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Chapitre 2 : Etude du fonctionnement hydrogéologique de l’aquifère de Dardennes par

3. Matériels et méthodes

3.2 Mesures des paramètres hydrodynamiques (hauteur d’eau et débit) et physico-chimiques

3.2.1 Les eaux souterraines

L’ensemble des données acquises est synthétisé dans le Tableau 2-4.

Concernant les sondes CTD, la résolution est de 1 μS/cm et la précision de mesures est de ±1% de la lecture avec un minimum de 10μS/cm pour la conductivité électrique. La plage de mesure pour obtenir

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la pression est de 0 à 100 m, avec une résolution de 2 cm et une précision de ±20 cm. La plage de mesure pour obtenir la température est de 0 à 50°C, avec une résolution de 0,01°C et une précision de ±0,2°C.

La conductivité électrique à 25°C, la température ainsi que la pression de l’eau sont les paramètres suivis au pas de temps 15 minutes dans le conduit vertical du Ragas. Deux sondes sont localisées à 92 m NGF installées dans un tube en plastique, dans le conduit karstique (Figure 2-17), afin de doubler les mesures et d’assurer ainsi l’acquisition de données fiables. Des mesures manuelles sont effectuées à ce point de mesure, tous les 6 mois environ afin de contrôler une éventuelle dérive des sondes.

Tableau 2-4 Les mesures du système de Dardennes

Lieu Paramètre Date

enregistrement Pas de temps enregistrement Matériel Source Ragas Niveau d’eau Température Conductivité élec. 19/10/2012-31/05/2017 15 minutes Sonde CTD (Diver) Source des Platanes (au

fond de la retenue de Dardennes) Niveau d’eau 08/10/2012-17/03/2015 15 minutes Sonde CTD (Diver)

Barrage Véolia Niveau d’eau 01-01-2016 - 15 minutes Radar

Barrage Véolia Niveau d'eau 1989-2017 journalier Manuel

Barrage Véolia Débit exploitation

usine AEP 1989-2017 journalier Manuel

Barrage Véolia Pression

atmosphérique 13/09/2012-31/05/2017 15 minutes Sonde baro (Diver) Source St Antoine Niveau d’eau Température Conductivité élec. 05/09/2012-31/05/2017 15 minutes Sonde CTD (STS)

Quelques spécificités sont à prendre en compte sur ce point de mesure:

- Les sondes sont installées à 92 m NGF, en face de la prise d’eau d’alimentation en eau potable du tunnel du Ragas, assurant le bon renouvellement de l’eau au niveau des sondes. Les sondes sont suspendues par un câble et les données sont récupérées en branchant un ordinateur à l’altitude 123 mètres, c’est-à-dire une altitude accessible même quand le lac est plein et le niveau d’eau haut (hors période de crue).

- En étiage, l’eau du lac est peu renouvelée et ses caractéristiques physico-chimiques évoluent : la conductivité électrique diminue et la température augmente. Les mesures par les sondes CTD dans le Ragas assurent d’avoir des données représentatives de l’eau souterraine se déversant normalement aux sources.

- En été, l’aquifère est en période d’étiage, les précipitations sont très faibles voire inexistantes et le débit en tarissement. Lorsque le problème de géosmine perturbe l’exploitation de l’eau du lac, l’usine utilise alors l’eau du Ragas grâce à la conduite en charge installée dans l’ancien tunnel du Ragas (creusé à la fin du 19ème siècle avant la mise en place du barrage). Si le prélèvement dans le Ragas est trop important, il y a alors une intrusion de l’eau du lac. L’eau du lac se distingue alors de l’eau souterraine sur les enregistrements CTD par une température

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plus importante et une conductivité électrique plus faible.. Toutefois, le prélèvement par la conduite du Ragas à l’avantage d’assurer un bon renouvellement de l’eau souterraine dans le conduit karstique naturel.

- En hiver, en dehors des périodes de crues, l’usine s’alimente en eau grâce au lac. L’eau dans le conduit vertical du Ragas est alors moins renouvelée et cela peut entrainer ponctuellement des erreurs de mesures dans le tube de mesure où les sondes CTD sont installées. Toutefois, lors des périodes de crues, la variation du niveau d’eau dans le Ragas, voire l’écoulement permanent lorsque le karst déborde par le vallon du Ragas, assure un bon renouvellement de l’eau au niveau des sondes de mesures.

