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4 Structures et fonctionnement des sols

4.5 Caractérisation de la matière organique des sols de Pierrelaye

4.5.4 Distribution granulométrique des matières organiques solides

La répartition du carbone organique total du sol a été étudiée dans des fractions granulométriques couramment distinguées en Science du Sol : sables grossiers (200- 2000 µm), sables fins (50-200 µ m), limons grossiers (20-50 µ m), limons fins (2-20 µ m) et argile (< 2 µm). Ces différentes fractions ont été obtenues en effectuant des fractionnements granulométriques d’échantillons de sols témoin et pollué, par tamisage sous eau avec des tamis de diamètre de maille décroissant. Dans chaque fraction isolée, les teneurs en carbone organique et en éléments traces ont été déterminées afin d’évaluer leur répartition en fonction de la taille des particules et de les quantifier.

La Fig. 57 présente l’allure des courbes des quantités de carbone réparties dans chaque fraction granulométrique pour les deux sols (P6), pollué et témoin (DBZ).

Dans les différentes fractions granulométriques, le carbone ne se réparti pas de la même façon dans les sols pollués et le sol témoin. Dans le sol témoin, on observe une répartition avec des fractions grossières riches en carbone dû à la présence de matières organiques libres, avec des fractions de limons moins riches en carbone, et enfin une fraction fine < 2µm de nouveau plus riche en carbone. Ce type de répartition du carbone dans les fractions granulométriques est couramment observé dans les sols agricoles non contaminés.

Figure 57. Répartition des quantités de carbone contenues dans chaque fraction granulométrique (en µm), des plus grossières sur l’axe des abscisses à gauche, vers les plus fines à droite. G : fractions globales, sans séparation des fractions légères (particules organiques figurées) et denses (minérales).

Par contre, dans le sol pollué, l’allure de la répartition du carbone dans les différentes fractions est différente (Fig. 57) : la fraction fine est la moins riche en carbone, tandis que les fractions de sable et les fractions limoneuses contiennent des quantités importantes de carbone. Cette répartition dans les sols pollués s’explique par la présence de fragments de MO fortement agrégée, isolés ou associés aux constituants minéraux, qui résistent aux traitements de fractionnement et qui se retrouvent alors dans des fractions granulométriques plus grossières. La présence de ces micro-agrégats est liée aux pratiques d’épandages des eaux usées, fortement chargées en matières organiques d’origine urbaine, qui s’agrège en (micro)- agrégats quand les excès d’eau s’écoulent par drainage et le sol se ressuie.

Les rapports C/N des différentes fractions granulométriques montrent que quel que soit la fraction, les rapports C/N des fractions du sol pollué sont proches à celles observées dans les mêmes fractions du sol témoin (Fig. 58). Ce résultat est à priori surprenant, compte tenu de l’origine urbaine des MO dans les sols pollués. Dans le sol témoins, les valeurs varient de 24 dans la fraction la plus grossière, à environ 8 dans la fraction < 2 µm. Ces valeurs sont représentatives des valeurs couramment observées dans les sols agricoles non contaminés. Si la matière organique exogène apportée par l’irrigation se répartie dans chaque fraction granulométrique, on devrait alors observer une variation moindre entre fractions grossières et fines. La variation constatée pour le sol pollué peut s’expliquer par la présence de quantités notables de charbons (Lamy et al., 2006) dans les fractions grossières, entraînant une augmentation de la valeur globale du C/N.

On peut faire l’hypothèse que plus il y a de carbone organique dans une fraction, plus il y aura de métaux associés à ce carbone, si celui-ci correspond à un type de carbone réactif vis-à-vis des ETM. Les relations entre teneurs en métaux et teneurs en C. org. de toutes les fractions sont présentées dans la figure 59 pour le sol témoin (relations avec les ETM du fond pédogéochimique et des contaminations agricoles habituelles) et dans la Fig. 60 pour le sol pollué (ETM apportés en sus par les eaux usées riches en MO exogènes).

0,0

5,0

10,0

15,0

20,0

25,0

30,0

200-2000

µm

50-200

µm

20-50 µm 2-20 µm

< 2 µm

C

/N

sol pollué

sol témoin

Figure 58. Répartition des valeurs de C/N dans les différentes fractions granulométriques (fractions globales).

Figure 59. Sol témoin, non-irrigué. Relation entre la teneur en carbone organique (C. org.) et la teneur en éléments traces métalliques (ETM) dans les fractions granulométriques.

Ces deux figures 59 et 60 montrent qu’il s’agisse du sol non pollué ou du sol pollué, on observe les mêmes allures de relations entre les métaux et le carbone organique : Pb et Zn n’ont pas une logique d’augmentation des teneurs dans les fractions lorsque la teneur en C.org augmente. On a des teneurs fortes en Pb et Zn associées à des teneurs faibles en C.org. A l’inverse dans les fractions à teneur en C.org élevées, les teneurs en Pb et Zn dans les fractions sont faibles. Au contraire, Cu et Cd montrent un comportement qui varie en fonction de la teneur en C.org, mais à partir d’une certaine teneur en métaux, la teneur en Cd ou Cu reste la même dans la fraction même si la teneur en carbone organique est importante, comme si on avait atteint un plateau.

Ce comportement identique des relations matières organiques –métaux entre sol témoin et sol pollué montre que l’introduction de MO exogène n’a pas fondamentalement changé ces relations. Les quantités mises en jeu ne sont pas du même ordre de grandeur, mais le type de relation est le même. En moyenne, de l’ordre de 40% du carbone organique total du sol se situe dans les fractions < 50µm pour le sol témoin, mais on en retrouve de l’ordre de 54 % dans le sol pollué. Le carbone des matières organiques libres (fractions légères) dans le sol, de taille > 50µm et qui présentent un turn-over plus rapide que les matières organiques liées aux fractions globales < 50 µm, représente un pourcentage plus faible dans le sol pollué que dans le sol témoin : respectivement environ 25 et 40% du carbone total du sol. Ces matières organiques libres représentent également des puits de métaux dans les sols, dans l’ordre Cu>Pb>Cd>Zn pour le sol pollué, et qui représentent respectivement 18, 14, 9 et 8 % des stocks totaux de chacun des métaux du sol pollué. L’ordre de réactivité des matières organiques libres du sol témoin vis-à-vis des métaux est légèrement différent : Cu>Cd>Zn>Pb, avec une représentation respectivement de 16, 14, 7 et 5% des stocks de métaux du sol témoin non pollué. Le positionnement du cadmium malgré des valeurs totales faibles pour le sol témoin provient probablement du fait de sa présence dans le sol à partir des pratiques culturales comme impureté avec les engrais phosphatés par exemple.