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UNE OFFRE DE SERVICE INNOVANTE ?

Dans le document Quel modèle de bibliothèque ? (Page 166-171)

DES BIBLIOTHÈQUES MUNICIPALES À VOCATION RÉGIONALE

UNE OFFRE DE SERVICE INNOVANTE ?

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Ces douze bibliothèques, qui se distinguent par la qualité de leurs construc- tions, le soin apporté à leur aménagement intérieur et la richesse de leurs fonds, font-elles aussi preuve d’audace dans l’offre de service qu’elles pro- posent à leurs usagers en présentiel et à distance ? Nous plaçant du point de vue de l’utilisateur fréquentant le bâtiment, nous commencerons par nous intéresser aux horaires d’ouverture.

Les horaires d’ouverture

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Première remarque, le temps moyen d’ouverture au public est de 39 heu- res, il est légèrement supérieur à la moyenne horaire des grandes BM (35 heures) ; cette durée masque, cependant une situation très contras- tée selon les établissements. Ainsi la médiathèque Michel Crépeau à La Rochelle est ouverte seulement 31 heures par semaine, alors que la médiathèque de l’agglomération troyenne propose 50 heures d’ouver- ture au public. Il faudrait procéder à une analyse fine de la situation dans chaque établissement pour mieux comprendre ces différences, et déter- miner les contraintes liées au bâtiment et au mode d’organisation du tra- vail. On peut regretter toutefois que, dans les critères d’éligibilité définis par le décret du 5 février 1993, ne figurait pas l’obligation d’assurer une large ouverture au public des bâtiments financés. Deux établissements, Toulouse d’abord puis Rennes, ont innové en instaurant l’ouverture du dimanche, Reims a suivi récemment en instituant un après-midi portes ouvertes dans sa bibliothèque-cathédrale le premier dimanche du mois.

30 000 25 000 20 000 15 000 10 000 5 000 0 Graphique 6 : acquisitions par type de support en 2004

nombr e d’imprimés nombr e d’abonnements à des périodiques nombr e de phonogr ammes nombr e de vidéogr ammes nombr e de cédér oms

Bmvr bibliothèques grandes villes

Des services spécifiques ?

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Sabrina Le Bris écrit dans un article du BBF16: « Sans doute les grands éta- blissements ont-ils en revanche une fonction d’expérimentation des nouvelles technologies et pratiques professionnelles ». Le recensement des services

16. Le Bris Sabrina, Les bibliothèques municipales à vocation régionale : quelles missions ? Bulletin des bibliothèques de France, 1997, t. 42, n° 6.

Bmvr Ouverture Ouverture le dimanche

hebdomadaire Châlons-en-Champagne 32 heures La Rochelle 31 heures Limoges 39 heures Marseille 40 heures Montpellier 39 heures Nice 36 heures Orléans 39 heures Poitiers 38 heures

Reims 35 heures 1erdimanche du mois (sans dimanche) de 15 heures à 18 heures Rennes 40 heures de 14 heures à 19 heures

(avec dimanche) du 7 octobre 2007 au 27 avril 2008 Toulouse 45 heures 14 heures à 18 heures

(avec dimanche) (sauf juillet et août) Troyes 50 heures

moyenne BMVR 39 heures

moyenne nationale 35 heures

proposés dans ces nouveaux bâtiments montre, certes, une tentative de diversifier l’offre mais aucune véritable révolution dans le domaine. Le champ de l’expérimentation n’a pas été véritablement investi par les BMVR. Est-ce une question de moyens ou une frilosité des professionnels ? Les nouveaux services proposés visent surtout les publics handicapés et l’accès aux nouvelles technologies. Tous les projets ont été attentifs à l’accessi- bilité des personnes handicapées. Cela a donné lieu dans certains bâti- ments, comme la bibliothèque de l’Alcazar à Marseille, à la mise en place d’une signalétique spécifique. L’offre pour ces publics a visé plus parti- culièrement les déficients visuels et s’est traduite selon les bibliothè- ques par la constitution de fonds particuliers, livres en gros caractères, disques compact de textes lus, documents en braille, ou par la création de véritables services disposant de personnel et d’espaces dédiés.

Les services associés aux nouvelles technologies sont très variés selon les établissements. Cinq seulement proposent des accès wifi, certains ont des ateliers multimédias, organisent des formations aux outils bureautiques, de l’initiation aux nouvelles technologies. Quelques bibliothèques accueil- lent des ECM17

ou offrent l’apprentissage des langues.

