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De la connaissance des représentations

2. Choisir une méthode pour enquêter

2.2. Observer des acteurs en réunions de travail

Nous avons choisi de participer à des séances de travail regroupant des acteurs autour de projets concernant le paysage à différentes échelles de prise en compte. Ainsi nous avons suivi plusieurs initiatives sur les territoires que nous avons retenus, en privilégiant tout particulièrement celui de la Haute-Saône. Le travail de terrain constitue une double expérience : des autres, ici des acteurs de l’aménagement du territoire que nous ne connaissions guère, et de nous-même qui découvrons lors de situations nouvelles un rôle d’apprenti chercheur et un second rôle de personne ressource potentielle (Copans J., 2005). Ce travail de terrain nous semble fondamental pour observer les pratiques des acteurs, il constitue une approche complémentaire aux entretiens pour lesquels la situation est davantage artificielle. Notre observation fut participante dans la mesure où nous avons choisi de participer à diverses réunions de travail concernant la mise en œuvre de projets intéressant la vie sociale et culturelle de notre territoire d’étude. Notre attitude revêt, certes, une certaine artificialité car notre présence dépend au départ de notre détermination à observer les pratiques des acteurs pour identifier et comprendre leurs façons d’agir en matière de paysage, cependant notre intégration fut bien réelle et la méfiance de certains s’est rapidement effacée.

Nous avions élaboré une grille d’observation pour guider notre regard et notre écoute lors des réunions de travail. Nous avons donc été particulièrement vigilante :

• Aux éléments de définition du paysage • Aux projets que suscite le paysage • Au lexique utilisé pour parler de paysage

• Aux outils employés pour travailler sur le paysage et leur pratique d’utilisation

• Aux relations qu’entretiennent entre-eux les acteurs lorsqu’ils travaillent sur le paysage

Les remarques issues de ces observations ont complété notre étude et permis de proposer des médiations que nous exposerons dans la troisième partie.

L’observation participante a donc guidé notre étude de terrain autour de projets que nous avons souhaité variés pour comprendre la façon dont est abordée la problématique paysagère à différentes échelles territoriales et décisionnelles. Nous avons donc choisi de suivre plusieurs projets répondant à nos attentes.

Concevoir et faire vivre un plan de paysage

Le Parc Naturel Régional des Ballons des Vosges à travers ses chargés de mission, mène une politique paysagère particulièrement dynamique auprès et avec les collectivités locales des Vosges saônoises et du pays sous-vosgien. La dynamique paysagère est particulièrement perceptible grâce aux mutations agricoles de ce

territoire et génère des initiatives intéressantes, c’est pourquoi nous souhaitons observer ce qui se passe dans le domaine d’intervention du PNRBV situé au nord-est de la Haute-Saône et au nord du Territoire de Belfort.

Ainsi, nous avons participé à de nombreuses réunions concernant les plans de paysages mis en œuvre sur le territoire du Parc. L’observation des pratiques des acteurs nous a permis de découvrir la façon dont s’élabore ce type de document d’orientation autour d’une dynamique territoriale pour les paysages.

La communauté de communes de Saint Amarin a souhaité instaurer une réflexion auprès des nombreux acteurs sur cette thématique suite aux mutations spatiales qui s’instaurent sur son territoire. Cette vallée étroite est traversée par un réseau abondant d’infrastructures de communication reliant Thann à Remiremont,la situation économique engendre une déprise agricole et de nouvelles friches industrielles ; toutefois la communauté de communes doit faire face à une demande foncière importante pour la construction de maisons individuelles. Les acteurs choisissent de se réunir afin de proposer un cadre d’orientations pour les futures politiques d’organisation et d’aménagement de leur territoire. Ils bénéficient du soutien du Conseil Général du Haut-Rhin pour finaliser ce plan de paysage appelé ici GERPLAN. Nous avons donc observé les séances de mise au point du document de diagnostic entre les différents partenaires pour comprendre les choix retenus en matière de communication sur les paysages.

Les acteurs de la Haute Vallée du Rahin en Haute-Saône avaient déjà conçu en 1994 un plan de paysage, avec l’aide des chargés de mission du PNRBV. La communication de ce document occasionna une série d’accompagnements et de manifestations divers auprès de la population, projet pédagogique avec les écoles, exposition ou encore sorties de terrain avec le grand public autour de la découverte des paysages indigènes par exemple. Le contexte socio-économique, au demeurant proche de celui de la Vallée de Saint Amarin, incita les élus locaux à souhaiter recouvrer la dynamique fédératrice qu’avait suscité précédemment l’élaboration du plan de paysage sur leur territoire. Aussi, les chargés de mission du PNRBV furent sollicités pour aider les acteurs à donner suite au document initial.

