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3.2.1 Artemis, une observation pour l’hypertension artérielle

Artemis est une observation médicale informatisée, fonctionnant initialement de façon indépendante et d’usage limité à un seul service. Elle a été mise en produc-tion dans l’unité d’hypertension artérielle de l’hôpital Saint-Joseph (1975-2000), puis dans celle de l’hôpital Broussais (1979-2000) et enfin dans celle de l’HEGP (2001-actuellement). Le modèle d’information clinique initial a été conceptualisé par des experts du domaine. Il a évolué en fonction du progrès des connaissances médicales et du retour d’expérience sur son utilisation (Degoulet et al., 1990; Stei-chen et al., 2007f). Sa validité est attestée (i) par la possibilité de prendre en charge les patients en s’appuyant uniquement sur l’observation informatisée, (ii) par la possibilité de faire fonctionner des système d’aide à la décision efficaces à partir des données recueillies et (iii) par les nombreux travaux rétrospectifs de recherche clinique auxquels les données recueillies ont pu donner lieu.

Initialement, l’observation comportait six vues (Degoulet et al., 1980b,c) : don-nées administratives, histoire médicale personnelle et familiale, évaluation initiale, suivi, traitement, fin de suivi. Il s’y ajoutait une vue facultative pour le résultat de l’urographie intraveineuse. Chaque vue était structurée et comportait des questions à réponse facultative (lettres noires sur fond blanc) ou à réponse obligatoire (lettres blanches sur fond noir), qui pouvaient être de format booléen, liste à choix simple ou multiple, numérique, date ou texte libre. L’espace réservé aux commentaires en texte libre était très limité. Le serveur informatique et ses terminaux étaient hors site et la saisie de faisait donc nécessairement en temps différé, à partir d’une observa-tion papier formatée (avec une copie carbone donnée au patient pour son médecin). Environ 1 300 nouveaux patients étaient vus chaque année à Saint-Joseph, avec au moins une consultation initiale, le plus souvent une hospitalisation courte et parfois une ou plusieurs consultations de suivi. À partir de 1979, il s’y est ajouté 1 500 nou-veaux patients vus chaque année à Broussais. Le taux de données manquantes était alors inférieur à 5% pour les réponses obligatoires de l’interrogatoire et de l’examen physique et pour les données des examens complémentaires systématiques.

En 1983, un mini-ordinateur a été installé sur site pour permettre la gestion locale des données de Saint-Joseph et de Broussais. Des terminaux étaient placés dans les box de consultation et dans le bureau médical en hospitalisation. Certains médecins ont commencé à saisir les données cliniques en temps réel. En 1986, un

système d’aide à la décision a été couplé à l’observation informatisée. Dans les an-nées 1970 et 1980, les donan-nées cliniques saisies ont été utilisées pour des analyses épidémiologiques (Degoulet et al., 1979; Chatellier et al., 1982, 1987; Degoulet et al., 1980a, 1983; Ménard et al., 1985), des études diagnostiques et thérapeu-tiques (Plouin et al., 1981; Chatellier et al., 1982, 1987; Jeunemaitre et al., 1987, 1988) et des analyses d’efficience de la pris en charge hospitalière de l’hypertension (Chatellier et al., 1984; Devries et al., 1983), pour l’évaluation de l’observation in-formatisée (Degoulet et al., 1980c,b, 1982, 1984, 1990) et du système d’aide à la décision attaché (Jeunemaitre et al., 1986; Devriès et al., 1987; Lavril et al., 1989). Une interface graphique a été réalisée en 1995 pour améliorer la convivialité et fa-voriser la saisie des informations en temps réel. Les deux grandes modifications par rapport à l’interface alphanumérique étaient la disposition des tous les items de la consultation sur une seule vue et la possibilité de les compléter dans un ordre ar-bitraire en naviguant à la souris. Par ailleurs, l’application était capable d’afficher des courbes d’évolution pour n’importe quelle variable numérique. Cependant, les données colligées à travers Artemis ont cessé de servir de base à des travaux scien-tifiques, en dehors de quelques études d’évaluation des pratiques (Chatellier et al., 1995; Tache et al., 1997, 1999).

