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L’état |10ê + |01ê présente des cohérences entre les états |10ê et |01ê. Celles-ci sont responsables de la sensibilité de l’état à la différence de fréquence des deux cavités. Afin de les mettre en évidence, il faut recombiner les deux composantes de la superposition.

Fig. II.8 Schéma de principe de la mesure de l’état |10ê + e|01ê par un atome sonde. L’atome effectue d’abord une impulsion π dans C1, qui transfère l’état de la cavité sur l’atome, puis une impulsion π/2 dans C2. On mesure la probabilité de le trouver dans |gê, qui dépend de φ.

Ceci peut être fait par un atome qui absorbe le photon éventuellement contenu dans la première cavité et le fait interférer avec la partie de la fonction d’onde où il est dans la deuxième cavité.

Dans cette section, nous allons présenter une mesure permettant de réaliser cette interférence. Dans un premier temps, nous décrirons la séquence expérimentale de mesure. Nous montrerons ensuite que cette méthode permet en principe de mettre en évidence l’intrication entre les deux cavités.

II.2.1 Séquence de mesure

Afin de faire battre les deux composantes de la superposition |10ê + |01ê, on utilise un atome résonnant, qu’on appellera dans la suite atome sonde, qui copie le champ contenu dans la première cavité et peut ensuite absorber ou émettre dans la deuxième cavité, en fonction de la phase quantique de la superposition.

Le principe de la mesure effectuée par l’atome sonde est présenté sur la figure II.8. Initialement préparé dans |gê, il effectue une impulsion π dans la première cavité. L’état de la première cavité est alors transféré à l’atome et celle-ci termine dans l’état vide :

|g, 1, 0ê + e|e, 0, 1êπ,CÔ−→ |e, 0, 0ê + e1 |g, 0, 1ê . (II.2.1) Lors de l’interaction avec la deuxième cavité, l’atome effectue une impulsion π/2. En supposant réelle la pulsation de Rabi Ω0,2 dans la deuxième cavité, l’état évolue comme :

|e, 0, 0ê + e|g, 0, 1êπ/2,CÔ−→2 11 − ei(φ−ψm)2

|e, 0, 0ê + e11 + ei(ψm−φ)2|g, 0, 1ê . (II.2.2) Comme on l’a fait pour la préparation de l’état, on a introduit une phase ψm pour la mesure, qui prend en compte à la fois la phase acquise par l’atome pendant la traversée entre les deux cavités et pendant les interactions avec les cavités.

Afin de sonder les cohérences, on mesure la probabilité de trouver l’atome dans |gê, pour différentes valeurs de la phase des cohérences. Si on laisse évoluer l’état, sa phase os-cille à la différence de pulsation δ des cavités. Il suffit donc d’attendre entre la préparation et la détection pour observer une oscillation de la probabilité d’absorption du photon. Le contraste de cette oscillation nous donne l’amplitude des cohérences.

La figure II.9 montre la séquence de préparation et mesure utilisée pour sonder les cohérences. Elle consiste en quatre étapes :

Fig. II.9 Schéma temps-position de la séquence expérimentale utilisée pour étu-dier les cohérences de l’état |10ê+|01ê. Dans un premier temps, une série d’atome serpillières est envoyé dans chaque cavité pour absorber le champ thermique. On envoie ensuite l’atome injecteur qui prépare l’état intriqué des deux cavités. Cet état évolue pendant une durée T0, avant l’arrivée de l’atome sonde. On répète l’expérience pour moyenner la probabilité de trouver l’atome sonde dans |gê et on fait varier T0 pour observer l’évolution temporelle du signal d’interférence.

1. On initialise les cavités dans l’état vide en envoyant une série de dix atomes ser-pillières dans chacune d’entre elles ;

2. On prépare l’état |10ê + |01ê en envoyant un atome injecteur AI selon le protocole décrit sectionII.1.1;

3. On attend un temps T0;

4. On envoie un atome sonde AS et on mesure la probabilité de le trouver dans |gê. On obtient alors une courbe de la probabilité de trouver la sonde dans |gê en fonction du temps T0. La phase du signal oscillant obtenu est une mesure interférométrique de la différence de fréquence entre les deux cavités. La figure II.10 montre à l’aide de sphères de Bloch comment cette phase est transformée en signal de probabilité.

II.2.2 Optimalité de la mesure résonnante : états propres et information de Fisher

Dans cette section, on va introduire un critère permettant de montrer que l’état est intriqué par la violation d’une inégalité métrologique [70] et on va montrer que la mesure résonnante permet de violer maximalement cette inégalité.

