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Méthodes de microfabrication standard des matériaux magnétiques en microsystèmes

Chapitre I Magnétophorèse en microsystèmes fluidiques

2. Méthodes de microfabrication standard des matériaux magnétiques en microsystèmes

La microfabrication de matériaux magnétiques pour des microsystèmes s’appuie sur le procédé classique de la microélectronique. Pour des applications de magnétophorèse, des films épais (100 nm à 100 µm) sont préférables afin de générer des forces homogènes avec une portée adaptée à des dispositifs microfluidiques [42]. On peut distinguer deux approches de fabrications principales, la croissance de films magnétiques, et l’utilisation de poudres magnétiques.

a) Films magnétiques structurés

Très largement utilisée dans le cadre des microsystèmes, la croissance de films sur des substrats, généralement de silicium, est obtenue par divers procédés qui permettent le contrôle de l’épaisseur, de la composition et de la structure des matériaux déposés. Les principales techniques de dépôt de films magnétiques sont la technique de pulvérisation cathodique et l’électrodépôt qui ont des vitesses de dépôt jusqu’à quelques dizaines de µm par heure. La méthode de pulvérisation se déroule comme suit : création d’un plasma (généralement d’argon), bombardement ionique de la cible métallique, formation d’une vapeur d’atomes et dépôt métallique sur un substrat

La seconde est un dépôt par réaction électrolytique, c’est-à-dire qu’un courant électrique continu est appliqué à un solvant contenant du métal sous forme ionique, menant à sa solidification sur l’électrode. Cette technique est largement utilisée pour la préparation de films pour des microsystèmes et s’est montrée adaptée pour la fabrication de films métalliques magnétiques. Pour générer des gradients de champs importants dans des microsystèmes, il est nécessaire de structurer ces films magnétiques. Il est possible d’opérer cette microstructuration pendant l’étape de dépôt du film (dépôt à travers masque, sur un substrat structuré), ou après la fabrication de ces derniers (DRIE, gravure humide, structuration thermomagnétique).

Le procédé LIGA (Lithographie, Galvanoformung, Abformung) est la méthode la plus couramment utilisée pour structurer des films épais pendant l’étape de dépôt. Cette méthode repose sur la structuration d’une résine photosensible par rayonnements UV (UV-LIGA), voir rayons X (X LIGA), puis du dépôt par électrodéposition du film d’intérêt [49]. La version UV de la LIGA a été utilisée dans les travaux présentés peu avant, de Yu et al. (Figure 21.a), concernant la fabrication de piliers en nickel [47]. Plus rare, la LIGA X a été utilisée pour réaliser des structures en NdFeB dédiées à des fonctions d’actuation en microsystème (Figure 21.b). Les films peuvent également être structurés grâce à un dépôt sur un substrat à surface non-plane, on parle alors de microstructuration topographique. Cette approche a été utilisée lors de l’électrodéposition de films de CoMnNiP sur un substrat dont la discontinuité est assurée par un moule de résine photosensible [50]. Il a été possible d’obtenir des structures d’épaisseur 20 µm et de dimensions 30x30 µm (Figure 21.c). Walther et al. [51] ont préalablement gravé des tranchées (6µm de profondeur) dans un substrat de silicium par DRIE (Deep Reactive Ion Etching). Une couche de NdFeB (8 µm) a ensuite été déposée par pulvérisation à triode, provoquant ainsi la structuration du matériau magnétique selon les tranchées creusées dans le substrat (Figure 21.d).

33 Figure 21 : a) d’après Yu et al. [47] plots de nickel préparés par procédé LIGA UV, la barre d’échelle correspond à 100 µm b) micro-aimants en Nd2Fe14B fabriqués par LIGA X [49]. c) Images MEB des réseaux de microaimants en CoNiMnP fabriqués par structuration topographique [50]. d) Walther et al. [51] NdFeB déposé par pulvérisation triode sur un substrat texturé par DRIE et.

