• Aucun résultat trouvé

A NALYSE DES FREINS ET DE LEUR PERCEPTION PAR LES ACTEURS

Dans le document ÉTUDE SUR LE RÉEMPLOI DES EEE MÉNAGERS (Page 100-104)

D EPOT - VENTE

R EVENTE ET DONS Les bénéficiaires / acheteurs

II.3. ANALYSE TRANSVERSALE

II.3.3. A NALYSE DES FREINS ET DE LEUR PERCEPTION PAR LES ACTEURS

II.3.3.1 FREINS REGLEMENTAIRES

Le cadre réglementaire s’appliquant à la filière de réemploi et réutilisation des EEE ménagers et assimilés est rappelé en I.2.1.

Les entretiens réalisées avec les acteurs de la filière, qu’ils soient parties prenantes de l’activité ou qu’ils aient un rôle de suivi ou législateur, ont permis d’identifier de fortes insatisfactions en relation avec le cadre réglementaire ainsi qu’une vision hétérogène des freins. Cela s’explique par des intérêts parfois divergents d’acteurs en concurrence mais aussi par un manque de clarté de certaines réglementations en raison de la visibilité relativement récente de la filière de réemploi et de réutilisation.

Le Tableau 17 synthétise les principaux freins identifiés et indique quels acteurs les partagent. Les principaux freins réglementaires sont ensuite décrits et analysés.

Tableau 17 : Synthèse des principaux freins aux développements du réemploi des EEE Volet

réglementaire Frein Description courte Type d’acteurs

ayant relevé un frein

Certains acteurs déplorent un manque de contrôle aux frontières et le risque que des DEEE se cachent dans les envois d’EEE à l’export.

La réglementation bloque les envois de DEEE en bon état (« Ready to Repair ») à réparer dans des pays à bas coût, leur rapatriement dans des centres de remise

Intermédiaires /

Vente ou don à un proche (sans intermédiaire)

Vente via un intermédiaire (hors sites web de mise en relation) Vente via site web de mise en relation

Vente ou don via un acteur de l'ESS

Don/vente entreprise aux particuliers et associations

Volet

réglementaire Frein Description courte Type d’acteurs

ayant relevé un frein produits en état et la revente de certains produits considérés

comme des déchets. quasi-monopole et c’est une lourdeur administrative supplémentaire pour les entreprises de contractualiser avec un éco-organisme.

L’augmentation progressive des objectifs de taux de collecte provoque une mise en concurrence des éco-organismes avec les intermédiaires : certains acteurs du réemploi perdent des gisements désormais captés par les éco-organismes qui cherchent à augmenter leur collecte.

La filière REP DEEE ménagers privilégie un nombre restreint d’acteurs du réemploi.

Reconditionneur ou réparateur de l’ESS

Inclusion assimilé dans ménager

L’inclusion des assimilés dans le ménager amènent les constructeurs à regretter l’importance significative des éco-organismes et la concurrence. Certains acteurs sur l’assimilé n’ont ainsi pas pu conserver leurs activités de réemploi.

Constructeurs

Statuts de déchet vs. produit

Manque de cadre

Le cadre juridique et fiscal des statuts mais aussi de la sortie du statut de déchet n’est pas suffisamment clair notamment pour garantir une homogénéité des pratiques entre les acteurs et le respect des réglementations sur les échanges transfrontaliers.

Tous

ICPE

Les structures collectant une majorité de déchets (cas de la réutilisation) sont soumises à la réglementation ICPE qui représente des lourdeurs et un coût administratif.

Les subventions à destination de l’ESS sont perçues par certains acteurs comme une distorsion de concurrence. A l’inverse, certains acteurs relèvent le très faible financement de l’ESS par les éco-organismes.

Certains acteurs souhaitent relever d’intérêt général et estiment que l’ESS regroupe des structures qui n’ont pas le même niveau d’engagement social.

Reconditionneurs ou

Des exigences de traçabilité compliquées et de qualité trop lourdes peuvent poser des difficultés aux

reconditionneurs/réparateurs de l’ESS de petite taille.

