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Biographie

Marion a tenu un carnet où il nota certains passages importants de sa vie, ce témoignage précieux nous a permis de connaître les grandes lignes d'une vie hors du commun à une époque des plus tourmentées.

«Je ne compte plus les heures lorsque je suis à écrire à ma table cette petite chronique d'un temps que nul n'a connu jusque-là et qui se doit d'être connu de ceux qui viendront après nous // C'est mon plus cher désir de transmettre à ceux qui viendront après nous, notre modeste expérience de vie partagée dans notre communauté d'Hoedic. » 15

Né le 8 août 1759, Jean Marion est fils de Jean Marion et de Françoise Selon, tous deux simples métayers habitants le village du Bignot dans la paroisse d'Arradon. Ces derniers sont sous la tutelle des seigneurs du lieu, le marquis de Stapleton (d'origine anglaise) et sa femme Marie-Anne de Lannion. Le jeune Marion tisse des liens d'amitié avec Joseph-Marie de Stapleton le fils du marquis, amitié qui aura ensuite beaucoup de conséquences sur la vie de Marion. C’est grâce à cette camaraderie qu'il est remarqué par la dame d'Arradon, étonnée par l'intelligence, l'« esprit naturel » que montre l'enfant. Alors soutenu et protégé par cette dernière, Jean Marion peut entreprendre des études, d'abord au collège puis au séminaire.

Son goût et son intérêt pour la langue bretonne datent peut être de cette époque puisqu'il mentionne le rôle d'Amelot (évêque de Vannes) qui lui enseigne « le respect de la tradition dans l'esprit de notre pays breton 16», il parle aussi de Pourchasse, qui fut son maître au séminaire17 avec lequel il entreprit de traduire en breton La Littérature religieuse à l'usage des

15 Buttin M-P, La République de Monsieur Marion, Keltia Graphic, 2005, Épiphanie 1810 16 Buttin M-P, 2005 , Lettre de Marion J.Lundi 24 septembre, 1786

croyants. C'est ce même Amelot qui désignera Marion comme prêtre d'une petite île du Morbihan, Hoëdic, nouvelle qui ne semble d'ailleurs pas vraiment réjouir notre jeune prêtre : « cette première charge qui m'est confiée est l'une des plus humbles et des plus effacées du diocèse. »18

L’île est éloignée de plusieurs heures de navigation du continent et ne compte guère que 25 foyers: Marion se trouve, pour ainsi dire, en partie coupé du monde. Sa passion pour la langue bretonne transparaît alors: arrivé à Hoëdic, il décrit brièvement le parler des îliens qu'il trouve plus « doux » que celui de la côte et qui se parle avec un « phrasé aux accents chantants ». Cet éloignement lui permet, peu de temps après, de jouir d'une relative sécurité pendant la Grande Terreur, étant donné qu'il est recherché à plusieurs reprises19.

Houat et Hoedic étaient alors rattachées à la sénéchaussée de Rhuys, et donc sous la tutelle de l'abbaye de Saint Gildas. Mais suite à la chute de l'ancien régime elles ne relèvent plus d'aucune tutelle et après à la mort de Lorcy (l’ancien recteur de Houat), les deux petites îles morbihanaises se retrouvent, de fait, gouvernées par Jean Marion. Celui-ci est soutenu par le conseil des anciens houadicais et hoëdicais. Il y applique un certain nombre de mesures pour y faciliter la vie des îliens et pallier la misère ambiante. Cette situation est aussi permise par le climat de l'époque, les côtes morbihanaises sont alors bousculées par des combats entre républicains et contre-révolutionnaires et les assauts sont âpres sur terre, comme sur mer20.

Les îles ont alors connu21 les incursions et même l'occupation des Anglais venus appuyer les troupes contre-révolutionnaires, et la cohabitation entre ces militaires et les îliens se fait en bonne intelligence :

« j'aurais aimé ne pas avoir à dire que j'ai plus souvent redouté les incursions de nos compatriotes que celles des Anglais, qui sont pourtant nos ennemis »22

Sous contrôle anglais, les deux îles deviennent alors une sorte de territoire neutre. Marion

