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Au cours de l’année 2012, 12,5 % des patients reçus dans les Caso sont mineurs (soit 2 993 patients), poursuivant ainsi l’augmentation amorcée en 2007. Ainsi, l’évolution entre 2007 et 2012 du nombre de mineurs consultant dans les Caso est de 69 %. Cette hausse est beaucoup plus marquée que celle de l’ensemble des patients, qui est de 30 % sur la même période (figure 12).

En 2012, plus de la moitié (52 %) des mineurs sont âgés de 6 ans et moins, 28 % ont entre 7 et 14 ans et 20 % entre 15 et 17 ans.

La proportion de jeunes enfants (moins de 6 ans) varie à la fois selon le sexe et la nationalité ; elle est plus importante chez les filles (54 % vs51 % parmi les garçons) ainsi que chez les Français (57 % vs52 % chez les étrangers). Seuls

40 % des enfants de 6 ans ou moins sont suivis par les ser-vices de protection maternelle et infantile (PMI), et ce de façon plus fréquente chez les Français (61 % vs36 % chez les étrangers). Ce suivi en PMI est extrêmement lié à l’état des droits à la couverture maladie. Ainsi, les mineurs de 6 ans et moins ayant des droits ouverts sont 71 % à être suivis en PMI contre 29 % de ceux n’ayant pas de couverture maladie.

Il est important de rappeler que les centres de PMI assurent gratuitement des consultations et des actions de prévention médico-sociale pour tous les enfants de la naissance jusqu'à 6 ans, indépendamment de la présence d’une couverture maladie ou d’un titre de séjour. Certains centres de PMI dis-pensent des soins curatifs, en particulier quand l’offre de soins est réduite sur le territoire.

1 813 2 423

2 025 1 721

1 974 2 101

1 756 1 772 1 912

2 471 2 465

2 831 2 993 10,5 10,0

9,2 9,2 9,8 9,6 8,1

9,5 9,8

11,9 11,6 12,2 12,5

0 3 6 9 12 15

0 500 1 000 1 500 2 000 2 500 3 000 3 500

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Effectif

%

Effectif %

Figure 12 : Évolution du nombre et de la proportion de mineurs reçus dans les Caso de 2000 à 2012

Comme pour le reste des consultants, 95 % des mineurs sont de nationalité étrangère. On compte parmi eux une part nettement plus élevée de personnes originaires d’un pays eu-ropéen, qu’il s’agisse de pays de l’UE (32 % vs16 % des pa-tients majeurs) ou hors UE (20 % vs 11 %). Cette forte représentation de ressortissants de l’UE se traduit par le fait que près d’un mineur sur quatre est roumain (tableau 59).

Les nationalités les plus fréquemment rencontrées parmi les patients mineurs sont globalement identiques à celles de l’an-née précédente, avec cependant l’émergence de mineurs haïtiens, guinéens et albanais.

Les mineurs de nationalité étrangère résident majoritairement en France depuis peu de temps : 65 % depuis moins d’un an et, parmi eux, un tiers depuis moins de trois mois. Près de 70 % des jeunes originaires d’Europe hors UE vivent en France depuis moins de trois mois.

En majorité, les mineurs sont accompagnés de leurs parents ou d’un proche (tableau 60).

Environ 6 % sont isolés, soit 134 mineurs, chiffre en nette augmentation par rapport à 2011 (3 %, soit 64 jeunes). Ces mineurs isolés sont pour la plupart (90 %) des garçons, âgés majoritairement (92 %) de 15 ans et plus, et pour beaucoup (70 %) originaires d’Afrique subsaharienne (Cameroun, Mali, Guinée, Congo-Brazzaville). Plus de la moitié (56,2 %) sont en hébergement social et plus d’un mineur isolé sur 4 est sans domicile fixe. En théorie, les mineurs isolés étrangers, qui sont dans une situation de grande vulnérabilité, relèvent de la protection de l’Aide sociale à l’enfance (Ase). À ce titre, ils ne peuvent faire l’objet d’aucune mesure d’éloignement du territoire et peuvent donc se voir accorder un titre de séjour. Leur minorité est souvent contestée, conduisant ainsi à la pratique d’une expertise osseuse pour déterminer leur âge. L’utilisation de ces tests osseux est fortement critiquée par le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, les éthiciens et les associations militantes. Non seu-lement ces tests sont contestés par les scientifiques, mais en plus cette méthode est contraire à la convention relative aux droits de l’enfant, qui souligne l’importance de témoigner du respect et de la confiance envers l’enfant.

