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La mentalité, un lieu de rencontre

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 95-107)

Chapitre 2 : Barthes avec Lucien Febvre

2.3. La mentalité, un lieu de rencontre

Un fragment inédit de Roland Barthes par Roland Barthes, intitulé : « l’École », pose cette question : « Comment peut-on être heureux dans une institution (qui est un petit morceau d’État) ? » Barthes répond : « Je l’ai été (et le suis) à l’École des Hautes Études ». Dans la partie biffée du fragment Barthes avait énuméré ses causes de bonheur à la VIe section : « liberté d’enseignement, plaisir affectif et intellectuel des séminaires […], complicité avec l’Idée scientifique qui y règne (qui est en gros celle d’une Histoire des mentalités et des structures)147 ».

Barthes se sent complice de l’Histoire des mentalités, et met en parallèle cette histoire et celle des structures. Nous sommes à l’époque de Roland Barthes par Roland Barthes, loin de la période « structuraliste » de Barthes durant laquelle il essaie de rapprocher toute innovation dans les sciences humaines du mouvement structuraliste. La « structure » est donc en l’occurrence à entendre, aussi mais peut-être pas seulement, au sens historiographique,

146 Lucien Febvre, Le Problème de la croyance au XVIe siècle. La Religion de Rabelais, Albin Michel, 1947, p. 36.

147 Fragments inédits de Roland Barthes par Roland Barthes, publiés à la suite du Lexique de l’auteur, présentation et édition d’Anne Herschberg Pierrot, Paris, 2010.

95 dire en renvoyant à ce qui relève de la « longue durée ». Pourtant, contrairement à Proust148, Barthes semble ne pas aimer particulièrement le mot « mentalité », il apparaît rarement sous sa plume.

Le concept n’est pas facile à définir. Les historiens qui ont pratiqué ce modèle d’historiographie l’avouent les premiers. Jacques Le Goff, par exemple, a intitulé le chapitre qu’il a consacré à ce sujet dans Faire de l’histoire : « Mentalité : une histoire ambiguë ».

Georges Duby emploie le même adjectif : « Je reconnais maintenant que ce terme (mentalité) est ambigu […] mais au moment où Robert Mandrou et moi-même l’avons lancé, son utilité était évidente. Il a permis de préciser ce que Lucien Febvre avait voulu adjoindre à l’histoire économique et sociale, lorsqu’il avait changé le titre de la revue des Annales, ajoutant à “Économie” et “Société”ce mot “Civilisation”149 ».

Et d’abord, où commence cette histoire des mentalités ? En premier lieu on trouve trois noms : Georges Duby, Robert Mandrou et Philippe Ariès, auxquels viendront rapidement s’ajouter ceux d’autres chercheurs, notamment Jacques Le Goff, dont les apports sont décisifs quant à la précision du concept. En arrière-plan, l’héritage direct de Lucien Febvre, Marc Bloch et aussi l’historien belge, Henri Pirenne. Mais l’héritage indirect peut remonter loin : les durkheimiens et en particulier Halbwachs, des historiens du XIXe siècle comme Michelet ou Fustel de Coulanges. Mieux vaut s’arrêter là : l’héritage indirect peut toujours trouver ses origines quelque part en Grèce.

Quel est son objet ? L’explication de Robert Mandrou à cet égard reste l’une des plus claires : « L’histoire des mentalités se donne pour objectif la reconstitution des comportements, des expressions et des silences qui traduisent les conceptions du monde et les sensibilités collectives ; représentations et images, mythes et valeurs reconnues ou subies par les groupes ou par la société globale, et qui constituent les contenus des psychologies collectives, fournissent les éléments fondamentaux de cette recherche150 ».

Comment rapprocher cette notion de la pensée de Barthes ? Pour Lucien Febvre, comme pour ses successeurs, les « mentalités » ne sont pas éloignées des « représentations

148 Il est d’usage parmi les historiens qui expliquent la notion de « mentalité » en Histoire, pour situer le mot dans le temps, de citer cette phrase du Côté de Guermantes : « Mentalité me plaît. Il y a comme cela des mots nouveaux qu’on lance ». (Bibliothèque de la Pléiade, t. II, p. 236-7).