18 Idem , Lettre de Marion J.Jeudi 27 septembre, 1786 19 Idem,Lettre de Marion J. p. 45

noue une amitié forte avec l'amiral anglais John Warren avec lequel il échange quelques mots d'anglais. C'est peut-être en partie grâce à cette complicité qu'il signe parfois « John Marion » ou encore « John Mahrion »23. L'amiral et ses hommes, vivant en bonne entente avec les habitants et respectant leurs traditions, permirent une amélioration du cadre de vie des îliens (commerce, techniques de pêches modernisées24,...). Warren joue aussi un rôle prépondérant dans la vie de Marion et le soutient même dans ses traductions en langue bretonne25 :

« Ces relations sans flagorneries m'ont procuré un heureux soutien dans bien des circonstances et un apport non négligeable pour mes travaux de traduction en breton des manuels de piété français. »26

C'est à cette époque qu'en passionné des langues, Marion, prend connaissance d'un manuel d'apprentissage de l'anglais écrit par M. Clifton, et s’étonnant qu'à la fin des années d'occupation anglaise les hoëdicais avaient fini par connaître la langue de ces militaires, il imagine créer le même genre de méthode « breton-français » pour enseigner la langue française aux bretonnants, et c'est à partir de cette idée qu'il contribuera à la rédaction du Vocabulaire nouveau, ou dialogues français et breton27.

L'indépendance toute relative dont jouissent les deux îles se poursuivra après le départ des Anglais, et sous le concordat, il devient agent national pour l’administration. Les années de stabilité qui suivent lui permettent d'effectuer des recherches et de se lancer de nouveau dans l'écriture en langue bretonne :

« J'ai voulu dans ce climat de provisoire détente, reprendre mes chers travaux sur cette langue bretonne, le vannetais de mon enfance. »28

Dans son mot écrit à la Chandeleur 1802, il décrit ses conditions de rédaction dans un environnement fort modeste, luttant contre l'humidité ambiante et les rats, nombreux sur l'île. Il prête une attention particulière à l'amélioration de l'orthographe, permettant ainsi une certaine unification à la diversité des parlers vannetais. Il s'attache aussi à corriger et adapter

23 Buttin M-P, 2005,Lettre de Marion J., Fête-Dieu 1804

24 Les casiers de pêches, appelés « bornioù » à Hoedic auraient été emmenés sur l'île par les soldats de la Navy. Il s'agit certainement d'une légende.

25 Il en reste que « l'apport » d'un amiral anglais pour des traductions bretonnes peux nous sembler surprenant sans plus d'informations.

26 Buttin M-P, 2005,1820 27 Éditons Galles, Vannes, 1810

les textes sources afin de produire un travail de qualité mais aussi accessible à une population modeste :

« Mon but est de procurer aux Bretons des manuels de piété et de rendre service aux nombreuses familles de marins dans une langue qui leur est familière. »29

Ses traductions lui servent d'ailleurs directement sur le terrain pour l'enseignement religieux de ses paroissiens :

« Ce soir, après Vêpres, j'ai comme à l'accoutumée, fait l'instruction sainte des enfants en âge de commencer une vie spirituelle et d'apprendre les vérités qui ont nourri la foi de leurs pères. J'ai l'avantage de puiser pour cet enseignement dans mes traductions en breton, faites à l'intention des fidèles du pays de Bretagne qui n'ont jamais appris le français. »30

À cette époque d'instabilité, le travail d'édition n'est pas toujours été simple, et est parfois même dangereuse. L'éditeur, Galles, prend de grands risques pour publier ces textes religieux pendant la période révolutionnaire et doit cacher son atelier dans la cave. L'auteur et l'éditeur communiquent alors par lettres transportées dans une chaloupe hoëdicaise et pour se protéger, ils utilisent de fausses signatures dans leur correspondance, par anagramme Jean Marion signe alors « J. Noiram »31. À cette époque dangereuse les ouvrages restent souvent anonymes. Selon Marion, il est pendant cette période le seul auteur à travailler pour Galles :

« Et si monsieur Galles est le seul éditeur à Vannes qui puisse imprimer ces pieux ouvrages, je sais bien que je suis le seul auteur à ce jour qui travaille pour lui ».32

Le succès est cependant au rendez-vous et ses traductions en langue bretonne d’œuvres religieuses se retrouvent chez les plus modestes, pour son plus grand contentement :

« Quelle n'est pas ma joie de voir maintenant en bonne place dans chaque foyer un de ces livres qui soutient la vie chrétienne des familles ! »33

29 Idem.

30 Idem, Lettre de Marion J. Épiphanie 1810 31 Idem, Lettre de Marion J. Chandeleur 1802

Ce succès ne se dément pas même bien après la mort de l'auteur comme le remarque Albert Danet à propos d'Inis er Vertu et du Magasin Spirituel :