Un mineur isolé afghan ne parlant pas anglais a été hospitalisé pour des problèmes rénaux pendant cinq jours, sans qu’aucun interprète ne lui ait été proposé. Le numéro de téléphone d’un de nos bénévoles avait été laissé au cas où, personne n’a pris la peine de le contacter, ni même d’effectuer une traduction via ISM interprétariat, plateforme à laquelle l’hôpital est abonné.”

[Mission Migrants littoral Nord-Pas-de-Calais]

Après avoir traversé la Libye et l’Italie, le jeune C.

est arrivé en France à 16 ans. Il a perdu ses parents suite au premier conflit armé en Côte d’Ivoire. Sans aucune attache en France, C. a été orienté vers la plateforme Enfants du Monde de la Croix-Rouge. Il a obtenu une prise en charge au titre de l’aide sociale à l’enfance sur le département du Val-de-Marne. Dès le premier jour de sa prise en charge, C. a dû passer un examen osseux dont les résultats ont contesté sa minorité. L’Ase du Val-de-Marne a de ce fait mis fin à son accueil et ce dernier s’est retrouvé à la rue. Après avoir dormi quelques semaines dehors, il a été accueilli par un compatriote dans un foyer de migrants. Il souhaite déposer une demande d’asile mais il ne peut bénéficier de la désignation d’un administrateur ad hoc, indispensable pour le représenter légalement auprès de la préfecture, car pour le tribunal de grande instance il est considéré comme majeur alors qu’au regard de ses documents d’identité il est mineur. Au-delà de l’arrêt d’une prise en charge socio-éducative adaptée, la contestation de sa minorité est venue complexifier le dépôt de sa demande d’asile et par conséquent ses chances de régularisation en France.” [Caso de St Denis]

“ “

Tableau 59 : Répartition par nationalité des mineurs accueillis dans les Caso, 2012

Nationalités % Nationalités %

Bulgarie 4,8 Côte d’Ivoire 1,7

Maroc 3,3 Autres 29,7

Les mineurs à l’épreuve du mal-logement

Les mineurs connaissent ,comme les adultes, d’importantes difficultés de logement : ils sont 37,4 % à vivre dans un loge-ment précaire, 28,4 % à être hébergés par une association ou un organisme et 10,4 % à ne pas avoir de domicile fixe (tableau 60). Le mal-logement a des conséquences néfastes sur la santé, le développement et la réussite scolaire des enfants. Selon la Fondation Abbé-Pierre, en 2012, 600 000 enfants vivent dans des conditions de logement dégradées en France75.

« RUE-HÔPITALRUE? »

À l’accueil du Caso se présentent des parents avec leur enfant de 1 an. La mère explique que son enfant a chaud, tousse, mange et dort peu depuis une semaine. Elle est déjà venue à MdM pour consulter un médecin, mais depuis l’état de l’enfant s’est aggravé car il vomit, présente du sang dans ses fèces et a toujours de la fièvre.

Elle passe alors en priorité pour voir de nouveau le médecin, qui conclut que l’enfant doit être vu par un pédiatre à l’hôpital. Cette famille, d’origine roumaine, vit sous une tente dans la rue. La mère n’a pas fait les démarches pour avoir accès à la sécurité sociale pour elle ou son enfant. De plus, elle ne comprend pas bien le français.

15h30 : J’accompagne la famille à l’hôpital. Il faut d’abord passer par l’accueil afin que l’enfant soit évalué par l’infirmière qui va déterminer l’urgence ou non de sa prise en charge.

16h00 : Il faut de nouveau faire la queue afin de pouvoir faire les étiquettes d’admission à la consultation pédiatrique d’urgence. Là, l’agent administratif nous envoie vers l’assistante sociale.

