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Nanoparticules métalliques et nanoparticules métalliques encapsulées

Les NPs métalliques actives supportées sur un matériau inerte à grande surface spécifique tel que le carbone, la silice ou divers oxydes métalliques, permettent une utilisation plus efficace de la surface métallique ainsi qu’une séparation plus facile et plus efficace du milieu réactionnel.61 En principe, l'hétérogénéisation de NPs métalliques devrait empêcher les atomes métalliques de surface de s'agréger en masse en raison de leur énergie de surface élevée, ce qui entraînerait une diminution rapide dans le temps de leur activité catalytique intrinsèque et de leur sélectivité.62 Cependant, l’activité catalytique diminue souvent en raison du frittage du métal, du support, ou des deux. Pour les catalyseurs solides obtenus par déposition des NPs métalliques sur le support, le frittage est défini comme l’augmentation irréversible de la taille des particules métalliques et la réduction de la surface active. Ceci a des effets évidents nécessitant des limitations opérationnelles significatives sur les catalyseurs à base de NPs métalliques dans de nombreuses applications où les températures rencontrées sont modérées à élevées. Cependant, le frittage du support réduit la surface totale et le volume de pores, ce qui peut piéger la phase active à l'intérieur de la structure réorganisée.

En conséquence, la plupart de catalyseurs hétérogènes, en particulier les catalyseurs à base de Pd et de Pt, agissent comme des réservoirs de NPs métalliques lixiviées dans le milieu réactionnel où elles catalysent les réactions d’une manière homogène. Toutefois, leur agrégation se produit rapidement en résultant des catalyseurs usés caractérisés par une faible activité résiduelle.63

Des efforts de recherche considérables (et au moins partiellement réussis) ont été consacrés à l’isolement des sites actifs et à la création de systèmes catalytiques hétérogènes plus actifs et plus stables thermiquement avec une grande résistance à la formation de coke et au frittage.64 Des résultats très prometteurs ont été obtenus dans la synthèse de NPs métalliques

colloïdales pré-préparées et stabilisées avec un haut degré de contrôle sur la taille, la forme et la composition, ensuite incorporées ou piégées dans les cages poreuses d’un support solide.65 Par cette voie de synthèse, les NPs métalliques colloïdales sont isolées des parois

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internes du support en minimisant leurs frittages. De plus, la structure poreuse du support permet aux molécules de réactif d’accéder aux sites actifs. La capacité d’isoler des NPs métalliques individuelles a des implications importantes pour l'activité, la sélectivité et la stabilité du catalyseur.66, 67, 68

L’activation des matériaux obtenus est généralement réalisée par calcination pour éliminer le stabilisant. Par exemple, lorsque le CTAB était utilisé pour stabiliser les NPs d’Au, en présence de surfactant, l’activité catalytique du catalyseur diminuait.69 Des résultats

similaires ont été observés pour les NPs de Pd synthétisées dans une microémulsion de di(éthylhexyl)sulfosuccinate de sodium (AOT) et incorporées dans différents supports solides. Les catalyseurs obtenus se sont montrés inactifs dans l’hydrogénation de l’alcool allylique avant la calcination, tandis que les matériaux calcinés présentaient une activité catalytique élevée.70

L’imprégnation est la méthode la plus simple et la plus courante utilisée pour déposer une espèce catalytique telle que les NPs métalliques sur un support solide de silice (SiO2),71

d’alumine (γ-Al2O3, α-Al2O3),72 d’oxyde de magnésium (MgO),73 d’oxyde de titane (TiO2),74 75 ou d’oxyde ferrique (Fe

2O3).76 Cette méthode, réalisée par voie sèche (méthode de dépôt

chimique en phase vapeur) ou par voie humide (les pores du support sont remplies d’une solution aqueuse ou non aqueuse du précurseur métallique, suivie de l’évaporation du solvant) peut être obtenue avec ou sans interaction entre le support et l’espèce métallique (par exemple, échange d’ions). Après séchage, généralement effectué à l’air, en conditions inertes ou sous vide, une température entre 80 et 150 °C, les NPs métalliques sont générées par réduction du précurseur métallique à l’état zéro. L'avantage de cette méthode est la simplicité et la rapidité de réalisation ainsi que la possibilité de déposer une plus grande quantité de métal. Cependant, l’étape de réduction est difficile à contrôler, ce qui entraîne une dispersion inégale des NPs métalliques dans les pores du support solide. Un autre inconvénient est la formation d'oxydes métalliques lors de l'imprégnation, qui peuvent interagir plus fortement avec le support (par exemple avec de l'alumine ou de la silice), ce qui rend la phase de réduction plus difficile.77

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Une autre méthode utilisée pour déposer des NPs métalliques sur un support est la précipitation.78 Cette méthode consiste à précipiter un sel du précurseur métallique sous forme d’hydroxyde ou de carbonate dans les pores et à la surface du support par la variation du pH. Plusieurs paramètres influencent la formation des NPs : l’ajout du support avant ou après l’ajustement du pH de la solution du précurseur, la valeur du pH, la température de la solution et le temps de contact entre le support et la solution de précurseur.

