La
législation ouvrière et lecommerce
entre les Etats.— Cependant
lecommerce
entreEtats (m^e/'s-tate trade) est instructifà plusieurs égards : car, ilnous montre
les conseils spéciaux de Victoria et lacour d'arbitrage de laNouvelle-Galles
du
Sud, aux prises avec le problème de l'exportation ; eneffet»si ces deux pays n'exportent pas d'objets manufac-turés à l'étranger, ils se disputent le
marché
des autres Etats. L'expérience prouve que lesreprésen-—
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tantsde l'autoritépubliqueet les ouvriers
eux-mêmes
savent agir avecprudence en ce cas, et qu'ils s'abs-tiennent d'imposer àl'industrie des charges qui com-promeltraient la production locale. L'influence quecette considération exerce sur leur esprit est telle
que certains
membres du
parlement fédéral (i) ont déposé des notions tendant à uniformiser la législa-tion ouvrière dans les divers Etats,pour
éviter que l'abstention de certains d'entre eux en paralysâtlefonctionnementchez les autres.
Il semble aussi que la comparaison des Etats qui l'ontadoptée avecceuxqui sesontabstenus,aucours de cette
même
période doive fournirune
indication à ce sujet. Or, laTasmanie
est de toutes les colo-nies australasiennes celle où il existe lemoins
delois ouvrières ; et lorsqu'ellea été soumise au
libre-échange avec ses voisines, sesindustries,
moins
soli-dement
établies,ontsuccombé
devantlaconcurrence.Mais,
en
raison de l'inégal développementdes Etats australiens, cette constatationestdépourvuedetoute signification.L'étude
du commerce
extérieurdela confédération semble donner des indications plus précises :on
aremarqué
queles importationsd'objets manufacturésI, Notamment M. S. Mouger.
analogues à ceux que l'on produit en Australasie (chaussures principalement) s'étaient
beaucoup
ac-crues ences dernières années. Ainsi, par exemple, à Melbourne,l'importationdes chaussuressuitun mou-vement
ascendant : elle estpassée de 59.947 livres sterling en 190^ à 72.935 en 1904. Les adversaires desconseils spéciaux déclarentque ces importations auraient été moindres si la production locale s'étaitdéveloppée davantage ; mais
on
leur répond :l'aug-mentation des achats ainsi faits à l'étranger (aux Etats-Unis principalement)s'explique par le faitque, depjisl'introduction
du
libre-échange entre les colo-nies australiennesMelbourne
devient de plusenplusun
centre de distribution ; et l'onmontre
que les exportations de Victoria dans les autres Etats s'ac-croissent plus rapidement que les importations de l'étranger, cequi nepeuts'expliquerque par le pro-grès de la production locale. Iln'estdonc
pas possi-ble de tirer une conclusion. Cependant, lemême
développementdes importations se produit en
Nou-velle-Zélande, quoique ce pays soit isolé et ne soit
pas
un
centre de distribution. Faut-il l'expliquerparun
accroissement delaconsommation, ou
conclure que la production locale aurait pris une extension plus grande sousun
régime de liberté ? Lesstatisti-ques ne suffisent pas à donner
une
réponse.Analj'se des effets de cette législation sur la pro-duction et la répartition en Australasie.
—
Ilne
Nogaro 8
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ii8—
faut doncpas songer à apprécier les effets de l'arbi-trage obligatoire
ou
des conseils spéciaux d'après desrésultatsglobaux.On
peutseulement analyser—
sans les mesurer
—
certaines conséquences de cette législation.On
peutdire, par exemple, que, en pro-voquant la hausse dessalaires dans certaines indus-tries, elle a étéun
stimulant au progrès technique;que, en poussant à la concentration des entre-prises (i), elle a accéléré
un mouvement
conforme à l'évolutionéconomique
générale; que,enréduisant considérablement lenombre
des grèves, elle a épar-gné de grosses pertes à l'industrie et à la classe ouvrière. D'autre part,on
nesaurait affirmer encore qu'ellea assuréune
stabilité plus grande aux condi-tionsdu
travail : quoique déterminées pourun
cer-tain temps (deuxou
trois ans engénéral), elles sont exposéesaune
revisionau terme de chaque période.La
tendance à l'établissement d'un régime uniforme(common
raie)danschaque industriesemble compli-querun
peu la vie économique.Dans
les quelques cas—
cas exceptionnelsen Australasie— ou
lechefI. Les statistiques montrent en effet dans beaucoup de cas une diminution du nombredes établissements, correspondantà une augmentationdupersonnel. Cf. E. ^chwledland. Behœrdli-che Mindestlohnsatzangen [SchmollersZahrbuch) ; etcertaines affaires portées devant les cours d'arbitrage montrent qu'une partie de ce mouvement de concentration doitêtre attribuéà leurs sentences.
V
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d'entreprisen'est pas tout à faitmaître de sonprix de vente,soitparcequ'il
vend
àTextérieur,soitparcequeletarif douanier ne leprotègepas complètement con-trela concurrenceétrangère, la productionse trouve diminuée : ainsi,
M.
Glasser observe justement quela facilité assez grande avec laquelle les mineurs obtiennent des hausses de salaires ne
permet
pas d'exploiter certaines mines, dont lerendement
est médiocre, mais qui sont cependant exploitables au point de vue technique (i) ; demême, on
prétend que certains industriels ont plus d'intérêt désormais à importercertaines catégoriesde marchandises qu'à les fabriquer. Enfin, les mesures prises en faveur des ouvriers, et surtout lamenace
de mesures nou-velles, inquièteun peu
les capitalistes locaux, et effraye les capitalistes étrangers (2).Par conséquent en ce qui concerne laproduction^
on
ne saurait dire que la législation que nous avons exposée ait arrêté l'essoréconomique du
pays, nimême
qu'elle l'ait diminué ;on
ne peut cependant pas affirmerdavantage qu'elle l'a favorisé.Ce
qui est certain, c'est que l'Australie n'est pas orientée actuellement vers lemême
idéaléconomi-que
que laplupartdesautres pays. Aussi, tandisque
1. Annales des mines, 1906, g^ livraison.
2. Onditaussi, d'une façonvagueetprobablementexagérée,
que les capitaux sont chassésdu pays.
I20
le
gouvernement du Canada
s'efforce d'attirer leshommes
etlescapitaux, lesgouvernements de l'Aus-tralasie (qui pourtantnecontient—
Australieet Nou-velle-Zélande réunies— que
cinq millions d'habi-tants) ontabandonné
les primes à l'immigrationet interdit l'introduction de travailleurs