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Chapitre IV Effet de la microstructure sur les performances magnétiques du i-PDMS

V. Microscopie à Force Magnétique (MFM)

1. Principe de la MFM

La MFM consiste à utiliser un levier équipé d’une pointe très fine et fonctionnalisée par un revêtement magnétique afin d’être sensible aux interactions magnétiques. De plus, l’usage de cette pointe spécifique est couplé à l’utilisation d’un mode appelé « double pass » ou « Nap » qui consiste à faire un premier balayage de l’échantillon pour connaître sa topographie puis d’imposer à la pointe exactement le même parcours avec un décalage vertical Δznap. La mesure à cette altitude permet alors de n’observer que les interactions actives de l’échantillon, c’est-à-dire décorrélées des interactions de la surface [13], [14]. Ainsi le mode Nap ajoute simplement un deuxième parcours surélevé par rapport au premier parcours de topographie conventionnel, que ce soit en mode contact ou Tapping. C’est un mode de mesure de choix pour des mesures d’interactions magnétiques résolues spatialement. La Figure 91 présente une vue schématique du mode Nap réalisé en mode Tapping dans le cas de l’interaction entre une pointe magnétique et un échantillon composé de microstructures magnétiques.

Photodiode 4 quadrants

Piezo / Z-sensor

110 Figure 91 : Principe de fonctionnement du mode Nap réalisé en Tapping avec une pointe aimantée et un échantillon comportant des structures magnétiques.

L’utilisation de la MFM donne deux informations distinctes :

- La topographie de l’échantillon, enregistrée lors du premier passage,

- Une cartographie du gradient de la force magnétique, se manifestant par un déphasage entre l’excitation et la déflexion du levier durant le deuxième passage, tel que :

∆¶ = ïð òó

( 45 )

Où Q est le facteur de qualité de la résonance du levier et k sa raideur.

Ainsi, sur l’image de déphase du mode Nap, les zones de fort déphasage correspondent à des régions où la force magnétique varie fortement, et plus particulièrement un déphasage positif (négatif) renseigne sur une force attractive (répulsive).

2. Mise en œuvre des mesures MFM

Nous avons utilisé l’AFM MFP-3D (Asylum Research, Oxford Instrument) du laboratoire ILM. Nous avons vu précédemment que les pièges sont formés de particules de Fe-C, un ferromagnétique doux nécessitant une aimantation externe afin de rayonner un champ magnétique. En MFM, la pointe, aimantée à rémanence, jouera le rôle de champ externe. Le champ magnétique rayonné par la pointe ira aimanter à son tour l’échantillon, permettant l’observation de la réponse magnétique des pièges. Plus précisément, les pointes utilisées sont revêtues d’un alliage cobalt/chrome CoCr et ont une raideur (mesurée par bruit thermique [15]) de 1,6 N/m. Ce sont des pointes ferromagnétiques dures disposant d’une coercivité élevée, paramètre important au niveau du contraste des images obtenues [16]. Avant utilisation, la pointe est aimantée entre deux aimants de NdFeB (en configuration attractive) rayonnant un champ de 1 T, nous considérons alors que la pointe est magnétiquement saturée. Les mesures sont réalisées à l’air libre.

La Figure 92 montre un résultat typique de mesures par MFM obtenues sur un échantillon de i-PDMS 5wt% avec une hauteur Nap ∆¹2' = 50 nm. En premier lieu, la topographie de l’échantillon (Figure 92.a) révèle la présence de deux pièges. Ce profil avait déjà été présenté auparavant (Chapitre

111 II), on y observe deux pièges émergeant de la surface, à côté de ces objets, la surface est relativement lisse avec une rugosité RMS de 2,5 nm sur 4 µm × 4 µm.

En regardant maintenant l’image en phase Nap (Figure 92.c), nous voyons qu’il existe deux zones de fort déphasage positif, ce qui correspond donc à des régions où la force magnétique est attractive et varie brutalement. Ces deux zones semblent coïncider avec les deux objets observés en topographie. Pour nous en assurer, nous avons superposé à la topographie en 3D l’échelle des couleurs des mesures de déphasage (Figure 92.d) : nous pouvons alors affirmer que les gradients de force magnétique sont concentrés exactement à l’endroit des pièges.

Figure 92 : Mesure MFM entre une pointe CoCr et un échantillon de PDMS-FeC5% : a) topographie, la ligne rouge correspond au profil représenté en b), profil de topographie mesuré c) déphasage mesuré en mode Nap ; d) superposition de la topographie 3D et de l’image de déphasage.

Une autre information importante que révèlent ces mesures est l’absence de gradient de force en dehors des pièges affleurant la surface. Il est néanmoins possible qu’il existe des pièges enterrés trop profondément pour être sensibles au champ de la pointe.

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3. Avantages et limitation des caractérisations par MFM

L’utilisation de la MFM nous a offert la possibilité d’acquérir les informations suivantes : - les pièges affleurants peuvent être détectés par MFM,

- la force magnétique n’est pas diffuse sur la totalité de l’échantillon, mais reste localisée au niveau du piège.

Cependant, cette technique montre plusieurs limitations. Premièrement, nous ne connaissons pas précisément le champ rayonné par la pointe CoCr. Ensuite, comme indiqué précédemment, ce type de mesures ne permet pas de quantifier les forces magnétiques, mais donne accès au gradient de la force magnétique.

Nous avons aussi été confrontés à un problème d’altération de la fonctionnalisation des pointes CoCr au cours du temps : même si les pointes utilisées sont magnétiquement dures et de coercivité élevée, nous avons observé un phénomène de perte progressive d’aimantation de la pointe. La Figure 93 montre la même surface d’échantillon imagée mais avec un intervalle d’1h. Nous observons que le signal a diminué de moitié durant ce laps de temps. Ce phénomène de désaimantation de la pointe entraîne une dégradation du contraste lu sur la phase.

Figure 93 : Cartographie des interactions magnétiques sur une membrane de i-PDMS à 5wt% avec un intervalle d'1h entre deux expériences

Pour quantifier la force magnétique véritablement ressentie par les billes superparamagnétiques en système microfluidique, il était alors nécessaire d’aller au plus près des conditions expérimentales. Nous avons donc réalisé des mesures de force par AFM équipé d’une sonde colloïdale superparamagnétique et développé un dispositif adaptable à la platine AFM pour générer l’aimantation externe nécessaire à l’activation des pièges. Ceci fait l’objet de la partie suivante.

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