149 Georges Duby, « La rencontre avec Robert Mandrou et l’élaboration de la notion d’histoire des mentalités », in Histoire sociale, sensibilités collectives et mentalités, Mélanges Robert Mandrou, PUF, 1985, p. 34.

150 Robert Mandrou, « L’histoire des mentalités » In Encyclopédie Universalis, Tome VIII, 1968.

96 collectives », Georges Duby les rapproche de l’idéologie. Elles enveloppent la doxa et le

« mythe », Robert Mandrou précise : « même les illusions ». Cette capacité à explorer tout ce qui relève de l’imaginaire social, -pris en un sens très large, ce qui implique d’interroger la construction et le fonctionnement de la raison spéculative - fait partie des raisons pour lesquelles il est difficile de définir le concept des mentalités. Pourtant, cette notion a un potentiel considérable pour rassembler les sciences humaines et faire entrer l’histoire en dialogue avec elles. D’un côté la « mentalité » peut être l’objet d’étude de chacune des sciences humaines, de la géographie à la linguistique en passant par la sociologie et la psychologie. De l’autre, elle oblige l’historien à s’intéresser constamment aux travaux de ses voisins.

Si Barthes se sent complice de l’histoire des mentalités, la complicité peut se sentir également de la part des historiens. Prenons l’exemple de Robert Mandrou: Philippe Joutard et Jean Lecuir témoignent de son séminaire à l’EPHE en ces termes : « toutes les semaines il (Mandrou) proposait à la discussion quelques articles ou livres d’histoire ou de sciences humaines (de Barthes à Lévi-Strauss en passant par Foucault), susceptible de provoquer une réflexion sur les méthodes historiques151 ». En effet, dans le travail de Mandrou, Duby ou Le Goff, l’histoire des mentalités se rapproche de l’étude des mass media ou de l’analyse du quotidien. En expliquant la méthode de l’histoire des mentalités, Robert Mandrou précise : « Il est également nécessaire de retrouver les comportements sociaux dominants […] Les sociologues qui se préoccupent de mass media et de culture ne cessent de faire semblables démonstrations empiriques pour le temps présent. Les historiens peuvent en trouver les coordonnées essentielles jusque dans le plus lointain passé152 ».

Dans les années soixante, où l’histoire des mentalités commence à s’affirmer comme une branche des études historiques, celle-ci doit trouver sa place dans un milieu dominé par d’autres tendances, notamment l’histoire économique. Le marxisme a évidemment un impact fort, mais il n’est pas le seul à contribuer à l’essor des études de l’économie en Histoire. Les historiens des Annales eux-mêmes, sont très attentifs au sujet ; Braudel s’est toujours intéressé à l’économie, Morazé aussi. À la Sorbonne, le socialiste engagé Ernest Labrousse et ses disciples mènent de grandes enquêtes sur l’économie en Histoire.

L’histoire des mentalités n’est pas nécessairement antimarxiste : Georges Duby reconnaît explicitement ses dettes à l’égard de l’historiographie marxiste. Mais dans cette tendance à

151 Philippe Joutard et Jean Lecuir, « Robert Mandrou. L’itinéraire d’un historien européen du XXe siècle », in Histoire sociale, sensibilités collectives et mentalités, Mélanges Robert Mandrou, op.cit. p. 12.

152 Robert Mandrou, « L’histoire des mentalités », art-cit.

97 analyser les mentalités et la civilisation, il fallait dépasser ce que Jacques Le Goff appelle « un marxisme vulgaire », le primat de l’économie sur le social et l’idée que la superstructure s’explique sans faute par l’infrastructure. Nouvelle revendication de l’héritage de Lucien Febvre, qui ne se lassait pas de mettre en garde les historiens contre cette manière d’expliquer l’histoire. Les mentalités ne sont des reflets de rien.

L’autre enseignement important de Lucien Febvre, c’est de se méfier des concepts comme

« l’homme du Moyen Âge » ou « l’homme de la Renaissance », abstractions vides et dépourvues d’une réalité concrète. L’affirmation paraît simple, elle nous pose pourtant de vrais problèmes lorsque l’on essaie de « reconstruire la vie affective d’autrefois », lorsque l’on veut se garder de « l’anachronisme psychologique », de projeter sur le passé nos catégories, nos idées, nos états psychiques d’aujourd’hui. Comment penser la psychologie des contemporains de Rabelais, et de Rabelais lui-même, si l’on refuse de passer par cette abstraction qu’est

« l’homme » de son époque ?