Durant ces observations, nous avons pu nous rendre compte de la place du paysage dans le projet territorial. Il peut être un prétexte au regroupement d'acteurs, pour envisager ensemble une réflexion sur le cadre de vie des hommes de ce territoire et concevoir ainsi un projet consensuel et cohérent pour les années à venir. Le paysage est alors un médiateur entre les hommes et leur territoire. Nous avons pu confirmer le rôle d’impulsion du Parc auprès des acteurs de leur territoire que nous suggérions.

Sensibiliser des ingénieurs des collectivités territoriales à la problématique paysagère

Le CNFPT, centre national de formation des personnels des collectivités territoriales, organise avec l’aide des chargés de mission Paysage du PNRBV un stage de formation pour les ingénieurs sur la problématique paysagère. Nous avons pu participer à l’un de ces stages qui a réuni une vingtaine de personnes sur le territoire du Parc. De très nombreux et divers acteurs locaux ont ainsi pu partager leurs expériences avec les personnels en formation intéressés par la question du paysage dans les politiques territoriales. Nous avons pu ainsi observer la pluralité des problématiques paysagères dans les projets des territoires et la façon dont les acteurs agissent face à ces questions. Nous avons par ailleurs identifié l’importance de la sensibilisation, de la formation à la connaissance paysagère auprès des acteurs

territoriaux, mais ce stage nous a permis aussi d’appréhender divers moyens pédagogiques pour favoriser celles-ci.

Accompagner la diffusion de l’atlas des paysages auprès de divers publics

Les maîtres d’ouvrage de l’atlas franc-comtois ont souhaité accompagner la parution de l’ouvrage auprès des acteurs territoriaux. Ils les ont ainsi conviés à Arc et Senans en 2002, pour un colloque sur la thématique paysagère. De nombreuses communications ont présenté divers projets sur des échelles territoriales variées et une exposition sur les atlas départementaux furent proposées lors de cette réunion d’acteurs. Le responsable du service Environnement du Conseil Régional à cette période, demanda aux organismes préoccupés par la question du paysage, les CAUE, CPIE, et PNRBV, de proposer des actions de sensibilisation sur cette thématique auprès de différents publics et de favoriser la connaissance des atlas. Ces structures élaborèrent un cahier de propositions qui, à ce jour, n’a pas été réalisé. Nous avons participé aux réunions de travail entre ces différents partenaires. Nous souhaitions ainsi découvrir les volontés politiques mises en œuvre pour la communication des outils de connaissance et observer les réponses proposées par les organismes reconnus dans les actions de sensibilisation.

Elaborer une Charte pour l’Environnement

Le Conseil Général de Haute-Saône a souhaité élaborer avec l’Etat et tous ses partenaires locaux, une Charte pour l’Environnement dans le cadre de son Agenda local. Nous avons participé aux réunions de travail concernant les deux dernières phases de la Charte avec le groupement d’acteurs concernés par le thème du patrimoine bâti et naturel, afin de préparer la définition des orientations stratégiques et le plan d’actions. Nous souhaitions identifier les éventuelles difficultés des acteurs à exposer les enjeux et objectifs qu’ils soutiennent, puis observer les similitudes et les écarts de leurs ambitions, et enfin appréhender la façon dont s’élabore le consensus final.

Réaliser une étude sur le cadre de vie pour la Charte du Pays des 7 rivières

Dans le cadre de l’élaboration de la Charte de Pays, les territoires constituant ce Pays ont commandé aux CAUE 25 et 70 une étude « afin de définir la stratégie de

développement du cadre de vie, de l’aménagement urbain et paysager des villages et bourgs du Pays des 7 Rivières ». Les acteurs territoriaux souhaitaient ainsi pouvoir

utiliser un document référentiel d’actions à mener pour la décennie à venir, qui donnerait des repères aussi pour la mise en place de tout projet sur le territoire du Pays. Nous avons ainsi pu observer les difficultés de compréhension entre les élus et les professionnels lorsqu’il s’agit d’envisager les principes d’actions pour la politique paysagère du territoire. Nous avons par ailleurs identifié des attentes des élus non assouvies liées au document lui-même, certains élus attendaient davantage une publication de type « règlement d’urbanisme » ou « recueil de recettes culinaires » alors que les professionnels ont proposé un cadre de recommandations à partir

duquel les acteurs peuvent décider conjointement d’une politique paysagère propre à ce qu’ils désirent, à ce qu’ils attendent aujourd’hui et pour l’avenir de leur territoire.

Figure 60 : Protocole méthodologique de recueil des représentations des acteurs

Nous avons ainsi privilégié la multiplicité des techniques d'enquêtes car elle favorise le recoupement des informations récoltées sur la façon dont la problématique paysagère est abordée par les acteurs territoriaux.

3. Enquêter

Notre paradigme de recherche étant posé nous avons élaboré un guide d’entretien constitué de questions que nous avons formalisé en fonction des objectifs que nous nous sommes fixés. Ainsi, différents axes d’interrogations ont structuré notre travail, toutefois la question de l’utilisation de l’image paysagère dans les entretiens se posa bien évidemment.