat, j’ai été alcoolique et j’ai arrêté de boire, je suis sous médicaments pour arrêter de boire, j’ai arrêté en 91 de fumer, bon ça… Je suis très fragile. Je suis quelqu’un de peut-être trop gentil. Trop gentil et très con. (sa femme rigole discrètement) Ben oui, ça la fait marrer ! Ma mère m’a toujours dit : ‘T’es trop gentil, t’es trop con.’ La vie, elle m’a pas toujours aidée. J’aurais voulu que mes parents me soutiennent beaucoup plus. Ce que je fais pour Anaïs, c’est l’amour, c’est ce que j’aurais voulu. »

Mes thèmes d’entretien permettaient aisément de mettre en évidence les réticences et les propensions à parler de certains sujets plutôt que d’autres. Lorsque c’était possible (c’est-à-dire lorsque mon interlocuteur ne bouleversait pas cet ordre), je commençais par faire retracer la vie de l’enfant depuis sa naissance, en insistant sur sa trajectoire scolaire (ou institutionnelle lorsqu’il ne s’agissait pas à proprement parler d’écoles) et ses apprentissages, sa trajectoire médicale (les différents professionnels vus, ce qu’ils avaient dit, les relations avec eux) et sa trajectoire administrative (relations avec les commissions pour l’enfance handicapée, démarches éventuelles de reconnaissance du handicap). Je proposais ensuite d’établir un arbre de famille comportant les personnes qui « comptent » pour l’enfant, puis de détailler les relations avec ces personnes, en insistant sur l’organisation matérielle autour de l’enfant (et ses évolutions). La première partie de l’entretien était la plus attendue par mes enquêtés et celle qui leur semblait la plus naturelle pour un entretien sociologique. La deuxième partie était souvent plus difficile à mener, même si aucun entretien ne s’est mal passé ou arrêté en cours de route. On me demandait en revanche plus souvent de justifier pourquoi je m’intéressais à ces questions domestiques et notamment à quoi un arbre de famille pouvait bien me servir.

De même que l’on ne parle pas aussi facilement de tout à un sociologue, on ne parle évidemment pas non plus de tout dans son entourage, proche et plus encore éloigné. Mais là encore les différences sont majeures d’une famille à l’autre. Pour simplifier, on peut esquisser une typologie grossière des attitudes en matière de propension à parler du handicap au-delà d’un cercle restreint. Il y a tout d’abord les parents qui en parlent très peu, c’est-à-dire uniquement aux personnes qui leur sont très proches et à des professionnels (y compris à un sociologue sinon je ne pourrais pas à mon tour parler d’eux). C’est un sujet difficile à aborder

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pour eux et ils ne cherchent pas à développer une sociabilité dans le cadre du handicap et des associations qui gravitent autour. Parmi les cas que j’ai déjà abordés, les parents de Frédéric (qui sont institutrice et informaticien)2, Grégoire (qui sont médecins)3 et Anne-Lise (qui sont cadre bancaire et chercheur)4 peuvent être rangés dans cette première catégorie. Le père de Frédéric, Marc Patole (qui est informaticien), l’exprime très clairement : « Généralement, on n’explique pas aux gens avant. Ils le prennent comme il est. Des fois, s’ils en parlent, on peut en parler, mais on va pas le montrer en exergue » et sa mère, Sylvie Manaud (institutrice), avance quelques explications à cette attitude en montrant que s’il est si difficile de parler de Frédéric, c’est aussi parce qu’on ne sait pas comment en parler, car il est toujours « entre-deux », comme l’exprime selon elle le diagnostic tardif de « borderline » qu’on leur a donné :

« Les caractéristiques, on nous les a pas données, des borderlines, on nous a dit ça ; donc

‘état-limite’, il est entre deux. Par moments, (hésite) en fait il penche d’un côté puis…

(s’arrête) Par moments, (cherche ses mots) il a un comportement tout à fait normal. Ça peut durer… (s’arrête) Mais quand on vit avec lui, on se rend compte de ce qui va pas.