« Ces deux ouvrages, le « Magasin Spirituel » surtout, eurent une vogue extraordinaire dans nos campagnes vannetaises où on le trouvait dans toutes les maisons. »34

Jean Marion joue alors la carte dangereuse de renseigner les autorités françaises sur le continent (lui permettant de passer pour un « patriote » et lever certains soupçons d'ailleurs bien justifiés) tout en essayant de ne pas trahir ses amis anglais et abritant parfois sur ses îles certains prêtres réfractaires activement recherchés comme l'abbé Guillevic par exemple. Mais son expérience des îles, l'appui de ses paroissiens, et sans doute un certain don pour la diplomatie lui permettent de ne pas être arrêté ou tué par un camp ou un autre. Ces intrigues, rajoutées à des conditions de vie particulièrement difficiles l'épuisent, notre homme, désormais cinquantenaire, trouve du réconfort en traduisant :

« Si l'âge et les douleurs ralentissent mon activité, j'ai du moins le bonheur de pouvoir continuer mes traductions en langue bretonne, grandement aidé en cela par monsieur Galles qui édite à Vannes // j'ai repris les travaux de mon maître Pourchasse Instructioneu Santel, ainsi qu'une grande partie du Catéchisme de Montpellier. Je trouve dans cette étude la paix de l'esprit. »35

Après 35 années de vie sur une île située à plus d'une heure de navigation du continent, c'est fatigué que Jean Marion quitte Hoëdic en 1820 pour retourner vivre dans le pays de son enfance, dans le manoir de Kerran où réside la famille Stapleton. Emmenant avec lui son « précieux coffre » où se trouvent tous ses écrits, il laisse cependant à Hoëdic sa traduction de L’introduction à la vie dévote « que je ne destine pas à l'impression. Je demande instamment qu'elle ne quitte jamais l'île. 36». Il semble en effet que sa toute première traduction ait eu une valeur particulière pour le recteur d'Hoëdic, elle est aussi sa plus ancienne traduction. Il est

34 Danet A, Monographie historique d’Arradon, Le Livre d’histoire, 2004, fac-similé de la première édition de 1955. p. 226-227

35 Buttin M-P, 2005,Lettre de Marion J., 1812 36 Buttin M-P, 2005 , Lettre de Marion J.Février 1820

probable que l’œuvre de François de Sales ait éteé son livre de chevet37. Du fait qu’il s’agit d’une oeuvre de jeunesse, il paraît aussi vraisemblable que Jean Marion ait voulu effectuer des corrections et modernisations avant une probable impression, travail qu’il n’aura parachever. En or ag er vuhé devot est cependant éditée elle aussi, grâce au recteur de l'île aux Moines, Corneille le Diot (1797-1862) qui fait publier certains textes inédits de Marion. C'est ainsi aussi par son initiative qu’est publié Officieu eit er sulieu en 1837. Jean Marion meurt le 17 août 1824. Au XIXème siècle un incendie dans le château de Kerran emporta son « précieux coffre » et ses archives.

Postérité

Comme nous l'avons vu plus haut, les traductions de Marion connaissent un grand succès populaire dans le Morbihan, et nous avons retrouvé plusieurs mentions38 prétendant que ses ouvrages se trouvaient dans « toutes les fermes », ce qui est probablement exagéré mais montre bien la notoriété de ses œuvres. Le style de l'auteur a servi de modèle à plus d'un, notamment celui de son œuvre souvent vue comme la plus réussie, Inis er Vertu. Même si l'on a critiqué un nombre excessif d'emprunts au français, les auteurs bretonnants le lisent et l'étudient pour ses tournures.

« Brehoneg en E. Marion e zou lan a halleg; ha neoah, én é livreu é teli er skriùagnerion ieuank monet de glah girieu iah ha troieu dispar de zispleg un dra. »39

(Loeiz Herrieu)

Le breton de M. Marion est plein de mots français, et pourtant, les jeunes écrivains devraient chercher dans ses livres des mots vifs et des tournures sans pareilles pour rendre les choses.