Reconditionneurs ou réparateurs de l’ESS

Non-respect des process de qualité

Les acteurs de l’économie traditionnelle et de l’ESS décrient respectivement le manque de

professionnalisation et de contrôle des processus de réemploi.

Tous

Echanges transfrontaliers de produits et déchets

Alors que certains acteurs décrient les exports illégaux de déchets sous couvert de produits, les reconditionneurs/réparateurs de l’économie traditionnelle et les intermédiaires décrient les conditions trop lourdes freinant leur activité.

En effet certains de ces acteurs réalisent leur activité entre différents pays d’Europe et sont donc fortement concernés par ces réglementations :

 Ils envoient dans des pays à bas coûts, principalement dans les pays de l’Europe de l’Est, des produits « Ready to Repair » qui sont en suffisamment bon état pour être réparés mais ne remplissent pas les critères suffisants pour passer la frontière sous couvert de produits (ex : téléphone dont l’écran ne s’allume pas). La réparation en France n’est pas rentable, sur un marché de plus en plus concurrentiel.

 Les produits en fin d’usage des clients européens sont parfois rapatriés dans leurs centres de remise en état dans d’autres pays dont la France ce que la réglementation freine.

 Certains produits sont revendus à l’étranger en Europe. Les équipements doivent être complets et donc par exemple une unité centrale doit être accompagnée d’un écran, clavier et souris. Or envoyer un clavier Azerty pour revente dans un pays où le clavier est différent est une perte d’argent.

La directive européenne (cf. I.2.1. comporte des mesures d’exemptions pour les constructeurs permettant à ces flux de profiter d’un réemploi en dehors des frontières. Ces mesures sont décriées par les intermédiaires et reconditionneurs ou réparateurs comme une concurrence déloyale.

Toutefois, une partie importante des flux réemployés pourraient cacher des DEEE vendus à l’export pour des raisons économiques avec des conséquences désastreuses sur l’environnement, les normes de dépollution dans ces pays étant généralement faibles voire inexistantes. En effet, il est avéré que des conteneurs entiers de DEEE partent en Afrique et en Asie55, ou passent simplement la frontière espagnole ou italienne, sans que les acteurs soient connus et les flux quantifiables. La crainte ce certains acteurs est que ces déchets se cachent dans des envois de produits à réparer en Europe ou de produits vendus en Europe et en Afrique, qui représentent des quantités importantes dont le suivi est à l’heure actuel insuffisant.

L’export est donc un sujet sensible pourtant dans une logique de réduction globale de l’empreinte environnementale des DEEE, l’export fait sens dans la mesure où le marché national pour les biens d’occasion est limité pour des raisons notamment culturelles et d’appétences pour les produits neufs.

La filière REP DEEE ménagers

Le décret « déchets de bureau « 5 flux » (cf. I.2.1. ) oblige les producteurs de déchets à traiter leurs déchets dans le cadre de la filière REP. Cette situation est décriée comme quasi-monopolistique par les acteurs de la filière de réutilisation des DEEE puisque les éco-organismes ont la possibilité de contractualiser avec les recycleurs qu’ils sélectionnent. Selon les intermédiaires, rien ne prouve que les éco-organismes continueront à travailler avec eux, bien que leurs process de remise en état soient conformes avec la réglementation, en raison de stratégies de massification pour réduire les coûts de collecte.

Par ailleurs, certains constructeurs et distributeurs estiment que cette obligation représente une lourdeur administrative pour les entreprises qui doivent contractualiser avec un éco-organisme alors qu’elles travaillent déjà avec des recycleurs fiables et audités, notamment des entreprises de l’ESS. Ceux-ci, bien qu’ils aient un coût sont plus flexibles et ont une approche multi-flux.

Toutefois cette réglementation permet aux institutions publiques d’avoir une vision globale de la filière, notamment des dérives potentielles. Par ailleurs, les éco-organismes peuvent ainsi optimiser la gestion des déchets en massifiant avec un opérateur de gestion.