Plusieurs établissements, Châlons-en-Champagne, Limoges, Marseille, Montpellier, Reims, Toulouse et Troyes, ont développé des fonds et des ser- vices éducatifs destinés « aux adultes qui accompagnent les jeunes », pour reprendre la formule utilisée sur le site Web de la Bfm de Limoges. Ces ser- vices ont un rôle de conseil et interviennent dans des actions de formation auprès des professionnels de la petite enfance et des enseignants. Toulouse accueille aussi des classes patrimoine. À Marseille, L’île aux livres, cen- tre de ressources et de promotion dédié à l’édition et à la littérature jeunesse, participe de la vocation régionale de l’établissement avec un fonds riche de 35 000 ouvrages des années 1940 à nos jours, constitué d’acquisitions à titre onéreux – auprès de libraires spécialisés, de gale- ries d’art ou directement auprès des artistes –, ainsi que des apports pro- venant de la conservation partagée, fruit de la collaboration avec les différentes bibliothèques de la région. Par ailleurs, toutes les bibliothè- ques proposent une programmation culturelle variée, sont pourvues de salle d’exposition, de salle de conférence et d’auditorium permettant d’ac- cueillir les nombreuses manifestations qu’elles organisent. À Nice et à

17. Depuis 1998, le ministère de la Culture et de la communication développe le programme Espaces Culture Multimédia (ECM), qui soutient la mise en place de lieux d’accès publics au multimédia au sein de structures culturelles.

Rennes, un piano est mis à disposition des usagers. Plusieurs bibliothèques, Châlons-en-Champagne, Nice, Rennes et Toulouse, ont des espaces télé- vision et donnent accès à une grande variété de bouquets satellites. Quelques sites ont des lieux de restauration, à Limoges un café-restau- rant est intégré au bâtiment et à Rennes on peut se rendre au café des Champs libres, mais ces lieux ne sont pas gérés par la bibliothèque. Certains équipements déclarent prêter ou louer des espaces pour des manifesta- tions organisées par d’autres partenaires : la BMVR de Châlons-en- Champagne met à disposition son auditorium, à Marseille plusieurs salles peuvent être louées, la salle de conférence et le foyer attenant, la salle d’ex- position, le hall d’entrée, l’auditorium et la salle de l’heure du conte. La BM de Reims prête l’auditorium de la médiathèque Jean Falala et les espaces d’animation de la bibliothèque Carnegie et de la médiathèque Croix Rouge.

Les services en ligne

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Peu novateurs dans leur offre de service intra-muros, ces nouveaux temples du savoir construits pour le XXIesiècle ont-ils investi le cyber espace ? Dotés de bâtiments intelligents et missionnés par décret18pour utiliser « les moyens modernes de communication […] et travailler en réseau », se sont-ils empa- rés des nouvelles technologies pour développer de nouveaux services et ainsi bâtir une bibliothèque dématérialisée, affranchie des horaires, des distan- ces et du regard prescripteur du bibliothécaire ?

Presque toutes offrent l’accès en ligne au catalogue et disposent d’un site Web. La médiathèque Michel Crépeau de La Rochelle a une position à part parmi les douze BMVR : elle est la seule à ne pas avoir intégré la déferlante Internet, elle ne propose aucun service sur la toile et ne met aucun poste public à disposition de ses usagers. On peut se demander si ce particularisme est un choix bibliothéconomique validé par les instances politiques ou un retard subi pour des raisons structurelles et/ou financières.

Si on exclut ce cas atypique, les autres établissements ont tous commencé, à des degrés divers, à développer des e-services. Le catalogue et les services associés (réservations, accès au dossier lecteur, suggestions d’achat) sont la première offre, mais de nouveaux services arrivent : ainsi on peut réaliser des transactions de prêt à partir des portails Web de cinq bibliothèques19, l’usa- ger peut emprunter des livres numériques et des audiolivres. Certaines plate-

18. Décret n° 93-174 du 5 février 1993.

formes permettent le prêt et la réservation par téléchargement du fichier sur l’ordinateur de l’abonné après identification de celui-ci, d’autres la consulta- tion de contenu, après identification. Ce sont les sites Web de Montpellier et de Troyes qui actuellement donnent accès à l’offre la plus diversifiée : l’abonné a la possibilité de télécharger des partitions, de la musique, des vidéos (arte- vod20

