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Minéralisation du COT et conséquences sur l’extractabilité des métaux La minéralisation d’échantillons de sols de surface de la plaine de Pierrelaye (parcelles

4 Structures et fonctionnement des sols

4.5 Caractérisation de la matière organique des sols de Pierrelaye

4.5.2 Minéralisation du COT et conséquences sur l’extractabilité des métaux La minéralisation d’échantillons de sols de surface de la plaine de Pierrelaye (parcelles

cultivées P1, P6, secteur des Boërs) a été comparée avec celle d’un échantillon du sol témoin (parcelle dite DBZ). Après prélèvement de plusieurs kg, les échantillons de sols ont été tamisés frais à <5 mm et séchés à l’air libre. Après quartage, environ 500 g de chaque échantillon ont été placés dans un bocal fermant hermétiquement. De l’eau a ensuite été ajoutée par pesée afin d’amener les sols à 60% de la capacité au champ puis les bocaux ont

été fermés après avoir introduit un petit pot contenant de la soude 1M destinée à piéger le CO2

émis suite à la minéralisation de la MO des sols. Des blancs ont été constitués par des bocaux contenant seulement les petits pots de soude, sans sol, et chaque expérience a été réalisée en triplicata. Les bocaux ont été placés au noir dans une enceinte à incubation à 28°C afin d’accélérer légèrement le processus de minéralisation. Les bocaux ont été ouverts régulièrement pour remplacer la soude et éviter l’anaérobie. Le carbone organique minéralisé

a été déterminé au laboratoire par dosage du CO2 piégé dans la soude, en dosant le

changement de titre de NaOH avec HCl 1M en présence d’un excès de BaCl2.

Les teneurs en C Organique Total (COT) des échantillons ont été déterminées à t0 et à t6, en fin d’incubation (après 6 mois). Des extractions d’éléments en traces ont également été effectuées en début et en fin d’incubation afin de quantifier l’effet d’une modification du statut des matières organiques du sol suite à l’incubation. Deux types d’extractants ont été

utilisés : le NH4NO3, couramment utilisé en agronomie pour déterminer les teneurs en ions

facilement échangeables, et le DTPA utilisé pour extraire les ions potentiellement mobilisables, cette dernière fraction étant souvent assimilée à une fraction ‘biodisponible’ des éléments traces. Les dosages des éléments ont été faits au laboratoire d’analyse des sols d’Arras. Les résultats sont présentés dans la Fig. 56 et dans les tableaux III et IV.

Figure 56: Courbes cumulées des dosages de CO2 exprimés en % du carbone total du sol (TOC), déterminés lors des minéralisations des sols pollués de la plaine de Pierrelaye (pour deux échantillons nommés P1 et P6) et le sol non pollué de référence (DBZ).

Le sol pollué a une teneur initiale en C. org., environ 7 fois supérieure à celle du sol témoin

classiquement rencontrée pour un sol agricole. Ce rapport atteint une valeur de 23 pour le sol pollué, soulignant une nature de matière organique différente.

Malgré le fait que les sols de la plaine soient très riches en matières organique, les résultats montrent que leur carbone organique se minéralise moins bien que celui du sol témoin (Fig. 56). Par exemple au bout de 100 jours d’incubation, 6% du carbone organique du sol témoin était minéralisé, alors que dans les mêmes conditions seulement 2% du carbone du sol pollué l’était. Ainsi dans les sols pollués, une partie des matières organiques résiste à l’action des microorganismes du sol et à la minéralisation par rapport à un sol classique non contaminé qui n’a pas reçu d’eaux usées brutes. La nature du carbone associé à ces matières organiques récalcitrantes demanderait à être précisée. Une partie de ce carbone par exemple pourrait provenir de charbons.

