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5.4 Fonctions de force gamma

5.4.2 Modèles de fonction de force gamma

Jusqu’à maintenant les modèles de fonction de force gamma analytiques SLO (Standard Lo- rentzian), EGLO (Enhanced Generalized Lorentzian) et microscopiques (RSF tabulées) issues de calculs de QRPA (méthode HF+BCS avec l’interaction SLy4) étaient disponibles dans le code FIFRELIN.

L’existence dans la littérature de modèles de RSF permettant de tenir compte de la dépendance de l’énergie et de la déformation du noyau dans la description de la GDR a motivé l’étude de quelques uns de ces modèles lors de ce travail. De plus certains des modèles étudiés ne différent que par le nombre de processus participant à l’amortissement de la GDR, chacun contribuant à la largeur de la résonance Γ. Ces modèles permettent donc d’étudier l’influence des processus d’amortissement de la GDR sur les observables gammas de fission.

Dans cette thèse, je me suis donc intéressé en plus des modèles SLO et EGLO, au mo- dèle MLO (Modified Lorentzian) qui se décline en trois sous-modèles notés MLO1, MLO2 et MLO3 chacun décrivant les modes d’amortissement de la GDR de manière différente.

Ces modèles sont maintenant brièvement décrits pour comprendre les hypothèses sur lesquelles ils se basent.

Modèle SLO (Standard Lorentzian)

Les sections efficaces de photo-absorption sont mesurées pour des noyaux initialement dans leur état fondamental. Les RSF associées sont notées fG.S.

XL . Brink suppose que la fXL associée

à un noyau initialement dans un état excité a la même forme que fG.S.

XL , i.e. que sa largeur Γr et

son amplitude σr sont indépendantes de l’état excité initial. Par contre l’énergie de la résonance

est translatée de l’énergie de cet état initial excité |ii tel que Er||ii= Er|G.S.+ |ii.

Dans ce modèle, la largeur Γr dépend de la force de couplage entre les nucléons et la surface du

noyau. La RSF SLO s’écrit alors :

fE1(γ) = 8.674 ∗ 10−8σrΓr Γr  2 γ− Er2 2 + 2 γΓ2r [MeV−3] (B.5.41) avec Γ en MeV, < γ> en MeV et σ en mbarn.

Modèle EGLO (Enhanced Generalized Lorentzian)

Kopecky et Uhl [125] proposent une paramétrisation de la largeur de la résonance Γ permet- tant de prendre en compte la dépendance en énergie de cette dernière par l’intermédiaire de la température finale Tf du noyau. La RSF s’écrit alors :

fE1(γ) = 8.674 ∗ 10−8σrΓr    ΓK(γ, Tf)  2 γ− Er2 2 + 2 γΓ2K(γ, Tf) + 0.7ΓK(γ= 0, Tf) E3 r    [MeV −3] (B.5.42) avec la largeur de la résonance définie par :

ΓK(γ, Tf) = Ccoll(γ)(2γ+ 4π2Tf2) (B.5.43)

avec Ccoll(γ) un paramètre ajusté aux données expérimentales et dépendant du modèle de

densité de niveaux utilisé lors de l’ajustement. Le terme asymptotique Γr(γ=0,Tf) E3

r est ajouté

pour mieux reproduire les données expérimentales à basse énergie.

Modèle MLO (Modified Lorentzian)

CHAPITRE 5. INFLUENCE DES MODÈLES SUR LES OBSERVABLES DE FISSION évolue alors sous l’action du potentiel auto-cohérent du noyau (V ). Dans cette description, f(r, p, t) est soumise à un phénomène d’amortissement qui est caractérisé par l’introduction d’un terme source du processus de relaxation de l’état collectif noté J(r, p, t). Lorsque f(r, p, t) est soumis à de faibles perturbations l’équation de Landau-Vlasov s’écrit alors :

∂δf ∂t + p m ∂δf ∂r∂V0 ∂r δf ∂p∂δV ∂r δf0 ∂p = J (δf) (B.5.44)

Lors de l’amortissement de la GDR par émission radiative pour des énergies gammas inférieures à 10 MeV, les deux principaux processus de relaxation à considérer sont :

