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Chapitre 1 : Caractérisation d’ADCs par MS native haute résolution

3. Résultats

3.1. Cas du brentuximab vedotin

3.1.3. MS native haute résolution : les optimisations

Si les méthodes d’analyses sur le Q-TOF étaient déjà bien optimisées, ce n’était pas le cas sur l’Orbitrap. Les optimisations instrumentales réalisées sur l’Exactive Plus EMR vont ici être développées avant de réaliser la comparaison Q-TOF vs. Orbitrap.

Les influences du choix de la résolution sur les mesures de masse, de l’énergie CID et la pression de la cellule HCD sur les profils de distributions Dn et sur le DAR moyen, seront ici discutées.

3.1.3.1.Influence de la résolution nominale de l’analyseur Orbitrap

Comme décrit dans le paragraphe précédent, il est possible de choisir la résolution nominale de l’instrument. Nous avons ici évalué trois résolutions et vérifier l’impact de ce paramètre sur la précision de mesure de masse (figure 15). Nous pouvons voir que si le profil au niveau du spectre de masse reste sensiblement le même, les résolutions effectives sont nettement améliorées (zooms figures 15). Cette augmentation de résolution effective, s’accompagne d’une meilleure précision de masse. En passant de 8750 à 17500, puis à 35000 de résolution, les erreurs moyennes sur les mesures de masses évoluent favorablement de 230 ppm à 110 ppm, puis à 36 ppm. Ainsi, pour la suite de nos analyses, c’est la valeur 35000 en résolution nominale qui sera retenue.

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Figure 15. Comparaison des spectres de masses natifs du brentuximab vedotin obtenu sur l’Orbitrap en utilisant une résolution nominale de 8750 (a), 17500 (b) et 35000 (c). Les échantillons sont infusés à 10 µM (AcONH4 150 mM, pH 7.5) sur l’Exactive Plus EMR (CID : 75 eV, CE : 0 eV, injection-inter-bent flatapôles : 8-7-6 V, PUHV : 1,1.10-9 mbar). Les tableaux présentent les masses expérimentales des différents Dn avec les erreurs de masses en Dalton et ppm par rapport aux masses théoriques.

3.1.3.2.Influence de l’énergie de collision en source (CID)

Si le choix de la résolution nominale de l’instrument est important pour la détermination de masses précises, les optimisations des énergies de collisions CID et CE sont aussi

149 primordiales pour la détermination des profils Dn et du DAR moyen. Ceci est particulièrement marqué pour le brentuximab vedotin (figure 16).

Figure 16. Influence de l’énergie de collision CID sur le profil de distribution Dn et le DAR moyen Les échantillons sont infusés à 10 µM (AcONH4 150 mM, pH 7.5) sur l’Exactive Plus EMR (CE : 0 eV, injection-inter-bent flatapôles : 8-7-6 V, PUHV : 1,1.10-9 mbar, Rnom : 35000) avec une énergie de collision CID de 75 eV (a) ou 140 eV (b). Les spectres de masses sont présentés en partie gauche, les spectres déconvolués associés sur la partie de droite. dg. = drogue.

Ainsi avec une énergie de collision en source (CID) de 75 eV l’ensemble des espèces sont observées sur le spectre de masse. Le profil de distribution Dn et le DAR moyen sont déterminés, et sont accord avec la littérature [55]. Avec l’augmentation de l’énergie de collision CID à 140 eV, nous remarquons l’apparition d’espèces de plus basses masses entre 4000 et 5000 m/z correspondant à des demi-ADCs couplés à 2 et 4 drogues. Cette valeur d’énergie ne permet pas ici de maintenir l’ensemble des espèces non covalentes au sein du spectromètre de masse. Cette dissociation induit notamment des modifications au niveau des profils de distributions Dn et du DAR moyen (figure 16, partie droite). En effet, nous constatons une diminution des espèces D4, D6 et D8 respectivement de 2.7, 4.7 et 3.1%. Cette diminution se fait au profit des espèces D0 et D2, pour qui nous remarquons une augmentation respective de 1.7 et 8.8%. Ces variations de distributions Dn influent aussi sur

150 la détermination du DAR moyen, qui dans ce deuxième cas est sous-estimé (3.5), et n’est plus en accord avec ce qui est attendu. Cette illustration montre bien ici l’importance de l’optimisation de ces paramètres, et notamment dans le cas d’un mélange de composés covalents et non covalents.

