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CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.1 Modélisation thermodynamique

L’élaboration du modèle thermodynamique s’effectue selon l’approche CALPHAD [17], laquelle consiste à évaluer simultanément toutes les phases d’un système chimique donné et à minimiser l’énergie de Gibbs du système global à partir de celles optimisées pour chaque phase considérée. Cette méthode permet donc de rapidement calculer les diagrammes de phases à l’aide de logiciels spécialisés, dont les plus connus sont FactSage™ et Thermo-Calc™. Pour effectuer cette minimisation, les fonctions d’énergie de Gibbs de chaque espèce pure doivent d’abord être définies. Ces fonctions sont également définies pour chaque solution solide ou liquide, à partir de modèles de solutions. Ces modèles sont basés sur les fonctions thermodynamiques de chacun de leurs constituants. Les déviations par rapport à l’idéalité sont modélisées par des paramètres d’interaction, qui permettent de stabiliser ou de déstabiliser la solution. Ces paramètres peuvent être constants, ou être une fonction de la composition et/ou de la température du système. Pour les bases de données sur les solutions développées dans la présente recherche, deux modèles sont utilisés : le Modèle Quasichimique Modifié avec l’Approximation des Quadruplets (MQMAQ) pour les solutions liquides et le « Compound Energy Formalism » (CEF) pour les solutions solides.

2.1.1 Modèle Quasichimique Modifié avec l’Approximation des Quadruplets

(MQMAQ)

Le Modèle Quasichimique Modifié [20-22] est une adaptation du modèle original de Fowler et Guggenheim [23, 24]. Ce modèle permet de tenir compte des phénomènes d’ordonnancement à courte distance dans les solutions liquides, puisqu’il modélise l’énergie des interactions entre les premiers voisins des espèces pures distribuées sur un seul réseau et formant des paires. Pour une

solution liquide, les « réseaux » ne font pas référence à un emplacement spatial, comme c’est le cas pour un réseau cristallin solide, mais plutôt de sites fictifs sur lesquels les différentes paires du modèle se substituent de manière à minimiser l’énergie de Gibbs de la solution et à respecter le bilan de matière du système. Le MQM permet de calculer le nombre de paires de l’équation quasichimique suivante par minimisation de l’énergie de Gibbs du système, où A et B sont deux espèces chimiques pures d’un système binaire. L’énergie d’échange de cette réaction est notée ∆gAB et constitue le paramètre du modèle qui peut être exprimé sous une forme polynomiale en fonction de la composition et de la température. Lorsque la valeur de ∆gAB est négative, la Réaction 2-1 est favorisée vers la droite, ce qui signifie que la concentration à l’équilibre des paires A-B sera supérieure à celle d’une solution distribuée aléatoirement. À l’inverse, une valeur positive de ∆gAB favorisera la ségrégation entre A et B et une lacune de miscibilité pourrait apparaître dans le liquide si ∆gAB est suffisamment positif [25].

(𝐴 − 𝐴)𝑝𝑎𝑖𝑟𝑒+ (𝐵 − 𝐵)𝑝𝑎𝑖𝑟𝑒 = 2(𝐴 − 𝐵)𝑝𝑎𝑖𝑟𝑒 ∆𝑔𝐴𝐵 (2-1) Le MQM avec l’approximation des paires n’est toutefois pas adapté pour tous les systèmes de sels fondus (le bain cryolithique par exemple). Le MQM ne tient compte que des interactions entre les premiers voisins, ce qui n’est pas adéquat pour traiter de systèmes ioniques en phase liquide, où l’ordonnancement entre les deuxièmes plus proches voisins a également un fort impact sur la distribution des constituants dans le liquide. Afin de tenir compte de l’ordonnancement à courte distance entre les 1ers et les 2es plus proches voisins simultanément, on doit utiliser un modèle à deux sous-réseaux, soit un sous-réseau cationique et un sous-réseau anionique. Le Modèle Quasichimique Modifié avec l’Approximation des Quadruplets (MQMAQ) répond à ce besoin [26]. Ce modèle est analogue au MQM, mais il s’en distingue puisque ce sont des quadruplets plutôt que des paires qui se distribuent sur les sous-réseaux. Un quadruplet consiste en deux cations qui sont mutuellement 2es plus proches voisins et, similairement, deux anions 2es plus proches voisins. Les cations et les anions d’un quadruplet sont 1ers plus proches voisins. Le MQMAQ permet notamment de tenir compte des interactions des 2es plus proches voisins par les réactions d’échange suivantes :

(𝐴 − 𝑋 − 𝐴) + (𝐵 − 𝑋 − 𝐵) = 2(𝐴 − 𝑋 − 𝐵) ∆𝑔𝐴𝐵/𝑋2 (2-2)

Où A et B représentent deux cations tandis que X et Y représentent deux anions. ∆𝑔𝐴𝐵/𝑋2 et ∆𝑔𝐴2/𝑋𝑌 sont des paramètres ajustables du modèle permettant de reproduire les données

expérimentales pour des sous-systèmes binaires à anion ou à cation commun, respectivement. Des ajustements peuvent également être effectués dans le système réciproque (A, B // X, Y) par l’ajout du paramètre d’interaction ∆𝑔𝐴𝐵/𝑋𝑌 pour la réaction suivante :

1

2(𝐴𝐵𝑋2+ 𝐴𝐵𝑌2+ 𝐴2𝑋𝑌 + 𝐵2𝑋𝑌) = 2 𝐴𝐵𝑋𝑌 ∆𝑔𝐴𝐵/𝑋𝑌 (2-4)

Un nombre de coordination, noté Z, doit être défini pour chaque ion dans un quadruplet en particulier. Par exemple le nombre de coordination noté 𝑍𝐴𝑋2/𝑋𝑌 représente le nombre de 2es plus proches voisins de l’anion X dans le quadruplet AAXY. La définition des nombres de coordination permet de déplacer la composition d’ordonnancement maximale d’un système donné, ce qui représente une modification importante du modèle quasichimique.

Dans une version améliorée du MQMAQ, un paramètre noté ζi/j est ajouté au modèle [27]. Ce dernier représente le ratio entre les nombres de coordination 2es et 1ers plus proches voisins. Ce paramètre est calculé pour chaque quadruplet unaire. Par exemple, le paramètre ζA/X est égal au nombre de quadruplets contenant une paire A-X comme 1er plus proche voisin et il est défini comme suit :

𝜁𝐴/𝑋 =

2 𝑍𝐴2/𝑋2𝐴 𝑍𝐴2/𝑋2𝑋

𝑍𝐴2/𝑋2𝐴 +𝑍𝐴2/𝑋2𝑋 (2-5)

2.1.2 « Compound Energy Formalism » (CEF)

Le « Compound Energy Formalism » (CEF) est un modèle à plusieurs sous-réseaux qui est le plus simple pour représenter des solutions solides, des espèces intermétalliques, des solutions interstitielles et des composés non stœchiométriques. Il tient compte uniquement de l’ordonnancement à longue distance, ce qui convient parfaitement aux solutions cristallines [25]. Ce modèle a été proposé par Sundman [28] et par Barry et al. [29] et suppose que toutes les espèces se retrouvant sur un même sous-réseau y sont distribuées aléatoirement. Des paramètres d’interaction peuvent être ajoutés entre des paires sur un même sous-réseau ou entre différents sous-réseaux afin de modéliser les déviations par rapport à l’idéalité. L’énergie de Gibbs de la phase est ensuite minimisée pour obtenir la distribution des différentes espèces sur les sous- réseaux, tout en respectant le bilan de matière [25, 30].