Figure 2-17 Equipement du conduit karstique de la source du Ragas

Afin de suivre l’évolution du niveau d’eau dans le lac de Dardennes et les caractéristiques de l’eau souterraine l’alimentant, la source des Platanes (Figure 2-4) fut équipée d’une sonde CTD au début de l’étude. Toutefois, les conditions de mesure n’étaient pas optimales, mélangeant eau souterraine et eau du lac. La relève des données nécessitait l’intervention de plongeurs, ce qui a conduit à abandonner le site de mesure lorsque la sonde est tombée en panne. Le niveau d’eau du lac utilisé pour la fin de l’étude est celui relevé par Véolia (Tableau 2-4). En complément, une sonde de mesure de la pression atmosphérique a été installée au barrage pour corriger la mesure de pression absolue des sondes dans l’eau.

3.2.2 Les eaux de surface

Le point de mesure le Las à la station Lagoubran est stratégique dans la compréhension du système aquifère de Dardennes. Il est équipé d’une sonde CTD afin de mesurer la conductivité électrique, la température et la pression d’eau. Elle est installée au pont de Lagoubran, dans un tube piézométrique en rive gauche à l’amont du pont. La station de mesure de Lagoubran est idéale, la section de la rivière est connue précisément, grâce aux mesures de hauteur d’eau, le débit du Las est alors calculé précisément à cette station. Une courbe de tarage a été établie en 2014 par T. Lamarque (2014) à l’aide de 29 mesures

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de débit effectuées au courantomètre et par jaugeage par dilution d’un traceur fluorescent (Schnegg et al., 2011).

Tableau 2-5 Caractéristiques de mesures du niveau d’eau, de la conductivité électrique et de la température du fleuve Las, à la station Lagoubran

Lieu Paramètre Date

enregistrement

Pas de temps

enregistrement Matériel

Rivière Las à Lagoubran

Niveau d’eau Température Conductivité élec. 05/10/2012 – 23/01/2014 15 minutes Sonde YSI (Dufresne, 2014)

Rivière Las à Lagoubran

Niveau d’eau Température Conductivité élec. 20/05/2014 -24/04/2015 15 minutes Sonde STS n°609887

Rivière Las à Lagoubran

Niveau d’eau Température Conductivité élec. 15/06/2015 – 26/01/2016 15 minutes Sonde STS n°2-524265

3.2.3 Calcul du débit des sources de Dardennes

 Bilan hydrologique de la retenue artificielle de Dardennes

Le débit aux sources de Dardennes n’est pas mesuré directement, les sources sourdent au fond de la retenue artificielle. Ce débit doit être estimé par bilan hydrologique de la retenue artificielle de Dardennes. Cette approche est basée sur le principe de conservation des débits, les débits entrants dans le système doivent être égaux aux débits sortants de la retenue artificielle. A la retenue artificielle de Dardennes, le bilan hydrologique s’explique par l’équation suivante :

𝑉𝑜𝑙𝑢𝑚𝑒 𝑑′𝑒𝑎𝑢𝑒𝑛𝑡𝑟𝑎𝑛𝑡= 𝑉𝑜𝑙𝑢𝑚𝑒 𝑑𝑒𝑎𝑢𝑠𝑜𝑟𝑡𝑎𝑛𝑡+ 𝑉𝑎𝑟𝑖𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑆𝑡𝑜𝑐𝑘 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑟𝑒𝑡𝑒𝑛𝑢𝑒 (2.1)

Le Volume d’eau entrant correspond à l’apport des sources de Dardennes et le volume d’eau issu des précipitations par ruissellement sur le bassin versant.

Le Volume d’eau sortant est constitué :

- du volume d’eau évaporé de la retenue artificielle (Vol.Evaporé)

- du volume d’eau prélevé dans la retenue (eau brute) par l’usine pour l’alimentation en eau potable (Vol.AEP)

- du volume d’eau provenant des fuites du barrage et restitué dans la rivière du Las (Vol.FuitesBarrage) - du volume d’eau de surverse, évacué par le déversoir lorsque la retenue artificielle est pleine (Vol.Surverse). Ce débit est évalué à partir de la courbe hauteur-débit issue d’une étude antérieure (Le Clerc and Noret, 2008)

