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Les mesures de champs de temp´erature sont essentiellement r´ealis´ees par thermographie in-frarouge (InfraRed Thermography IRT). Nous pr´esentons succinctement ici le principe physique exploit´e et les diff´erentes ´etapes n´ecessaires `a l’obtention d’une mesure de qualit´e. Nous

discute-Techniques d’observation de ph´enom`enes locaux : mesure de champs 49

rons des performances attendues.

3.2.1 Principe de la thermographie infrarouge

Tous les corps, en fonction de leur temp´erature et de leur ´emissivit´e, ´emettent un rayonnement d’ondes ´electromagn´etiques. Entre 0C et 100C, la majorit´e du rayonnement est compris entre les longueurs d’ondes 3 µm et 5 µm, c’est le domaine de l’infrarougemiddle waves(moyennes longueurs d’ondes : IR MW).

Les cam´eras infrarouges actuelles sont, pour la plupart, dot´ees d’une matrice CMOS (Comple-mentary Metal Oxide Semiconductor) de pixels sensibles aux rayonnements dans ces fr´equences. Sur une certaine dur´ee (temps d’int´egration de l’ordre de 1 ms), les rayonnements rec¸us sont donc quantifi´es par chaque pixel et cod´es num´eriquement en Digital Level (DL) (sur 14 bits soit cod´es de 0 `a≃ 16000). La valeur en DL est donc repr´esentative du rayonnement rec¸u depuis la surface.

Celui-ci est fonction `a la fois de la temp´erature et de l’´emissivit´e de la surface, comme le montre l’´equation 2.12. L’intensit´e des radiations perc¸ues , Rp provenant d’un corps opaque, en chaque point, peut s’´ecrire [Gaussorgues et Chomet, 1994] :

RpepΦemission´ + (1 −εepr ´e f lexion (2.12)

o`u εep est l’´emissivit´e de la surface de l’´eprouvette observ´ee. Φemission´ est l’excitance spec-trale c’est-`a-dire la puissance rayonn´ee par unit´e d’aire, sur les longueurs d’ondes de la bande passante de la cam´era, pour une surface `a la temp´erature Tepr ´e f lexion repr´esente la contribution des radiations de l’environnement se refl´etant dans cette mˆeme surface.

La relation de Stefan-Boltzmann ´etablit que :

Φemission´SB.T4

ep

Φr ´e f lexion≃∑σSBεextText4 (2.13)

avecσSB= 5.67 × 10−8 Wm−2K−4 et en n´egligeant les aspects de permissivit´e de l’atmosph`ere.

Tepet Text sont respectivement les temp´eratures de l’´eprouvette et de son environnement ext´erieur. Le premier terme de l’´equation 2.12 repr´esente les ´emissions de l’´echantillon, alors que le second terme repr´esente les rayonnements de tout ce qui entoure l’objet imag´e, qui se refl`etent partiellement dans la surface observ´ee. Quand l’´emissivit´e est proche de l’unit´e,εep≃ 1, les

rayon-nements de l’environnement peuvent ˆetre n´eglig´es et Rpest un signal fiable pour la mesure de la temp´erature.

La conversion entre les degr´es num´eriques (Digital Levels DL) d´elivr´es par la cam´era et la temp´erature r´eelle en degr´es Celsius est une fonction non-lin´eaire qui capture les non lin´earit´es dues `a la fois `a la relation de Stefan-Boltzmann, `a l’´equation 2.12, au spectre d’´emission du corps noir et `a la bande passante spectrale du capteur de la cam´era. La conversion est r´ealis´ee en imageant un corps noir ´etendu, r´egul´e en temp´erature, utilis´e comme ´etalon de rayonnement. Afin d’obtenir une mesure fiable, l’´emissivit´e de l’objet doit donc ˆetre, `a l’instar du corps noir, aussi haute et uniforme que possible. C’est pourquoi g´en´eralement on recouvre la surface d’int´erˆet de peinture noire `a haute ´emissivit´e ou de noir de fum´ee (typiquement εep≃ 0.96). Il est alors possible de

50 Mesure coupl´ee de champs cin´ematiques et thermiques : IRIC

3.2.2 Etalonnage de la Cam´era´

Comme pour toute mesure, le capteur doit ˆetre ´etalonn´e avant l’essai. Nous disposons ici d’une matrice de pixels, chacun ´etant un capteur en soi. Il y a donc trois ´etapes : la d´etermination de la gamme de mesure, le r´eglage de l’uniformit´e de la matrice et la conversion DL→C.

Gamme de mesure. Comme la plupart des capteurs, chaque pixel a une gamme de

fonc-tionnement en intensit´e de rayonnement au-del`a de laquelle il sature. On peut r´egler la gamme de temp´erature sur laquelle on veut travailler, en modifiant le temps d’int´egration, c’est-`a-dire le temps durant lequel chaque pixel va compter les photons (IT≃ 1ms). Ainsi, on s’arrange pour

saturer juste au dessus de la temp´erature maximale de la gamme de travail, elle correspondra `a

≃ 16000DL .