37 Buttin M-P, 2005 p.136

38 Magasin er Beurerion; Instructioneu santél; Historieu en neu destament; en Or ag er vuhé devot ha réral, hag e vezè kavet guéharal é kement ti e oè ar er méz , Loeiz Herrieu, Livreu Neùé, Dihunamb, 1925 p300. - « ar levroù-se a oa kavet ker stank e-mesk an dud ha lennet e pep tiegezh. » A.Guillevig, Inis er Vertu

Standard écrit

L'orthographe utilisée par Marion est surtout basée sur celle du français de l'époque, les « e » muets apparaissent ainsi généralement dans les mots d'origine française : langage, brumene, véritable, disprisable, sorte,… mais aussi dans les mots d'origine celtique, la finale n'est alors pas étymologique : klemme «plainte», clasque «chercher»,... elle apparaît aussi, enfin, dans les conjugaisons : hui hé gùéle40. Ce système pose les mêmes difficultés de lecture que le standard du français où à un même phonème, peuvent correspondre plusieurs caractères ou combinaisons de caractères :

[s] = s, ss, ç, c

Pour les sons inexistants en langue française, Marion reprend les conventions orthographiques précédentes :

[ɛ̃ɲ] → ein [œɥ] → eu

Il est cependant important de rappeler que la version que nous avons étudiée de L’introduction à la vie dévote de Marion est une édition posthume. Il semble à la vue des autres œuvres de l'auteur que la graphie ait été parfois modernisée mais présente paradoxalement aussi des « archaïsmes » orthographiques issus des premières étapes de rédaction. Les différences graphiques entre les œuvres publiées du vivant de l'auteur et L’introduction à la vie dévote sont importantes :

Les finales en « -cg » (tammicg dans L’introduction à la vie dévote) sont alors retranscrites par « -q » (tamiq dans le Magasin Spirituel). La lettre « y » ne sert plus dans L’introduction à la vie dévote qu'à rendre [j] (moyand, muyan,...) alors qu'elle pouvait aussi servir à rendre [i] dans son premier texte (ty). Les « e » muets ont tendance à disparaître dans les mots n'étant pas d'origine française :

sadourne (Vie Dévote) → sadourn (Magasin Spirituel)

Doh en dougue (Vie Dévote)→ en doar d'hé doug (Magasin Spirituel)

ha ni e zigueore hur halon (Vié Dévote) → ha pedein Doué de zigueor ou deulagad (Magasin Spitiruel)

Les déclinaisons des prépositions sont aussi orthographiées différemment entre ses premières et dernières traductions :

doh-oh (Vie Dévote) → dohoh (Magasin Spirituel)

guet-n-eign (Vie Dévote) → gueneign (Magasin Spirituel) ar (Vie Dévote) → àr (Magasin Spirituel)

Pour certains mots, Jean Marion hésite manifestement entre deux écritures que l´on retrouve simultanément dans les mêmes textes :

attàu / atàu (toujours) = doublement du « t » ou non.

Ces recherches concernant l'orthographe de la langue bretonne apparaissent dans ses chroniques :

« J'ai terminé la traduction des psaumes, prières et cantiques de l'Office parisien et le Magasin spirituel er beurerion » est en bonne voie. Mon but n'est pas de me faire un nom dans cette littérature mais d'aménager les traductions pour les fidèles bretons qui ne parlent que leur dialecte. J'ai parfois de grandes difficultés, car, de tradition orale, je dois innover dans la transcription. Je me fie à la seule prononciation lorsqu’elle l'exige. »41

Il semble avoir été assez préoccupé par cette orthographe de la langue bretonne et avoir nourri un vrai désir d'unification et de modernisation du standard vannetais écrit, comme le montre l'exemple suivant dans une lettre adressée à son éditeur :

absolument nécessaire. Pour les accêns c'est une autre affaire. Vous seriez embarrassé, Monsieur, s'il vous fallait lire nos livres bretons de la façon qu'ils sont écrits. Nous avons quantité de mots écrits de la même façon, qui se prononcent cependant différemment. Comment faire entendre cette différence si ce n'est par les accêns ? En voici un exemple : cousquèt; à l'infinitif : cousquet ; à l'impératif : cousquét; au participe. Il en est de même de presque tous nos verbes. Mais quoique je fasse usage des accêns où il en faut absolument, je puis dire que je n'en emploie point d'inutiles comme on en trouve dans nos livres bretons, tandis que les nécessaires, à mon avis, y manquent presque toujours." 42

Il est souvent question dans ses lettres de Pourchasse qui semble avoir été un modèle à dépasser. L'auteur se réjouit d'ailleurs que le disciple dépasse le maître et que Pourchasse, se mette à utiliser l'orthographe de Marion :

