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Chapitre 3 : Apport de la modélisation pluie-débit à l’étude du fonctionnement d’un

7. Résultats et Discussion

7.1 Fonctionnement de l’aquifère de Dardennes : ce que le modèle Pluie-Débit permet de valider ou

Tout d’abord le modèle pluie-débit confirme l’hypothèse de l’étendue de la zone de recharge, déduite de l’étude géologique et géomorphologique, entre 50 et 70 km² (Figure 3-5). Mais les indices de sensibilité montrent que ce paramètre n’est que très peu sensible à la valeur choisie et ne peut être spécifié plus précisément. Ensuite, les bons résultats du modèle ont validé le modèle conceptuel de fonctionnement de l’aquifère. Le fonctionnement de l’aquifère peut être simplifié par deux composantes d’écoulement principaux de l’épikarst à l’exutoire : une composante lente et une rapide. En outre, les précipitations sont séparées dans le compartiment épikarst-sol, entre une réserve disponible pour l’évapotranspiration et l’infiltration pour les deux compartiments inférieurs (lent et rapide).

La Figure 3-6a montre les chroniques de débit simulé et observé sur les périodes de calage et de validation. Le débit simulé est représenté en fonction du jeu de paramètres et de la période de calage P1, présenté dans le Tableau 3-2, qui a donné le meilleur résultat sur la fonction objectif. L’allure générale de la chronique de débit est bien reproduite lors des périodes d’étiage ainsi que les variations de débit lors des crues. Le débit de base est bien simulé avec une longue courbe de récession en basses-eaux, en été et au début de l’automne. Pendant les évènements pluvieux, chaque crue observée est simulée avec le modèle pluie-débit même si le débit simulé maximum n’est pas toujours très bien représenté. A la fin de la période d’étiage, principalement entre septembre et octobre, le modèle atténue le transfert des précipitations jusqu’à la source, en remplissant le réservoir Epikarst jusqu’au seuil limite (ESeuilC). Mais ce stockage n’est pas suffisant et les crues simulées restent trop élevées comparées au débit observé. Ceci montre que l’impact des premières précipitations après une période d’étiage, est réellement atténué dans l’épikarst et dans l’aquifère. Le modèle simule donc mal ces périodes, mais met en exergue que la réaction du système karstique n’est pas la même en étiage et durant les périodes pluvieuses. Les précipitations infiltrées peuvent être stockées dans l’aquifère afin de remplir la réserve d’eau souterraine dans la zone non saturée. Cet effet sera augmenté durant la période d’étiage. Le stockage peut alors être augmenté par la limite variable de la charge hydraulique contrôlée par le niveau d’eau dans la retenue artificielle, régulé par l’usine. La variation du niveau d’eau dans l’aquifère en relation avec les variations du niveau d’eau dans le lac n’est pas prise en compte dans ce modèle pluie-débit. C’est une condition aux limites qui pourrait être intégrée dans un autre modèle, lors d’une étude complémentaire future.

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Figure 3-6 Résultats du modèle pluie-débit. W= « warm-up » ou période de chauffe. a) Débit observé et simulé. b) Débit internes simulés depuis le réservoir Matrice jusqu’à la source et le débit total à la source (réservoir Conduit + Matrice). C) Niveaux d’eau simulés dans les trois réservoirs (E, M et C). d) Précipitations journalières (moyenne des trois stations météorologiques).

La déconvolution du débit selon les deux réservoirs Matrice et conduit est représentée sur la Figure 3-6b. Cela permet de quantifier respectivement la part d’écoulement rapide et lent du débit total. Le débit du réservoir Matrice jusqu’à la source montre une variation saisonnière lisse et une longue courbe de récession. Le débit du réservoir Conduit jusqu’à la source augmente et diminue très rapidement en quelques jours. Le modèle nous donne les informations sur les débits internes rapides et lents (Tableau 3-5).

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Tableau 3-5 Moyenne annuelle des précipitations calculées en prenant la moyenne des trois stations météorologiques (Toulon La Mitre, Le Castellet aérodrome, Limate). Moyenne annuelle et le pourcentage de: QMS, le débit du réservoir Matrice à la source, et QCS, le débit du réservoir Conduit à la source. QMS donne le débit d’écoulement lent. QCS donne le débit d’écoulement rapide.