Le sol pollué a des teneurs totales en mg kg-1 respectivement de : Cu 257.1 ; Pb 398.4 ; Zn

728.7 ; et Cd 3.38 ; de l’ordre de 20 fois supérieures à celles du sol témoin : Cu : 11.1 ; Pb

25.2; Zn 39.3; et Cd 0.25 mg kg-1. Par rapport à ces teneurs totales, les extractions nous

donnent une autre approche du risque.

Tableau III. Teneurs en µg/kg en Cu, Pb, Zn et Cd extractibles NH4NO3 avant et après 6 mois d’incubation des sols témoin,

non pollué (DBZ) et pollué (échantillon dit « P6 ») (nd = non déterminé) ; t0 extr représente le pourcentage d’ETM extractible

à t0 par rapport à la teneur totale de l’élément dans l’horizon.

Cu (NH4NO3) Pb (NH4NO3) Zn (NH4NO3) Cd (NH4NO3) Sol t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 DBZ 59.2 0.5 nd < 5 nd < 5 nd 1.61 0.6 nd P6 644.3 0.3 592.4 10.14 0.002 12.27 1352 0.2 1674 17.8 0.6 20.4

A t0, les extractions NH4NO3 (fraction des métaux facilement échangeables) donnent des

valeurs très faibles pour les métaux en solution, qu’il s’agisse du sol témoin ou du sol pollué (tableau III). Les proportions d’extraction sont du même ordre de grandeur et inférieurs au pourcent. Les extractions DTPA (fraction des métaux potentiellement mobilisables) sont de l’ordre de la dizaine de pourcents ou plus (tableau IV). Les valeurs observées sont plus fortes pour le sol pollué P6 que pour le sol témoin DBZ, sauf pour Pb, indiquant peut être une nature différente des liaisons Pb-MO ou encore une origine différente du Pb dans le sol témoin, compte tenu de sa position proche d’une route passagère. C’est le cadmium qui présente le taux d’extraction DTPA le plus élevé, de l’ordre de 40%, que le sol soit pollué ou non : ce résultat montre que malgré des teneurs totales faibles en cadmium, le cadmium dans le sol témoin est autant, voir plus facilement, échangeable que dans le sol pollué.

Tableau IV. Teneurs en mg/kg en Cu, Pb, Zn et Cd extractibles DTPA avant et après incubation des sols témoin, non pollué (DBZ) et pollué (échantillon dit « P6 ») (nd = non déterminé) ; t0 extr représente le pourcentage d’ETM extractible à t0 par

rapport à la teneur totale de l’élément dans l’horizon.

Cu (DTPA) Pb (DTPA) Zn (DTPA) Cd (DTPA)

Sol t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 t0 t0 % extr t6 DBZ 1.64 14.7 nd 6.02 24 nd 3.43 8.7 nd 0.09 36 nd P6 60.26 24.0 61.5 54.4 12 57.21 148.4 21 162.3 1.32 42 1.41

Après incubation, on obtient des résultats contrastés concernant les teneurs extractibles suivant les métaux : pour Cu et Pb, les résultats montrent que la minéralisation du carbone

organique n’a pas changé leur extractabilité, quel que soit l’extractant, NH4NO3 ou DTPA,

tandis que pour Zn et Cd les relargages tant de fraction échangeable que de fraction potentiellement mobilisables ont été augmentées suite à l’incubation pendant 6 mois.

Cette différence de résultat peut être reliée aux propriétés à la fois des métaux mais aussi à des natures différentes des MO dans le sol témoin et le sol pollué. En effet, Cu et Pb sont deux métaux ayant une forte affinité pour la matière organique, au contraire des éléments Zn et Cd. Or, le sol pollué de Pierrelaye est aussi très riche en C. org., et le peu de carbone minéralisé pendant l’incubation ne suffit pas à déplacer les métaux ou les rendre plus extractibles. Par contre, la matière organique n’étant pas un ligand majeur pour Zn et Cd, on voit que le peu d’évolution des matières organiques suffit à changer leur extractabilité.