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RÉGULATION DU TRAVAIL ET POLITIQUES (IM)MIGRATOIRES CANADIENNES : CADRE SOCIOJURIDIQUE DE L’ÉTUDE

C. Nature et portée des règles composant le droit du travail

L’ensemble normatif désigné sous le vocable de « droit du travail » concerne à la fois « les phases préparatoires à l’emploi, les multiples péripéties découlant de l’exécution du travail, les obligations inhérentes des parties [et] les effets de la perte d’emploi »97. Ainsi, le droit du travail ne s’intéresse pas strictement à la matérialité du contrat de travail; cette catégorie

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Michel Coutu et Georges Marceau, Droit administratif du travail, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2007 à la p 11.

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Fudge, «Labour as Fictive Commodity», supra note 19 à la p 123.

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Vallée et Gesualdi-Fecteau, « constitutionnalisation », supra note 72.

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À ce sujet, voir Verge, Trudeau et Vallée, supra note 8 aux pp 123-31.

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C.t., supra note 7, art 62.

96

CCQ, supra note 6, arts 1411, 1413.

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juridique s’intéresse au rapport salarial. Le concept de « rapport salarial » permet de qualifier une « relation qui existe entre un employeur et un travailleur lorsque celui-ci s’insère dans un milieu de travail »98. Le droit du travail est constitué d’un « entrelacs de règles substantielles et de normes procédurales »99. Ce corpus régulatoire prévoit également différents recours visant la mise en œuvre de ses prescriptions.

Le droit du travail est donc une catégorie spécifique de l’ensemble juridique; les différents instruments normatifs le composant, qu’ils découlent de la négociation entre les parties ou du droit étatique, comportent également leurs spécificités. Il faut alors effectuer l’évaluation de « leur contenu, de leurs articulations internes et rendre compte, avec les autres composantes de l’ordre juridique d’appartenance, des opérations ou situations qu’elles tendent à (ou peuvent) autoriser, favoriser, dissuader »100. Il importe également de répertorier avec précision les différentes règles qui peuvent être mobilisées en fonction des situations factuelles en cause.

Les droits et les obligations prévus par les instruments qui composent le droit du travail incombent généralement aux employeurs et peuvent également viser les salariés et les associations syndicales. Il importe toutefois de souligner que si toutes les parties au contrat individuel ou collectif de travail peuvent être visées par les prescriptions du droit du travail, ce sont toutefois les salariés, en tant que « groupe social », qui seront visés par la fonction de protection du droit du travail.

Il fut également plaidé que l’effet des droits substantiels et procéduraux découlant de la loi, de la négociation collective et des pratiques professionnelles permettraient à certains groupes de salariés d’aspirer à la « citoyenneté industrielle ». Cette forme de citoyenneté permettrait aux salariés d’acquérir un ensemble de privilèges et de droits inextricablement

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Vallée, « La contribution scientifique », supra note 23 à la p 12.

99

Antoine Jeammaud et Evelyne Serverin, « Évaluer le droit » (1992) Droit social 263 à la p 270

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liés au travail, desquels découlerait, ultimement, un droit à la sécurité économique101. La célébration des effets de cette citoyenneté industrielle impose toutefois que l’on saisisse comment les ressources économiques, juridiques, culturelles et politiques font en sorte que les salariés puissent accéder à ses avantages102. Or, le droit du travail ne contribue-t-il pas à priver certains groupes de salariés de la citoyenneté industrielle en les excluant formellement ou de facto de son application? Ce faisant, le droit aurait-il contribué à la segmentation du marché du travail en confinant certains groupes de salariés à une pluralité de « bad jobs »103?

À l’instar du droit dans son ensemble, le droit du travail n’est pas neutre. Si, comme le souligne Judy Fudge avec acuité, cette catégorie juridique se présente comme étant « color- blind » et « gender-blind », la réalité est toute autre104. Les lois du travail ont été élaborées en prenant pour référence la « relation individuelle d’emploi traditionnelle »; c’est-à-dire du rapport salarial dans lequel on retrouve un salarié, lié à un seul employeur, qui fournit sa prestation de travail dans une unité productive classique, soit l’entreprise et, généralement, à temps plein et pour une durée indéterminée105. Du point de vue de la modélisation sociale sur la base de laquelle le droit du travail fut élaboré, certains signalent que ce droit s’est développé en ayant pour référence le « white male breadwinner» 106.