1. le couplage de l’état vibrationnel à des états d’excitation intrinsèque de type particule- trou (1p-1h). Ce couplage caractérise la relaxation intrinsèque de la résonance par col- lision. Il dépend de la section efficace d’interaction entre un neutron et un proton à l’intérieur du noyau. Plus celle-ci sera grande, plus ce couplage sera important. Le terme source caractérisant cet amortissement se met sous la forme :

Jc(δf) = −

δf(r, p, t)

τc(ω0, T) (B.5.45)

avec τc le temps caractéristique de relaxation vers l’état d’équilibre dû aux collisions

internes. La largeur de la résonance associée à ce phénomène est notée Γc= ~/τc.

2. l’interaction entre un nucléon et la surface du noyau. Dans cette approche, la surface du noyau est définie par la chute brutale du potentiel nucléaire auto-cohérent V . Le mou- vement de cette surface dépend de la multipolarité L de l’état vibrationnel, dont une représentation est visible sur la Figure B.5.37. Les fonctions d’onde associées aux nu- cléons perdent alors leur cohérence en se réfléchissant sur la surface du noyau et peuplent alors des états d’excitation intrinsèque du noyau. Le terme source caractérisant cet amor- tissement s’écrit :

Jw(δf) = −

δf(r, p, t)

τw (B.5.46)

avec τw le temps caractéristique de relaxation vers l’état d’équilibre. Le terme Γw = ~/τw

correspond à la fragmentation de la résonance associée à ce mode d’amortissement. Cette approche a donné naissance à trois modèles de RSF : MLO1, MLO2 et MLO3, qui différent par les termes sources d’amortissement (J(δf)) présents dans l’ÉquationB.5.44.

Avec le modèle MLO1, seul le terme de relaxation collisionnel est considéré. La largeur totale de la résonance s’écrit alors :

ΓM LO1(γ, Tf) = Γc (B.5.47)

Le modèle MLO2 est obtenu en ajoutant au modèle MLO1 un terme de relaxation décrivant l’interaction des nucléons avec la surface du noyau. La largeur de la résonance est alors :

ΓM LO2(γ, Tf) = Γc+ ks(γ, Erw (B.5.48)

avec ks(γ, Er) un facteur d’échelle dépendant de l’énergie du gamma émis et de l’énergie de

résonance.

Le modèle MLO3 dérive du modèle MLO2 dans lequel le terme de relaxation collisionnel est maintenant explicitement proportionnel à la section efficace d’interaction proton-neutron dans le milieu. Le terme de relaxation surfacique est identique à MLO2. La largeur totale de la résonance s’écrit :

ΓM LO3(γ, Tf) = Γ

0

c+ ks(γ, Erw (B.5.49)

Pour plus de détails sur l’expression de chacun des paramètres, se référer à [97].

Dans les modèles MLO, un facteur d’échelle Λ(γ, Tf) dont l’expression est donnée par la

5.4. FONCTIONS DE FORCE GAMMA

d’augmenter la probabilité d’émission de photons de basse énergie et d’augmenter la probabi- lité d’émettre un photon d’énergie donnée lorsque l’énergie d’excitation du noyau augmente. Comme le montre la Figure B.5.40, ce facteur d’accroissement permet d’obtenir un comporte- ment asymptotique semblable au modèle EGLO mais la valeur asymptotique de ce terme est plus faible que celle du modèle EGLO.

Λ(γ, Tf) = 1

1 − exp

Tf (B.5.50)

La RSF des modèles MLO s’exprime alors selon : fM LO(γ) = 8.674 ∗ 10−8Λ(γ, Tf)σrΓr γΓ(γ, Tf)  2 γ− Er2 2 + 2 γΓ2(γ, Tf) (B.5.51) L’ensemble des RSF présentées sont obtenues dans le cas où les noyaux sont sphériques. Or les fragments de fission sont souvent déformés (β26= 0). Pour les noyaux déformés la GDR possède deux composantes : une correspondante à la vibration du noyau selon son axe de symétrie (demi- grand axe) et une correspondante à l’axe perpendiculaire (demi-petit axe). Le noyau possède donc des états collectifs vibrationnels selon ces deux axes. Chaque état est caractérisé par une énergie de résonance Er,axe, une largeur de résonance Γr,axe et une amplitude σr,axe. L’énergie