- du volume d’eau vidangé pour la régulation et la stabilité du barrage

Le ruissellement étant très faible sur le bassin d’alimentation et le lac étant entouré d’un canal de colature qui exporte les eaux de ruissellement à l’aval du barrage, ce volume d’eau est négligeable dans le bilan hydrologique. La variation du stock d’eau dans la retenue est calculée à partir d’une loi mettant en relation la hauteur d’eau et le volume du barrage de Dardennes (Artélia, 2013). Cette relation a été établie à partir du levé topographique réalisé à l’occasion de la vidange décennale de 2006. Le débit des sources de Dardennes est calculé au pas de temps journalier afin de prendre en compte les variations de hauteur d’eau du lac et le débit d’exploitation fournis au pas de temps journalier par Véolia. Ce pas de temps ne peut pas représenter les débits de pointe réels, il va alors lisser les valeurs de débit.

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Dans cette équation bilan, la plus grande difficulté est d’estimer le volume d’eau du karst sortant à l’aval de la retenue de Dardennes et alimentant la rivière Las lorsque le barrage est plein et que l’eau s’écoule par le déversoir. Ce déversoir a été dimensionné afin de permettre le passage d’un débit de crue de l’ordre d’une cinquantaine de m3/s pour une hauteur d’eau de surverse de quelques décimètres. Une grande incertitude sur le débit existe donc en fonction de la qualité de la mesure de hauteur d’eau et de la qualité de la loi de tarage du déversoir. Classiquement, ce débit a été estimé dans les études précédentes menées par les bureaux d’études, en utilisant une loi hauteur-débit (Le Clerc and Noret, 2008) basée sur la mesure de hauteur d’eau journalière au barrage faite par les techniciens de l’usine généralement à 9h le matin. Le débit n’est toutefois pas estimable lorsque les vannes du barrage sont ouvertes, comme cela a été régulièrement le cas durant l’année 2013 (pour des raisons d’études géotechniques sur la stabilité du barrage). De plus, la mesure unique de hauteur d’eau à 9h n’est pas systématiquement représentative de la valeur moyenne journalière. Nous avons proposé dans le cadre de cette thèse d’estimer le débit du karst alimentant le Las directement à partir des mesures de débit faites en aval sur le Las, en utilisant une moyenne journalière calculée sur les mesures enregistrées au pas de temps de 15 minutes.

 Déconvolution du débit du Las (station de mesure en aval)

La deuxième méthode pour estimer le débit des sources de Dardennes alimentant le Las est d’utiliser le débit du Las mesuré à la station de Lagoubran. Le débit total est la somme du débit du système karstique qui provient du barrage de Dardennes, du débit de la source Saint-Antoine et d’autres sources le long du Las, ainsi que du débit de ruissellement urbain. L’approche par déconvolution du débit du cours d’eau va permettre de séparer l’écoulement en plusieurs composantes et de calculer leur contribution à l’écoulement total (Ogunkoya and Jenkins, 1991). Les techniques de déconvolution du débit, utilisant les isotopes stables de l’eau (18O et 2H), sont appliquées depuis les années 1970. Klaus and McDonnell (2013) proposent une synthèse bibliographique sur la méthode de déconvolution avec les isotopes stables qui englobe de nombreuses conditions climatiques, géologiques et d’utilisation du sol différentes. D’autres traceurs chimiques conservatifs sont utilisés pour la déconvolution du débit total d’une rivière, tels que les isotopes du strontium, les chlorures, le Carbone Organique Dissous (DOC), la silice ou encore la conductivité électrique (CE) (Klaus and McDonnell, 2013; Ladouche et al., 2001; Petelet-Giraud and Negrel, 2007). Une des limites de la méthode utilisant les isotopes stables, est que ce travail doit être effectué en deux temps : un échantillonnage in-situ et ensuite une analyse en laboratoire. Dans notre cas, nous utilisons la conductivité électrique en tant que traceur conservatif, très largement utilisé pour la déconvolution du débit de cours d’eau de surface et d’écoulement souterrain (Cirpka et al., 2007; Liao et al., 2014; Meriano et al., 2011; Pellerin et al., 2008). C’est un paramètre physique facilement enregistré grâce à la mise en place de sondes CTD. La CE est un paramètre physique pertinent dans la déconvolution du signal dans un environnement karstique urbain car il y a des contrastes importants entre le ruissellement de l’eau de pluie, avec de faibles valeurs de CE et l’eau souterraine qui peut avoir des valeurs moyennes à élevées de CE. Nous avons utilisé cette méthode pour déconvoluer le débit du Las et remonter ainsi au débit du karst de Dardennes. Ces résultats ont été présentés lors de la conférence Eurokarst 2016 à Neuchâtel (Arfib et al., 2016).