101

C’est ainsi que Harry Arthurs, en 1967, célébrait les avantages de l’émergence d’une citoyenneté industrielle, Harry Arthurs, « Developing Industrial Citizenship : A Challenge for Canada’s Second Century » (1967) 45:4 Revue du Barreau canadien 786. Voir également le regard critique que ce même auteur jette de façon contemporaine sur ce concept de citoyenneté au travail : Harry Arthurs, « Un second regard sur la citoyenneté industrielle » dans Coutu et Murray, supra note 29 à la p 43.

102

Fudge, « citoyenneté industrielle », supra note 79 à la p 421.

103

Fudge et Tucker, supra note 14.

104

Judy Fudge, «Reconceiving Employment Standards Legislation : Labour Law’s Little Sister and the Feminization of Labour » (1991) 7 Journal of Law and Social Policy 73.

105

Définition empruntée à Jean Bernier et Guylaine Vallée, «Pluralité des situations de travail salarié et égalité de traitement en droit du travail québécois» dans Analyse juridique et valeurs en droit social : Études offertes à

Jean Pélissier, Paris, Dalloz, 2004, 69 à la p 72 [Bernier et Vallée, « Pluralité »].

106

Dans la doctrine travailliste française, les auteurs ont souvent recours à l’expression « travailleur autochtone » pour désigner le modèle de travailleur autour duquel se développa le droit du travail. Compte tenu du sens que prend cette expression dans des États à l’histoire coloniale complexe, comme c’est le cas au Canada, nous avons recours à ce raccourci conceptuel que constitue la référence au « white male breadwinner ».

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Le rapport salarial classique se caractérise par la présence d’un contrat de travail entre un employeur et un salarié. Au Québec, le contrat de travail est défini comme « celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne, l'employeur »107. Bien qu’en milieu syndiqué ce soit l’association accréditée qui soit partie à la convention collective, la réalité demeure : c’est à l’égard du salarié que l’autorité patronale se déploie et que la subordination intervient. L’association syndicale assure une médiation, de nature collective, des intérêts des salariés et intervient pour leur compte auprès de l’employeur.

Ce sont les lois du travail qui déterminent leur domaine d’application respectif. En effet, chacun des instruments normatifs composant le droit du travail précise les situations de travail salarié visées. Or, « si amplement et distinctement le salariat puisse-t-il naturellement se présenter »108, il faut techniquement s’en remettre aux différents instruments normatifs composant le droit du travail pour ce qui est de la détermination précise de leur domaine d’application respectif. Ainsi, la notion de salarié peut se trouver partiellement restreinte. Différents exemples, tirés de la législation québécoise, permettent d’illustrer notre propos. Pensons aux travailleuses domestiques, main-d’œuvre largement féminine, lesquelles sont exclues des bénéfices de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en cas d’accident109.

Différentes catégories de salariés sont également explicitement exclues, totalement ou partiellement, du bénéfice de la Loi sur les normes du travail. Ainsi, certaines catégories de gardiens, les étudiants embauchés au cours de l’année scolaire dans un établissement choisi par un établissement d’enseignement et en vertu d’un programme d’initiation au travail

107

CCQ, supra note 6, art 2085.

108

Verge, Trudeau et Vallée, supra note 8 à la p 65.

109

En effet, les résidences privées sont exclues de la définition d’établissement prévue à la LATMP. Sur cette question, voir notamment Frédéric Antoine Tremblay et Guylaine Vallée, « Champ d’application personnel et portée territoriale » dans Katherine Lippel et al, dir, Rapports individuels et collectifs du travail, JurisClasseur, Montréal, LexisNexis, 2012, fasc 2, aux para 26-32.

