• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : Apport de la modélisation pluie-débit à l’étude du fonctionnement d’un

4. Choix de l’outil de modélisation : plateforme KarstMod

Afin de modéliser la relation pluie-débit des sources de Dardennes, la plateforme de modélisation KarstMod a été utilisée avec un pas de temps journalier (Mazzilli et al., 2017). Elle permet de reproduire la structure conceptuelle des modèles karstiques globaux connus dans la littérature (Bezès, 1976; Fleury, 2005; Fleury et al., 2007c; Mero, 1964). Cet outil fournit des structures réglables pour la simulation des débits des sources karstiques et pour l’analyse hydrodynamique des compartiments considérés. Le modèle est composé de réservoirs connectés qui se remplissent et se vident, transformant les précipitations en débit à la sortie du système.

4.1 Structures de modèle pluie-débit

La structure modulable proposée dans KarstMod est basée sur une revue approfondie de la littérature sur les modèles existants et sur la prise en compte des problèmes d’équifinalité (Mazzilli et al., 2017). La structure la plus complète du modèle comprend quatre réservoirs organisés sur deux niveaux (Figure 3-2): le réservoir Epikarst (réservoir E, niveau supérieur) ainsi que les réservoirs lent (ou matrice M), Rapide (ou conduit C) et Latéral (L).

Figure 3-2 Structure complète de la plateforme de modélisation KarstMod. Tous les compartiments et les flux sont activés, un niveau d’eau minimum Emin est assigné et la fonction d’hystérèse utilisée.

163

La structure la plus simple du modèle est réduite à la seule présence du réservoir Epikarst, qui ne peut pas être désactivé, avec un écoulement direct vers la source. Le réservoir Epikarst peut avoir un niveau d’eau inférieur à zéro. En effet, le niveau minimum de ce réservoir peut être inférieur à 0 en proposant un seuil Emin, permettant de simuler la teneur en eau disponible dans le sol. Ce seuil représente la quantité d’eau disponible pour l’évapotranspiration.

Tous les seuils tels que Emin et ESeuilC peuvent être activés ou non par l’utilisateur. Afin de compléter les lois linéaires et non linéaires des niveaux d’eau traditionnellement utilisées dans les modèles pluie-débit, KarstMod propose (i) une fonction d’hystérèse, qui reproduit la dépendance hystérétique observée sur des cycles hydrologiques dans la zone vadose (Tritz et al., 2011) et (ii) une fonction d’échange entre les réservoirs qui permet de reproduire les interactions matrice-conduit observées dans plusieurs systèmes karstiques (Bailly-Comte et al., 2010; Mazzilli et al., 2011). Le réservoir Latéral peut être interprété comme étant un réservoir plus profond que les deux précédents ou une composante intermédiaire entre l’écoulement lent (M) et rapide (C). Des pompages peuvent être ajoutés dans chacun des réservoirs afin de simuler des gestions de l’eau souterraine de différentes façons.

4.2 Equations et schéma numérique

4.2.1 Equations de bilan de masse

Les équations de bilan de masse du modèle utilisé sont les suivantes:

𝑑𝐸 𝑑𝑡

= 𝑃 − 𝐸𝑇 − 𝑄

𝑝𝑒𝑟𝑡𝑒

− 𝑄

𝐸𝐿

− 𝑄

𝐸𝑀

− 𝑄

𝐸𝑆

− 𝑄

𝐸𝐶

− 𝑄

ℎ𝑦𝐸𝐶

− 𝑄

ℎ𝑦𝐸𝐶

si E≥0(3.2a)

𝑑𝐸 𝑑𝑡

= 𝑃 − 𝐸𝑇 si E

min

<E<0(3.2b)

𝑑𝐿 𝑑𝑡

= 𝑄

𝐸𝐿

− 𝑄

𝐿𝑆

− 𝑄

𝑝𝑜𝑚𝑝𝑎𝑔𝑒𝐿

(3.2c)