de résonance associée à la vibration selon un axe est inversement proportionnelle à la longueur de cet axe. La largeur de la résonance associée à chaque axe est obtenue à partir de largueur de la résonance associée à un noyau sphérique, Γ0, pondérée par l’inverse de la longueur du demi axe associé tel que Γr,axe = Γ0/(demi-axe). L’amplitude de la vibration du noyau selon l’axe perpendiculaire est donc deux fois plus grande que celle selon l’axe de symétrie : σr,⊥= 2σk. La RSF d’un noyau déformé s’écrit donc :

fE1def(γ) =

X

axe=⊥,k

fE1axe(γ)|Eaxe

r ,Γaxer ,σraxe (B.5.52)

Les RSF des noyaux déformés sont obtenues à partir des modèles MLO2 et MLO3 dans lesquels l’interaction des nucléons avec la surface du noyau participe effectivement à l’amortisse- ment de la GDR (terme de relaxation Γw). Ce sont les largeurs Γw de ces modèles qui tiennent

compte de la déformation des noyaux selon la méthode décrite ci-dessus. Pour plus de détails se référer à [97,128].

Finalement les modèles SLO, EGLO et MLO1 permettent de décrire les noyaux sphériques et les modèles MLO2 et MLO3 les noyaux déformés.

L’implémentation de ces modèles fait appel à de très nombreux paramètres et est sujette à de nombreuses erreurs : erreurs de code ou erreurs dans la documentation RIPL-3. La première étape est donc de reproduire les graphiques présents dans la documentation RIPL-3 sur lesquels les différents modèles de RSF sont comparés aux données expérimentales. Un exemple de cette vérification est montré sur la Figure B.5.38.

CHAPITRE 5. INFLUENCE DES MODÈLES SUR LES OBSERVABLES DE FISSION 0,1 1 10 ε γ [MeV] 1e-09 1e-08 1e-07 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3 Popov (1982) 10 20 30 ε γ [MeV] 5e-07 1e-06 1,5e-06 2e-06 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3 Szeflinski (1983)

Figure B.5.38 – Comparaison des fonctions de force gamma théoriques aux données expérimen- tales, pour le 144Nd (βGS =0.0) (gauche) et le 90Zr (βGS =0.053) (droite) [129]. Les mêmes comparaisons sont présentes dans la documentation RIPL-3 p.3171-3172.

Il est rappelé que les fonctions de force gamma définies ci-dessus ne permettent de décrire que les transitions électrique de type E1. Les autres transitions électromagnétiques peuvent être obtenues à partir des largeurs partielles de Weisskopf comme exposé dans la Section 4.3.2.

Les résultats des modèles de RSF pour le 106Mo et le 144Ba sont présentés sur les Figures

B.5.39 etB.5.40. On observe (Figure B.5.39) que l’amplitude de la RSF du modèle MLO1 est deux à trois fois plus importante que celle prédite par les autres modèles.

Les RSF MLO2 et MLO3 du106Mo, qui a un paramètre de déformation βM o

GS = 0.361, possèdent

chacune deux composantes lorentziennes. La composante de droite de la GDR caractérise la vi- bration du noyau selon son demi-grand axe et la composante de gauche de la GDR sa vibration selon son demi-petit axe. Pour ce noyau, la prise en compte de la déformation du noyau dans la RSF a une influence significative sur sa forme pour des énergies comprises entre 10 MeV et 25 MeV. De manière générale, la prise en compte de la déformation des noyaux dans les RSF augmente leur largeur à mi-hauteur d’environ ∼1 MeV par rapport à celles utilisées pour décrire les noyaux sphériques.

Par contre les RSF MLO2 et MLO3 du 144Ba, qui a un paramètre de déformation βBa

GS = 0.144,

ne possèdent qu’une composante lorentzienne.