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approuvé par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport ainsi que les cadres supérieurs sont exclus du bénéfice de la loi110.

Ce n’est que depuis le 1er juin 2003 que la Loi sur les normes du travail et ses règlements n’excluent les travailleurs agricoles du bénéfice de la loi. Les travailleurs agricoles, une main- d’œuvre qui fut historiquement composée de personnes racisées111, sont toutefois exclus de la pleine portée de certaines protections prévues à la Loi sur les normes du travail. Ceux-ci ne sont pas visés par la semaine normale de travail de 40 heures prévue à la LNT112; ils sont donc exclus du calcul des heures supplémentaires aux fins de la majoration de leur salaire habituel113. Ils recevront donc le même taux horaire peu importe le nombre d’heures travaillées. De plus, certains travailleurs agricoles ne bénéficient pas du taux général du salaire minimum114 et, sous réserve du consentement du travailleur agricole, l’employeur peut reporter la période de repos hebdomadaire à la semaine suivante115. Finalement, pour les travailleurs agricoles embauchés sur une base journalière, l’indemnité de congé annuel pourra être payée au même moment que le salaire116.

La définition de salarié du Code du travail prévoit également différentes exclusions. Ainsi, le mot « salarié » s’entend d’une personne qui travaille pour un employeur moyennant rémunération; ce terme exclut toutefois une personne « qui est employée à titre de gérant, surintendant, contremaître ou représentant de l'employeur dans ses relations avec ses salariés » ainsi que différents groupes de fonctionnaires117. De plus, il importe également de signaler que, jusqu’à tout récemment, les travailleurs agricoles étaient exclus de l’application

110

LNT, supra note 7, art 3. Ces salariés peuvent toutefois se prévaloir des dispositions portant sur les absences familiales et parentales et l’interdiction du harcèlement psychologique. LNT, supra note 7, art 3.1.

111

Sur cette question, voir Vic Satzewich, Racism and the Incorporation of Foreign Labour : Farm Labour

Migration to Canada since 1945, Londres, Routledge, 1991.

112

LNT, supra note 7, art 54.

113

Ibid, art 57.

114

Règlement sur les normes du travail, RLRQ c N-1.1, r 3, art 4.1.

115

LNT, supra note 7, art 78. Cette disposition prévoit que tout salarié a droit à une période minimale hebdomadaire de repos de 32 heures consécutives.

116

Ibid, art 75.

117

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du Code du travail s’ils n’étaient pas embauchés par une entreprise ayant à son service ordinairement et continuellement trois salariés118.

S’il existe une pluralité d’exclusions formellement prescrites dans les lois du travail, certains groupes de salariés sont également susceptibles d’être exclus, de facto, des bénéfices de celles-ci. En effet, le rapport salarial dit classique tend de plus en plus à coexister avec différentes autres formes d’emploi : « le marché du travail de l’entreprise se caractérise [de plus en plus] par sa dualité, d’une part, le noyau de personnel permanent [...] et d’autre part, le personnel périphérique appelé au gré de ses besoins fluctuants »119. On qualifie ces emplois d’atypiques, c’est-à-dire en rupture avec la « relation individuelle d’emploi traditionnelle »; les salariés occupant ces emplois peuvent parfois difficilement accéder à l’ensemble des potentialités proposées par le droit du travail. Comme le soulignaient les auteurs du rapport Bernier, les conditions d’accès aux divers régimes de protection issus du droit social et du travail ne sont généralement pas adaptées aux réalités des travailleurs atypiques120. À titre d’exemple, plusieurs protections conférées par la Loi sur les normes du

travail sont tributaires d’une condition liée au service continu des salariés121. Or, compte

tenu du caractère parfois ponctuel ou même épisodique du rapport salarial entre le travailleur atypique et son employeur, cette condition préalable d’exercice, en apparence