Un changement profond a eu lieu en 2001, lors de la migration à l’HEGP. Ar-temis a alors été intégré au sein du dossier patient informatisé déployé localement (DxCare®, Médasys, Gif sur Yvette), avec une reprise des observations saisies dans Artemis depuis sa création. Le formulaire d’observation comporte à partir de ce mo-ment quatre sections principales avec environ 180 questions à réponse facultative. Les possibilités de commentaires en texte libre sont plus importantes que dans les versions précédentes. Les données sont affichées comme elles sont saisies, suivant une approche mixte, à la fois orientée par le temps (chronologique), par la source et par problèmes. En effet, une nouvelle observation complète est ouverte à chaque épisode de soins, même si les antécédents et quelques valeurs numériques (taille, poids. . .) peuvent être importés de l’observation précédente. Il existe un module pour les antécédents, alimenté par l’interrogatoire, et un onglet spécifique pour les examens biologiques, témoignant d’une organisation par la source. Néanmoins, la logique dominant l’organisation est une approche par problèmes, avec notamment un onglet pour le traitement antihypertenseur et le contrôle de la pression artérielle, un onglet pour les facteurs de risque associées, et des onglets pour le retentisse-ment par organe cible, combinant les données de l’examen clinique et les résultats d’examens complémentaires. Les valeurs sont versées dans la base de données

re-Sections Sous-sections Hypertension et autres facteurs

de risque cardiovasculaires

Histoire familiale Histoire personnelle Traitement en cours Antécédents Par appareil

État actuel

Mesures de pression artérielle Examen clinique par appareil Examens complémentaires Conclusion

Cause de l’hypertension Risque cardiovasculaire Autres conclusions et projet de prise en charge

TABLE3.1 – Organisation initiale de l’observation médicale informatisée du service d’hypertension.

lationnelle hospitalière. Il existe une copie de la base de production permettant les utilisations secondaires sans compromettre les performances pour les soins. Entre 1 000 et 1 500 nouveaux patients sont vus chaque année et environ 5 000 observa-tions semi-structurées sont saisies en consultation ou en hospitalisation. À ce jour, Artemis a permis de colliger les données de plus de 90 000 patients. Après la mi-gration dans le système d’information hospitalier de l’HEGP, les données n’ont pas fait l’objet d’utilisation secondaire jusqu’en 2007.

3.2.2 Formulaires analysés

Nous avons analysé les 5 109 formulaires complétés au cours de l’année 2005 dans une unité d’hypertension artérielle. À cette époque, l’observation informatisée comportait quatre sections principales (TABLE3.1) dans lesquelles se répartissaient 176 questions à réponse optionnelle. La FIGURE3.1 comporte une vue du question-naire concernant l’examen cardiovasculaire, avec des questions dont les réponses peuvent être :

– binaires (« diabète ? » → oui/non),

– dates (« date du dernier infarctus du myocarde ? » → 21/12/1996),

– à choix simple ou multiples parmi les items d’une liste prédéfinie (« récapi-tulatif cardiaque ? » → « hypertrophie ventriculaire gauche » et « valvulopa-thie », entre autres),

– numériques (« pression artérielle diastolique en millimètres de mercure ? » → 95),

FIGURE3.1 – Onglet « cœur – ECG » de l’observation médicale, avec tous les types de questions.

– texte libre (« conclusion ? » → « prévoir des explorations hormonales en rai-son d’une hypokaliémie persistant à l’arrêt des diurétiques »).

La liste des items cliniques composant le formulaire d’observation (en-têtes de sec-tions et de sous-secsec-tions, quessec-tions, réponses prédéfinies) a été extraite de la base de données hospitalière à l’aide d’une requête SQL.

Par ailleurs, les réponses en textes libre trouvées dans les 5 109 formulaires ont été anonymisées : les noms des patients et des médecins ont été remplacés par des identifiants numériques et les dates de naissance par l’âge en années. Les comptes rendus de concertation pluridisciplinaire correspondants à ces visites ont également été pris en compte. À l’issue des explorations, les différents professionnels impli-qués – médecins, chirurgiens, radiologues – concluent à l’existence ou non d’une cause d’HTA secondaire et définissent la suite de la prise en charge appropriée. La concaténation de ces éléments a permis la constitution d’un corpus de 350 000 mots en français. Les fautes d’orthographe ont été corrigées pour permettre le travail des outils de traitement automatique du langage naturel.

3.2.3 Guides pour la pratique clinique

Plutôt que de nous appuyer sur un seul guide et d’en extraire manuellement les concepts, nous avons choisi d’en colliger huit, publiés entre 1999 et 2005, pour constituer un corpus de 56 000 mots en langue anglaise susceptible d’être analysé à l’aide d’outils de traitement automatique du langage naturel. Ce choix repose sur le souhait de traiter de façon homogène les documents en langue naturelle. Chaque guide de bonne pratique étant peu redondant, il était nécessaire d’en compiler un certain nombre pour permettre les analyses terminologiques.

Nous avons inclus les recommandations internationales de l’organisation mon-diale pour la santé (OMS), les recommandations de la société européenne d’hyper-tension (ESH), les recommandations françaises de la haute autorité de santé (HAS), les recommandations britanniques de la société d’hypertension (BHS) d’une part et de l’institut national d’excellence clinique (NICE) d’autre part, les recomman-dations du comité dirigé par l’institut national pour la santé américain (JNC), les recommandations de la société canadiennes d’hypertension (CHS) et de la de la société brésiliennes d’hypertension (SBH).