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Chapitre II: Bilan des activités de recherche

2 Lavage chimique du sulfure d’hydrogène en solution aqueuse en milieu basique et basique-

2.2.4 Modélisation

L’absorption d’H2S dans des solutions concentrées d’hypochlorite de sodium est reconnue pour obéir à un régime de réaction rapide pour lequel le soluté absorbé est consommé très rapidement à proximité de l’interface gaz-liquide sans diffuser dans le cœur de la solution (Bonnin, 1991; Couvert et

al., 2008a). Dans ces conditions, le débit molaire d’H2S transféré par section Sc de contacteur (dFT/Sc en mol s-1 m-2) se calcule en fonction d’un élément infinitésimal de hauteur (dz) selon l’Eq. 1 (Roustan, 2003):

𝑑𝐹𝑇

𝑆𝐶 = 𝐾𝐿𝑎°𝑅𝑇𝐶𝐺

𝐻 𝑑𝑧 Eq. 1

Avec :

 CG : la concentration du soluté (H2S) en phase gazeuse (mol m-3)

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 KL : le coefficient global de transfert de matière côté liquide (m s-1)

 a° : l’aire interfaciale gaz-liquide par unité de volume de contacteur (m2 m-3)  KLa° : le coefficient volumétrique global de transfert de matière côté liquide (s-1)

KL et a° dépendent tous les deux des conditions opératoires (débits de gaz et de liquide et propriétés physico-chimiques des fluides) dans un contacteur donné. Dans le cas d’une absorption avec réaction chimique (Roustan, 2003):

𝐾𝐿𝑎° = ( 1

𝐸𝑘𝐿+ 𝑅𝑇

𝐻𝑘𝐺) 𝑎° Eq. 2

Avec :

 kL : le coefficient local de transfert de matière côté liquide (m s-1)  kG : le coefficient local de transfert de matière côté gaz (m s-1)

 E : Le coefficient d’accélération de transfert de matière (sans dimension). E = 1 en l’absence de réaction chimique (absorption physique).

E représente le ratio du flux transféré avec et sans réaction chimique pour une différence de

concentration CL*- CL identique (E ≥ 1). Il dépend de nombreux facteurs tels que la nature de la transformation (réaction élémentaire, réaction équilibrée, réactions successives, réactions jumelles, etc.), la cinétique de la réaction et la cinétique de transfert (van Swaaij and Versteeg, 1992). Ces paramètres nécessitent donc la connaissance du coefficient de transfert de film côté liquide kL, des constantes cinétiques des réactions mises en jeu ainsi que des constantes de diffusion et des concentrations des espèces impliquées.

Avec :

 CL : la concentration du soluté dans le cœur du liquide (mol m-3). Cette concentration est nulle dans le cas présent (régime de réaction rapide)

 CL*: la concentration du soluté à l’interface côté liquide (mol m-3) qui peut être calculée selon l’Eq. 3 (Biard and Couvert, 2013) :

𝐶𝐿=𝑘𝐺(𝑅𝑇𝐶𝐺−𝐻𝐶𝐿)

𝐻𝑘𝐺+𝑅𝑇𝐸𝑘𝐿 + 𝐶𝐿 Eq. 3

En milieu basique et oxydant, H2S peut potentiellement réagir de façon compétitive avec HO-, ClO- et l’acide hypochloreux ClOH, dont la plus faible concentration que ClO- en milieu basique peut-être compensée par une plus grande réactivité (Deborde and Von Gunten, 2008). En l’absence de connaissance précise du mécanisme réactionnel et des constantes cinétiques associées, un mécanisme

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simplifié impliquant une réaction d’oxydation bimoléculaire entre H2S et ClOH/ClO- a été considéré, ce choix étant conforté par l’apparente dépendance du rendement de transfert avec la concentration en oxydant (et non avec le pH). Pour une réaction rapide de second ordre, E dépend typiquement de deux nombres adimensionnels, le nombre de Hatta (Ha) et le facteur d’accélération infini (Ei), qui correspond au facteur E maximal qu’il serait possible d’obtenir pour des concentrations CL* et CR (concentration du réactif) fixées dans le cas d’une réaction instantanée :

