• Aucun résultat trouvé

MONOTHERAPIE ANTIPLAQUETTAIRE

! ""#!

IV.1.2.b) Bithérapie antiplaquettaire

Lorsque le risque thromboembolique présenté par le patient est très important, il est recommandé d’instaurer une bithérapie antiplaquettaire reposant généralement sur l’association entre l’aspirine à raison d’au moins 75 mg/jour et d’une autre molécule antiplaquettaire appartenant à la famille des thiénopyridines (clopidogrel, prasugrel ou ticagrelor). L’utilisation concomitante d’aspirine et de dypiridamole est également parfois décrite dans les protocoles thérapeutiques.

L’interruption d’une bithérapie aspirine + dipyridamole n’occasionne pas de saignements supplémentaires par rapport à l’arrêt d’une monothérapie par l’aspirine. En revanche, l’association aspirine + clopidogrel génère un risque hémorragique beaucoup plus conséquent en comparaison à l’aspirine ou au clopidogrel seul (82) (83). Dans tous les cas, les auteurs de ces études mettent en évidence l’efficacité quasi constante de l’hémostase locale et rapportent peu de cas d’hémorragies sévères ou tardives (84) (85) (86).

Les diverses études scientifiques se sont attachées à évaluer le bénéfice/risque de l’arrêt ou du maintien de la bithérapie uniquement lors de la réalisation de soins dentaires à risque hémorragique faible ou modéré. Cependant, les actes bucco-dentaires responsables de saignements importants et donc plus difficilement contrôlables impose la mise en œuvre d’autres attitudes thérapeutiques. Tout d’abord, il est essentiel que le praticien ainsi que le médecin prescripteur évaluent de façon rigoureuse les risques hémorragiques et thrombotiques présentés par le patient afin d’apprécier au cas par cas la meilleure stratégie à adopter. Ainsi, deux attitudes vis à vis de la bithérapie peuvent être proposées : maintien ou arrêt partiel du traitement reposant sur l’arrêt du clopidogrel, du prasugrel ou du ticagrelor tout en poursuivant l’aspirine. L’arrêt partiel de la bithérapie présente un double objectif, d’une part la diminution du risque hémorragique permis par la suppression de la thiénopyridine et d’autre part l’assurance d’une protection vis-à-vis du risque thrombotique grâce à la poursuite de l’aspirine. L’intervalle de temps séparant l’arrêt de la thiénopyridine antiplaquettaire et le geste chirurgical dépend de la molécule médicamenteuse utilisée par le patient. Il conviendra d’interrompre le clopidogrel 5 jours avant l’intervention de chirurgie dentaire, 7 jours avant pour le prasugrel et enfin 3 à 7 jours pour le ticagrelor (87) (88).

La reprise de la bithérapie doit être réalisée le plus tôt possible (le jour même de l’intervention voire le lendemain) après le geste invasif en l’absence de complications hémorragiques majeures (réintervention avec reprise de l’hémostase locale ou nécessité d’une transfusion

! ""$! sanguine) et que les paramètres de l’hémostase soient corrects. Concernant les patients traités par clopidogrel, la dose administrée lors de la reprise de l’agent antiplaquettaire devra tenir compte du risque thrombotique. Lorsque le risque thrombotique sera minime, une dose identique à celle retrouvée dans le traitement d’entretien habituel du patient sera suffisante ; en revanche un risque thrombotique majeur nécessitera le recours à une dose de charge de 600 mg afin de retrouver en moins de 24 heures l’effet biologique du médicament. Quant aux patients sous ticagrelor ou prasugrel, une reprise de la dose d’entretien sera réalisée quel que soit le risque thrombotique.

La durée de la bithérapie varie en fonction de la pathologie présentée par le patient. Elle dure généralement au minimum 6 mois et peut parfois être prolongée pendant un an.

Ainsi, elle permet éventuellement au chirurgien de pratiquer son intervention après l’arrêt de cette bithérapie lorsque bien entendu l’état du patient le permet.

En 2015, Branislav et son équipe se sont intéressés au sein d’une même étude à comparer les effets d’une mono et d’une bithérapie antiplaquettaire en terme de survenue de complications hémorragiques post-opératoires chez des patients devant subir un acte de chirurgie bucco- dentaire à faible risque hémorragique, type extraction simple unitaire ou multiple.

Pour cela, trois groupes d’individus ont été constitués de la manière suivante.

Groupe 1

Bithérapie

Groupe 2

Monothérapie

Groupe 3

Contrôle

n

homme 32 66 61 femme 11 51 44

Age

61,1 63,4 61,2

Traitement

aspirine + clopidogrel 39

aspirine + ticlopidine 2 aspirine + prasugrel 2

aspirine 84

ticlopidine 20

! "%&! Suite aux diverses extractions réalisées au sein de cette cohorte de patients, des mesures d’hémostase locale ont été mises en place reposant sur l’utilisation d’éponges de collagène résorbables éventuellement associées à une suture au niveau de la plaie afin d’obtenir une hémostase locale correcte et efficace assurant une sécurité hémorragique optimale aux patients. Tous les patients ont été surveillés au cours des 2 heures suivant l’intervention afin de vérifier l’absence de saignements avant le retour à leur domicile. De plus un contrôle post- opératoire à été prévu à J1, J3 et J5 ou au minimum un contact téléphonique avec le chirurgien dans le but de vérifier l’état de santé du patient.

Certains auteurs ont établi les critères permettant de considérer la survenue de saignement comme une complication majeure suite à l’intervention chirurgicale : poursuite du saignement pendant plus de 12 heures, nécessité pour le patient d’appeler ou de consulter à nouveau le chirurgien, développement d’un hématome ou d’ecchymose, recours à une transfusion sanguine.

Dans le but de rechercher l’existence d’une éventuelle différence significative en terme de survenue de complications hémorragiques suite à la réalisation d’une ou plusieurs extractions dentaires chez des patients traités par mono ou bithérapie antiplaquettaire, les scientifiques ont utilisé le test statistique du chi deux.

Le tableau suivant présente pour chaque groupe de patients le nombre de dents extraites ainsi que le nombre de complications hémorragiques rencontrées.

Groupe 1

Bithérapie

Groupe 2

Monothérapie

Groupe 3

Contrôle

Nombre d’extractions

59 128 127

Nombre de

dents extraites

extraction

unique

23 62 49

extractions

multiples

36 66 78

Nombre d’hémorragies

post-opératoires

1 0 0

Nombre de sutures

4 2 0

! "%"! Aucun des patients inclus dans le groupe contrôle ou traité par une monothérapie antiplaquettaire n’a présenté de saignements post-opératoires. On note seulement un cas de complication hémorragique chez un malade appartenant à la cohorte de patient ayant une bithérapie antiplaquettaire. Ce saignement a facilement pu être contrôlé par une reprise de l’hémostase locale et de sutures au niveau de la plaie.

Enfin, on constate que le nombre d’individus ayant eu recours à des sutures complémentaires aux mesures classiques d’hémostase locale est relativement faible. Devant l’ensemble de ces constatations, les auteurs de cette étude concluent qu’il n’existe pas de différence significative concernant la survenue éventuelle d’effets indésirables hémorragiques suite à une intervention chirurgicale responsable d’un faible risque de saignement entre les patients traités par un ou plusieurs agents antiplaquettaires.

! "##!