3.1.3.3.Influence de la pression au niveau de la cellule HCD

Un autre paramètre à optimiser de manière à conserver l’intégrité des complexes en phase gazeuse, est la pression de la cellule HCD. S’il n’est pas possible de déterminer une valeur de pression absolue, nous pouvons moduler une valeur arbitraire y étant rattachée. Ainsi nous pouvons voir l’influence de cette variable en figure 17.

Figure 17. Influence de la pression de la cellule HCD sur le profil de distribution Dn et le DAR moyen Les échantillons sont infusés à 10 µM (AcONH4 150 mM, pH 7.5) sur l’Exactive Plus EMR (CID : 75eV, CE : 0 eV, injection-inter-bent flatapôles : 8-7-6 V, Rnom : 35000) avec une pression arbitraire en cellule HCD de 7 (a) ou 3 (b). Les spectres de masses sont présentés en partie gauche, les spectres déconvolués associés sur la partie de droite. dg. = drogue.

Nous pouvons constater ici la présence de demi-ADC pour une valeur de pression de 3, ce qui n’est pas le cas pour une pression de 7. Pour une valeur de vide plus poussée (donc ici 3), le

151 libre parcours des ions devient plus important, ainsi ces derniers accumulant une plus grande énergie cinétique, les chocs avec les molécules de gaz du milieu deviennent plus énergétiques, et entrainent la dissociation d’une partie des espèces non covalentes. Ceci se traduit notamment au niveau des profils de distributions Dn, pour lesquels nous pouvons noter la baisse des espèces D4, D6 et D8, qui diminuent respectivement de 2.1, 4.4 et 1.7. La réduction du taux des espèces se fait notamment au profit de l’espèce D2, qui augmente de 7.3%.

3.1.3.4.Evaluation du logiciel de retraitement associé à l’Exactive Plus EMR : « Protein Deconvolution 3.0® » (PD 3.0)

Les analyses réalisées sur l’Exactive Plus EMR sont retraitées à l’aide du logiciel PD 3.0, de manière à déterminer les masses des analytes et générer les spectres déconvolués associés. Pour une utilisation optimale de ce logiciel, nous avons noté trois paramètres essentiels à optimiser :

- La gamme m/z sur laquelle la déconvolution va être réalisée - La masse ciblée

- La tolérance de masse

- Dans un premier temps nous avons évalué l’impact de la gamme de m/z paramétrée,

associé à la valeur de masse ciblée. A titre d’exemple nous avons réalisé une

comparaison de ces variables à l’aide du spectre de masse présenté en amont (influence du CID), présentant des espèces hétérogènes en masses (demi-ADCs et ADCs entiers) (figure 18). En effet nous pouvons remarquer deux distributions, une entre 4000 et 5000 m/z et l’autre entre 5300 et 7000 m/z. Dès lors, les paramètres de déconvolution sont cruciaux pour la caractérisation de toutes les espèces présentes sur le spectre de masse. Si la gamme m/z établie est corrélée avec une masse cible adéquate, la déconvolution associée permet une caractérisation des espèces de qualité. C’est le cas pour le panel b et d, où les paramètres de déconvolutions sont bien centrés respectivement sur des espèces faisant référence à l’ADC entier et au demi-ADC. En revanche si la gamme m/z utilisée est conséquente, il est possible de passer au travers d’espèces si la masse ciblée est trop éloignée (figure 18 d et e). Dans notre cas, si la masse cible est de 150000 Da, les espèces faisant référence au demi-ADC ne sont pas observées.

152 Ceci montre l’importance d’optimiser ces paramètres, et de travailler avec plusieurs méthodes de retraitement selon la dispersion des profils multichargés sur le spectre de masse.

