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1. L A SPECTROSCOPIE PROCHE INFRAROUGE

1.2. L E SPECTRE DE L ’ EAU

1.3.2. MODÉLISATION RADIATIVE APPLIQUÉE

Dans le cadre du projet SPREAD, nous avons confié nos mesures spectrales à l’équipe de Mark Danson de l’Université de Salford, dans le but de simuler les images satellitaires de nos sites d’étude à partir de modèles de transfert radiatif. Le système proposé par Danson et Bowyer (2003) est composé du couplage :

du modèle de réflectance foliaire PROSPECT (Jacquemoud et Baret, 1990) en nouvelle version (Jacquemoud et al., 2000), pour des couverts modélisables par des couches homogènes superposées ;

des modèles de réflectance du couvert SAIL (Verhoef, 1984 et 1985) et de sa version modifiée GEOSAIL (Jasinski et Eagleson 1989, Huemmrich 2001), pour des couverts discontinus.

Les modèles sont testés pour des valeurs standards de paramètres, puis pour des valeurs spécifiques correspondant aux trois espèces prélevées sur les deux sites d’étude.

1.3.2.1. M

ODÈLE À L

ÉCHELLE DE LA FEUILLE

Au niveau de la feuille, nous disposons de mesures spectroscopiques de laboratoire de trois espèces : arbousier (AU), chêne kermès (QC) et chêne vert (QI). Ces spectres sont introduits dans le modèle PROSPECT pour simuler le rayonnement. Danson et Bowyer (2003) proposent d’étudier la sensibilité du modèle à travers quatre paramètres (teneurs en chlorophylle, eau, matière sèche, structure foliaire). Nous représentons dans le Tableau 22 l’amplitude de variation de chaque paramètre ; on considère à la fois les valeurs standards (valables pour la plupart des végétaux) et les valeurs spécifiques aux trois espèces étudiées.

Tableau 22. Paramètres du modèle PROSPECT

Valeurs spécifiques

Paramètres Valeurs standards AU QI QC

Teneur en chlorophylle a et b, en µg.cm-2 10 à 65 inconnu 30-90* 10 à 50*

Teneur en eau EWT, en g.cm-2 x 10-4 1 à 850 143 à 200 91 à 154 78 à 133

Teneur en matière sèche SLW (specific leaf

weight) en g.cm-2 x 10-4 20 à 200 88 à 147 110 à 177 87 à 138

Paramètre N de structure foliaire 1 à 4 non directement mesurable *valeurs issues de travaux du CNRS-CEFE de Montpellier pour les feuilles de QC et QI de juin à septembre Les valeurs standards des paramètres du modèle présentent de grandes amplitudes de variation. A l’inverse, définir les valeurs spécifiques aux espèces a permis de restreindre les amplitudes.

1.3.2.2. M

ODÈLE À L

ÉCHELLE DU COUVERT VÉGÉTAL

Au niveau du couvert, deux sites A et B près de Montpellier sont étudiés avec les capteurs haute résolution SPOT-HRVIR et basse résolution NOAA-AVHRR, SPOT-VGT et TERRA- MODIS. Pour la modélisation de la réflectance du couvert, les images satellitaires acquises ont des angles de visée variables [-29°;+29°] sources d’effets de BRDF. Les mesures de LAI ne sont que des estimations grossières (estimation ponctuelle par appareil LAI-2000) et demandent à être confirmées.

Tableau 23. Paramètres du modèle de couvert GEOSAIL

Valeurs spécifiques

Paramètres Valeurs standards Site A Site B

Angle zénithal solaire SZA (solar zenith angle)

pour la période de risque de feu 17 à 70° 40 à 70° 40 à 70° Indice foliaire LAI (leaf area index)* 1 à 3 2 à 4 1,8 à 3

Taux de couvert végétal 60 à 100% 60 à 90% 100% * uniquement sur les composants végétaux d’occupation du sol

De la même manière que précédemment, les paramètres standards du modèle prennent des valeurs de plus fortes amplitudes que les paramètres des deux sites d’étude.

1.3.2.3. TRAITEMENTS ET RÉSULTATS

Les associations des modèles PROSPECT+SAIL et PROSPECT+GEOSAIL sont testées pour le site A et l’espèce QC ainsi que pour le site B et l’espèce QI.

L’équipe de Mark Danson réalise l’analyse de sensibilité des modèles par la méthode EFAST (Extended Fourier Amplitude Sensitivity Test) de Saltelli et al. (1999). Près de 5000 simulations sont testées pour l’ensemble des jeux de paramètres et pour une distribution uniforme.

La Figure 42 représente la sensibilité du spectre de réflectance avec la méthode EFAST et l’association des modèles PROSPECT et GEOSAIL, pour les valeurs standards des paramètres (large amplitude).