Pour appréhender la mentalité d’une époque, il faudrait pouvoir tracer les limites des pensées, des sentiments collectifs et des idées qui la caractérisent. Certes, jamais une mentalité unique ne règne sur une société à une époque donnée ; cependant, le nombre possible de ces mentalités est toujours limité, et elles sont prises dans un cadre plus large qui permet la cohésion sociale : c’est ce que l’on peut appeler « la mentalité de l’époque ». Elle est souvent comprise de manière négative, à l’exemple de l’impossibilité de ne pas croire en Dieu au XVIe siècle.

« Est-il possible que ? » : la question de Lucien Febvre implique de tracer ces limites. L’un des grands instruments de l’analyse des bornes, des horizons de la mentalité d’une époque, est ce que Lucien Febvre appelle « outillage mental ». La langue, la logique (au sens large du terme) et les mathématiques, sont de grands outillages mentaux. Produits et producteurs de l’homme et de sa mentalité, ces outillages ont un double rapport avec le temps : les limites de la mentalité d’une époque peuvent être tracées par ces outillages mentaux, mais ceux-ci sont, réciproquement, développés par la mentalité de l’époque. C’est dans ce sens que Lucien Febvre affirme : « …tout savant – le mathématicien y compris – est l’homme de son temps et de son milieu. De ce temps, de ce milieu il ne saurait se dégager 153». Si le savant ne peut se dégager de son temps et son milieu, le savoir ne le peut évidemment pas non plus.

153 Lucien Febvre, Avant-propos à Charles Morazé, Trois essais sur histoire et culture, Cahier des Annales, Librairie Armand Colin, 1948, p. VII, VIII.

98 Ces outillages sont compris comme un langage, considéré comme un fait social au sens durkheimien : extérieur et coercitif. Ce langage est entièrement historique. Il permet la connexion des activités et des mentalités différentes au sein de la société dans une époque donnée. Aussi, traçant les ruptures qui ont lieu dans ce langage, on peut rendre compte des traits spécifiques d’une époque et de ses différences avec une autre. Une longue citation de l’analyse par Lucien Febvre du rôle de personnage historique nous éclaire à ce propos :

Mais où est l’être humain qu’on peut considérer comme une puissance autonome, indépendante et isolée, une sorte de création originale et spontanée, alors que toute personne humaine subit si fortement des influences – les unes venues du fond des âges, les autres exercées de la façon la plus immédiate, par le milieu actuel – et d’abord véhiculées par le langage de l’outillage ? Langage : le plus puissant de tous les moyens d’action du groupe sur l’individu. Langage, technique lentement élaborée par l’humanité, et parvenue à son état actuel, à son état perpétuellement changeant et mouvant, après, ne disons pas des siècles, mais des millénaires de travail. Langage chargé, au bout de ce temps, de toute la série des distinctions, des dissociations, des catégories que l’humanité est parvenue à créer peu à peu. Langage, dont l’action rejoint et celle des mythes qui ont tenu lieu de technique à l’humanité quand lui faisait encore défaut l’outillage capable "de lui donner prise sur les choses – et celle des techniques elles-mêmes, si fortement apparentées entre elles à une même époque, si fortement participantes d’un même style susceptible d’être daté sans erreur. – Tout cela, d’un mot, permettant de dire que l’individu n’est jamais que ce que permettent qu’il soit et son époque, et son milieu social154.

Le travail philologique devient l’une des méthodes les plus efficaces pour constater le changement des mentalités. On forge un néologisme lorsqu’une nouvelle idée, liée à de nouvelles mentalités, a besoin de s’exprimer. C’est le cas, par exemple, de l’analyse que fait Lucien Febvre de l’apparition du mot « civilisation » au XVIIIesiècle. D’un autre côté, les mots sont souvent responsables des grandes confusions historiques, car un même mot désigne parfois deux phénomènes complètements différents à deux époques différentes. Enfin, c’est le danger pour l’historien, le mot n’existe qu’en contact avec la société, impossible de lui réserver un sens restreint et limité, le sens véhiculé par les mots est affaire de grand public et donc immaîtrisable :