16h30 : L’assistante sociale nous reçoit et remplit la demande d’AME pour la mère et l’enfant.

17h00 : le dossier est transmis aux urgences pédiatriques où l’on attend la venue d’un médecin. Il y a beaucoup de monde dans la salle d’attente…

18h00 : Un médecin des urgences vient examiner l’enfant. Il nous rappelle qu’il faut bien aller au rendez-vous de la PMI en mars 2013 afin de mettre à jour les vaccins de l’enfant.

18h30 : Un nouveau médecin vient examiner l’enfant, avec de nouveau de nombreuses questions difficiles à comprendre du fait de la barrière de la langue. Ce médecin souhaite des examens complémentaires avant de pouvoir se prononcer.

La famille me demande alors d’appeler le 115 pour avoir accès à un logement pour les nuits qui viennent. C’est leur premier signalement auprès du 115, les places d’hébergement sont saturées, notre interlocuteur du 115 est dans l’impossibilité de nous fournir une place pour cette nuit-là, nous

encourageant à rappeler les jours suivants.

(75) Fondation Abbé-Pierre, « Rapport 2012 sur l’état du mal-logement en France ».

Tableau 60 : Conditions de logement et situation familiale des mineurs reçus dans les Caso, 2012

% n

Situation familiale. Vivent avec…

Leurs parents (père et/ou mère) 90,5 2 188

Autre membre de la famille 3,0 72

Autre(s) personne(s) 1,0 24

Sont isolés 5,5 134

Logement

Stable 23,8 618

Précaire 37,4 970

Hébergés (association ou organisme) au moins 15 jours 28,4 373

Sans domicile fixe ou hébergement d’urgence au jour le jour 10,4 271

(76) Convention internationale des droits de l’enfant par arrêt du Conseil d’État du 7 juin 2006.

19h30 : L’infirmière procède aux examens

complémentaires. Cela s’avère difficile, car l’enfant a de nouveau 40 °C de fièvre. La mère est très secouée de voir son enfant se faire piquer par des aiguilles.

21h00 : Les premiers examens donnent des résultats qui indiquent un syndrome infectieux.

L’interne demande une radio pulmonaire.

22h00 : La radio révèle une pneumopathie, en lien avec les conditions de vie et d’habitat de l’enfant.

L’enfant et sa mère vont devoir rester à l’hôpital jusqu’au lendemain afin d’avoir un avis médical plus poussé, de faire des examens complémentaires et de démarrer une antibiothérapie.

22h30 : Nous arrivons dans l’unité d’hospitalisation de courte durée, où une puéricultrice et une

infirmière nous accueillent. Elles expliquent au couple les conditions d’hospitalisation, les règles du service, et commence une antibiothérapie afin de stopper la progression de la pneumopathie. Tout cela n’est pas facile après une longue journée d’attente et de stress pour les parents.

23h15 : L’enfant et sa mère restent à l’hôpital.

Le compagnon retourne dormir sous sa tente dans la rue par 1 °C ou 2 °C dehors.” [Caso de Lyon]

Près de 90 % des mineurs SANS couverture maladie

En France, l’accès aux droits des mineurs est en principe in-conditionnel. Tous les mineurs étrangers sont éligibles à l’AME dès leur arrivée sur le territoire76. La circulaire du 8 sep-tembre 2011 relative à la réglementation de l’AME précise

que ce droit « doit leur être ouvert immédiatement, même si leurs parents ne sont pas éligibles à l’AME ». Si les parents ont un titre de séjour, les enfants relèvent alors de la CMU.

Dans les faits, seuls 11 % des mineurs disposent d’une couverture maladie lors de leur première visite au Caso. Les freins à l’accès aux droits des patients mineurs sont du même ordre que ceux rencontrés par les adultes et concernent essentiellement les difficultés d’ordre administratif (38 %), la méconnaissance des droits et des structures de soins (32 %) ou encore l’impossibilité d’accéder à des droits sociaux (20 %).