Pour des énergies gammas inférieures à 10 MeV, énergies des gammas émis par les fragments de fission, la Figure B.5.40montre que globalement quel que soit le noyau, pour des énergies :

• γ<1 MeV, les valeurs de la RSF prédites par le modèle EGLO sont environ trois à cinq

fois plus importantes que celles prédites par les modèles MLO. Cette dernière est environ trois fois plus importante que celle prédite par le modèle SLO. Le classement des modèles selon la valeur de l’amplitude de leur RSF est donc :

EGLO > M LO1 > MLO2 > MLO3 > SLO

• 1 MeV<γ<8 MeV, les écarts des valeurs des RSF des différents modèles s’amenuisent

à mesure que γ augmente. Grossièrement, les valeurs de RSF données par le modèle

SLO sont deux à trois fois plus élevées que celles des différents modèles MLO. Celles-ci sont deux à trois fois plus importantes que celles obtenues avec le modèle EGLO. Le classement des modèles selon la valeur de l’amplitude de leur RSF est donc :

SLO > M LO1 ∼ MLO2 ∼ MLO3 > EGLO • γ>8 MeV, les écarts des valeurs des RSF sont négligeables :

SLO > M LO1 ∼ MLO2 ∼ MLO3 > EGLO

D. Régnier durant sa thèse [7] avait déjà étudié l’influence des modèles SLO et EGLO sur les observables de fission et avait constaté que le choix de l’un ou l’autre des modèles n’affecte pas

5.4. FONCTIONS DE FORCE GAMMA

significativement les observables de fission. Comme les valeurs des RSF MLOs pour des énergies gammas inférieures à 10 MeV sont similaires et se situent généralement entre les valeurs des RSF EGLO et SLO, et ce quelle que soit la déformation du noyau, elles ne devraient donc pas non plus, a priori, affecter significativement les observables de fission. Les données présentes dans la documentation RIPL-3 ne le sont que pour des noyaux dont le paramètre de déformation est proche de zéro (144Nd et 90Zr), par conséquent ces conclusions ne pouvaient être tirées pour les noyaux déformés avant l’implémentation des modèles MLO2 et MLO3.

L’influence de ces cinq modèles sur les spectres de gammas prompts du 106Mo et du144Ba a été regardée. Pour cela l’état initial est défini par une énergie d’excitation égale à Sn. Cela permet

d’étudier seulement l’influence des modèles de RSF sur les observables gammas. Le Jπ est lui

fixé à 14−. Les différents spectres gammas obtenus, exposés sur la Figure B.5.41, ne présentent aucune différence significative. Cette étude préliminaire montre donc que les observables gammas de fission devraient être peu influencées par l’utilisation d’un modèle de RSF plutôt qu’un autre.

0 5 10 15 20 25 30 ε γ [MeV] 0 5e-07 1e-06 1,5e-06 2e-06 2,5e-06 3e-06 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3 0 5 10 15 20 25 30 ε γ [MeV] 0 1e-06 2e-06 3e-06 4e-06 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3

Figure B.5.39 – Fonction de force gamma du106Mo (gauche) et du 144Ba (droite).

0,1 1 10 ε γ [MeV] 1e-09 1e-08 1e-07 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3 0,1 1 10 εγ [MeV] 1e-09 1e-08 1e-07 1e-06 fE1 [MeV -3] SLO EGLO MLO1 MLO2 MLO3

Figure B.5.40 – Fonctions de force gamma pour des gammas d’énergie inférieure à 10 MeV pour le 106Mo (gauche) et le144Ba (droite).

CHAPITRE 5. INFLUENCE DES MODÈLES SUR LES OBSERVABLES DE FISSION 0 1 2 3 4 5 6 ε γ [MeV] 1e-05 0,0001 0,001 0,01 0,1 1 M γ EGLO MLO1 MLO2 MLO3 0 1 2 3 4 5 6 ε γ [MeV] 1e-05 0,0001 0,001 0,01 0,1 1 M γ EGLO MLO1 MLO2 MLO3

Figure B.5.41 – Spectres gammas du 106Mo (gauche) et du 144Ba (droite), respectivement ob- tenus à partir des états initiaux (E=6.8 MeV, J =14 ~, π =-) et (E=5.9 MeV, J =14 ~, π =-).