Une alternative à cette méthode est la sequéstration du précurseur de l’éspèce active dans le support par le procédé sol-gel au cours de la synthèse. Le principe du procédé sol-gel implique en une succession de réactions d’hydrolyse-condensation à température modérée afin de préparer un réseau d’oxydes par conversion en solution d’alkoxydes métalliques, tels que des alkoxydes de silicium, de zirconium, d’aluminium ou de titane.79 Le solide résultant,

dopé avec le précurseur d’espèce active est réduit in situ pour générer des NPs métalliques. L’avantage de la méthode réside non seulement dans la simplicité et la rapidité de réalisation, mais également dans la possibilité d’obtenir une phase active uniforme et finement dispersée dans les pores du support solide. Un inconvénient possible de cette méthode est la formation d’espèces métalliques du précurseur lors de la condensation, ce qui nécessite des conditions plus sévères pour obtenir l’espèce active désirée.80

Afin de limiter le frittage des NPs métalliques à des températures plus élevées et d’augmenter la stabilité et la résistance thermique des catalyseurs, une approche intéressante a été développée par Reetz et coll.81La synthèse consiste en l’incorporation de NPs métalliques colloïdales pré-préparées dans le support par un procédé de synthèse de type sol-gel. Ainsi, les NPs métalliques sont piegées individuélement dans la matrice solide en limitant leur agrégation (Figure 1.2). Parmi les catalyseurs développés par Reetz, l’incorporation de NPs monodisperses colloïdales de Pd (2,0-3,5 nm) stabilisées par des ions quaternaires d'ammonium R4NX dans une silice hydrophobe, obtenue à partir des mélanges d’un silane

modifié organiquement CH3Si(OCH3)3 et du diéthoxyde de magnésium Mg(OC2H5)2, s’est

démarquée le plus.82 Afin de conserver le caractère hydrophobe du support, l’activation des NPs métalliques a été réalisée par extraction du stabilisant dans l’éthanol et non par calcination, les NPs métalliques restant piégées dans les pores du support (voir Figure 1.2).

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Figure 1.2 Incorporation des NPs métalliques dans des matériaux sol-gel. Adapté de Reetz.82

De plus, les auteurs ont été en mesure de contrôler le caractère hydrophobe de la matrice en ajustant les quantités relatives de silane CH3Si(OCH3)3 et de Mg(OC2H5)2 dans le gel. Ils ont

également étudié les propriétés catalytiques de ces catalyseurs en testant leur activité catalytique et leur sélectivité dans l'hydrogénation partielle du 1,5-cyclooctadiène. Les résultats obtenus ont montré que les catalyseurs développés se sont révélés plus réactifs que le catalyseur commercial Pd/Al2O3. Leur activité catalytique a augmenté de 50 % et elle

dépend directement du volume des pores et des propriétés hydrophobes de la matrice qui favorise la diffusion de réactifs et de produits de réaction dans les pores.

Une nouvelle approche prometteuse pour l’isolation des NPs métalliques a été la synthèse des matériaux de taille nanométrique de type cœur-coquille « core-shell en anglais » avec la particule métallique encapsulée au centre du support. D'un point de vue structural, ces matériaux avec des noyaux métalliques bien isolés sont souhaitables pour empêcher le frittage des NPs métalliques. La coquille extérieure isole le noyau actif de NPs métalliques et empêche le frittage lors de réactions catalytiques à haute température. Cependant, les

particules sont trop petites et les synthèses sont difficiles et moins adaptables pour une exploitation industrielle.

Ainsi, Somorjai et coll.83 ont rapporté la synthèse d’un catalyseur de taille nanométrique Pt@mSiO2 de type capsule cœur-coquille « core-shell en anglais ». Le catalyseur a été

synthétisé en trois étapes. Dans la première étape, les NPs de Pt ont été préparées en utilisant le bromure de tétradécyltrimethylammonium (TTAB) en tant qu’agent stabilisant et du

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NaBH4 en tant qu’agent réducteur. Ensuite, dans la deuxième étape, les NPs ont été

encapsulées par polymérisation de TEOS dans un milieu basique. Dans la troisième étape, le TTAB a été éliminé par calcination, libérant les mésopores du support. Le catalyseur Pt@mSiO2 obtenu, consiste en un noyau de Pt de forme nanocubique de 14 nm entouré d’une

couche de silice mésoporeuse de 2-3 nm et d’une épaisseur de 17 nm. La présence de mésopores permet l’accès direct des molécules de réactif au noyau de Pt et la diffusion des molécules du produit final vers l’extérieur (Figure 1.3).

