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4.4 Limites de l’audit

4.4.1 Limites liées aux connaissances disponibles

Un bon indicateur doit s’appuyer sur des résultats probants de la recherche cli-nique. Les recommandations ont l’avantage de réaliser une traduction opération-nelle et consensuelle des résultats de la recherche clinique. Elles sont donc une

ACTU : Prescription de traitements antihypertenseurs

L’hypertension artérielle est une maladie fréquente qui constitue un facteur de risque pour de nombreuses affections cardiovasculaires et rénales. Elle peut être facilement prise en charge par des traitements médicamenteux et des mesures d’hygiène.

L’hypertension artérielle (HTA) est définie de façon consensuelle par une pression artérielle systo-lique supérieure ou égale à 140 mmHg et/ou une pression artérielle diastosysto-lique supérieure ou égale à 90 mmHg. Par sa grande fréquence et ses diverses complications, l’HTA représente un problème majeur de santé publique. C’est pourquoi des textes de recommandations sont régulièrement publiés afin de mettre à la disposition des praticiens les connaissances issues des travaux les plus récents, sous une forme applicable à la pratique clinique. En collaboration avec le Pr Plouin de l’unité d’hy-pertension artérielle de l’Hôpital Européen Georges Pompidou à Paris, Olivier Steichen, doctorant à l’unité Inserm U 872 et médecin dans un service spécialisé de prise en charge de l’hypertension, s’est penchée sur l’évolution de la prise en charge de l’HTA par des médecins non spécialistes entre 2001 et 2006.

« Notre étude montre que les patients hypertendus sont pris en charge de manière plus incisive en 2006 et ça c’est un signe positif. Par contre, si on regarde en détail, on constate qu’il y a encore des progrès à faire, notamment dans l’association des médicaments utilisés », résume Olivier Steichen. Il existe trois classes de médicaments qui peuvent être associés : les inhibiteurs calciques, les antago-nistes de l’angiotensine 2 (ARA2) et les diurétiques thiazidiques. Or, malgré les recommandations officielles, « les diurétiques thiazidiques restent sous-utilisés et sont en particulier absents de deux tiers des bithérapies et d’un tiers des trithérapies en 2006 alors que dans notre étude, l’hypertension est mieux contrôlée avec une bithérapie ou une trithérapie qui comporte un thiazidique », explique le Dr Steichen. Par ailleurs, les auteurs constatent que la prescription des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ne progresse pas chez les patients par ailleurs à haut risque cardiovasculaire alors que celle des ARA2 augmente fortement. « C’est regrettable car chez ces patients, les ARA2 devraient être utilisés lorsque les IEC sont inefficaces ou provoquent des effets secondaires, confor-mément à la fiche de bon usage des médicaments publiée par la HAS à ce sujet en octobre dernier ». En pratique :

Lors d’une prise en charge médicamenteuse de l’hypertension, dès qu’il y a association de deux classes ou plus, il faut envisager de prescrire un diurétique. C’est d’autant plus facile qu’il existe aujourd’hui des associations sous la forme d’un seul comprimé.

S’il existe des complications de type athérosclérose ou diabète, privilégier les inhibiteurs de l’en-zyme de conversion en première intention.

La prise en charge de l’hypertension artérielle est du ressort du médecin généraliste. Cependant, s’il y a résistances aux médicaments, s’il l’on constate une hypokaliémie, ou si le patient est jeune (moins de 30 ans) il convient d’adresser le patient à un service spécialisé.

* O. Steichen & P.-F. Plouin, La revue de Médecine Interne, vol. 29, p773-779, 2008.

FIGURE 4.2 – Newsletter Inserm à destination des médecins généralistes #8 – dé-cembre 2008.

source idéale pour définir des indicateurs crédibles et acceptables. Réciproquement, on ne peut pas attendre des indicateurs qu’ils soient plus valides que la recomman-dation sur laquelle ils reposent. La validité des recommanrecomman-dations dépend de celle des résultats de la recherche clinique sur lesquelles elles s’appuient et de la perti-nence de la traduction qui est faite de ces résultats.

Résultats de la recherche clinique

Dans la pratique, les résultats probants de la recherche clinique ne couvrent pas – loin s’en faut – toutes les situations cliniques auxquelles les médecins sont confrontés quotidiennement. De plus, la recherche est généralement conduite dans des services spécialisés hospitalo-universitaire, sur des groupes de malades particu-lièrement sélectionnés et surveillés. Autrement dit, les résultats de la recherche cli-nique sont obtenus chez des patients et dans un contexte fort éloignés des conditions de la pratique médicale courante. Leur applicabilité est donc incertaine. Dans cer-tains domaines, au contraire, c’est l’existence de résultats contradictoires qui pose problème. Le caractère incertain et provisoire des résultats de la recherche clinique Traduction en recommandations

Les recommandations reposent sur l’interprétation et l’extrapolation des résul-tats de la recherche clinique (Mancia et Zanchetti, 1999). Ainsi, le bénéfice observé chez des patients sélectionnés et traités dans les conditions idéalisées d’une étude clinique est extrapolé à toutes les molécules de la même classe thérapeutique uti-lisées en conditions réelles chez des malades ne répondant pas aux critères d’in-clusion de l’étude. Dans certains domaines où les données font défaut, les recom-mandations sont fondées sur un consensus d’experts. Tricoci et al. (2009) montrent même que dans le domaine cardiovasculaire, pourtant très étudié, la moitié des re-commandations reposent sur des habitudes de pratiques, un avis d’experts ou des études de cas.

Même une connaissance bien établie peut être interprétée de diverses façons et donner lieu à des recommandations différentes, voire opposées. Ainsi, il est parfaite-ment établi que l’ECG est spécifique mais peu sensible pour le diagnostic d’HVG : quand l’ECG est positif, l’HVG est quasi-certaine, mais un ECG négatif ne peut pas l’exclure (Pewsner et al., 2007). Certains guides s’appuient sur ces résultats pour recommander qu’une échographie soit faite chez les patients dont l’ECG est positif, car l’examen est alors rentable dans la mesure où la probabilité d’HVG est

forte (Haute Autorité de Santé, 2006). D’autres recommandent au contraire de ne pas faire d’échographie si l’ECG est positif, car le diagnostic est alors déjà acquis (Mancia et al., 2007).

La force d’une recommandation varie en fonction du nombre et de la qualité des études qui la corroborent, c’est-à-dire du niveau de preuve qui lui est attaché. Des recommandations extrapolées de données peu nombreuses et imparfaitement probantes risquent d’être remise en question par des résultats ultérieurs. Mais il est important de ne pas s’en tenir à la significativité statistique et de considérer éga-lement la signification clinique des résultats. La force de la recommandation doit également dépendre de la pertinence clinique des bénéfices observés, à la fois en termes de critère de jugement et d’amplitude de l’effet. Au final, des recommanda-tions peuvent être qualifiées de fortes si elles consistent en l’application directe de résultats probants risquant peu d’être remis en question par de nouvelles données, ou si le rapport bénéfice-risque de l’intervention est grand et peu dépendant du pro-fil clinique du patient (Guyatt et al., 2008). Elles ont alors les qualités nécessaires pour être traduites en indicateurs utiles pour un audit.