R´eglage de l’uniformit´e de la matrice. La cam´era dispose d’une matrice CMOS, dont chaque

pixel poss`ede sa propre ´electronique. Aussi, sans correction, elle donnerait une mesure diff´erente pour une mˆeme temp´erature. Pour pallier cela, la proc´edure consite `a imager deux sc`enes uni-formes (le corps noir r´egul´e), pertinemment choisies `a environ un tiers et deux tiers de la gamme de temp´erature, pour r´ealiser sur chaque pixel une correction lin´eaire, en fonction de la valeur moyenne de la matrice totale. Cette proc´edure peut ˆetre r´ealis´ee automatiquement, grˆace au logi-ciel de la cam´era. C’est la Non-Uniformity Correction (NUC) ditedeux points.

Conversion DLC. Maintenant que tous les pixels ont une r´eponse identique en DL pour

une mˆeme temp´erature, il est possible de d´eterminer la loi de conversion. Nous avons vu qu’il s’agit d’une relation non-lin´eaire `a cause des lois physiques (d´ecrites par les ´equations 2.12 et 2.13), mais aussi de la nature des capteurs. Pour d´eterminer la loi de conversion, on image un certain nombre de sc`enes, uniformes et `a des temp´eratures connues (le corps noir r´egul´e est notre ´etalon en rayonnement). On obtient les points repr´esent´es sur le graphe 2.5, que l’on peut inter-poler par une fonction polynomiale, convertissant DL enC.

10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 4000 5000 6000 7000 8000 9000 10000 11000 12000 13000 14000

température du corps noir en Celcius

niveau de gris moyen en DL point de mesure

polynôme de DL vers °C polynôme de °C vers DL

FIGURE 2.5: Courbe d’´etalonnage de la cam´era infrarouge, donnant la correspondance entre Digital Levels etC, interpol´ee ici par un polynˆome d’ordre 7.

Cette proc´edure est conseill´ee par le constructeur de la cam´era. Dans le cas o`u l’on voudrait encore am´eliorer la justesse et l’uniformit´e de la mesure, l’´etalonnage peut ˆetre r´ealis´e en

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traitement. On r´ealisera alors une NUC- n points (n ´etant le nombre de sc`enes uniformes imag´ees) et l’on identifiera un polynˆome de conversion par pixel.

3.2.3 Int´erˆet et limitations 50 100 150 200 250 300 20 40 60 80 100 120 34 35 36 37 38 39 40

FIGURE2.6: Image infrarouge convertie en temp´erature enC enregistr´ee lors d’un essai de traction sur un Alliage `a M´emoire de Forme de type Ni-Ti `a 2 mm min−1. Une bande

de localisation est visible au centre de l’´eprouvette.

Ce moyen de mesure d´elivre donc des champs dont la discr´etisation correspond `a la taille du pixel. Pour chaque image on obtient la temp´erature en chaque point de la surface d’int´erˆet, sur la configuration courante. Cela permet `a la fois une observation globale du comportement et une mesure pr´ecise, pouvant ˆetre approfondie en certains points particuli`erement pertinents.

Les performances atteintes sont sans comparaison avec celles que l’on peut obtenir avec des thermocouples. Bien sˆur, l’incertitude de mesure d´epend grandement de la gamme de mesure (IT) de la cam´era (l’´etalonnage corrige l’erreur syst´ematique), mais `a titre indicatif le constructeur de la cam´era (pour nous Flir Cedip) annonce un NEDT (Noise Equivalent Temperature Difference) de≃ 20 mK `a 20C. C’est-`a-dire que l’incertitude de mesure est de l’ordre de 0, 02C.

De plus, la cam´era se situe `a une distance respectable de l’objet `a imager, ne perturbant pas son comportement. Il faut cependant savoir que les matrices IR sont g´en´eralement de taille li-mit´ee. Pour notre cam´era, une Cedip Jade III MW, la matrice poss`ede 320× 240 pixels (76 800

pixels), espac´es de 30 µm, soit un d´etecteur de dimension 9, 6 × 7,2mm. La r´esolution est bien

plus faible que celles auxquelles nous sommes accoutum´es dans le visible. Une piste pour pallier ce manque d’information spatiale est la richesse temporelle [Besnard et al., 2011]. En effet la plu-part des cam´eras IR propose des fr´equences d’acquisition tr`es ´elev´ees, pertinentes pour l’´etude de ph´enom`enes transitoires ou dynamiques. Notre cam´era propose par exemple des fr´equences de 25 `a 190 Hz, en pleine r´esolution et pouvant aller jusqu’`a 10 kHz en sous-fenˆetrant (acquisition de quelques pixels seulement).

52 Mesure coupl´ee de champs cin´ematiques et thermiques : IRIC

4 Simultan´eit´e des mesures DIC et IRT