Mais il peut donner le change un certain temps, d’ailleurs il le donne, même à nous et tout. Puis après, tout d’un coup, là on se dit : ‘Ah, tiens, là… (léger rire)’ et puis hop ! il repart et puis… (s’arrête) Donc il est toujours… (s’arrête) C’est très inconfortable, pour lui, pour nous, pour… (s’arrête) On sait pas trop où on en est en fait, on sait jamais vraiment où on en est. Puis on sait pas, quand il va de l’autre côté, est-ce qu’il pourrait… (se reprend) s’il est pas soutenu, jusqu’où ça pourrait aller, hein. Si on s’occupait plus de lui, par exemple, il pourrait dériver très vite. Il a besoin d’un grand soutien. Sans que les gens s’en aperçoivent. Parce que souvent, par rapport aux autres parents, (cherche ses mots) moi je connais des mères qui ont des enfants beaucoup plus handicapés. Donc moi, j’ai du mal à parler de Frédéric. Oui. Mais y’a (en riant légèrement) problème quand même et ça lui pourrit sa vie ! Et son itinéraire, il est quand même pas avec les autres, il est hors-circuit. Et là, il continue et ça lui fera toujours. Mais c’est léger. C’est sûr que c’est plus léger qu’un enfant qui peut pas parler, qui comprend pas les choses. Nous, on a cette chance de pouvoir parler avec lui, discuter, avoir des échanges quand même… (se reprend) de bons échanges, quand même, il est capable de… (s’arrête) ça c’est bien.

Mais… (léger rire) »

2 Frédéric est l’adolescent, diagnostique « borderline », dont la mère explique que l’absence de marques physiques de son handicap conduisent les inconnus à des interprétations socialement violentes de son comportement.

3 Grégoire est l’adolescent ayant eu d’importantes difficultés de développement devant qui son père parle apparemment sans difficultés.

4 Anne-Lise est l’adolescente diagnostiquée tardivement autiste dont la mère explique que son changement d’aspect physique a entraîné une prise de conscience de son handicap par l’entourage.

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Ce ne sont pas forcément les mêmes raisons qui motivent les parents de Grégoire et d’Anne-Lise, mais on retrouve dans leur cas une attitude similaire, comme l’exprime par exemple le père d’Anne-Lise lors de notre entretien téléphonique en novembre 2005.

« C’est pas évident mais bon, (soupire) moi j’en ai jamais trop parlé donc de toute façon… (s’arrête) J’estime que c’est déjà suffisamment difficile à gérer, à accepter pour pas continuer à en parler (en riant légèrement) sans cesse. C’est pour ça que là, je fais un gros effort ! (rires)

Je vous remercie !

Non, bon, pas tant que ça quand même. »

Il y a ensuite ceux qui en parlent de façon plus large, qui recherchent éventuellement une sociabilité dans le champ du handicap, mais qui n’ont pas vraiment franchi le pas et qui dans les faits n’en parlent pas tant que ça en dehors d’un cercle étroit. C’est le cas des parents de Pierre-Yves5 (qui sont enseignants), Sarah6 (qui sont ingénieurs) et Anaïs7 (qui sont prothésiste dentaire et agent de sécurité). Le père de Sarah, qui est séparé d’avec sa mère, raconte ainsi ses tentatives insatisfaisantes de parler de sa fille, qui est trisomique, dans son cadre professionnel :

« J’en ai parlé à mon boulot et ça a motivé mon départ un an et demi après. Mon chef avait réagi, enfin j’ai peut-être interprété : ‘C’est pas normal que de nos jours on puisse encore accoucher d’enfants trisomiques’, ça y était, il était dans une case, je me suis dit :

‘Je vais me le payer’ (rires). Après, on apprend qu’il y a certaines personnes à qui on peut s’ouvrir, d’autres non. On se protège et on le vit mieux. On fait l’apprentissage à ses frais. »

Une troisième attitude consiste à en parler le plus possible autour de soi en estimant qu’il est bon pour ces enfants qu’ils ne soient pas cachés, qu’il faut le plus possible que tout le monde s’habitue à l’existence de personnes handicapées, qu’elles soient plus visibles qu’elles ne le sont actuellement. C’est ce que fait la mère de Fanny8 (elle est journaliste), qui me l’explique très clairement lors de notre premier entretien :

5 Pierre-Yves est l’adolescent ayant des « troubles de type aphasique » dont la mère parle facilement en disant

5 Pierre-Yves est l’adolescent ayant des « troubles de type aphasique » dont la mère parle facilement en disant

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