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5.6 Caractéristiques radiatives des nuages de mi-niveau

L'effet des nuages de mi-niveau sur les flux radiatifs à la surface dépend de nombreux facteurs dont les propriétés des nuages, les propriétés de la surface, l'angle d'élévation solaire, les heures de la journée et les saisons (Zhang et al. 1996). Dans ces travaux, nous nous sommes intéressés aux caractéristiques radiatives des nuages de mi-niveau sur les deux sites sols : Niamey et BBM. Nous avons vu précédemment que ces deux sites sols sont marqués par la présence récurrente de poussières désertiques. Ces poussières, difficiles à quantifier, auront donc un impact important dans le bilan radiatif cependant nous ne l'avons pas quantifier dans cette étude. Selon Marsham et al. (2013a), une corrélation entre la profondeur optique des aérosols (AOD) et la nébulosité existe. L'effet combiné des poussières et des nuages jouerait un rôle important dans les variations quotidiennes du chauffage radiatif net à la surface d'après Marsham et al. (2013a). A Agoufou, entre Niamey et BBM, Guichard et al. (2009) observaient quant à eux un impact important de la vapeur d’eau sur les variations quotidiennes hors de la saison des pluies.

De précédentes études sur les propriétés radiatives ont été réalisées avec le jeu de données de la station ARM à Niamey en 2006 (Slingo et al. 2008; Miller et al. 2012; Collow

et al. 2016). Collow et al. (2016) se sont intéressés à l'impact des nuages (pas seulement des nuages de mi-niveau mais à tous ceux présents dans la colonne atmosphérique) en utilisant les équations suivantes :

CRETOA=LW ↑TOA ,clear−LW ↑TOA+SW ↑TOA , clear−SW ↑TOA (i)

CRESurface=LW ↓Surface−LW ↓Surface, clear+SW ↓Surface−SW ↓Surface ,clear (ii)

CREAtmosphere=CRETOA−CRESurface+SW ↑Surface−SW ↑Surface ,clear (iii)

Ils ont montré dans le domaine du visible une forte différence de l'effet radiatif des nuages (CRE - Cloud Radiative Effect) à la surface entre la période sèche et la période humide (de plus de 100 W.m-2; cf. Fig. 5.22 (d)) où la période humide a le plus fort CRE ; alors qu'au sommet de l'atmosphère, les effets des nuages sont assez comparables entre les deux périodes (cf. Fig. 5.22 (a)). En ce qui concerne le domaine de l'infrarouge, peu de différences des effets des nuages sont notées entre les deux périodes (cf. Fig. 5.22 (b-e)). Pour ce qui est de l'impact radiatif net, ils observent au sommet de l'atmosphère un réchauffement des nuages (c'est-à-dire des valeurs positives; cf. Fig. 5.22 (c)) et à la surface un refroidissement (c'est-à-dire des valeurs négatives; cf. Fig. 5.22 (f)). La combinaison des flux au sommet de l'atmosphère et à la surface induit un réchauffement des nuages dans le visible et l'infrarouge (c'est-à-dire des valeurs positives; cf. Fig. 5.22 (g-h)). Finalement, les nuages engendrent un impact net positif donc ils tendent à réchauffer l'atmosphère. Au sommet de l'atmosphère, durant la nuit, les nuages ont tendance à réchauffer alors que suivant les heures de la journée, ils peuvent refroidir ou réchauffer. Miller et al. (2012) notent à partir de moyennes mensuelles que les nuages réchauffent légèrement le sommet de l'atmosphère jusqu'en avril, puis cela augmente en mai pour finalement diminuer durant la saison humide et ré-augmenter à nouveau pendant la saison sèche. A la surface, ils observent un refroidissement tout comme Miller et al. (2012) qui se sont intéressés à l'impact mensuel des nuages. D'après Collow et al. (2016), c'est lors de la période de mousson que les nuages ont le plus d'impact à la surface. Si l'on s'intéresse aux nuages de mi-niveau, nous n'observons pas cette particularité (cf. Fig. 5.23). Finalement, tout deux constatent un effet radiatif net des nuages réchauffant le plus le matin et le moins en fin d'après-midi (Collow et al. 2016).

La figure 5.23 quantifie le forçage radiatif des nuages de mi-niveau dans les domaines du visible (shortwave - SW) (a) et de l'infrarouge (longwave - LW) (b) à l'échelle mensuelle calculés à partir des données moyennées à une résolution de 15 minutes. Ces calculs sont donc effectués par colonnes nuageuses et non par objets nuageux. Ces résultats étendent l'étude de Bouniol et al. (2012) à Niamey à toute l'année 2006 spécifiquement pour les nuages

de mi-niveau.