Figure 1.3 Représentation schématique de la synthèse de NPs de Pt encapsulées Pt@mSiO2.

Adapté de Somorjai.83

Les essais d’hydrogénation catalytiques d’éthylène à 25 °C ont montré que le catalyseur Pt@mSiO2 avait une activité catalytique pouvant atteindre un TOF de 6,9 s-1, similaire à celle

du cristal unic de Pt et du catalyseur à base de NPs coloidalles sur SBA-15, mais d’un ordre de grandeur supérieur à celui du catalyseur hétérogène Pt@CoO de type jeune d’oeuf « yolk- shelles en anglais ». Cependant, le catalyseur était moins actif que le catalyseur traditionnel à base de Pt, synthétisé à partir de NPs de Pt déposées par une voie plus standard sur la silice, Pt/SiO2, qui a démontré une activité catalytique pouvant atteindre un TOF de 17,5 s-1 dans la

même réaction. La stabilité du catalyseur cœur-coquille Pt@mSiO2 à haute température a été

étudiée en chauffant l'échantillon à 550 °C et à 750 °C en présence d’air. Après calcination à 550 °C, la morphologie cœur-coquille et la taille des NPs de Pt ont été préservées. Plus important encore, la taille et la nature cristalline des NPs de Pt encapsulées ont été conservées après que la réaction d’oxydation du CO en CO2 ait été réalisée à 240-340 °C. La stabilité

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thermique élevée, favorisée par la coquille mésoporeuse de silice qui encapsule et protège les NPs de Pt, suggère que les NPs métalliques encapsulées represente un excellent système pour les réactions catalytiques ou les procédés chimiques de surface qui ont lieu à des températures élevées.83

Au cours de la même période, Park et coll. ont rapporté une approche similaire pour la préparation de NPs de Pd encapsulées dans le cœur des particules de taille nanométrique de silice. Ainsi, le catalyseur Pd@SiO2, synthétisé par encapsulation des NPs de Pd colloïdales

pré-préparées de 4,2 nm dans une coquille de silice de 10 nm d’épaisseur a montré une résistance remarquable au frittage après calcination.14 Ainsi, après calcination à 700 °C pendant 6 h la surface BET du cataltseur Pd@SiO2 a diminué d’environ 20 % et celle du

catalyseur traditionnel obtenu à partir de NPs de Pd déposées par imprégnation sur silice (Pd/SiO2) a diminué de plus de 50 %. La validité de cette approche a également été démontrée

en comparant leurs performances catalytiques en oxydant du CO en CO2. Le catalyseur

Pd/SiO2 était plus actif à basse température (conversion quantitative à 150 °C) que le

catalyseur Pd@SiO2 (conversion quantitative à 200 °C). Cependant, après une calcination à

700 °C pendant 6 h en présence d’air, le Pd@SiO2 a conservé son activité alors que le

catalyseur Pd/SiO2 présentait un décalage significatif vers une température d'atténuation

beaucoup plus élevée de 220 °C pour une conversion quantitative en CO2. Ces résultas

concordent avec l’augmentation de la stabilité au frittage à haute température du catalyseur Pd@SiO2 avec les NPs de Pd emprisonnées dans le cœur des capsules de silice.84

Li et coll. ont également rapporté la synthèse d’un catalyseur au Pd de type core-shelle, Pd@SiO2. Des particules de taille comprise entre 100 et 150 nm ont été obtenues en

appliquant de la silice sur la surface des NPs colloïdales de Pd stabilisées avec de lapoly(vinyl)pyrrolidone (PVP) d’environ 4 nm. Le catalyseur a montré une performance catalytique élevée dans l’hydrogénation catalytique du 4-carboxybenzaldehyde en acide 4- méthylebenzoïque. Le rendement maximum en acide 4-méthylebenzoïque (environ 99 %) a été atteint entre 160 et 175 °C, ce qui était bien inférieur à la température de 250-270 °C utilisée dans le procédé industriel avec le catalyseur Pd/C.85

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Contrairement aux cas précédents dans lesquels des NPs métalliques sont encapsulées au centre d’une particule de silice de taille nanométrique, Alivisatos et coll. (2004) ont rapporté la synthèse du catalyseur Pt@CoO, où la NPs de Pt, telle qu’un jaune d’œuf, est placée quelque part dans la coque du matériau inorganique, un matériau de type « yolk-shelles en anglais ».86 La synthèse de Pt@CoO a été réalisée par un processus en trois étapes. La synthèse de particules colloïdales de Pt d’environ 3 nm a été réalisée en modifiant le procédé "polyol" suivi par l'injection et la décomposition de Co2(CO)8 pour former Pt@Co.