Figure 42. Contributions des différents paramètres standards pour le modèle PROSPECT + GEOSAIL (analyse de sensibilité EFAST)

Pour ce cas précis, le signal est donc fortement influencé par le taux de couvert végétal (jusqu’à 50%) ainsi que par les interactions entre les paramètres (de 30 à 40%). En revanche, la contribution de l’état hydrique de la végétation (indice EWT) est très faible (moins de 10%).

Les mêmes simulations sont ensuite effectuées avec les paramètres spécifiques au site B (taillis de chêne vert QI). La Figure 43 représente la sensibilité du spectre de réflectance obtenue par la méthode EFAST. N’interviennent pas dans les contributions le taux de couvert végétal, fixé à 100% pour le site B, et le paramètre foliaire N, fixé à 2 pour le chêne vert.

Figure 43. Contributions des différents paramètres spécifiques au site B pour le modèle PROSPECT + GEOSAIL (analyse de sensibilité EFAST)

Nous notons que les interactions entre les paramètres sont très fortement réduites par rapport à la simulation précédente. Pour la partie du spectre du moyen infrarouge de 1350 à 1900 nm, l’indice de teneur en eau EWT est majoritairement impliqué dans les variations des modèles (environ 60%). Pour cette plage de longueurs d’ondes, l’indice foliaire LAI participe à environ 25%. Les 15% restants correspondent à la matière sèche SLW et à l’angle zénithal du soleil SZA.

Ces simulations de transfert radiatif de Danson et Bowyer (2003) sont encourageantes. On peut penser que dans le cas de sites à couvert végétal dense, l’état hydrique des feuilles est le facteur qui influence en premier lieu les valeurs de réflectance dans le moyen infrarouge. A partir des données de télédétection, l’angle zénithal solaire est connu. De même, il est désormais possible d’estimer, plus ou moins précisément selon les couverts, l’indice foliaire LAI d’un pixel sans mesure de terrain à partir de nouveaux produits satellitaires (par exemple avec le capteur MODIS). La NASA propose même des produits de teneur en chlorophylle a des pixels MODIS.

La combinaison de plusieurs produits satellitaires devrait donc permettre dans l’avenir d’isoler les différents paramètres influençant la réflectance (aérosols, nuages, chlorophylle a, indice foliaire LAI, angles de visée et du soleil…) pour mieux identifier les seules variations liées à l’état hydrique du couvert.

Dans cette première partie du chapitre 3, nous avons précisé la notion de spectroscopie proche infrarouge et surtout l’origine du spectre électromagnétique. La modélisation radiative montre la potentialité du spectre pour observer l’état hydrique des plantes. Chaque spectre s’obtient à partir de mesures en laboratoire. Afin de simplifier les spectres de manière efficace, il est nécessaire d’appliquer différents traitements (mathématiques et statistiques) que nous allons détailler dans la prochaine partie.

2. CHIMIOMÉTRIE

Selon Geladi (1995), la chimiométrie (en anglais chemometrics) est la « science de l’utilisation des méthodes mathématiques, statistiques et informatiques dans le but d’améliorer l’extraction des informations obtenues à partir des données analytiques ».

En d’autres termes, la chimiométrie peut être définie comme la branche de la chimie qui utilise les outils mathématiques et statistiques pour construire et sélectionner les expériences de manière à en extraire le maximum d'informations grâce à une analyse des données pertinente. Pour notre domaine d’étude, elle représente plus exactement l’ensemble des traitements mathématiques et statistiques des spectres.

L’objectif de cette étude est de relier le spectre de réflectance d’une feuille à son état hydrique. Il s’agit donc d’utiliser la chimiométrie pour déterminer la teneur en eau de la feuille analysée. Comme la spectrométrie est pour notre étude une méthode indirecte, il est nécessaire avant toute mesure d’établir un étalonnage basé sur un modèle empirique (Figure 44) permettant de prédire les indices FMC et EWT à partir des données spectrales.

Figure 44. Démarche de modélisation du spectre

L’étalonnage (en anglais calibration) du modèle implique la recherche de relations de prédiction entre les spectres et les données de teneur en eau (FMC et EWT) de référence. Pour créer ce modèle, des échantillons de feuilles suffisamment représentatifs (grande variance d’état hydrique) sont considérés. On calcule les indices FMC et EWT de ces échantillons par les méthodes classiques (cf. chapitre 2). Ces valeurs tiendront lieu de valeurs de référence pour notre modèle. Ensuite on mesure les spectres de ces échantillons ; puis on introduit les données spectrales et les valeurs de références dans une équation d’étalonnage. Le contrôle de l’acquisition des spectres bruts est primordial.