La Renaissance, au départ, c’est avant tout l’apparition d’une nouvelle peinture. Et puis, de la peinture le mot passe à la sculpture, à l’architecture, à tout l’ensemble des arts plastiques. Et puis des arts plastiques, il passe à la littérature. Et à l’érudition, dans tous les domaines. À la philosophie et à la science comme humanisme, au sens restreint du mot. Voilà l’étiquette devenue système cohérent, elle aussi, et système qui prend vie. […]

Et la Renaissance cessant d’être un épisode de l’histoire artistique et littéraire de l’Occident, devient toute une époque, tout un genre de vie, toute une manière d’être. […]

Un être qui engendre, qui façonne, qui marque des hommes : les hommes de la

154 Lucien Febvre, « Histoire et psychologie » repris in Vivre l’Histoire, op.cit. p. 184.

99 Renaissance. […] Étonnante puissance des mots que l’homme crée pour ses besoins. Mais qui, sitôt créés, volent de leurs propres ailes, courent leur fortune, connaissent leur destin.

[…] Qu’y a-t-il derrière tous ces débats verbaux : rien que des mots. Supprimons-les, jurons de ne plus prononcer ni le mot Moyen Âge, ni le mot Renaissance. […] Je veux bien. Je ne tiens pas aux mots. Je me méfie singulièrement, toujours, de leur pouvoir occulte. Biffons-les. Ce ne sera d’ailleurs pas si facile que l’on pourrait croire155.

Nous voyons la ressemblance et la différence entre le concept de « mentalités » et celui de

« représentations collectives ». Lucien Febvre cependant se pose une question, qui semble ne pas avoir préoccupé Durkheim : comme tout être humain, l’historien est prisonnier de ses mentalités, il doit donc réfléchir sérieusement à l’objectivité et à l’impartialité de son savoir.

Lucien Febvre essaie de résoudre la difficulté par le biais de ce qu’il appelle l’« histoire-problème ». L’histoire-problème est une manière d’assumer la subjectivité de l’historien, en renonçant à la prétention de représenter une période historique dans son entier, en se posant en revanche une question précise : celle de de la mentalité de l’historien. Il explique cette idée clairement, dans la très belle préface qu’il a écrite à Trois essais sur histoire et culture de Charles Morazé. La question du « fait historique », qui préoccupe beaucoup Lucien Febvre, revient encore une fois : quelle place lui accorder ? Febvre compare le fait dans l’histoire aux briques dans l’architecture, certes indispensable, mais « l’architecture ne consiste pas dans les briques ». L’Histoire non plus n’est pas un assemblage naturel des faits : « Pas d’architecture sans projets d’architecte. Pas d’histoire sans hypothèse de travail – conçue et formée par un historien156 ».

Cette affirmation a deux conséquences : d’abord l’objet de l’histoire dépend de la mentalité de l’historien qui dépend elle-même de la mentalité de son époque. Ensuite, l’écrit historique est lui aussi soumis à une temporalité historique : un problème reste un problème tant que la mentalité sociale l’admet ou s’y intéresse, le changement de la mentalité crée de nouveaux objets historiques. Donc « l’Histoire crée son objet », mais cet objet est soumis au temps et varie avec lui. Lucien Febvre peut alors proclamer qu’il « n’y a pas l’Histoire. Il y a des historiens ». Le texte de Febvre fonctionne doublement, comme constatif et performatif : en proclamant que l’objet de l’histoire est construit dans le temps par l’historien, il crée un nouvel objet potentiel de l’histoire qui est l’historien lui-même, et en le créant il prouve que l’objet de l’histoire est construit dans le temps. Il argue que l’histoire ne reste pas identique à

155 Lucien Febvre, Michelet et la Renaissance, Cours au Collège de France 1942-1943, Flammarion, 1992, p. 25-26

156 Lucien Febvre, avant-propos à Charles Morazé, op.cit.

100 elle-même au fil des années, et par ce raisonnement annonce la nouvelle ère de la discipline historique.