Il est également possible de structurer les films déposés après leur fabrication. Une méthode pour obtenir de hauts gradients de champs magnétiques peut consister en une alternance directions d’aimantations. C’est l’approche explorée par la structuration thermomagnétique ou Thermo Magnetic Patterning [52] (montrée à la partie précédente) en complément de la pulvérisation cathodique triode pour faire croître un film de NdFeB d’une épaisseur de 4 µm. Ici, c’est la dépendance du champ coercitif avec la température pour retourner l’aimantation du film déposé qui est mise à profit pour structurer le film. En chauffant localement le film, à travers un masque, avec un laser UV, on réduit le champ coercitif dans les zones chaudes par rapport aux zones froides. Si le film, initialement aimanté dans une direction est alors exposé à un champ opposé à son aimantation, il est possible de retourner l’aimantation uniquement dans les zones chauffées par le laser, et sur une profondeur de l’ordre de 1,2 µm. Dans l’article présentant cette technique, un film de NdFeB est ainsi magnétiquement structuré en damier (Figure 22). De forts champ et gradients de champ apparaissent à la frontière de deux domaines voisins.

Figure 22 : Dumas-Bouchiat et al. a) Schéma de principe du procédé TMP. Le film est irradié par un laser UV à travers un masque en damier pendant qu'un champ magnétique s'opposant à l'aimantation du film est imposé. La baisse de coercivité dûe à l’augmentation de température là où le film est irradié va forcer une aimantation le long du champ externe H. b) Image magnéto-optique du film final en damier.

34 De manière générale, l’électrodéposition et ses dérivés permettent des dépôts à température ambiante, avantageux pour des matériaux dont la structure doit être maîtrisée. D’autre part, la méthode de pulvérisation triode permet le dépôt rapide de grandes quantités de matériaux et d’obtenir des films épais de matériaux de haute qualité. Dans chaque cas il est possible de déposer des films magnétiques doux (il n’est pas facile de déposer des matériaux durs par cette méthode).

b) Approche par poudres

L’utilisation de poudres magnétiques s’apparente à la fabrication des aimants massifs, consolidés dans une résine (bonded magnets). Utiliser des poudres disponibles commercialement permet de s’affranchir des traitements thermiques souvent nécessaires pour la formation des phases à haute anisotropie magnétocristalline. Deux principales méthodes existent pour l’utilisation de poudres.

Dans un premier temps, il est possible d’utiliser la technique dite de “Dry Packing” de poudres [53]. Il s’agit alors d’utiliser des poudres d’intérêt (dans ce cas des poudres de NdFeB) incorporées dans des substrats préalablement gravés. L’excédent de poudres est retiré par raclage, puis un polymère (polyimide, colle ou parylène) peut être coulé et structuré par tournette au-dessus des agglomérats de NdFeB de manière à les fixer (Figure 23.a). Cette méthode a permis l’obtention de réseaux de microstructures de NdFeB d’épaisseur 350 µm [43].

Une autre méthode est d’incorporer directement les poudres magnétiques à des polymères sous forme liquide et de structurer ces composites. Cette utilisation des poudres a été explorée par Wang

et al. qui ont incorporé des poudres de NdFeB dans une résine époxy à une concentration de 60 wt%

[54]. Ils ont par ce biais obtenu des structures de dimensions 200x200x70 µm3 (Figure 23.b).

Figure 23 : a) D’après Wang et al. [53] vue en coupe de poudres de NdFeB encapsulées dans un susbstrat de silicium pré gravé, chapeauté par une couche de polyimide coulé par tournette b) Image MEB de réseau de microstructures magnétiques obtenues à partir de composites de NdFeB/Epoxy.

Cette approche permet de réaliser aisément des microstructures magnétiques aux propriétés proches des matériaux classiques en facilitant les procédés de fabrication. Ce gain d’un point de vue fabrication s’accompagne de propriétés proches des matériaux sous leur forme massive. Cette approche est cependant tributaire de la taille des poudres, ce qui en limite la résolution et génère des motifs hétérogènes.

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3. Mise en œuvre de fonctions magnétiques pour des applications