118

L’article 21 (5) du Code du travail fut invalidé par la Commission des relations du travail. Travailleuses et

travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, section locale 501 c L'Écuyer, DTE 2010T-295 (CRT) (Requête

en révision judiciaire rejetée, L’Écuyer et Locas c TUAC, local 501, 2013 QCCS 973). Malgré le délai accordé au gouvernement pour modifier le Code du travail, aucune modification ne fut apportée et cette disposition fut effectivement abrogée le 14 mars 2014. Il importe toutefois de souligner que le 13 juin 2014, le gouvernement déposa le Projet de loi 8 intitulé Loi modifiant le Code du travail à l’égard de certains salariés d’exploitations

agricoles. Ce projet de loi prévoit un cadre procédural spécifique en vertu duquel les travailleurs agricoles

saisonniers pourront mettre en œuvre leur liberté d’association en vertu du Code du travail.

119

Verge et Vallée, Un droit du travail?, supra note 9 à la p 20.

120

Jean Bernier, Guylaine Vallée et Carol Jobin, Les besoins de protection sociale des personnes en situation de

travail non traditionnelle, Rapport final du Comité d'experts chargé de se pencher sur les besoins de protection

sociale des personnes vivant une situation de travail non traditionnelle, Gouvernement du Québec, 2003.

121

Cet assujettissement des protections contenues à la Loi sur les normes du travail à une condition de service continu a fait l’objet d’une longue analyse dans le rapport Bernier. Voir ibid aux pp 137-141. À l’instar des experts, nous citerons, à titre de protections liées à une condition de service continu, les vacances annuelles (LNT, supra note 7, art 67 et s), le droit limité à la rémunération de certains congés familiaux (LNT, supra note 7, art 81.1), la protection en cas d’accident ou de maladie (LNT, supra note 7, art 79.1) et le recours à l’encontre d’un congédiement sans cause juste et suffisante (LNT, supra note 7, art 124).

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neutre, peut avoir pour effet d’exclure de facto ces salariés des protections prévues122. Au surplus, il fut également établi que la grande mobilité professionnelle de ces travailleurs rend plus difficile leur organisation collective et la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles123. Ces difficultés d’accès aux mécanismes, recours et protections mis en place par le droit du travail résultent d’une inadéquation structurelle des lois du travail vis-à-vis différentes « nouvelles » formes d’emploi. Ces emplois sont encore aujourd’hui occupés de façon plus importante par certains groupes de travailleurs et de travailleuses qui furent historiquement placés dans l’angle mort du droit du travail124.

Si le droit du travail a notamment pour fonction la régulation de l’économie, son objet principal est de contribuer à redresser l’inégalité du rapport de force entre les salariés et les employeurs. Toutefois, les dispositions du droit du travail parviennent-elles systématiquement à atteindre cet objectif? En plus des exclusions formelles et de facto ci- haut évoquées, « ces dispositions paraissent particulièrement exposées à l’ignorance, au refus d’application dans un espace privé où s’impose souvent le pouvoir sans partage de l’employeur »125. Une démarcation entre le plein effet des potentialités protectrices du droit du travail et le recours à celles-ci par ses destinataires est incidemment susceptible d’être constatée.

122

Bernier et Vallée, « Pluralité », supra note 105 à la p 74.

123

Voir notamment Guylaine Vallée, Pour une meilleure protection des travailleurs vulnérables : des scénarios de

politiques publiques, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques (RCRPP) / Canadian Policy

Research Networks (CPRN), Collection sur les travailleurs vulnérables, no 2, mars 2005 ; Katherine Lippel, « Le travail atypique et la législation en matière de santé et sécurité du travail » (2004) 201 Développements récents en santé et sécurité du travail 307.

124

Sur cette question, voir les résultats de récentes enquêtes menées par la Commission des normes du travail : Commission des normes du travail, Agences de placement de personnel : profil de leurs salariés les plus à

risque d’infractions à la Loi sur les normes du travail, Direction de la recherche, de la prévention et de la qualité,

2013, en ligne : < http://www.cnt.gouv.qc.ca/fileadmin/pdf/enquetes-et- recherches/2013/Rapport_CNT29_octobre_2013_LB.pdf > (consulté le 10 juin 2014). Voir également Commission des normes du travail, Profil des salariés non-syndiqués et assujettis à la Loi sur les normes du

travail, 2011, en ligne : < http://www.cnt.gouv.qc.ca/fileadmin/pdf/enquetes-et-recherches/2010/ENQUETE-

EVALUATION-CERTAINES-DISPOSITIONS-LNT-EDITION2010.pdf > (consulté le 10 juin 2014).