La sensibilité de Febvre aux problèmes qui préoccupent également les écrivains de son temps est frappante, d’autant plus que la plupart des chercheurs en littérature de son époque ne s’en soucient pas vraiment. Par exemple la question de l’impossibilité matérielle de représenter le réel (en l’occurrence le passé), à propos de laquelle on note une grande insistance de la part de Lucien Febvre. Sa deuxième grande affirmation en dérive : « il n’y a pas le passé, ce donné ».

Il y a chez Lucien Febvre une « subjectivité collective » qui prend la place de l’objectivité supposée des historiens. Cette subjectivité n’est pas un critère du savoir, mais son aspect inévitable : « Il n’y a pas le Passé qui engendre l’historien. Il y a l’historien qui fait naître l’Histoire. Le Passé, chaque génération, à sa date, dans son climat, à l’intérieur de sa civilisation particulière, le récrée157 ». Il est nécessaire donc de reconnaître la part subjective, mais aussi d’en tirer une leçon de modestie : à la question « un livre d’histoire est-il définitif ? » Febvre répond : « oui, pour cinq ans ».

Dans son article « Mentalité : une histoire ambiguë », Jacques Le Goff résume les grands débats autour de l’histoire des mentalités, au moment où ce mot, pourtant relativement neuf dans la langue française, paraît déjà galvaudé ; il s’agit pour lui de savoir s’il faut continuer la recherche sur ce sujet ou bien l’abandonner. Pour Le Goff, l’histoire des mentalités est une histoire sociologique, dans le sens où la mentalité est une affaire sociale, ethnologique, parce qu’il s’agit de changements très lents, « la mentalité est ce qui change le plus lentement158 ». Il rapproche une telle histoire du structuralisme, car « la mentalité elle-même n’est-elle pas une structure ? 159 ». Elle permet de corriger ce que Michelet dénonçait déjà, dans la préface de 1869, comme la grande faute de l’historiographie de son temps qui était « trop peu matérielle […], trop peu spirituelle ». La mentalité, telle que Le Goff la définit, est unique pour une société à chaque époque : elle est du niveau du « quotidien et de l’automatique ». Par définition elle échappe à l’individu. Il semble que pour Le Goff ce terme ne corresponde pas à ce que, plus proche de l’usage courant du mot, on peut définir comme les attitudes mentales ou les dispositions psychologiques ou morales des individus, ni des mœurs de la société. La mentalité de Le Goff est uniquement le cadre, non la pluralité qui l’habite : « c’est ce que César et le

157Ibid., p. VII-VIII.

158 Jacques Le Goff, « Mentalité : une histoire ambiguë », in Faire de l’histoire, Jacques Le Goff et Pierre Nora (éd.), Gallimard, 1974, p.736.

159Ibid., p. 732.

101 dernier soldat de ses légions, Saint-Louis et les paysans de ses domaines, Christophe Colomb et le marin de ses caravelles ont en commun 160 ».

L’histoire des mentalités porte sur « des systèmes culturels, systèmes de croyances, de valeurs, d’équipement intellectuel ». Par cette affirmation, Le Goff rapproche d’un coup décisif l’histoire des mentalités de ce qu’il appelle « anthropologie historique ». Or, c’est précisément dans ce chemin de l’histoire des mentalités vers l’anthropologie historique que Roland Barthes accompagne le projet historiographique des Annales. La parution de L’Histoire de la civilisation française de Georges Duby et Robert Mandrou est pour lui l’occasion de l’affirmer.

Peu avant sa mort, Lucien Febvre avait proposé à Georges Duby d’écrire « une courte histoire de la civilisation française ». Duby demanda de l’aide, et Febvre suggéra Robert Mandrou qui, d’un côté, fut son « héritier direct » et de l’autre, parce que moderniste, pouvait apporter le complément nécessaire au travail du médiéviste. Duby considère ce moment comme le point de départ du programme de l’histoire des mentalités : « Febvre nous proposait un nouvel objet d’étude, les “mentalités”. C’était le terme qu’il employait. Nous le reprîmes161 ».

Lorsque parut le livre, en 1958, Lucien Febvre était déjà mort. C’est Roland Barthes qui en rendit compte dans la revue des Annales, deux ans plus tard. Les archives de l’EHESS

Lorsque parut le livre, en 1958, Lucien Febvre était déjà mort. C’est Roland Barthes qui en rendit compte dans la revue des Annales, deux ans plus tard. Les archives de l’EHESS

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