L’augmentation progressive des objectifs de taux de collecte provoque selon certains acteurs une mise en concurrence des éco-organismes avec les intermédiaires car les premiers cherchent à augmenter leurs flux de collecte en captant des gisements captés par les intermédiaires.

L’UNEA déplore que la filière REP DEEE ménagers privilégie un nombre restreint d’acteurs du réemploi au détriment d’acteurs historiquement présents sur l’activité de réemploi et notamment des entreprises adaptées qui ont vu leurs flux de collecte se tarir.

L’inclusion des assimilés dans le ménager amènent les constructeurs à regretter la mainmise des éco-organismes et la concurrence d’autant plus qu’un adhérent du SIFB nous signale ne plus réemployer les équipements ménagers couverts par un éco-organisme, en raison du double coût que cela représenterait,

55 http://www.journaldelenvironnement.net/article/les-milliards-du-trafic-de-dechets-electroniques,58570

alors que le système individuel en B2B permet de conserver les activités de réemploi. Certains acteurs estiment que des modèles économiques avaient été trouvés par les acteurs qui permettaient des taux de réemploi et réutilisation importants qui se réduisent avec l’obligation de passer par les éco-organismes.

Plusieurs acteurs interrogés militent donc pour la mise en place d’un objectif de taux de réemploi et réutilisation ou de taux différenciés afin d’améliorer le suivi de ces flux et de s’assurer qu’ils augmentent.

Statuts de déchet vs. produit

Le cadre juridique et fiscal des statuts de produits et déchets manque de clarté ce qu’ont révélé les entretiens avec les acteurs interrogés puisque ces notions sont comprises différemment par chacun des acteurs. Leur interprétation des définitions du code de l’environnement (c. I.1. varie puisque pour certains c’est le mode d’approvisionnement qui prime, alors que pour d’autres c’est le fait que les biens soient réparés qui en font des déchets. La première interprétation semble coller à la définition, qui ne précise toutefois par les modes d’approvisionnement, alors que la seconde est liée à la pratique qui veut que des déchets soient en mauvaise état donc nécessitent d’être réparés. Le Ministère de l’Environnement confirme quant à lui que la distinction entre un produit et un déchet lors de la collecte résulte de la connaissance qu’a le détenteur de l’utilisation du produit dont il se sépare : s’il est sûr qu’il va être réemployé alors c’est un produit, sinon c’est un déchet (ex : bornes apports volontaires). Le fait qu’il y ait un achat n’a pas d’impact sur le statut puisqu’il est aussi possible d’acheter des déchets.

Le flou ressenti par les acteurs a pour conséquence une hétérogénéité des pratiques et donc des réglementations respectées par chacun :

 Echanges transfrontaliers : certains acteurs estiment que les questions posées dans les boutiques des opérateurs lors de la reprise ne permettent pas forcement de déterminer si les téléphones sont des produits ou déchets mais que toutefois les téléphones déclarés comme produits sont ensuite traités comme tels en particulier lors des échanges transfrontaliers par les brokers. Toutefois, les lignes directrices DEEE établies par les correspondants du Règlement européen au sein des pays membres établissent un « faisceau d’indices » permettant de déterminer s’il s’agit d’un DEEE (déchet) ou d’un EEE (produit d’occasion) lors d’échanges transfrontaliers ;

 Fiscalité : la fiscalité qui s’applique aux produits est différente de celle s’appliquant aux déchets, et le flou perçu freine ainsi certains acteurs qui souhaiteraient se lancer dans une activité de réemploi.

 Réglementation ICPE : certains acteurs sont soumis à la réglementation ICPE sur la base d’une interprétation de la définition alors des acteurs similaires ne le sont pas.

Les structures collectant une majorité de déchets, que ce soit ENVIE ERG ou certaines recycleries ayant mis en place un atelier, sont soumises à la réglementation ICPE qui représente des lourdeurs et un coût administratif important. Des travaux d’allégement de la réglementation sont toutefois en cours.