L’oxydation de ce dernier en solution à une température de 182 °C a transformé le Co en CoO « creux » sans affecter la stabilité de la NPs de Pt située à l’intérieur. Le catalyseur Pt@CoO obtenu, des NPs d’environ 20 nm, a été testé dans la réaction d’hydrogénation de l'éthylène. À 25 °C, ce catalyseur s’est avéré moins actif que les catalyseurs classiques à base de NPs de Pt sur silice (Pd/SiO2) et moins actif que le catalyseur Pt@mSiO2 de type core-

shelle devéloppé par Somorjai.83

Dans les cas précédents, une seule nanoparticule métallique est supposée être encapsulée dans une coquille. Ce type de système minimise l’agglomération des NPs métalliques, mais limite malheureusement la charge en métal du catalyseur. Au cours de la même période, Yin et coll. ont rapporté une synthèse qui a permis la multiplication des cœurs dans une coquille. La synthèse consiste en une adsorption contrôlée de NPs métalliques (par exemple Au0 ou Pd0) stabilisées à la surface de particules colloïdales de SiO2 fonctionnalisées avec 3-

aminiopropyltriéthoxysilane. Les NPs métalliques immobilisées en surface ont ensuite été recouvertes d’une autre couche de SiO2, dont l’épaisseur a été déterminée afin de fixer les

NPs métalliques à la surface du support initial. Cette étape implique la pré-adsorption de particules de SiO2 en présence d’un polymère, suivie de la dissolution de la silice dans un

milieu basique pour créer de la porosité et permettre l’accès aux NPs métalliques. Selon les auteurs, ce type de synthèse permet d’ajouter une plus grande quantité de métal par masse de support. Cependant, la synthèse est difficile et peu adaptable à une exploitation industrielle.87

Une autre approche intéressante a été développée par Béland et coll. pour isoler et augmenter la stabilité des NPs métalliques. La méthode de synthèse est comparable aux voies biocompatibles pour la séquestration d'enzymes dans des matériaux à base de silice dans des

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conditions douces. Elle consiste en un procédé de polymérisation de type sol-gel in-situ réalisé dans des conditions douces, qui commence par une évaporation contrôlée de l'alcool libéré après l’hydrolyse du silane ORMOSIL, suivie d’une condensation. Le prépolymère obtenu, dopé avec la solution du sel du métal (M2+), subit une polycondensation supplémentaire en milieu basique. Le matériau mésoporeux obtenu après une mise en forme est réduit en solution avec du triacétoxyborohydrure de sodium (Na(AcO)3BH) ou du

borohydrure de sodium (NaBH4) pour obtenir un xérogel dopé avec des NPs de M0 de

morphologie irrégulière. Par cette méthode, la fonction catalytique est intégrée de manière homogène à la structure accessible d'un xérogel 100 % hybride, caractérisé par des surfaces spécifiques supérieures à 500 m2g-1 et des volumes poreux supérieurs à 1,0 ml g-1.15 Particulièrement, les catalyseurs à base de NPs de Pd/Pt sur un support hydrophobe modifié organiquement, développés par cette méthode, se distinguaient par une activité élevée dans des conditions douces. Par exemple, le catalyseur au Pd a été étudié dans l’hydrogénation d’oléfines à température ambiante (22 °C) et à 1 atm H2. Des conversions supérieures à

90 % ont été obtenues pour des teneurs en Pd par rapport à l’oléfine de 0,01 mol % après 0,5- 1,0 h de temps de réaction.17

Un progrès remarquable dans la synthèse de systèmes catalytiques hétérogènes a récemment été réalisé par Beller et coll.88 Ils ont rapporté la synthèse d’un catalyseur hétérogène d'Al2O3

de type nanorodes décoré avec du Pt à l’état atomique (SAC, single-atom catalyst). Les auteurs ont montré que, lors de la conception d’un tel catalyseur, le choix du support était crucial car il permettait la création de sites métalliques à la surface et empêchait la formation de NPs métalliques. Le nouveau produit Pt/NR-Al2O3-IP a catalysé sélectivement

l'hydrosilylation d’une large gamme de substrats avec une activité catalytique qui peut atteindre un TON de 105. Cependant, les essais catalytiques ont été réalisés dans un autoclave sous atmosphère innerte à une pression de 10 atm et à des températures de 100-120 °C.

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1.3 Nanoparticules métalliques et leurs applications en chimie

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