𝑑𝑀 𝑑𝑡

= 𝑄

𝐸𝑀

− 𝑄

𝑀𝐶

− 𝑄

𝑀𝑆

− 𝑄

𝑝𝑜𝑚𝑝𝑎𝑔𝑒𝑀

(3.2d)

𝑑𝐶 𝑑𝑡

= 𝑄

𝐸𝐶

+ 𝑄

ℎ𝑦𝐸𝐶

+ 𝑄

𝑀𝐶

− 𝑄

𝐶𝑆

− 𝑄

𝑝𝑜𝑚𝑝𝑎𝑔𝑒𝐶

(3.2e)

Où :

 P et ET sont respectivement les précipitations et l’évapotranspiration [L/T],

 E, M, C et L sont les niveaux d’eau dans les réservoirs Epikarst, Lent, Rapide et Latéral,  kAB est le coefficient de récession associé à l’écoulement provenant du réservoir A (soit E, M,

C et L) au réservoir B (soit M, C, L ou S) ou à la source S, et QAB est le débit [L/T] provenant de A jusqu’à B.

𝑄

𝑆

= 𝑅

𝐴

× (𝑄

𝐸𝑆

+ 𝑄

𝐿𝑆

+ 𝑄

𝑀𝑆

+ 𝑄

𝐶𝑆

− 𝑄

𝑝𝑜𝑚𝑝𝑎𝑔𝑒 𝑆

) (3.3)

Où RA est l’aire de recharge des sources en [L²] et QS

pompage est le débit de pompage directement pris à la source [L/T].

Les flux internes sont définis comme ceci (QEM, QEC, QES, QLS, QMS, QCS):

𝑄

𝐴𝐵

= 𝑘

𝐴𝐵

(

𝐴

164

Sinon, 𝑄

𝐴𝐵

= 0 (3.5)

Avec A le niveau d’eau dans le réservoir A, Lref est une longueur unitaire et αAB est un exposant positif.

Les autres fonctions telles que Qpertes, les échanges entre les réservoirs, QMC, l’hystérèse sont expliquées en détails dans le guide utilisateur de KarstMod.

4.2.2 Schéma numérique

Deux résolutions numériques sont envisagées pour résoudre les équations précédentes dans la version de KarstMod 2.0.19. Dans les structures de modèles où les lois de vidange sans fonction puissance sont appliquées et sans flux entre les réservoirs, alors une solution analytique des équations du modèle différentiel est utilisée. Les formulations non linéaires (avec une fonction puissance différente de 1) sont résolues en utilisant un schéma de Runge-Kutta de second ordre.

4.3 Paramétrage et calage du modèle pluie-débit

Les données d’entrée du modèle pluie-débit sont les précipitations et l’évapotranspiration et les données de sortie est le débit à l’exutoire. Le modèle doit caler un jeu de paramètres qui vont être les coefficients de récession de chacun des réservoirs utilisés, leurs niveaux d’eau initiaux, les seuils associés à ces différents réservoirs ainsi que l’aire de recharge de l’aquifère. Le nombre de paramètres à caler est fonction du nombre de réservoirs choisis par l’utilisateur. Le modèle doit alors caler ces différents paramètres afin d’obtenir un débit simulé proche du débit observé.

Afin de construire un modèle pluie-débit, trois périodes doivent être prises en compte. La période de « chauffe » (ou warm-up period en anglais) correspond à l’intervalle de temps après que le biais d’initialisation soit négligeable. Les résultats de simulation de cette période ne sont pas considérés dans le calage. Mazzilli et al. (2012) ont montré que le niveau d’eau initial dans un réservoir linéaire avec un faible coefficient de récession a relativement une faible influence sur le débit simulé mais son influence diminue lentement. Dans un réservoir avec un fort coefficient de récession, le niveau d’eau initial a une forte influence sur le débit simulé mais décroit très rapidement.