Le débit du Las à Lagoubran est décomposé suivant l’équation de conservation de la masse:

𝐐𝐓𝐨𝐭𝐚𝐥= 𝐐𝐊𝐚𝐫𝐬𝐭+ 𝐐𝐒𝐭𝐀𝐧𝐭𝐨𝐢𝐧𝐞+ 𝐐𝐒𝐨𝐮𝐫𝐜𝐞𝐬+ 𝐐𝐑𝐮𝐢.𝐔𝐫𝐛𝐚𝐢𝐧 (2.2)

Où QTotal est le débit obtenu à la station Lagoubran, QKarst, le débit sortant de la retenue de Dardennes, QStAntoine, le débit de la source Saint Antoine, QSources, le débit des sources localisées entre la retenue artificielle de Dardennes et la station de mesure de Lagoubran, QRui.Urbain le débit de ruissellement urbain. Le terme QSources est négligeable sur le cours du Las, ce qui simplifie l’équation 2.2 en :

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QTotal= QKarst+ QStAntoine+ QRui.Urbain (2.3)

Dans cette équation (2.3), la conductivité électrique est intégrée et l’équation (2.4) est obtenue :

QTotal×CETotal=QKarst×CEKarst+QStAntoine×CEStAntoine+QSources×CESources+QRui.Urbain×CERui.Urbain(2.4)

Le débit est mesuré à Lagoubran et à la source Saint Antoine. La CE est mesurée à Lagoubran, au Ragas (représentatif du karst) et à Saint Antoine au même pas de temps. Des mesures ponctuelles de CE du ruissellement urbain ont été réalisées lors d’épisodes pluvieux, montrant que les valeurs varient entre 30 et 150 µS/cm. Les 37 mesures faites sur 4 événements pluvieux donnent une valeur moyenne de CE de l’eau de ruissellement urbain égale à 79 µS/cm, avec un écart-type de 27 µS/cm. En combinant les équations 2.3 et 2.4, nous obtenons:

QKarst =𝑄𝑇𝑜𝑡𝑎𝑙(𝐶𝐸𝑇𝑜𝑡𝑎𝑙−𝐶𝐸𝑅𝑢𝑖.𝑈𝑟𝑏𝑎𝑖𝑛)− 𝑄𝑆𝑡𝐴𝑛𝑡𝑜𝑖𝑛𝑒(𝐶𝐸𝑆𝑡𝐴𝑛𝑡𝑜𝑖𝑛𝑒−𝐶𝐸𝑅𝑢𝑖.𝑈𝑟𝑏𝑎𝑖𝑛) 𝐶𝐸𝐾𝑎𝑟𝑠𝑡− 𝐶𝐸𝑅𝑢𝑖.𝑈𝑟𝑏𝑎𝑖𝑛 (2.5)

Ainsi nous avons reconstitué la chronique de débit sortant de la retenue artificielle de Dardennes sur la période du 15 octobre 2012 au 26 janvier 2016 (données disponibles).

Finalement, le débit des sources karstiques est donné par l’équation 2.6, comme la somme du débit exploité pour l’AEP (Qexploitation), de la variation de stock dans la retenue de Dardennes (𝛥_stocklac), de l’évaporation sur la surface du lac de Dardennes (Qévaporation_lac) et du débit du karst alimentant le Las précédemment calculé (QKarst_Las).

𝐐𝐒𝐨𝐮𝐫𝐜𝐞𝐬𝐃𝐚𝐫𝐝𝐞𝐧𝐧𝐞𝐬= 𝐐𝐄𝐱𝐩𝐥𝐨𝐢𝐭𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧+ 𝚫𝒔𝒕𝒐𝒄𝒌𝒍𝒂𝒄+ 𝐐é𝐯𝐚𝐩𝐨𝐫𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧_𝐥𝐚𝐜+ 𝐐𝐊𝐚𝐫𝐬𝐭_𝐋𝐚𝐬 (2.6)

Le débit ainsi calculé a pu être validé par comparaison avec le débit de surverse du barrage, et du 5 au 15 janvier 2015 lors des tests hydrauliques à Saint Antoine par régulation du débit du Las.