10 janvier 1797

« Celui-la ma fait penser que si j'avois communiqué ma façon d'écrire à l'auteur il l'auroit adopté avec plaisir. Quelle satisfaction pour un disciple de voir son maître adopter son orthographe ! Je m'en vante, monsieur mais ce n'est pas ce dont il est question. Si je me suis fait une orthographe fixe, je conviens que je l'ai pillé dans ses différents écrits : et si d’abord j'ai hazardé quelque chose de mon chef, j'ai l'avantage de le voir de mon sentiment dans ses dernières productions »43

Profil linguistique

Marion le répète souvent dans ses chroniques, la langue bretonne a eu une place prépondérante tout au long de sa vie :

« mais aussi je veux poursuivre mon travail de réflexion et d'étude pour cette langue bretonne que j'ai tant servie » 44

42 Le Goff P. «Marion», Revue Morbihannaise, 1908, p 19 43 Le Goff P. 1908, p .22

Arradon

(Carte 2: Localisation d'Arradon45)

Le breton de Marion est le breton de la paroisse d'Arradon qu'il a appris de sa mère, Françoise Selo :

« Il renferme aussi des ouvrages de piété, des méditations de retraites et des cantiques qu'avec monsieur Pourchasse, mon maître au séminaire, nous avions entrepris de transcrire dans le breton que j'ai appris de ma mère »46

Ce breton se rattache aux parlers de type haut-vannetais maritime qui sont les plus proches du standard écrit de Vannes de l'époque. Les particularités phonétiques principales de cette forme du breton concernent principalement l'existence de palatalisations semblables à celle que nous décrivons plus bas dans le parler de l'île d'Hoëdic (astenn → [a'ʃtjø:n]47), ainsi que

45 Images :Googlemap (https://www.google.fr/maps), Wikipedia (https://br.wikipedia.org/wiki/Aradon) 46 Buttin M-P, 2005,Lettre de Marion J.Février 1820

la chute du [d ] intervocalique et du [t] en position finale ( pichoned → [pø'ʃynjø:] 48).

Hoëdic

(Carte 3 : Localisation d'Hoëdic49)

Même si ce n'est pas son parler maternel et qu’il reste très proche de celui d’Arradon, Marion a tout de même vécu presque la moitié de sa vie sur cette île et comme il l’indique lui-même dans ses chroniques, le breton local a influencé sa manière de parler.

« ce rythme lent et guttural si particulier à Hoedic et que j'ai appris à suivre »50

L'île de Houat correspond au point 81 de l'atlas linguistique de Basse Bretagne de Pierre Le Roux. Cependant, Hoëdic n'y figure pas. Elle apparaît cependant dans le NALBB51. Les recherches sur le breton de l'île ayant été plutôt rares, je m’y suis rendu durant les étés 2012 et

48 Faby-Audic

49 Image Googlemap, Wikipedia en langue bretonne, www.wikipedia.org/wiki/Edig, consultée en 2013 50 Buttin M-P, 2005 , Lettre de Marion J.8 septembre 1800

2014 pour y effectuer des collectages, principalement auprès de Jeanne Blanchet et de Roger Alannic52. Il en ressort, sans surprise, un breton de type haut vannetais littoral partageant des traits phonétiques avec le pays d'Auray/ Quiberon, les parlers de la presqu’île de Rhuys mais aussi avec des parlers disparus comme celui de Damgan.

Nous ferons ici une rapide description des traits particuliers de ce parler. Comme dans les parlers littoraux53 du continent nous retrouvons la même tendance54 du [i :] à produire une diphtongue en [œi :] :

-Tri (trois): [tʁœi:] -Hir (long): [jœ :ʁ]

Suivie d'une consonne, une voyelle fermée ou mi-fermée peut aussi être légèrement palatalisée :

-penn (tête) : [pjɛn]

-touristed (touristes) : [tu'ʁistjә:t] -me zud (mes parents) : [mә'zjә :t]

Ce trait phonétique se retrouve aussi dans d'autres zones du golfe et des îles55. Le « o » est aussi souvent diphtongué :

-torr (cassé) → [twɔ:ʁ] -moc'h (porcs) → [mwɔ:h] -hoc'h (cochon) → [wɔ:h]

Cette particularité phonétique se trouvait aussi dans les autres parlers du « Mor-Bras »,

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