Année Précipitations (mm) Moyenne QMS (m3/s) Moyenne QCS (m3/s) Moyenne Qsimulé (m3/s) % QMS % QCS 2013 948 0,32 0,55 0,87 37 63 2014 1180 0,40 1,07 1,47 27 73 2015 578 0,29 0,18 0,48 61 39 Moyenne des 3 années 902 0,34 0,60 0,94 36% 64%

Pendant les trois ans d’étude, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, 64% de l’eau infiltrée s’écoule à travers le réservoir rapide (réservoir C) et 36% à travers le réservoir lent (réservoir M) jusqu’à la source. Les pourcentages sont différents selon les années. En 2013, les pourcentages sont à peu près les mêmes que sur toute la période d’étude. Mais en 2014, l’année fut pluvieuse (1180 mm de pluie), l’écoulement rapide est majoritaire, représentant 73% du débit simulé, avec une moyenne de QCS de 1,07 m3/s. Au contraire, l’année sèche de 2015 (578 mm de pluie) a montré que l’écoulement lent est majoritaire, représentant 61% du débit simulé. Sur les trois ans d’étude, le débit de base simulé, QMS, est quasiment constant entre 0,29 et 0,40 m3/s. Cela montre que le débit de base est un composant stable de l’écoulement dans l’aquifère de Dardennes.

La Figure 3-6c montre les trois niveaux d’eau internes des réservoirs en millimètre sur la période d’étude. Le réservoir Epikarst présente des valeurs négatives, dues à un niveau d’eau Emin, qui lui-même représente la quantité d’eau disponible pour l’évapotranspiration (calé Emin= -18.15 mm), l’équivalent d’une réserve utile ou facilement utilisable. Ces niveaux d’eau varient en fonction des évènements pluvieux. Lorsque le niveau d’eau est au-dessus de 0 mm dans le réservoir Epikarst, la recharge de l’aquifère devient effective et alimente le réservoir M et donc le débit de base. La zone non saturée fournit ce débit de base, avec ces centaines de mètres d’épaisseur et par le débit lent dans la matrice hydrogéologique de la zone saturée, drainée par le réseau karstique bien connectée à la source. Si le niveau d’eau dans le réservoir Epikarst dépasse le ESeuilC, calé à 13 mm environ par le modèle, l’écoulement rapide est activé. Le niveau d’eau dans le réservoir Conduit augmente et revient à zéro très rapidement, comme les coefficients de récession sont très forts (kEC et kCS) et le seuil présent dans le réservoir Epikarst. Le niveau d’eau dans le réservoir M possède une plus grande amplitude que les autres, qui est saisonnière. En effet, le réservoir M se remplit lors des périodes pluvieuses, lorsque le niveau d’eau dans le réservoir E est supérieur à zéro. Le niveau d’eau dans M diminue doucement, avec un faible coefficient de récession (kMS).

Le coefficient de récession kEC est tellement fort (Tableau 3-2) que lorsque le niveau d’eau dépasse le ESeuilC, l’eau dans le réservoir E est transféré dans le réservoir Conduit en très peu de temps (de l’ordre de quelques jours maximum) et donc elle n’est plus disponible pour alimenter le réservoir Matrice. Ainsi si les précipitations sont intenses ou plutôt faibles, le débit qui alimente le débit de base reste le même. De plus, le niveau d’eau simulé dans le réservoir Rapide (C) est comparé avec le niveau d’eau observé dans le conduit du Ragas selon l’équation 3.11. Les crues de janvier/février 2014 illustrent ces niveaux d’eau (Figure 3-7a) et de novembre 2014 (Figure 3-7b): i) le débit des crues est bien simulé par le modèle (Figure 3-6a) et ii) le niveau d’eau dans le lac est constant (123 mètres), il peut être utilisé comme niveau de référence afin de calculer la charge hydraulique qui augmente lors des crues.

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Figure 3-7 Niveau d’eau observé et simulé (moyenne journalière) dans le conduit du Ragas, au-dessus du niveau d’eau maximum du lac, la référence 0 équivaut à 123 mètres d’altitude in-situ quand le lac déborde par le déversoir. Le niveau d’eau simulé du réservoir Conduit est converti en hauteur d’eau au-dessus de 123 mètres. a) Crue de janvier/février 2014 (avec un emmagasinement karstique= 3,6 × 10-4). b) Crue du 26 novembre 2014 (avec un emmagasinement karstique = 5,7× 10-4)

Afin de faire correspondre graphiquement le niveau d’eau observé, l’emmagasinement karstique est fixé à 3,6 × 10-4 pour les crues de janvier/février 2014 et à 5,7 × 10-4 pour la crue de novembre 2014. La valeur de l’emmagasinement karstique est 10 fois plus petite que la valeur constatée sur le système karstique de la source du Lez, de 3 × 10-3 dans des conditions de pompage (Fleury et al., 2009; Mazzilli et al., 2011; Roesch and Jourde, 2006) et 100 fois plus petite que la porosité effective trouvée par Fu et al. (2016), de 3 × 10-2 pour un petit bassin versant de 1,14 km² dans des roches du Carbonifère. Les variations de niveau d’eau et le dynamisme des crues sont bien simulés, montrant que le réservoir Rapide du modèle permet de représenter l’écoulement rapide à travers le réseau karstique, comme observé dans le conduit du Ragas.