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1.4 Problématique générale de mon activité de recherche

1.4.3 Le niveau Expériences/Connaissances

Le dernier niveau du modèle global décrivant la problématique abordée dans mes activités (il- lustrée figure 1.2) est le niveau Expériences/Connaissances. La construction, la gestion, le maintien et l’exploitation des connaissances sont généralement dédiés à la fonction Knowledge Management dans les entreprises [Taylor and Zorn, 2004]. La gestion des connaissances vise à améliorer l’organ- isation de l’entreprise par la mise en œuvre de processus et de pratiques permettant d’identifier et capturer de la connaissance, des savoirs-faire et des expertises, de façon à rendre cette connaissance réutilisable [Lyles and Easterby-Smith, 2003, Easterby-Smith and Lyles, 2011]. Il s’agit alors d’être en

Chapitre 1. Introduction, Contexte de recherche et Problématique

mesure de la capitaliser et de l’exploiter. La capitalisation permet de réutiliser de la connaissance d’un domaine particulier, préalablement modélisée et enregistrée, de manière à réaliser de nouvelles activités [Dalkir, 2011]. L’exploitation permet la diffusion de connaissances pour aider la réalisa- tion des activités courantes et à former les futurs utilisateurs. Des approches comme CommonKADS [Schreiber et al., 1994] sont généralement considérées comme des méthodologies standards de gestion des connaissances. Dans ces approches, le processus de formalisation consiste à capturer la connais- sance que les acteurs de l’entreprise mettent en œuvre pour réaliser des tâches. La construction d’un système à base de connaissances (KBS - Knowledge Based Systems) est vue comme un processus de modélisation. Les principaux défauts que nous avons listés dans [Kamsu-Foguem et al., 2008] (A.4) sont que ces approches :

– sont basées sur des modèles de haut niveau difficiles à instancier, – imposent une charge de travail importante,

– requièrent un ingénieur expert en gestion des connaissances, – entraînent des connaissances peu contextualisées,

– nécessitent de très régulièrement mettre en œuvre des procédures de maintenance et de maintien à jour des connaissances.

En revanche, leur bon niveau de formalisation ainsi que les modèles non ambigus qu’ils mettent en œuvre sont des points positifs.

Une autre approche, développée depuis plusieurs années au LGP, est celle par retour d’expéri- ence (ReX) [Bergmann, 2002] qui permet de gérer les connaissances avec pour objectif de rendre (ré-)utilisables des connaissances expérimentales ou des leçons apprises afin d’améliorer le fonction- nement de l’entreprise. Le but est d’éviter de réitérer les erreurs du passé ou de bénéficier de l’expéri- ence, des savoirs faire acquis lors de la réalisation de tâches. Différents travaux existent dans la littéra- ture [Kolb, 1984, Faure and Bisson, 1999, Rakoto et al., 2002, Rakoto, 2004, Clermont et al., 2007], [Jabrouni et al., 2011]. Les approches sont de type bottom-up où la connaissance est construite gradu- ellement à partir d’expériences ou cas. Si l’on considère la hiérarchie standard Données, Informations, Connaissances, les expériences viennent se placer entre Informations et Connaissances [Béler, 2008], [Kamsu-Foguem et al., 2008] (A.4)où les connaissances sont inférées à partir des expériences passées. Dans l’approche de retour d’expérience développée au LGP, nous considérons que la transformation graduelle suit trois étapes issues d’un processus de résolution de problèmes : la formalisation d’un événement contextualisé (niveau Information), la formalisation des analyses mises en œuvre et des so- lutions obtenues (niveau Expérience) puis leur transformation en leçons apprises, en procédures, en rè- gles, etc. (niveau Connaissance) [Béler, 2008],[Kamsu-Foguem et al., 2008] (A.4), [Jabrouni et al., 2011]. 1.4.3.1 La formalisation des expériences dans nos travaux

Dans notre approche, les expériences correspondent à des cas traités lors de la réalisation d’activités du processus d’ingénierie système, de planification de projet et de résolution de problèmes. Le niveau Outils exploite ces expériences mais également, participe à leur élaboration. Ainsi, l’activité de con- ception de systèmes donnera lieu à des expériences correspondant aux démarches de développement, de l’expression des besoins jusqu’à la fourniture de systèmes conçus, voire réalisés. L’activité de réso- lution de problèmes génère des expériences correspondant à la formalisation de problèmes, d’analyses et de solutions. L’outil d’optimisation, quant à lui, génère des expériences correspondant aux solutions obtenues pour le problème de conception de systèmes / planification de projet.

Notre problématique concerne la formalisation des expériences de manière à ce qu’elles puissent 54

1.4. Problématique générale de mon activité de recherche être exploitées ensuite efficacement par les décideurs. Nous devons atteindre un bon niveau de formal- isation ainsi que des modèles non-ambigus afin de garantir leur future exploitation. Ainsi, dans nos travaux, les expériences sont formalisées soit en utilisant les graphes conceptuels [Sowa, 1976], soit en définissant nos propres modèles à base de classes, d’objets et de descripteurs (attributs). Ces choix sont principalement guidés par les outils de réutilisation développés au niveau Outils ainsi que les types de connaissances exploitées. Ces types de connaissances sont décrits dans la section suivante.

