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1.6 Etudes de syst` ´ emes m´ etaboliques via des m´ ethodes in silico

1.6.1 Mod´ elisation analytique

Reconstruction de r´eseaux m´etabolique

L’approche analytique est le type de mod´elisation le plus utilis´e par les biochimistes dans l’´etude du m´etabolome. Elle n´ecessite de d´eterminer le plus grand nombre de m´ecanismes mol´eculaires pr´esents, qui sont les briques ´el´ementaires du syst`eme m´etabolique. La recons- truction in silico de r´eseaux m´etaboliques permet d’identifier et d’analyser les m´ecanismes

mol´eculaires impliqu´ees dans un ´etat physiologique d’un organisme. La premi`ere phase consiste `

a r´ecup´erer les informations m´etaboliques des r´eactifs, des enzymes et des r´eactions impliqu´ees dans une voie m´etabolique (Francke et al.(2005)) . Cette phase n´ecessite le recueil de donn´ees `

a partir de publications et de bases de donn´ees biologiques regroupant des informations li´ees aux voies m´etaboliques et aux g`enes, aux prot´eines, aux r´eactions impliqu´es. De nombreuses bases permettent la collecte de ces donn´ees, nous pouvons citer quelques exemples :

ˆ la base KEGG (Kyoto Encyclopedia of Genes and Genomes) est une des premi`eres bases, sur internet, regroupant les informations de g`enes, prot´eines, r´eactions et de voies m´etaboliques issues du s´equen¸cage d’un panel important d’organismes.

ˆ La base BioCyc, apparue plus tard, regroupe actuellement des informations sur 3530 voies m´etaboliques et g´enomes.

ˆ la base BRENDA (BRaunschweig ENzyme DAtabase, Schomburg et al. (2013)) est d´edi´ee `a la collecte de donn´ees d’enzymes `a partir de publications ou de divers travaux exp´erimentaux. Elle propose une fiche d´ecrivant les propri´et´es biochimiques de chacune de ses enzymes.

Ce recueil d’informations doit permettre de lister tous les agents biochimiques d’une voie et leurs r´eactions associ´ees, et de d´ecrire leurs interactions entre eux. Une fois le mod`ele construit et v´erifi´e, la phase de simulation `a proprement dit peut d´ebuter.

Mod´elisation via l’´etude du r´eseau

Le but de la mod´elisation consiste, `a partir d’un mod`ele, `a pr´evoir le comportement du syst`eme ou de la voie m´etabolique ´etudi´ee, dans des situations donn´ees et sur des ´echelles de temps donn´ees. Il existe plusieurs m´ethodes pour effectuer ces pr´evisions `a partir du mod`ele, mais elles se basent toutes sur la stœchiom´etrie des r´eactions pr´esentes souvent repr´esent´ees dans une matrice S. S est la matrice stœchiom´etrique regroupant en lignes les m´etabolites et en colonnes les r´eactions. Une case ij donne le coefficient stœchiom´etrique du m´etabolite i pour la r´eaction j. Cependant, deux approches peuvent ˆetre distingu´ees :

ˆ des pr´evisions bas´ees sur l’´etude de pseudos ´etats stationnaires du syst`eme, c’est-`a-dire lorsque que les variations de concentrations, de volumes sont nulles ;

ˆ des pr´evisions bas´ees sur la dynamique de l’ensemble, o`u quel que soit l’´etat du syst`eme le mod`ele peut pr´evoir le comportement des ´el´ements biochimiques.

Mod`ele `a l’´etat stationnaire

L’´etat stationnaire est d´efini par l’´equation d’´equilibre suivante : dc(t)

dt = 0 = S ∗ v

c est un vecteur d´ecrivant la concentration des m´etabolites, c(t) est constant `a l’´etat sta- tionnaire. v est un vecteur ayant les vitesses des r´eactions du syst`eme.

Les principales m´ethodes bas´ees sur l’´etat stationnaire sont l’analyse des flux d’´equilibre (flux balance analysis), l’´etude des modes ´el´ementaires, et l’observation des voies extrˆemes.

Un flux est la vitesse de synth`ese ou de consommation d’un m´etabolite au niveau d’une r´eaction ou plusieurs r´eactions associ´ees dans un syst`eme m´etabolique. L’analyse des flux d’´equilibre consiste `a observer les flux m´etaboliques sous des contraintes de deux types :

ˆ des contraintes aux extrˆemes du syst`eme limitant l’apport du substrat de d´epart ou l’excr´etion du produit final

ˆ des contraintes internes qui limitent les flux internes du syst`eme

Cette analyse permet d’avoir une estimation de l’importance des flux dans le syst`eme `a l’´equilibre et dans des conditions particuli`eres.