D'après la figure 5.23 (a), dans le domaine du visible, l'impact radiatif mensuel moyen entrant des nuages de mi-niveau à la surface, calculé à partir de la différence entre le composite des nuages de mi-niveau et le composite des observations en ciel clair pour un mois donné entre 0800 UTC et 1600 UTC (cf. partie 4.2.5), varie entre -220 et -20 W.m-2 à Niamey. Des résultats comparables ont été obtenus avec la seconde méthode, c'est-à-dire à partir de mesures journalières, décrite dans la section 4.2.5. Les nuages de mi-niveau tendent donc dans le visible à refroidir, c'est-à-dire qu'ils bloquent le rayonnement incident. Cela est comparable aux travaux de Collow et al. (2016) qui atteignent des valeurs jusqu'à -180 W.m-2 sans distinction de nuages. Pour janvier, février et mars, l'impact moyen varie entre -150 et -100 W.m-2. Le maximum annuel est observé en avril. Au cours de la mousson, une amplitude maximale est observée en juillet et atteint une valeur moyenne de l'ordre de -180 W.m-2 liée à la progression du flux de mousson sur le continent (Bouniol et al. 2012) alors que pour les autres mois l'impact moyen est d'environ -100 W.m-2. En octobre, l'impact moyen diminue et

est d'environ -50 W.m-2 puis devient proche de zéro en novembre. La compréhension de l’origine de cette variabilité saisonnière demande un peu plus d'analyse. Par ailleurs, ces résultats sont proches de ceux obtenus par Bouniol et al. (2012). Cependant, ils ne sont pas strictement identiques pour les mois se chevauchant car la période de la journée sélectionnée (de 0800 UTC à 1600 UTC) n'est pas la même que la leur. Ils utilisent des observations entre 0530 UTC et 1800 UTC. De plus, le flux entrant est à une résolution de 15 minutes alors que

Bouniol et al. (2012) ont travaillé avec une résolution de 30 minutes. A BBM, l'impact radiatif moyen entrant en juin 2011 des nuages de mi-niveau à la surface est de -60 W.m-2. Ce résultat est comparable à celui obtenu sur le site de Niamey en juin 2006 d'environ -86 W.m-2. Sur le site de BBM, Marsham et al. (2013a) observent que dans le domaine du visible l'impact radiatif entrant en juin 2011 diminue avec les nuages et les poussières désertiques.

Figure 5.22: Cycles diurnes de l'impact radiatif des nuages au sommet de l'atmosphère dans (a) le domaine du visible, (b) le domaine de l'infrarouge, (c) le net, puis à la surface dans (d) le domaine du visible, (e) le domaine de l'infrarouge, (f) le net, et enfin au sein de l'atmosphère dans (g) le domaine du visible, (h) le domaine de l'infrarouge, (i) le net pour la saison sèche (en rouge) et la saison humide (en bleu) à Niamey en 2006. Sur la figure (i), les écarts-types sont représentés par des teintes colorées. (Collow et al. 2016)

La figure 5.23 (b) montre l'impact radiatif mensuel moyen entrant des nuages de mi- niveau à la surface dans le domaine de l'infrarouge, calculé à partir de la différence entre le composite des nuages de mi-niveau et le composite des observations en ciel clair pour un mois donné (cf. partie 4.2.5). Cet impact moyen, qui mesure l'effet de serre des nuages dans le bilan radiatif à la surface de la Terre, varie entre 10 et 60 W.m-2. Les nuages de mi-niveau tendent donc dans l'infrarouge à réchauffer; c'est ce que l'on nomme l'effet de serre. Cela est comparable aux travaux de (Collow et al. 2016) qui avaient des valeurs entre 20 et 36 W.m-2 sans distinction de nuages. Ces impacts sont plus importants pendant les mois secs (janvier, février, avril, novembre) et diminuent pendant la mousson (jusqu'à moins de 20 W.m-2) lorsque la quantité de vapeur d'eau est maximale. En d'autres termes, pendant la mousson, il existe un fort effet de serre de la vapeur d'eau, ce qui tend à réduire l'impact des nuages dans le domaine de l'infrarouge. Stephens et al. (2012) ont également observé une diminution systématique de cet impact à la surface au-dessus d'un seuil d'eau précipitable donné. A BBM, l'impact radiatif moyen entrant en juin 2011 des nuages de mi-niveau à la surface est de 10 W.m-2. Comme dans le domaine du visible, ce résultat est comparable à celui obtenu sur le site de Niamey en juin 2006 d'environ 8 W.m-2. Sur le site de BBM, Marsham et al. (2013a)

observent que dans le domaine de l'infrarouge le cycle diurne du rayonnement entrant en juin 2011 est contrôlé par le cycle diurne des nuages.