1.4.3.2 La formalisation des connaissances dans nos travaux

Notre problé `matique globale est de représenter les connaissances en construisant des modèles formels, non-ambigus et favorisant l’interopérabilité sémantique [Kamsu-Foguem et al., 2008] (A.4). F. Vernadat dans [Vernadat, 2010] définit de manière générale l’interopérabilité comme la mesure de la capacité de plusieurs entités à interagir au sein d’une entreprise distribuée ou d’un réseau d’entreprises. Il peut s’agir de logiciels, de processus, de systèmes, d’unités décisionnelles, etc. Dans ce contexte, les ontologies apportent des solutions significatives. Une ontologie est la spécification d’une connais- sance explicite à propos d’une conceptualisation [Gruber, 1993, van Heijst et al., 1997]. Elle permet de préciser les concepts (ou les termes) utilisables pour décrire les connaissances, les relations pos- sibles entre les concepts et, éventuellement, les contraintes d’utilisation [Valente and Breuker, 1996], [Dieng and Hug, 1998]. Un concept est une interprétation organisée et structurée d’une partie du monde réel utilisée pour penser et communiquer sur cette partie du monde [Darlington and Culley, 2008]. Une ontologie permet ainsi à une communauté d’experts d’un domaine particulier d’exprimer des informations sémantiques consensuelles [Studer et al., 1998]. Les ontologies sont généralement organ- isées en classifications d’éléments dont le principe le plus commun est la généralisation/spécialisation [Sowa, 1984]. Il s’agit dans ce cas de classifier les éléments dans une arborescence ou un graphe. Plus un élément est proche de la racine, plus il est général, plus il s’en éloigne, plus il est spécial- isé. De nombreuses applications des ontologies existent en conception de systèmes (voir par exemple [Uschold and Gruninger, 1996], [Kim et al., 2006], [Chang et al., 2008], [Borsato, 2014]).

Notre problématique globale de formalisation des connaissances se spécialise ensuite selon quatre axes correspondants aux Outils :

– pour les outils de synchronisation entre processus d’ingénierie et processus de planification de projet, il s’agit de développer des modèles de connaissances méthodologiques. Ces connais- sances sont des modèles génériques et intégrés i) d’informations et ii) de processus d’obtention de ces informations. Ces modèles sont capitalisés en tant que connaissances méthodologiques et instanciés à chaque nouvelle mise en œuvre d’un projet d’ingénierie. Dans nos propositions, le modèle générique d’informations est représenté à l’aide du formalisme UML (Unified Modelling Language), celui de processus est représenté à l’aide du formalisme BPMN (Business Process Modelling Notation). Ces modèles sont détaillés dans le chapitre 3, section 3.2, page 72,

– pour les outils de réutilisation d’acquis, il s’agit de développer des modèles de connaissances métier, c’est-à-dire des connaissances d’un domaine particulier. Dans nos travaux, le choix s’est porté sur les ontologies. Les éléments de connaissance métier qui y sont fédérés sont consulta- bles et exploitables directement par les acteurs de l’ingénierie système. Grâce à la connaissance qu’ils contiennent, d’une part ces éléments doivent permettre de guider directement la réali- sation des activités et, d’autre part, de formaliser les expériences. Pour la réutilisation d’ac- quis en résolution de problèmes, nous avons choisi le formalisme des Graphes Conceptuels [Sowa, 1976]. Les ontologies y sont représentées par des treillis de concepts et de relations

Chapitre 1. Introduction, Contexte de recherche et Problématique

[Sowa, 1976, Mugnier and Chein, 1998] et l’approche dispose en outre de mécanismes de raison- nement comme l’opérateur de projection [Chein and Mugnier, 1992]. Pour la réutilisation d’ac- quis en conception de systèmes, nous avons défini des taxonomies de concepts qui encapsulent des caractéristiques intrinsèques à l’aide de Problèmes de Satisfaction de Contraintes (voir par exemple [Yang et al., 2008] pour de telles approches). Ces modèles sont détaillés dans le chapitre 4, section 4.3, page 94,

– pour les outils d’exploitation de connaissances aidés par les expériences, il s’agit de développer des modèles de connaissances contextuelles (ce sont avant tout des connaissances métier) à l’aide de Problèmes de Satisfaction de Contraintes où certaines contraintes sont paramétrables selon le contexte d’application. Ces modèles sont détaillés dans le chapitre 4, section 4.4, page 105,

– pour les outils d’optimisation, il s’agit de formaliser des connaissances décisionnelles à propos de l’influence des décisions sur la satisfaction des objectifs. Ces influences sont formalisées à l’aide d’un réseau bayésien [Pearl, 1988]. Ces modèles sont détaillés dans le chapitre 3, section 3.3, page 79.

Une catégorie particulière de connaissances concerne les agents utilisés pour la reconfiguration de systèmes automatisés. Chaque agent dispose de sa propre connaissance sur une partie du système qu’il représente et qu’il pilote. Cette connaissance concerne notamment les possibilités de reconfiguration de l’agent au sein du système. Celle-ci est formalisée grâce à un Graphe d’Accessibilité Opérationnelle [Berruet et al., 2000] décrivant toutes les possibilités d’enchaînement des activités (ou tous les états possibles) pour le système automatisé représenté par l’agent. Ces modèles sont détaillés dans le chapitre 2.

1.4. Problématique générale de mon activité de recherche Pour nos travaux, les catégories de connaissances et les formalismes utilisés sont synthétisés dans le tableau 1.1.

Catégories de connaissances

Rôle Formalisme

Agents Capitaliser des connaissances sur les capacités de reconfigura- tion d’un système automatisé

Graphe d’Accessibilité Opérationnelle (GAO) Connaissances

Méthodologiques

Capitaliser sur la manière de réaliser des activités (informa- tions et processus)

Modèles UML et BPMN

Connaissances Métier

Capitaliser sur les artefacts à concevoir Ontologies et Problèmes de Satisfaction de Con- traintes Connaissances Contextuelles

Capitaliser sur les artefacts à concevoir en tenant compte du contexte Problèmes de Satisfaction de Contraintes paramétra- bles Connaissances Décisionnelles

Capitaliser sur les influences des décisions de conception et de planification sur la satisfaction des objectifs

Réseaux Bayésiens

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