Le critère repose sur l’information de Fisher, qu’on présentera plus en détails dans le chapitre III, et qui permet de quantifier l’information qu’un signal contient sur un paramètre qu’on souhaite estimer. Dans notre cas, celui-ci est la phase φ imprimée dans l’état |10ê + e|01ê. Le signal de mesure que l’on obtient lorsqu’on fait varier φ est tracé

Fig. II.10 Séquence expérimentale vue en termes de sphère de Bloch. Les deux premières vignettes montrent, dans la sphère de Bloch AI/C1, l’oscillation π/2 qui intrique l’injecteur à la cavité 1. Cette intrication est ensuite transmise à C2, ce qu’on voit sur la sphère de Bloch des deux cavités (en haut à droite). L’état des cavités évolue pendant une durée T0 en tournant dans le plan équatorial de leur sphère de Bloch. L’intrication est ensuite transmise à l’atome sonde par l’impulsion π dans la première cavité, ce qu’on voit sur la sphère de Bloch AS/C2

de la cinquième vignette. Enfin, la dernière impulsion transcrit la phase azimutale de l’état après T0 en probabilité. Pour simplifier, on a pris ψm= ψp = 0.

sur la figureII.11. Il s’agit d’une oscillation décrite par :

Pg = 1 + C cos(φ)

2 , (II.2.3)

où C est le contraste de l’oscillation mesurée.

L’information de Fisher contenue dans le signal est donnée par :

F (φ) = Pe 3d log Pe 42 + Pg 3d log Pg 42 , (II.2.4a) = C 2sin2φ 1 − C2cos2φ, (II.2.4b) et vaut 1, lorsque C = 1, quelle que soit la phase.

On prépare initialement l’état |ψê = |10ê + |01ê et on le laisse évoluer selon une évo-lution unitaire générée par ˆhf = ( ˆN1− ˆN2)/2, de manière à obtenir l’état |10ê + e|01ê,

Fig. II.11 En bleu, signal de probabilité obtenu lorsqu’on fait varier la phase

φ de l’état, en laissant le champ évoluer librement avant la mesure, pour un

contraste de la mesure C = 0.9. En rouge, information de Fisher sur la phase, associée au signal bleu. Le trait horizontal en pointillé indique l’information de Fisher à dépasser pour mettre en évidence l’intrication avec le critèreII.2.6.

qui contient l’information sur φ. L’information de Fisher maximale qu’on peut atteindre en effectuant une mesure sur le système est appelée information de Fisher quantique FQ et peut s’exprimer, pour un état initial pur [71] [72] :

FQ(φ) = 4 éψ| ∆ˆh2f|ψê , (II.2.5a)

= 1. (II.2.5b)

Pour un contraste C = 1, l’information de Fisher de notre mesure est donc égale à l’information de Fisher quantique, ce qui signifie qu’on extrait le maximum d’information sur la phase.

Le critère pour l’intrication proposé par [70] repose sur l’inégalité :

FQ(φ, ˆρsep) ≤ 4è(∆ˆh1)2+ (∆ˆh2)2é, (II.2.6) valide pour tout état séparable ˆρsep et pour un paramètre φ imprimé sur l’état par une transformation générée par ˆhf = ˆh1+ ˆh2, où ˆh1 et ˆh2 agissent respectivement sur les sous-systèmes 1 et 2. Dans notre cas, ˆh1 = ˆN1/2, ˆh2 = − ˆN2/2 et on a :

4è(∆ˆh1)2+ (∆ˆh2)2é= 1

2. (II.2.7)

On voit donc que l’inégalité est violée par l’information de Fisher quantique. Plus géné-ralement, si on parvient à obtenir un signal dont l’information de Fisher est supérieure à 1/2, l’état n’est pas séparable. On voit que notre mesure permet de le faire dès lors que

C >1

Fig. II.12 Signal d’interférence obtenu pour l’état |10ê + |01ê à froid. La courbe bleue est un ajustement par la fonction T0 Ô→ y0+ C/2 cos(2πf T0 + ϕ), avec

y0 = 0.558 ± 0.007, C = 0.44 ± 0.02, f = 16.0 ± 0.2 kHz et ϕ = 4.3 ± 0.09. La courbe rouge est l’information de Fisher sur la phase calculée à partir de l’ajus-tement. Celle-ci atteint 0.19 à mi-frange.