Figure 5.23: Effets radiatifs des nuages de mi-niveau à la surface obtenus à partir de la station mobile ARM à Niamey (Niger) en 2006 (bleu) et à Bordj Badji Mokhtar (BBM) (Algérie) en juin 2011 (noir) (a) dans le domaine du visible et (b) dans le domaine de l'infrarouge. Les symboles triangulaires représentent la valeur moyenne mensuelle et la ligne verticale deux fois l'écart type.

Dans l'ensemble, nous avons observé que les nuages de mi-niveau à la surface avaient un flux net (addition des impacts dans le domaine du visible et de l'infrarouge à partir des composites mensuels et en tenant compte du cycle diurne) d'environ -18 W.m-2 dominé par les flux dans le domaine du visible. Ils ont donc un effet de refroidissement sur le climat à la surface. Collow et al. (2016) montrent également que les nuages se révèlent être un important mécanisme de refroidissement de surface pendant la journée en particulier pendant la saison humide. A l'inverse, au sommet de l'atmosphère, les nuages induisent des changements négligeables durant la journée. La somme des flux dans les domaines du visible et de l'infrarouge à la surface et au sommet de l'atmosphère engendre donc dans la colonne atmosphérique un réchauffement radiatif net lorsque les nuages sont présents puisque les nuages augmentent l’absorption (McFarlane et al. 2007; Miller et al. 2012; Collow et al. 2016).

Au sommet de l'atmosphère, dans les Tropiques, Bourgeois et al. (2016) trouvent un effet radiatif net moyen de -0.6 W.m-2 avec -2.4 W.m-2 et 1.8 W.m-2 dans les domaines du visible et de l'infrarouge respectivement. Cependant, durant la période de mousson, ils observent un effet de réchauffement dans la région du Sahara qui varie entre -0.2 et 1.0 W.m-2.

Dans les Tropiques, l'effet radiatif net de tous les nuages est d'environ -20 W.m-2 avec le modèle de climat HadGAM1 ainsi qu'avec les données CERES (Su et al. 2010). Dans les moyennes latitudes, sur le site ARM des Grandes Plaines du Sud aux États-Unis, Mace et al. (2006) observent pour les nuages de mi-niveau un léger refroidissement au sommet de l'atmosphère et un réchauffement à la surface.

5.7 Conclusion

Grâce à trois jeux d'observations combinant un radar et un lidar déployés au sol dans des environnements différents : l'un au Sahel à Niamey durant la campagne AMMA en 2006 et l'autre dans le Sahara à Bordj Badji Mokhtar durant la campagne Fennec en juin 2011 ou embarqués sur les satellites CloudSat et CALIPSO, les nuages de mi-niveau en Afrique de l'Ouest ont été documentés. Ces nuages s'observent tout au long de l'année avec une occurrence beaucoup plus importante durant la période de mousson et notamment tôt le matin. En Afrique de l'Ouest, on les observe plus fréquemment dans les parties sud et ouest. Ils sont généralement fins puisque la plupart d'entre eux ont une épaisseur inférieure à 1000 m. Nous avons pu également observer à Niamey que ces nuages sont principalement composés d'eau liquide.

Certaines tendances ont pu être observées à partir des différentes variables macro- et microphysiques des 482 nuages de mi-niveau détectés sur le site de Niamey en 2006 (cf. Fig. 5.24) :

- des nuages bas corrélés à un sommet bas et des nuages hauts corrélés à un sommet haut, - des nuages fins corrélés à des temps de passages courts et des nuages épais corrélés à des temps longs,

- des nuages fins corrélés à un contenu faible en eau et des nuages épais contenant une importante quantité en eau ; cependant, des nuages très épais mais également très fins peuvent avoir une forte réflectivité moyenne par nuages.

Figure 5.24: Covariations entre les variables bases-sommets (R=0,88), durées-épaisseurs (R=0,61) et épaisseurs-réflectivités (R=0,70) des 482 nuages de mi-niveau détectés à la station ARM de Niamey en 2006.

Malgré cela et au delà de ces quatre variables, aucune relation évidente n'émerge entre les différentes caractéristiques des nuages de mi-niveau à Niamey où nous avons une large base de données (caractéristiques macro- et microphysiques) sur une longue période temporelle. Il est par conséquent difficile de distinguer des familles de nuages de mi-niveau partageant des processus de formation et de maintien identiques.

Afin d'avoir une répartition objective de cet échantillon et d’identifier différents types de nuages qui semblent apparent pourtant à l’œil, des méthodes de clustering (cf. section 4.2.3

pour davantage de détails sur ces méthodes) ont été appliquées à notre base de données afin de regrouper les nuages de mi-niveau partageant des caractéristiques communes.

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DIVERSITÉ DES NUAGES DE MI-NIVEAU EN