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En Afrique de l'Ouest, la période de mousson (de juin à septembre) apporte la majorité des pluies annuelles. Ces pluies proviennent de systèmes convectifs, les MCS, qui amènent également une forte nébulosité. Duvel (1989) s'est intéressé à cette nébulosité à partir des observations satellites Météosat de juin à septembre 1983 à 1985. Outre la nébulosité associée aux systèmes convectifs se développant en fin d'après-midi, il note la présence de cirrus sur le continent entre 18h00 LT et 00h00 LT et de nuages de mi-niveau tôt le matin.

Afin de palier les manques d'observations dans cette région et afin de mieux comprendre la mousson d'Afrique de l'Ouest, le programme AMMA (Analyse Multi- disciplinaire de la Mousson Africaine) et sa phase de terrain ont été lancés dans les années 2000 regroupant plus de 145 structures de recherches européennes, africaines et américaines. Ce programme international a pour objectif d'étudier les mécanismes de la mousson ouest- africaine, sa variabilité et ses liens avec les aspects socio-économiques. Grâce aux données recueillies, nous commençons à mieux comprendre ses caractéristiques géographique, météorologique et climatique notamment, et ainsi à améliorer les modèles actuels qui ont du mal à prédire son climat complexe. Le programme AMMA a été un véritable coup d'accélérateur dans les connaissances avec beaucoup d'investissement de la communauté

française et ce travail de thèse se place dans cette continuité, en bénéficiant des recherches communes (Redelsperger et al. 2006; Level et al. 2010).

L'étude de Bouniol et al. (2012), basée sur l'année d'observations de la station mobile ARM de Niamey (Niger) en 2006, a également montré que la nébulosité, d'avril à septembre, était loin d'être seulement liée aux systèmes de convection profonde, et que les nuages observés dans cette région se scindent majoritairement en quatre types :

- la convection peu profonde avec des bases de nuages entre le niveau de condensation et 500 m au-dessus de celui-ci et des sommets de nuages inférieurs à 3 km,

- les nuages de mi-niveau avec des bases entre 3 et 7 km, - les cirrus avec des bases supérieures à 8 km,

- les nuages issus de la convection profonde résultant des cumulonimbus et des lignes de grains. Ces nuages se situent au-dessus de la zone de fonte et ont des épaisseurs géométriques supérieures à 5 km.

De précédentes études avaient déjà proposé de scinder les nuages en Afrique de l'Ouest en quatre types (Hayward and Oguntoyinbo 1987; Slingo 1980).

Dans Bouniol et al. (2012), les altitudes, les fréquences d'occurrences, les cycles diurnes et les impacts radiatifs à la surface dans le visible et l'infrarouge de ces quatre familles de nuages ont été documentés.

Grâce aux observations satellites de CloudSat-CALIPSO (Figure 3.8), Bouniol et al. (2012) ont documenté sur la période d'avril à septembre 2008 la nébulosité observée à l'échelle de l'Afrique de l'Ouest. Ces données ont montré que les quatre types de nuages observés à Niamey ne sont pas spécifiques de la région du Sahel mais de l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest. Les cirrus ont une forte occurrence durant la période de pré-mousson. Ils s'étendent de l'Océan Atlantique à la région du Sahel où le site de Niamey se situe. Ce site est positionné en trait pointillé noir sur la figure 3.8. Dès le mois de juin, on remarque la progression des nuages vers le continent, entre 5 et 35°N, et une diminution de ceux que l'on observait sur l'océan en avril et mai. Cela est dû au flux de mousson (cf. 3.3.1) et à la ZCIT (cf. 3.2) qui progressent vers le nord. Pendant la période de mousson, on notera également une forte occurrence des nuages de mi-niveau au-dessus du Sahara. En ce qui concerne la convection peu profonde, pendant la période de pré-mousson, ces nuages se situent principalement sur l'océan et sont de type stratocumulus. Ces nuages bas deviennent plus fréquents sur le continent pendant la période de mousson tout en restant très présents sur l'océan.

Figure 3.8: Coupe verticale des fréquences d’occurrence des nuages pour les mois d’avril à septembre, en fonction de la latitude. Les lignes verticales en pointillés noirs marquent les positions du golfe de Guinée et de la Méditerranée. Entre 13 et 14°N, la ligne verticale en pointillés noirs indique le site de Niamey au Sahel. Adapté de Bouniol et al. (2012)

Stein et al. (2011) ont également étudié la nébulosité en Afrique de l'Ouest à partir des observations de CloudSat-CALIPSO de 2006 à 2009. Cette climatologie s'intéresse à la période de mousson. Les traces ont été séparées en fonction de leur heure d'acquisition : de jour ou de nuit. Différentes catégories de nuages ont été observées : (i) des cirrus ayant des pressions inférieures à 200 hPa, (ii) des enclumes avec des pressions inférieures à 500 hPa, (iii) des cumulonimbus ayant des pressions comprises entre 900 hPa et un peu plus de 150 hPa, (iv) des nuages de mi-niveau avec des pressions entre 600 et 400 hPa, (v) des congestus ayant des pressions entre 900 et 400 hPaet (vi) des petits cumulus où les pressions à leurs sommets peuvent atteindre 700 hPa(Figure 3.9). Ils définissent donc des types de nuages légèrement différents de ceux identifiés dans Bouniol et al. (2012) notamment en ce qui concerne les enclumes, qui sont des étalements du sommet des nuages associés à la convection profonde, et les congestus. Les enclumes sont une couche nuageuse située sous les cirrus. Ils incluent également les virga qui sont des précipitations n'atteignant pas le sol. Les