), des films (partenariat de la BMVR de Troyes avec Cinezime, site de télé- chargement de films indépendants). Intéressante aussi, l’initiative de la Bibliothèque francophone multimédia de Limoges qui, dans le cadre d’un pro- jet réalisé en partenariat avec l’ECM et la Cyber-base21de la Ville de Limoges, propose à l’écoute un jukebox virtuel permettant de découvrir des artistes musi- ciens de la région. Bibliosés@me, le service de réponses à distance piloté par la BPI fonctionne à Limoges, Marseille, Montpellier, Reims et Troyes. D’autres services participatifs sont testés par la médiathèque de l’agglo- mération troyenne, service de chat et audioblogs d’Arteradio ; le public est invité, après inscription via un formulaire, à utiliser les audioblogs pour partager des moments sonores, en diffusant ses propres productions. Des espaces d’expression sont ouverts sur le net par la bibliothèque Georges Pompidou de Châlons-en-Champagne, à l’occasion de certaines expositions. Le club des lecteurs, animation classique des bibliothèques, fait son entrée dans la blogosphère pour séduire les plus jeunes et les inciter au plaisir de la lecture. La Médiathèque José Cabanis de Toulouse et la BMVR d’Orléans ont ouvert des blogs pour leurs jeunes lecteurs22

. La bibliothèque franco- phone et multimédia de Limoges associe un flux RSS à la consultation de son agenda.

Mais la Toile constitue pour les bibliothèques, quel que soit leur statut, une formidable vitrine pour la valorisation des collections ; cet usage a d’ail- leurs vite été intégré sur l’ensemble des sites, d’importants chantiers de numérisation sont en cours dans tous les établissements venant accroître régulièrement les contenus disponibles. La dématérialisation des fonds, en permettant de s’affranchir des contraintes liées à la communication des documents anciens, rares et précieux, a révolutionné la gestion des servi- ces patrimoniaux, le clic magique ouvre enfin la porte des réserves et des magasins et permet aux citoyens de se glisser entre les pages des manuscrits,

20. Service de vidéos à la demande proposé par Arte.

21. Le label Cyber-base dépend de la Caisse des Dépôts et Consignations à qui l’État a confié la mission d’accompagner le déploiement d’un réseau regroupant plus d’une centaine d’espaces publics multimédias sur le territoire national. Ces espaces permettent à chacun, quel que soit son niveau, de découvrir les différents usages de l’Internet et de s’initier aux outils multimédias. < http://www-prod.cyber-base.org/ >

de feuilleter les almanachs de la Bibliothèque bleue, de zoomer sur le plan d’Orléans daté de 1581. Les derniers bastions détenus par les élites « savan- tes » tombent, le « grand public » accède enfin au saint des saints ! Les activités de valorisation des collections de lecture publique trouvent également leurs versions numériques : sélections de documents, coups de cœur des bibliothécaires et des lecteurs, bibliographies. La Bfm de Limoges a créé sur son site un espace @uteurs23consacré aux auteurs francopho- nes, il vise la constitution d’un dossier très complet sur chacun d’entre eux ; biographies, bibliographies, documents multimédias, liens, FAQ permettent de naviguer dans l’univers littéraire de chaque écrivain, six dossiers sont déjà en ligne. Expositions et conférences s’adaptent aussi à ce nouveau for- mat pour accroître l’audience et toucher un nouveau public qui ne vien- dra pas dans les locaux de la bibliothèque. Toulouse, Nice, Montpellier et Reims mettent en valeur sur leurs sites leurs publications, catalogues, car- tes postales, ou gravures mais n’offrent pas encore la possibilité de les ache- ter en ligne. L’internaute frustré peut cependant se consoler et surfer jusqu’au portail de la médiathèque d’Orléans pour envoyer une e-carte. Après ce tour de toile, il apparaît que nos grandes bibliothèques ont bien investi le cyber espace, même si leurs versions numériques sont plus ou moins abouties. Les contenus s’enrichissent, les services se diversifient mais dans l’ensemble, il s’agit encore de sites institutionnels, construits sur le modèle de la bibliothèque physique, distributrice de produits docu- mentaires. Ils intègrent encore peu les outils du Web 2.0 qui permettent d’associer l’usager à l’élaboration de l’offre de services en le métamorpho- sant en partenaire du bibliothécaire, en coproducteur d’information.

Dans le document Quel modèle de bibliothèque ? (Page 166-171)