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1.   Introduction

1.6   Mesure de la fatigue

Jusqu’à récemment, la fatigue n’était pas mesurée de routine dans de nombreuses maladies, telles que le cancer, et cela malgré son impact majeur sur les patients et leur qualité de vie109.

La fatigue chez les patients cancéreux est sous-estimée et sous-diagnostiquée et il a été démontré que peu de patients souffrant de fatigue voient leur problème pris en compte par les équipes soignantes110,111. Cela est probablement dû au fait que les patients sont parfois réticents à parler de leur fatigue, s’imaginant que le traitement sera moins agressif s’ils se déclarent fatigués110. Certains pensent aussi que c’est un problème qu’ils devraient pouvoir gérer eux-mêmes112. Les soignants sont également réticents à évaluer la FRC en raison de l’interférence fonctionnelle et de la détresse engendrée chez les patients, alors qu’ils n’ont pas connaissance de traitements validés à proposer110.

Il n’existe pas de « gold standard » pour mesurer la fatigue mais différents instruments ont été développés pour l'évaluer. L’approche générale de l’évaluation de la fatigue est basée sur le concept que la fatigue est une expérience subjective. La plupart de ces instruments sont donc des outils d’auto-évaluation. On retrouve surtout: la « Pearson-Byars Fatigue Feeling Checklist »113, le « Profile of Mood States (POMS) Fatigue and Vigor subscales »114, le « Functional Assessment of Cancer Therapy-Fatigue (FACT-F) »44, la « Piper Fatigue Self-Report Scale » (PFS)115, le « Fatigue Assessment Instrument (FAI) »109, le « Multidimensional Fatigue Inventory » (MFI)116, le « Multidimensional Fatigue Symptom Inventory » (MFSI)117 et le « Fatigue Symptom Inventory » (FSI)118.

Les principales échelles sont détaillées ci dessous :

- La « Pearson-Byars Fatigue Feeling Checklist »113 : elle consiste en une liste de 13 items décrivant des niveaux d’énergie. Des exemples de ces items

16 incluent des expressions telles que « faiblement fatigué (slightly tired) »,

« très vigoureux (very lively) » et « assez frais (quite fresh) ». Les patients s’évaluent selon qu’ils se sentent « mieux que (better than) », « identique (the same as) » ou « pire que (worse than) » pour chaque item. La fiabilité de ce test a été démontrée mais certaines limitations persistent : une graduation à trois points n’est peut être pas suffisante pour évaluer la variabilité des états de fatigue. Certains items sont propres à l’anglais ce qui les rend difficilement traduisibles46.

- Les deux sous-échelles du « Profile of Mood States (POMS) » (POMS-Fatigue et POMS- Vigor)114 : celles-ci sont également basées sur des items décrivant des niveaux de fatigue ou de vigueur (« worn-out », « listless »,

« fatigued », « exhausted », « sluggish », « weary », « bushed » pour la fatigue ; « lively », « active », « energetic », « cheerful », « alert », « full of pep », « carefree » et « vigourous »). Chaque item est quotté sur une échelle à 5 points. Ces deux sous-échelles présentent les mêmes limitations de traduction que la « Pearson-Byars Fatigue Feeling Checklist »46.

- Le « Functional Assessment of Cancer Therapy-Fatigue (FACT-F) »44 : cet outil a été créé pour mesurer les symptômes de fatigue chez les patients cancéreux avec une anémie. Il consiste en 28 items du FACT-General (FACT-G) pour évaluer la qualité de vie relative à l’état de santé et en 13 items additionnels pour évaluer la fatigue. Des exemples de ces items concernant la fatigue comprennent des expressions relatives à des degrés de fatigue et leurs répercussions. (« feel weak all over », « have energy », « I am frustrated by being too tired to do the things I want to do »). Chaque item est évalué sur une échelle de 0 (« not at all ») à 4 (« very much so »). Malgré une fiabilité démontrée, le FACT-F pêche par sa longueur et par la difficulté à traduire certains items46 .

- La « Piper Fatigue Self-Report Scale » (PFS)115, le « Multidimensional Fatigue Inventory » (MFI)116, le « Multidimensional Fatigue Symptom Inventory » (MFSI)117 : ces différentes échelles ont été créées pour évaluer plusieurs dimensions de la fatigue. Leur fiabilité a été démontrée mais leur

17 longueur les rend difficiles à remplir pour les patients cancéreux très fatigués46.

Comme évoqué précédemment, beaucoup de ces échelles sont trop longues à remplir pour les patients très sévèrement malades. D’autres sont basées sur des expressions ou idiomes propres à l’anglais, les rendant difficilement traduisibles. Afin de pallier à ces inconvénients, une équipe de l’Université du Texas a développé un outil fiable et facile d’utilisation : le Brief Fatigue Inventory (BFI) présenté ci-dessous :

1.6.1 Le « Brief Fatigue Inventory » (Annexe 2)

Cet instrument est basé sur le « Brief Pain Inventory » (BPI)119 qui a été utilisé et validé avec succès pour évaluer la sévérité et l’impact de la douleur liée au cancer aux États-Unis, en Europe120 et en Asie121. Comme énoncé précédemment, il a été développé afin d’obtenir un instrument simple, facilement utilisable, reproductible, d’interprétation rapide et compréhensible. Cet outil permet d’améliorer la communication à propos de la fatigue reliée au cancer (FRC) entre les patients et les soignants. La mise en place d’études cliniques en vue d’améliorer la compréhension et la prise en charge de la FRC se voit également facilitée46.

Le développement de cet outil a débuté par une première récolte de données auprès d’un échantillon très divers de patients cancéreux et non-cancéreux et qui a permis d’éliminer les items non-discriminants entre les deux groupes. Les patients présentant un état clinique trop dégradé ou ceux présentant un diagnostic psychiatrique majeur au moment de l’étude ont été exclus. Un groupe de travail multidisciplinaire a par la suite pratiqué une revue de la littérature pour développer le BFI.

La validation du BFI a, par la suite, permis de montrer que cette échelle était fortement corrélée aux autres instruments de mesure de la fatigue précédemment validés (POMS-Fatigue et la Fatigue subscale de la FACT)46,122.

Elle est composée de 9 items sur une seule page. La fatigue et son interférence avec la vie quotidienne sont mesurées sur une échelle numérique de 0 à 10.

18 Trois items demandent aux patients de décrire leur fatigue « actuellement », à son niveau habituel et à son pire niveau durant les 24 dernières heures. Les descriptions passent de « pas de fatigue »(0) à « le pire imaginable »(10).

Six items concernent la fatigue et son interférence sur la vie quotidienne durant les 24 dernières heures avec un zéro équivalent à « pas d’interférence ». Les différents aspects mesurés comprennent: l’activité générale, l’humeur, la marche, le travail normal (en dehors et à l’intérieur du domicile), les relations avec l’entourage et l’appréciation de la vie.

Le score global du BFI est la moyenne des 9 items. La fatigue est ensuite décrite comme « sévère » si le score est égal ou supérieur à 7 et « non sévère » si celui-ci est de 1 à 646.

D’autres études tendent à montrer qu’une stratification plus précise du degré de fatigue serait mieux corrélée avec l’interférence fonctionnelle en utilisant la classification suivante : 1-2: fatigue moyenne, 3-6: fatigue modérée, 7-10: fatigue sévère112. Ces derniers résultats n’ont cependant pas bénéficié d’une validation internationale.

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