La sortie du statut de déchet fait débat au sein de la filière, notamment suite à l’évocation de la possibilité d’imposer une éco-contribution sur les produits d’occasion, mais aussi pour des raisons de fiscalité évoquées ci-dessus et d’image lors de la revente. La sortie du statut de déchet dépend des réglementations européennes et nationales et des demandes faites par les acteurs. Un arrêté de sortie du statut de déchets (emballages, VHU, textile, pneumatique, DEEE, etc…) est en cours d’élaboration en France et fixe les conditions de préparation à la réutilisation qui permettrait la sortie du statut de déchet des déchets remis en état. Les déchets sortis du statut de déchet selon les termes de l'article L 541-4-3 du code de l’environnement ne relèvent plus du statut juridique de déchets, dès lors que le détenteur suivant en a pris possession.

Fiscalité

Les subventions à destination de l’ESS sont perçues par certains acteurs comme une distorsion de concurrence. Le rôle de l’ESS et son droit aux subventions n’est pas remis en cause mais la distorsion est jugée trop importante d’autant plus que certains flux, tels que ceux en provenance des distributeurs sur l’électroménager, leurs sont réservés en grande partie. Les ventes de produits neufs des distributeurs sont de plus en plus concurrencées par les structures de l’ESS qui commercialisent à très bas coûts des produits d’occasion reconditionnés grâce aux subventions reçues.

Par ailleurs, les réparateurs professionnels, pour beaucoup en situation de récession économique, pourraient souffrir de la concurrence déséquilibrée des acteurs de l’ESS si ceux-ci avaient un accès gratuit aux pièces détachées, alors qu’ils se positionnent également sur la réparation sans changement de propriétaire et sont subventionnés.

A l’inverse, certains acteurs relèvent le très faible financement de l’ESS par les éco-organismes en comparaison avec leur budget, alors que leur cahier des charges spécifie le rôle d’accompagnement et de priorisation des reconditionneurs/réparateurs de l’ESS (cf. I.2.1. ).

Le débat dépasse la séparation entre l’ESS et l’économie traditionnelle en réalité car, au sein même de l’ESS, certains acteurs souhaitent relever d’intérêt général et estiment que l’ESS regroupe des structures, depuis la loi ESS, qui n’ont pas le même niveau d’engagement social. Ainsi, elles sont traitées à égalité en matière de fiscalité ce qui pénalise les plus engagées.

Qualité des process de remise en état

Les travaux en cours d’élaboration d’une norme de préparation à la réutilisation (« norme CENELEC ») sont perçus par les acteurs comme l’occasion d’homogénéiser les pratiques et d’apporter un gain de confiance à chaque partie prenante (constructeurs, consommateurs, instituions publiques). Toutefois, les acteurs craignent qu’une application trop contraignante de la norme ne laisse pas le temps aux acteurs de petite taille de s’adapter.

La norme appliquée lors de la remise en vente d’un produit ne devra pas être plus contraignante que celle appliquée lors de la mise sur le marché, qui au sein de l’UE requiert notamment que le constructeur doit apporter la preuve qu’il a vérifié toutes les normes de sécurité (marquage CE).

Les acteurs de l’économie traditionnelle et de l’ESS décrient respectivement le manque de professionnalisation et de contrôle de l’activité de réemploi :

 Les premiers relèvent que le processus de remise en état n’est pas suffisamment conforme aux attentes des constructeurs mais aussi à la réglementation, notamment au respect des licences d’exploitations installées ;

 Les seconds décrient le manque de traçabilité des flux dont une partie pourrait circuler sans respecter les règles des échanges transfrontaliers.

II.3.3.2 FREINS ORGANISATIONNELS ET ECONOMIQUES

LES FREINS ORGANISATIONNELS ET ECONOMIQUES LIES A LA FILIERE REP DEEE

Dans le document ÉTUDE SUR LE RÉEMPLOI DES EEE MÉNAGERS (Page 100-104)