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De façon générale, les travailleurs étrangers temporaires occupant des emplois qui requièrent un niveau réduit de formation sont des « salariés » au sens des lois du travail; ils peuvent donc bénéficier des normes et recours prévus par le droit du travail et ce, nonobstant leur statut migratoire. À l’instar des salariés disposant de la citoyenneté politique ou de la résidence permanente, la portée du droit du travail, à leur égard, est fixée par le champ d’application de chacun des instruments normatifs composant ce corpus régulatoire.

Le caractère atypique de l’emploi des travailleurs étrangers temporaires découle notamment du fait que les conditions en vertu desquelles ceux-ci obtiendront un emploi au Québec sont d’abord surdéterminées par les programmes de migration temporaire. Bien que les salariés disposant de la citoyenneté politique ou de la résidence permanente occupant un emploi aytpique puissent parfois difficilement accéder aux protections prévues aux normes minimales d’emploi, ceux-ci n’auront pas à composer avec le cadre singulier mis en place par les programmes de migration temporaire. Incidemment, il importe d’envisager de façon détaillée les règles gouvernant la mise en œuvre de ces programmes.

II. Les politiques canadiennes de gestion des flux migratoires et la mise en place de programmes de migration temporaire

Les travailleurs étrangers temporaires ne constituent pas un groupe homogène ; les différents programmes-cadres fédéraux de migration temporaire distinguent ces différents groupes de travailleurs en fonction d’une pluralité de critères. D’entrée de jeu, l’analyse de ces programmes permet d’identifier deux grandes sous-catégories, soit les travailleurs qualifiés et ceux occupant des emplois qui requièrent un niveau réduit de formation. Les travailleurs qualifiés occupent généralement des postes de gestion, des emplois professionnels ou des emplois techniques et spécialisés; ces emplois correspondent aux compétences O, A ou B de la Classification nationale des professions126. Les travailleurs qui

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La Classification nationale des professions (ci après « CNP ») est la référence nationalement reconnue des professions au Canada. Elle répartit plus de 30 000 appellations d'emplois en 520 profils de groupes professionnels. En collaboration avec Statistique Canada, la CNP est mise à jour à chaque cycle de recensement

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occupent des emplois qui requièrent un niveau réduit de formation, que l’on qualifie parfois de « travailleurs peu spécialisés », comblent généralement des emplois qui réclament tout au plus un diplôme d'études secondaires ou un maximum de deux ans de formation durant le cours de l'emploi127. Par ailleurs, certains programmes, de nature spécifique, visent certaines catégories de professions ; c’est le cas des programmes s’adressant aux travailleurs agricoles et de celui permettant l’embauche d’aides familiales résidantes. Le constat de l’hétérogénéité des programmes de migration temporaire n’est pas anodin ; les conditions afférentes au recrutement et à l’embauche des travailleurs diffèrent selon le programme en cause.

La mise en place de ces programmes de migration temporaire constitue l’une des facettes des politiques publiques canadiennes en matière d’immigration. Comme l’administration de ces programmes est assurée par les autorités provinciales et fédérales, les règles qui structurent la mise en œuvre de ceux-ci sont énoncées par ces deux paliers de gouvernement. Si ces règles sont de nature législative et réglementaire, elles découlent également de directives administratives émanant des autorités gouvernementales chargées de la mise en œuvre de ces programmes. Il importe d’évoquer les caractéristiques de ces programmes et de situer les acteurs se chargeant de leur mise en œuvre (B). Un survol historique de l’émergence et de l’évolution de ceux-ci permettra d’abord de situer et de contextualiser, des points de vue national et régional, l’émergence des programmes de migration temporaire au Canada (A).