April 2008 Radar-Lidar (all)

June 2008 Radar-Lidar (all)

August 2008 Radar-Lidar (all) September 2008 Radar-Lidar (all) July 2008 Radar-Lidar (all) May 2008 Radar-Lidar (all)

congestus se situent à cheval sur le sommet des petits cumulus et les bases des nuages de mi- niveau. Les nuages de mi-niveau sont majoritairement plus fins géométriquement d'après sa figure 3.9 alors que les congestus ont un développement vertical plus important. La base des nuages de mi-niveau définie par Bouniol et al. (2012) est donc plus basse que celle définie par

Stein et al. (2011) ; des congestus sont donc inclus dans la définition des nuages de mi-niveau de Bouniol et al. (2012). Durant la nuit, la convection profonde est très présente conduisant à la formation en très grand nombre des cirrus et des enclumes (cf. Fig. 2 (a-c) de Stein et al. (2011)). Dans les régions tropicales, d'autres études ont montré que les cirrus sont prédominants par rapport aux autres types de nuages (Jin 2012). Le jour, en revanche, est marqué par la présence de davantage de convection peu profonde et de congestus (cf. Fig. 2 (b-d) de Stein et al. (2011)). Les nuages de mi-niveau sont présents à la fois le jour et la nuit avec une occurrence beaucoup plus forte la nuit sur la région de l'Afrique de l'Ouest (cf. Fig. 3.9).

Figure 3.9: Coupe verticale des contours des nuages et des précipitations pour différentes catégories de nuages pour la saison de mousson Juin-Septembre (a) nuit et (b) jour. Les contours contiennent des fractions de nuages pour les cirrus (fraction de nuage supérieure à 5% et 10%, magenta), enclumes (5% et 10%, vert), altocumulus (5%, orange), congestus (5%, bleu), cumulus peu profonds (5%, rouge) et cumulonimbus (5%, gris sombre). Une ligne pointillée noire indique la couche de fusion. Les lignes fines noires indiquent les contours de température potentielle avec des intervalles de 6 K. Le contour en trait pointillé épais noir correspond aux vents zonaux inférieurs à -10 m.s-1. Il indique la position de l'AEJ. Les

vecteurs de vent sont échantillonnés de façon à avoir une distance d'advection de 12h. (Stein et al. 2011)

A partir d'un large panel de données satellites dont CloudSat, CALIPSO, MODIS et MSG, des réanalyses ERA-Interim et de quatre modèles de climat en configuration AMIP (CanAM4, CNRM-CM5, HadGEM2-A et MRI-CGCM3), Hill et al. (2016) ont réalisé une climatologie de la nébulosité ainsi que des impacts radiatifs au sommet de l'atmosphère et des précipitations dans la région du Golfe de Guinée (8°W–8°E ; 5–10°N) durant les mois de juin et juillet lorsque les données étaient disponibles entre les années 2000 et 2015 (cf. Tableau 1 de Hill et al. (2016)). Ils ont classifié les nuages en trois catégories : les nuages hauts avec des sommets inférieurs à 440 hPa, les nuages de mi-niveau avec des sommets entre 440 et 800 hPa et les nuages bas avec des sommets supérieurs à 800 hPa. Ils ont observé dans l'ensemble de leurs jeux de données que les nuages hauts représentent la plus forte couverture nuageuse

(entre 0.54 et 0.94) suivis des nuages de mi-niveau (entre 0.29 et 0.74) puis des nuages bas (entre 0.06 et 0.21). Ils notent un maximum d'occurrence des nuages hauts durant la nuit, des nuages de mi-niveau entre 1000 UTC et 1400 UTC et des nuages bas vers 1000 UTC.

3.5 Conclusion

L'Afrique de l'Ouest est donc une région particulière d'une part en raison des différentes bandes zonales que l'on y rencontre associées à des climats différents et d'autre part en raison de sa géographie. De plus, elle est caractérisée par un fort cycle annuel. La période de mousson que l'on rencontre en Afrique de l'Ouest de juin à septembre est marquée par des vents amenant de l'humidité sur le continent engendrant de fortes précipitations. C'est également durant cette période que la couverture nuageuse est maximale. Des études se sont intéressées à la nébulosité dans cette région durant cette saison mettant en évidence la présence de cirrus, de convection profonde et de nuages de mi-niveau. Dans cette thèse, nous documenterons plus en détails ces derniers types de nuages dans cette région afin de mieux comprendre leurs caractéristiques telles que leur occurrence, leur cycle diurne et leurs propriétés macro- et microphysiques, l'environnement thermodynamique dans lequel ces nuages sont observés ainsi que leurs effets radiatifs.

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LES OBSERVATIONS, LES METHODES ET LES