Les modes ´el´ementaires (Schuster et al.(2002)) et les voies extrˆemes (Schilling et al. (2000)) utilisent le concept de chemin m´etabolique. Dans un organisme, plusieurs jeux de r´eactions permettent d’obtenir le mˆeme produit. Chacun de ces jeux forme un chemin m´etabolique. Un mode ´el´ementaire est un chemin m´etabolique unique au sein d’un r´eseau, d´ecrit `a l’´etat stationnaire :

ˆ un mode ´el´ementaire est constitu´e d’un nombre minimal de r´eactions et forme une unit´e fonctionnelle du r´eseau.

ˆ l’´elimination d’une r´eaction d’un mode ´el´ementaire rend caduque sa fonctionnalit´e. Les voies extrˆemes sont des sous-parties des chemins formant des modes ´el´ementaires. La d´etermination d’une voie extrˆeme repose sur les mˆeme r`egles qu’un mode ´el´ementaire avec deux particularit´es suppl´ementaires.

ˆ Les r´eactions internes au syst`eme sont d´ecompos´ees en deux r´eactions une sens et l’autre antisens

ˆ Une voie extrˆeme est unique, elle ne peut ˆetre repr´esent´ee par la combinaison d’autres voies extrˆemes pr´eexistantes du r´eseau.

Les modes ´el´ementaires et les voies extrˆemes permettent d’identifier tous les processus pos- sibles au sein d’un r´eseau m´etabolique, en tenant compte de sa topologie, de la stoechiom´etrie des r´eactions, leur sens et leur r´eversibilit´e.

Figure 1.13: Figure dePapin et al.(2004). Exemple d’un r´eseau m´etabolique avec ses modes ´el´ementaires et ses voies extrˆemes. Le r´eseau est compos´e de 3 m´etabolites, r´eactions internes et 3 r´eactions d’´echange(a). Le r´eseau poss`ede 4 modes ´el´ementaires (b) et 3 voies extrˆemes (c). La r´eaction d’´echange du m´etabolite A est r´eversible, elle est d´ecompos´ee en 2 r´eactions irr´eversibles dans le cas de voie extrˆeme (c).

Il existe une ´equivalence entre les modes ´el´ementaires et les voies extrˆemes de cet exemple : EIMo 1 = ExPa 1, EIMo 2 = ExPa 2, EIMo 3 = ExPa 3, EIMo4 = ExPa 1 + ExPa 2. Les mod`eles stationnaires permettent d’avoir une visualisation globale de l’intensit´e et de l’orientation des flux pr´esents au sein du m´etabolisme. Cependant, par leur nature, ces mod`eles ne peuvent pr´edire que le comportement des syst`emes `a l’´etat stationnaire.

Mod`ele dynamique

Un mod`ele dynamique, aussi appel´e mod`ele cin´etique, permet de donner une pr´evision du comportement du syst`eme durant un temps donn´e qui peut englober aussi bien l’´etat station- naire que l’´etat initial et la transition entre ces ´etats. La conception d’un mod`ele dynamique

repose, le plus souvent, sur l’identification et l’utilisation d’´equations diff´erentielles. Dans le cas d’un syst`eme m´etabolique, les ´equations diff´erentielles permettent de d´ecrire la concen- tration des diff´erents m´etabolites du syst`eme.La r´esolution de l’ensemble de ces ´equations permet la reproduction des diff´erents comportements du syst`eme.

Une r´eaction, dans un mod`ele dynamique, est d´efinie non seulement par les m´etabolites qui lui sont associ´es, mais aussi par sa vitesse. L’ensemble des vitesses de r´eactions est la base du mod`ele dynamique d’un syst`eme m´etabolique. En effet, l’int´egration dans le mod`ele d’une ´

equation donnant la vitesse permet le suivi dynamique des concentrations des m´etabolites du syst`eme. Chaque vitesse de r´eaction du syst`eme doit ˆetre retranscrit en une expression alg´ebrique, une loi cin´etique, fonction de la concentration des m´etabolites dans le temps. Cette loi cin´etique est une estimation de la vitesse r´eelle. Ainsi, la difficult´e d’identification de tel mod`ele r´eside dans l’utilisation d’une loi cin´etique la plus adapt´ee au cas de figure rencontr´e. Plusieurs lois cin´etiques ont ´et´e mises en place et souvent utilis´ees pour traduire une vitesse au sein d’une r´eaction. Parmi ces lois, nous trouvons :

ˆ la loi d’action de masse ˆ la loi de Michaelis-Menten

ˆ la loi de convenance cin´etique ( convenience rate law )

La loi d’action de masse a ´et´e d´etermin´ee en 1867 par les chimistes norv´egiens Cato Guldberg et Peter Waage. Elle associe les concentrations des m´etabolites `a l’´equilibre `a une constante KT qui d´epend uniquement de la temp´erature.

