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Le modèle bidimensionnel de Moliner

3.2 La théorie des représentations sociales

3.2.5 Le modèle bidimensionnel de Moliner

Développé par Pascal Moliner (1995), professeur de psychologie sociale à l’Université Paul Valléry de Montpellier en France, le modèle bidimensionnel des représentations sociales intègre les notions de noyau central d’Abric (1994) et celles des principes organisateurs de Doise (1990). Cette section en présente

sommairement les fondements, de même que l’application du modèle bidimensionnel pour l’objet d’étude.

3.2.5.1 Le noyau central

Une représentation sociale constitue « un système sociocognitif particulier composé de deux sous-systèmes en interaction : un système central et un système périphérique » (Abric, 2003 : 82), ces deux composantes étant à la fois complémentaires et spécifiques dans l’étude des représentations sociales.

Selon Abric (1994 : 78), « l’homogénéité d’un groupe social » se définit par l'adhésion aux éléments de la représentation qui constituent le noyau central, puisqu’ils sont partagés de façon plus ou moins consensuelle par l’ensemble des individus d’un groupe. Ce noyau fait alors l’objet d’un large consensus. L’adhésion des membres conforte la signification et la précision de l’objet, lui octroyant ainsi un pouvoir d’influence. C’est aussi la constituante la plus stable, puisqu’elle résiste aux changements. Pouliot et ses collègues (2013 : 15) rappellent que « le noyau central assure des fonctions génératrices et organisatrices en donnant un sens aux éléments périphériques et en déterminant la nature des liens qui unissent les éléments de la représentation ».

Les éléments périphériques facilitent quant à eux l’adaptation, la différenciation en fonction du vécu et l’intégration des expériences individuelles (Pouliot, Camiré &

St-Jacques, 2013). Contrairement au noyau central, le système périphérique est directement touché par les caractéristiques individuelles et les changements du contexte social.

3.2.5.2 Les principes organisateurs

La deuxième dimension, tirée du modèle des principes organisateurs de Doise (1990), est liée au caractère évaluatif des éléments d’une représentation qui elle-même est socialement déterminée (Moliner, 1995). Selon Doise (1990), les principes organisateurs ont deux fonctions : ils génèrent des prises de position et organisent les différences individuelles. Selon Negura et Maranda (2004 : 133), cela signifie que l’aspect dynamique des représentations sociales provient de « la situation de communication, donc par les rôles et les positions dans un champ social, où les personnes adoptent des points de vue différents à partir des mêmes principes organisateurs, en fonction de leur appartenance sociale ». Les interactions sont investies d’une charge symbolique et permettent aux individus et aux groupes de se définir les uns par rapport aux autres.

3.2.5.3 Application du modèle bidimensionnel à l’objet d’étude

Le modèle développé par Moliner (1995) comporte deux dimensions puisées dans les propositions théoriques précédentes. La première repose sur les éléments constitutifs de la représentation, soit l’information, l’image et l’attitude. En référence au système du noyau, Moliner (1995 : 51) explique que « sont considérés comme centraux les éléments qui sont estimés nécessaires, par une large majorité d’individus, pour définir l’objet d’une représentation ». Pour la réalisation de cette étude, la première étape consiste alors à identifier les éléments qui font consensus chez les participants et qui contribuent à la construction de leur discours sur la violence entre partenaires masculins.

La deuxième dimension réfère au caractère évaluatif des éléments d’une représentation, c’est-à-dire leur valeur déterminée socialement, qu’elle soit positive ou négative. En identifiant les éléments qui sont investis d’une valeur particulière, ce modèle prend en considération ceux qui peuvent susciter des divergences. La deuxième étape consiste alors à les intégrer dans un ensemble unique.

Par ailleurs, ce modèle permet de répartir les éléments d’une représentation en quatre champs distincts qui correspondent à des logiques différentes, soit les définitions, les descriptions, les normes et les attentes. Les définitions regroupent les éléments centraux peu évaluatifs qui permettent aux individus de définir l’objet de la représentation. Les descriptions regroupent quant à elles les éléments périphériques peu évaluatifs, c’est-à-dire des caractéristiques fréquemment attribuées à l’objet de représentation, mais non nécessaires à sa définition. Ces éléments permettent l’action et la compréhension des situations. Les normes regroupent les éléments centraux évaluatifs nécessaires pour définir l’objet de représentation, mais qui expriment un jugement de valeur sur cet objet. Enfin, les attentes regroupent des éléments périphériques évaluatifs.

Pour le sujet traité dans la présente étude, le modèle bidimensionnel prend en compte l’appartenance sociale des participants, ainsi que le contexte social belge associé à la violence entre partenaires et les relations intimes des hommes gais.

Puisque les interactions sociales ont un caractère symbolique qui participe à la construction identitaire (Doise, 1990), leurs caractéristiques individuelles et de groupe peuvent induire des différences de positions et influencer leurs représentations à propos de la violence entre partenaires masculins. Le tableau suivant offre une description de l’application du modèle bidimensionnel pour l’étude des représentations sociales de la violence entre partenaires masculins.

Tableau 2 : Application du modèle bidimensionnel pour l’objet d’étude

ÉLÉMENT EXPLICATION DESCRIPTION

Les connaissances génériques

• Ce que le participant connaît des relations intimes des hommes gais et de la violence entre partenaires masculins

• D’où provient l’information du participant sur la violence entre partenaires masculins Définition de la violence entre partenaires masculins

• Comment le participant définit-il la violence entre partenaires masculins

• Formes d’expression des manifestations de la violence entre partenaires chez les gais

• Contexte social lié au phénomène de la violence entre partenaires masculins

• Demande d’aide des hommes gais ayant vécu (agi ou subi) de la violence dans leurs relations intimes

• Prédispositions à l’intervention (expérience vécue ou anticipée)

• Recommandations visant à améliorer

l’accessibilité des services pour les hommes

Réactions émotives

• Sentiments ressentis à l’évocation ou à l’expérience de la violence entre partenaires masculins

Réactions normatives

• Mise en contexte des situations de violence entre partenaires masculins

• Explications théoriques entourant l’exercice de la violence dans les couples d’hommes gais