𝐻𝑎 =√𝐷𝐿𝑘𝑜𝑥𝐶𝑅

𝑘𝐿 Eq. 4

𝐸𝑖= 1 + 𝐷𝑅𝐶𝑅

𝜐𝐷𝐿𝐶𝐿 d’après la théorie du double-film Eq. 5

𝐸𝑖= √𝐷𝐿

𝐷𝑅+ 𝐶𝑅

𝜐𝐶𝐿𝐷𝐷𝑅

𝐿 d’après la théorie du renouvellement de Danckwerts Eq. 6 Avec :

 DL et DR : les coefficients de diffusion du soluté et du réactif dans le solvant (m2 s-1)  CR : la concentration de l’oxydant (mol m-3 ou mol L-1)

  : le nombre de mol d’oxydant consommé par mol de soluté (au maximum égal à 4 en cas de minéralisation totale de H2S en SO42-)

 kox : la constante cinétique de la réaction bimoléculaire H2S + Ox → Produits (L mol-1 s-1 ou m3 mol-1 s-1)

Quelle que soit la théorie considérée, compte-tenu des concentrations importantes en oxydant, Ei >>

Ha. Dans ce cas particulier, correspondant à une réaction de pseudo-premier ordre, telle que la

concentration en oxydant, introduit en excès par rapport à la concentration interfaciale d’H2S (CR >>

CL*), reste constante à proximité de l’interface gaz-liquide, E est égal à Ha, permettant de reformuler l’Eq. 1 : 𝑑𝐹𝑇 𝑆 = ( 1 √𝐷𝐿𝑘𝑜𝑥𝐶𝑅+𝐻𝑘𝑅𝑇 𝐺) −1 𝑎°𝑅𝑇𝐶𝐺 𝐻 𝑑𝑧 Eq. 7

Par intégration sur la hauteur de garnissage (Z) en considérant un écoulement à co-courant isotherme et piston de deux phases, l’Eq. 8 est obtenue :

𝐹𝑇 𝑆𝐶 = ( 𝐻 √𝐷𝐿𝑘𝑜𝑥𝐶𝑅+ 1 𝑘𝐺) −1 𝑎°𝐶𝐺,𝑒−𝐶𝐺,𝑠 𝑙𝑛(𝐶𝐺,𝑒 𝐶𝐺,𝑠) 𝑍 Eq. 8

Cette équation est obtenue en considérant que CR ne varie pas significativement entre l’entrée et la sortie du réacteur. En effet, d’après le bilan de matière :

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𝐶𝑅𝐹𝐿

𝜐 ≫ 𝐹𝑇 Eq. 9

 FL : le débit de liquide dans la colonne (m3 s-1)

L’efficacité de transfert (ou abattement EG) peut être défini comme :

𝐸𝐺=𝐶𝐺,𝑒−𝐶𝐺,𝑠

𝐶𝐺,𝑒 Eq. 10

Par ailleurs, le bilan de matière aux bornes de la colonne permet d’écrire que :

𝐹𝑇=(𝐶𝐺,𝑒−𝐶𝐺,𝑠)𝐹𝐺 = (𝐶𝐺,𝑒−𝐶𝐺,𝑠)𝑆𝐶𝑈𝑆,𝐺 Eq. 11

Des Eqs. 8, 10 et 11, il est ainsi possible de déduire EG :

𝐸𝐺= 1 − 𝑒𝑥𝑝 (− ( 𝐻 √𝐷𝐿𝑘𝑜𝑥𝐶𝑅+ 1 𝑘𝐺) −1 𝑎°𝐻 𝑈𝑆,𝐺) Eq. 12

Cette équation met en évidence la forte dépendance du rendement de transfert à la vitesse du gaz

USG, à l’aire interfaciale a°, ainsi qu’à la concentration en oxydant CR. L’aire interfaciale peut être écrite sous la forme d’une loi puissance en fonction des vitesses de deux fluides (𝑎° = 𝐶1𝑈𝑆,𝐺𝛼𝑈𝑆,𝐿𝛽), permettant de réécrire l’Eq. 12:

𝐸𝐺= 1 − 𝑒𝑥𝑝 (− ( 𝐻

√𝐷𝐿𝑘𝑜𝑥𝐶𝑅+ 1

𝑘𝐺)

−1

𝐻𝐶1𝑈𝑆,𝐺𝛼−1𝑈𝑆,𝐿𝛽) Eq. 13

 Avec C1, ,  des constantes.