KT =

Y

[produit]/Y[substrat] Cette loi permet d’obtenir l’´equation de vitesse simple :

r = kYRvii r est la vitesse de r´eaction.

k est une constante de vitesse propre `a cette r´eaction.

Ri d´esigne les concentrations des r´eactifs et vi leur coefficient stœchiom´etrique en tant que r´eactif.

La loi d’action de masse est utilis´ee pour exprimer la cin´etique de r´eactions chimiques, mais elle reste insuffisante pour d´ecrire des r´eactions biochimques. En effet, elle ne tient pas compte du comportement de l’enzyme, elle ne d´ecrit pas les interactions enzyme-substrat(s) possibles.

La loi de Michaelis-Menten est issue des travaux de l’allemand Leonor Michaelis et de la canadienne Maud Menten en 1913. Elle est sp´ecifique aux r´eactions enzymatiques. Elle ´etablit un lien entre la vitesse de la r´eaction avec la concentration de substrat et des param`etres cin´etiques de l’enzyme utilis´ee. L’´equation de vitesse v pour une enzyme irr´eversible `a 1 substrat-1 produit est : A → B

v = kcat ∗ [E] ∗ [S] Km + [S]

kcat est la constante catalystique de l’enzyme qui donne la quantit´e de substrat transform´e par quantit´e d’enzyme en une unit´e de temps, en seconde g´en´eralement.

[E] et [S] sont les concentrations respectives d’enzyme et de substrat en mol/L.

Km est la constante de Michaelis, elle traduit l’affinit´e d’association d’une enzyme pour un substrat. Km est en mol/L.

Une cin´etique michaelienne peut aussi repr´esenter les enzymes r´eversibles, ayant des inhibi- teurs, et plusieurs substrats-produit.

La loi de convenance, publi´ee en 2006 par Liebermeister and Klipp (2006), est d´eriv´ee du mod`ele de Michaelis-Menten. La loi de Michaelis-Menten demande la connaissance d’un grand nombre de param`etres pas toujours disponibles. Le but de la loi de convenance est d’avoir un mod`ele proche de la loi de Michaelis avec des param`etres estim´es `a partir de lois de ther- modynamique. Ces param`etres sont facilement obtenus apr`es exp´erimentation en mesurant l’enthalpie libre de la r´eaction et en utilisant la constante d’´equilibre, Keq de la r´eaction. La loi de convenance permet de d´ecrire une grande partie des cas de figure couvert par un mod`ele Michaelis-Menten.

Le d´eveloppement des lois cin´etiques des r´eactions, selon les mod`eles ´enonc´es, n´ecessite la connaissance de diff´erents param`etres internes sp´ecifiques comme la constante d’affinit´e Km pour une loi de Michaelis-Menten. L’estimation de ces param`etres est essentielle pour repro- duire la cin´etique du syst`eme. La difficult´e de cette phase d’estimation est en lien direct avec la complexit´e du r´eseau m´etabolique `a simuler. Apr`es la d´etermination des lois cin´etiques de toutes les r´eactions, les ´equations diff´erentielles ainsi obtenues permettront de connaitre la concentration des m´etabolites `a chaque pas de temps.

Soit la chaine de r´eactions suivante : A−−→v1

r1 B v2

−−→

r2 C

pour v2 issue de la loi cin´etique de r2. Le syst`eme a donc pour ´equations diff´erentielles : ∆A ∆t = −v1 ∆B ∆t = v1 − v2 ∆C ∆t = v2

Le mod`ele dynamique permet une reproduction du syst`eme de meilleure qualit´e, en terme de pr´ecision, que la m´ethode stationnaire. N´eanmoins elle n´ecessite de connaˆıtre les param`etres cin´etiques de chaque enzyme. Sur l’´evaluation d’un syst`eme m´etabolique complexe ou sur l’´etude du m´etabolome d’un organisme en entier, la recherche de ces param`etres peut ˆetre un point limitant de la mod´elisation dynamique. Ainsi bien que moins pr´ecis, le mod`ele stationnaire peut ˆetre plus facile `a identifier sur des r´eseaux de taille importante. Au sein de la m´ethode dynamique, le mod`ele michaelien demeure l’un des plus fid`eles et des plus exigeants `a mettre en place pour repr´esenter la cin´etique d’une r´eaction enzymatique.

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