Figure 18. Evaluation de l’influence des paramètres de gamme de m/z et de masse cible sur la génération du spectre déconvolué. A titre d’exemple nous présentons ici les résultats de l’infusion du brentuximab vedotin à 10 µM (AcONH4 150 mM, pH 7.5) sur l’Exactive Plus EMR (CID : 75eV, CE : 0 eV, injection-inter-bent flatapôles : 8-7-6 V, PHCD : 7, Rnom : 35000). Le spectre de masse est présenté en partie haute (a) alors que les spectres déconvolués selon différents paramètres sont présentés sur les panels (b) à (e).

- Dans un deuxième temps, nous avons évalué l’influence du paramètre « tolérance de

masse » sur la détermination des masses de toutes les espèces Dn, ainsi que sur leur

153 (cf. figure 17a) a été soumis à deux retraitements, avec des valeurs respectives de tolérance de masse de 5 et 25 ppm (tableau 3). Ce paramètre de tolérance de masse fait référence à la déviation acceptable pour un état de charge donné, et non pas sur la masse moyenne.

Tableau 3. Evaluation du paramètre tolérance de masse sur la détermination de la masse et du profil de distribution.

Nous pouvons observer ici que la détermination des masses des espèces Dn est plus précise avec un paramétrage stringent. Toutefois, avec une tolérance stricte, la quantification des espèces Dn n’est pas optimale. En effet, certains ions ne sont plus comptabilisés pour la construction du spectre déconvolués, et certaines populations sont alors mal estimées. Ceci est notamment le cas du D0 qui est surestimé pour une valeur de tolérance de 5 ppm. La valeur du DAR moyen s’en trouve aussi influencée, puisqu’elle devient légèrement sous-estimée dans ce cas à 3.8.

Ainsi, pour le retraitement de nos analyses, nous avons procédé systématiquement à un double retraitement : un premier avec une tolérance plus élevée pour la détermination des profils Dn, et un deuxième plus stringent pour la détermination de masse la plus précise possible.

3.1.3.5.Evaluation de la méthode de calcul du DAR moyen et des distributions Dn

Avec les interrogations du logiciel de déconvolution soulevées dans le paragraphe précédent, nous avons souhaité évaluer l’impact de la méthode de calcul sur le DAR moyen et la distribution Dn. Les méthodes de calculs possibles, sont basées soit sur les intensités des espèces du spectre déconvolué, soit sur les intensités de chaque état de charge pour chaque espèce observée sur le spectre de masse. De manière à répondre à cette question nous avons aussi voulu vérifier la reproductibilité des résultats générés de manière à être représentatif. Ainsi nous avons infusé à plusieurs reprises un échantillon déglycosylé de brentuximab vedotin et avons calculé les profils Dn et DAR moyen pour chaque réplicat (figure 19).

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Figure 19.Evaluation de la reproductibilité des analyses et de la méthode de calcul sur le profil de distribution Dn et le DAR moyen Les échantillons sont infusés à 10 µM (AcONH4 150 mM, pH 7.5) sur l’Exactive Plus EMR (CID : 75eV, CE : 0 eV, injection-inter-bent flatapôles : 8-7-6 V, PHCD : 7, Rnom : 35000). Les spectres de masses sont présentés en partie gauche ; les tableaux présentent les profils Dn et DAR moyen pour chaque réplicat, selon un calcul basé sur le spectre déconvolué (PD 3.0) ou à partir des intensités relevées sur le spectre de masse (Spectre de masse).

Ces analyses permettent ici de montrer la grande similarité au niveau de l’évaluation des profils Dn et du DAR moyen, entre la méthode basée sur l’intensité des spectres déconvolués et celle basée sur l’intensité des espèces observées sur le spectre de masse. En effet nous

155 pouvons noter une différence maximale de 1.9% pour un Dn donné entre l’intensité déterminée à partir de la déconvolution et du spectre de masse. Cette observation participe à valider les résultats déterminés à partir des déconvolutions et donc du logiciel PD 3.0. De plus, ces analyses ont aussi permis de démontrer la reproductibilité des mesures inter-réplicat. En effet le DAR moyen est reproductible sur les différentes analyses, avec une faible déviation associée : 4.0 ± 0.05. De plus, les distributions des espèces Dn sont aussi très proches dans les différents réplicats.