kG dépend également de US,G. Toutefois, compte-tenu de la faible variation d’USG dans cette série d’expérience de 14,1 à 18,6 m s-1, une valeur constante a été retenue en première approximation. Compte-tenu de la rapidité de la réaction entre H2S et l’oxydant, une constante cinétique kox de l’ordre de 106 à 108 L mol-1 s-1 peut être suspectée. Par résolution numérique, en tentant de minimiser la somme des moindres carrés entre les valeurs expérimentales de l’efficacité et celles déduites de l’Eq. 13, les valeurs de kG, C1, , ont pu être déterminées pour différentes valeurs de kox (Tableau 11). Quelle que soit la valeur de kox considérée, le modèle ajuste avec un très faible écart relatif moyen (ERM <1%) les résultats expérimentaux, et montre une forte influence de la valeur superficielle du gaz sur l’aire interfaciale avec un exposant  compris entre 1,29 et 1,61. La vitesse superficielle du liquide possède une influence plus modérée avec un exposant associé  de l’ordre de 0,6.

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Tableau 11. Résultats des simulations concernant le transfert d’H2S.

kox (L mol-1 s-1) 1,0 × 106 1,0 × 107 1,0 × 108 5,0 × 108 Gamme de Hattaa 80-116 250-370 790-1 160 1 770-2 600 C1 205,06 118,43 47,67 27,70  1,61 1,44 1,37 1,29  0,59 0,61 0,62 0,63 kG (m s-1) 0,14 0,31 0,85 1,67 a0 moyen (m2 m-3) 3 636 1 225 398 184 kGa0 moyen (s-1) 510 380 338 307 R2 (%) 97,44 97,99 98,06 98,02 ERM (%) 0,83 0,71 0,67 0,66

aCalculé en considérant un kL réaliste de 10-4 m s-1

Figure 7. Simulation de l’abattement et de la perte de charge en fonction du rapport L/G pour quatre concentrations en chlore (CR de 1,0 à 4,0 g L-1) différentes. (USG = 14,1 m s-1).

Ces simulations ont permis de valider les tendances mises en évidence dans le Tableau 10. Compte tenu du fait que  > 1, il est bien logique que EG augmente avec US,G, malgré une diminution du temps de séjour du gaz. A l’aide des valeurs de kox, kG, C1, ,  déterminées, l’abattement obtenu pour différentes conditions opératoires peut être simulé. En sélectionnant des doses d’hypochlorite de sodium de 3 à 4 g L-1 et des rapports L/G supérieurs à 5, des rendements de 95% pourraient être obtenus pour une vitesse du gaz de l’ordre de 14 m s-1 en limitant la perte de charge à une quarantaine de mbar (Figure 7). Les valeurs de a° moyennes obtenues s’échelonnent de l’ordre de 102 à plus de 103 m2 m-3 ; compte tenu des observations expérimentales et des résultats préliminaires du laboratoire qui soutiennent une aire interfaciale élevée supérieure à 1000 m2 m-3 (Sanchez et al., 2007b), il paraitrait

20 25 30 35 40 45 65 70 75 80 85 90 95 100 2.0 3.0 4.0 5.0 6.0 Pe rte d e ch ar ge ( m b ar ) A b atte m en t ( % ) L/G 1 g/L 2 g/L 3 g/L 4g/L Perte de charge

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plus cohérent que la constante cinétique apparente kox soit inférieure à 107 L mol-1 s-1. Les valeurs moyennes de kGa° obtenues, dans la gamme 300-500 s-1 mettent clairement en exergue la capacité du contacteur à favoriser le transfert, tant en développant l’aire interfaciale qu’en augmentant les turbulences, surtout dans la phase gazeuse.

Cette étude expérimentale sur site industriel, réalisée dans le cadre de mes travaux de doctorat, a clairement mis en évidence le potentiel d’un contacteur compact à co-courant et haute vitesse de gaz pour intensifier le transfert, permettant une augmentation de la compacité des installations. La méconnaissance tant du mécanisme que des valeurs des constantes cinétiques associées à l’oxydation du sulfure d’hydrogène par l’hypochlorite de sodium s’est cependant révélée préjudiciable à la modélisation du transfert. Rapidement, j’ai souhaité développer une étude cinétique de cette réaction, peu triviale du fait de la rapidité de cette réaction. L’approche que j’ai mise en place est ainsi développée dans la partie 2.3.

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2.3 Etude cinétique de la réaction entre le sulfure d’hydrogène et l’hypochlorite de