4.4 Performance du modèle

Les critères de performance dans KarstMod sont le coefficient de Nash-Sutcliffe, NSE (Nash and Sutcliffe, 1970) et la Balance Error BE, définis comme suit :

𝑁𝑆𝐸 = 1 −∑(𝑄𝑜𝑏𝑠−𝑄𝑠𝑖𝑚)2

∑(𝑄𝑜𝑏𝑠−𝑄𝑚𝑜𝑦 (3.6) 𝐵𝐸 = 1 − |∑(𝑄𝑜𝑏𝑠−𝑄𝑠𝑖𝑚)

∑ 𝑄𝑜𝑏𝑠 | (3.7)

Où Qobs est le débit observé(m3/s); Qsim le débit simulé (m3/s); Qmoy est la moyenne des débits observés (m3/s).

NSE et BE s’étendent de –∞ à 1. Un NSE de 1 est une parfaite correspondance entre le modèle et les observations. Un coefficient NSE de 0 indique que le modèle n’est pas plus performant que la valeur moyenne des données observées. Pour un NSE<0, la moyenne est un meilleur indicateur que le modèle. Une BE égale à 1 signifie que le volume total simulé écoulé est à égal au volume total observé. La

plate-165

forme KarstMod utilise une fonction objectif définie comme la somme pondérée des deux critères de performances, selon l’équation suivante (8) :

𝑊𝑜𝑏𝑗 = w NSE + (1 − w) BE (3.8)

Avec Wobj la fonction objectif, et w le poids défini par l’utilisateur (0≤w≤1).

La plateforme de modélisation KarstMod propose également d’utiliser les résultats de simulation de tous les jeux de paramètres donnant Wobj > Wobjmin pour l’évaluation de l’incertitude sur les résultats de la simulation. L’approche est dérivée de la Regional Sensitivity Analysis (Hornberger and Spear, 1981) et de la Generalized Likelihood Uncertainty Estimation (GLUE) (Beven and Binley, 1992). Au lieu de sélectionner un jeu de paramètres unique comme résultat du processus de calage, ces méthodes considèrent que tous les ensembles de paramètres donnant des résultats satisfaisants lors de la période de calage doivent être pris en compte dans le processus de prédiction. La valeur de Wobj pendant la période de calage est utilisée comme mesure de vraisemblance pour chaque comportement d’un ensemble de paramètres. Les limites de l’intervalle de confiance de 90 % sont également tracées autour de la courbe du débit simulé au temps t, et calculées sur les ensembles de paramètres en utilisant la probabilité comme facteur de pondération.

De plus, la plateforme de modélisation KarstMod propose une analyse de sensibilité des paramètres choisis (Mazzilli et al., 2017). Les indices sont calculés en utilisant la procédure de Sobol décrire par Saltelli (2002). Les indices de sensibilité sont liés à la décomposition de la variance de la variable calibrée (ici, le débit à l’exutoire):

- les indices de 1er ordre : chaque paramètre est pris indépendamment,

- les indices d’effet total : ce sont les interactions entre chaque paramètre qui sont considérées. L’indice de sensibilité Si pour le paramètre Xi par rapport au débit simulé Qs est défini comme la fraction Vi de la variance V(Qs) du débit simulé qui est due uniquement au paramètre Xi :

𝑆𝑖 =𝑉𝑖

𝑉 𝑄𝑠 (3.9)

L’indice de sensibilité d’effet total STI mesure la contribution du paramètre Xi à la variance du débit à l’exutoire, incluant les interactions de Xi avec d’autres variables d’entrées (Saltelli et al., 2008). Par défaut, les indices de sensibilité fournis par la plateforme KarstMod sont obtenus à partir d’un jeu de paramètres N = 1000 × (npar + 2), où npar est le nombre de paramètres à caler.

5. Mise en œuvre d’un modèle Pluie-Débit avec la plateforme KarstMod