Concernant le retard de recours aux soins constaté par les médecins, près d’un tiers des mineurs en sont affectés (tableau 61). Ils sont tout de même 32,4 % à nécessiter des soins urgents ou assez urgents au moment de leur consultation au Caso. Le renoncement aux soins au cours des douze der-niers mois concerne 13,3 % des jeunes patients, situation moins fréquente que chez les patients majeurs (22,6 %).

En 2012, 3 134 mineurs ont bénéficié de 4 998 consultations médicales, soit 1,6 consultation par mineur, moyenne plus faible que dans la population adulte (1,8). Ils souffrent essen-tiellement de pathologies respiratoires (56 %), loin devant les problèmes digestifs et dermatologiques, qui touchent res-pectivement 21 % et 19 % des mineurs.

Les problèmes de santé diagnostiqués sont majoritairement des pathologies aiguës : en effet, elles touchent 80,5 % des mineurs. Les pathologies chroniques concernent un mineur sur quatre (tableau 62).

L’indice de masse corporelle (IMC) a été calculé pour près de 900 mineurs, soit 25 % des mineurs reçus en 2012 (tableau 63). Les résultats, certes sur un faible échantillon, montrent que 13 % des mineurs sont en état de dénutrition et que les situations de dénutrition sont plus fréquentes parmi les plus jeunes enfants. Ces informations doivent être recueillies de façon plus systématique, en particulier chez les enfants en bas âge.

Tableau 61 : Retard de soins, renoncement aux soins et soins urgents ou assez urgents des patients mineurs reçus dans les Caso, 2012 (% en colonne)

Analyses ajustées sur le sexe, la nationalité, la situation administrative, la situation du logement et les droits à la couverture maladie.

*** p < 0,001 ** p < 0,01 * p < 0,05 ns : non significatif.

Mineurs Majeurs

% n % n

Retard de recours aux soins 32,2* 346 44,9 3 101

Renoncement à des soins au cours des 12 derniers mois 13,3** 142 22,6 3 033

Soins urgents ou assez urgents 32,4ns 408 34,2 2 600

Tableau 62 : Principaux problèmes de santé repérés chez les patients reçus dans les Caso selon l’âge, 2012 (% en colonne)

Mineurs Adultes p

Problèmes de santé les plus fréquemment repérés

Infections respiratoires supérieures 38,3 10,7 ***

Infections respiratoires inférieures 9,3 4,3 ***

Symptômes et plaintes du système digestif 9,3 10,4 ns

Toux 8,4 2,7 ***

Affections dents-gencives 6,4 6,7 ns

Infections de l’oreille 6,3 1,5 ***

Parasitoses / candidoses 5,5 5,0 ns

Diagnostics non classés ailleurs 5,1 3,3 ***

Autres pathologies cutanées 3,8 3,9 ns

Infections gastro-intestinales 3,7 0,9 ***

Nature des pathologies présentées par les patients1

Aiguës 80,5 48,6 ***

Chroniques 25,2 59,6 ***

*** p < 0,001 ** p < 0,01 * p < 0,05 ns : non significatif.

1Le total des pathologies aiguës et chroniques est susceptible de dépasser 100 % dans la mesure où un même patient peut consulter plusieurs fois et donc présenter des affections de natures différentes. Il est également possible qu’au cours d’une même consultation plusieurs pathologies aiguës et chroniques distinctes soient identifiées.

Tableau 63 : Fréquence de la dénutrition parmi les mineurs reçus dans les Caso, 2012

Taux de réponse : IMC parmi les mineurs : 25,0 %.

% n

Dénutrition ensemble des mineurs 13,0 112

0-2 ans 28,0 45

3-6 ans 18,7 46

7-17 ans 4,6 21

>

39 % des consultants sont des femmes, proportion en diminution constante depuis six ans.

>

95 % des patientes sont étrangères, principalement d’Afrique subsaharienne (30 %) et d’UE (22 %).

>

8 % des femmes sont sans domicile fixe et, parmi elles, 20 % sont accompagnées de mineurs.

>

44 % des femmes recourent tardivement aux soins d’après les médecins.

>

4 % des patientes sont enceintes : parmi elles, 9 % sont sans domicile et 46 % présentent un retard de suivi de grossesse.

LES POINTS ESSENTIELS