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Bien que largement étudiés depuis la mise en évidence de l’efficacité de la SHF-NST, les mécanismes d’action de cette stimulation demeurent mal compris (cette problématique fait d’ailleurs partie des questions scientifiques de notre équipe). La similitude entre les effets produits par la SHF et par une lésion du NST a conduit à penser que la SHF pouvait avoir un effet inhibiteur sur les neurones du NST via un phénomène de blocage dépolarisation (Benazzouz et al., 1995; Beurrier et al., 2001; Magarinos-Ascone et al., 2002). Pourtant, certains arguments mettent en doute cette hypothèse. En effet, il a été montré que la SHF-NST (100-140Hz) pratiquée sur des tranches de cerveau de rat conduit à une excitation des neurones du NST (Lee et al., 2003). De plus, des données électrophysiologiques obtenues chez le singe ont montré que la SHF du NST induisait une augmentation de l’activité des neurones du GPi, structure de projection du NST (Hashimoto et al., 2003). Enfin, des études de microdialyse réalisées au sein de notre laboratoire chez le rat sain ont montré au cours de la SHF-NST une augmentation des taux de glutamate et de GABA au niveau de la SNr (Windels et al., 2000), suggérant ainsi l’implication de mécanismes à la fois inhibiteurs et excitateurs.

Au final, la question de l’effet inhibiteur ou excitateur de la SHF-NST ne semble pas avoir de réponse simple. Au niveau du NST, un consensus s’accorde à dire que la SHF supprimerait l’activité spontanée et pathologique de cette structure pour la remplacer par un patron d’activité plus régulier calqué sur la stimulation elle-même (Garcia et al., 2003; Garcia

et al., 2005). Cependant, la SHF n’affecte pas de la même façon le soma et les axones, de même que les fibres passant à travers ou à proximité de la structure stimulée (McIntyre et al., 2004a). Par ailleurs, de nombreuses études comportementales, électrophysiologiques et neurochimiques montrent que les effets de la SHF sont largement dépendants des paramètres de stimulation utilisés. À basse fréquence (10-50Hz), la stimulation du NST n’améliore pas, voire aggrave les symptômes moteurs parkinsoniens (Rizzone et al., 2001; Moro et al., 2002) et ne permet pas de normaliser l’activité pathologique du NST, quelle que soit la valeur des autres paramètres de stimulation (Garcia et al., 2005). Cette absence d’effet s’accompagne d’une absence de modification des taux de glutamate et de GABA dans la SNr et le GPe/GP chez le rat sain (Windels et al., 2003). De plus, Maurice et collaborateurs ont montré que l’activité des neurones de la SNr chez des rats sains anesthésiés au cours de la SHF du NST, dépendait de l’intensité de stimulation. Pour de fortes intensités (> 80 A), les neurones étaient activés alors qu’ils étaient inhibés pour de faibles intensités (20-80 A)

Rappels bibliographiques – Chapitre 2 : La maladie de Parkinson, une maladie motrice et

neuropsychiatrique

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(Maurice et al., 2003). Ainsi, pour des paramètres classiquement utilisés en clinique humaine (130-185 Hz, 60-100 s, 1-3 mA), il est aujourd’hui admis que la résultante des mécanismes de la SHF du NST correspond à une inhibition des voies de sortie des GB (GPi/EP et SNr) dans laquelle l’activation de la transmission GABAergique semble jouer un rôle primordial. Des études de microdialyse menées au laboratoire chez le rat 6-OHDA ont permis d’observer qu’une SHF-NST d’une heure induisait une augmentation des taux de GABA au sein de la SNr (Windels et al., 2005). La voie GABAergique pallido-nigrale semble directement impliquée dans l’inhibition de l’activité des voies de sortie induite par la SHF du NST. En effet, la lésion du GPe/GP permet de prévenir l’augmentation des taux de GABA observés dans la SNr de rats anesthésiés durant la stimulation du NST (Windels et al., 2005).

Enfin, une étude très récente menée par l’équipe de Karl Deisseroth sur des rats rendus hémiparkinsoniens, semble apporter des éléments supplémentaires dans la compréhension des effets bénéfiques de la stimulation dans la MP, et plus particulièrement sur les cibles de cette stimulation, grâce à la technique d'optogénétique sur des neurones ciblés sélectivement, dans et autour du NST (Gradinaru et al., 2009). Ces auteurs ont montré que la suppression de l'activité des neurones subthalamiques par optogénétique, ne conduit à aucun effet bénéfique sur le comportement locomoteur des rats. En revanche, lorsque cette technique était pratiquée de telle sorte de stimuler sélectivement les afférences de la couche V du cortex moteur vers le NST à haute fréquence (Gradinaru et al., 2009), les résultats obtenus étaient spectaculaires puisque les symptômes moteurs dus à la lésion disparaissaient chez les animaux sévèrement atteints, et réapparaissaient à l'extinction de la lumière. Cette étude a ainsi permis de suggérer que les effets bénéfiques de la SHF-NST ne semblent pas passer par une inhibition directe des corps cellulaires des neurones du NST mais par une activation antidromique des fibres afférentes au NST, notamment celles passant par les neurones de la couche V du cortex cérébral.

Il semble ainsi que les effets bénéfiques de la SHF-NST passent par des mécanismes complexes, entre excitation et inhibition des fibres de passage autour du NST. Cette régulation fine permet globalement une régularisation du pattern d’activité des GB permettant au final, l’élaboration d’un comportement moteur approprié (Fig. 52). Si cette stimulation se révèle bénéfique pour le traitement de la symptomatologie motrice, elle a également permis de faire le jour sur certains troubles non moteurs de la maladie.

II. LES TROUBLES NON MOTEURS DE LA MALADIE DE PARKINSON

Bien moins reconnus au niveau clinique pendant de nombreuses années que les symptômes moteurs, les troubles non moteurs sont aujourd’hui reconsidérés du fait de leur impact sur la qualité de vie des patients (Schrag et al., 2000). Ce terme regroupe une pléthore

Figure 52. Proposition de l’effet anatomo-fonctionnel au sein des ganglions de la base de la stimulation haute fréquence du noyau subthalamique. ATV: aire tegmentale ventrale ; GPe: globus pallidus

externe; GPi: globus pallidus interne; NST: noyau subthalamique; SNc: substance noire pars compacta; SNr substance noire pars reticulata. D’après Lang et Lozano, 1998.