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Chapitre 2. Recension des écrits 6!

2.5 Équilibre des personnes hémiparétiques suite à un AVC 29!

2.5.2 Marche sans perturbation 31!

Malgré l’incidence de chutes élevée considérant le faible niveau d’activités physiques et la survenue des chutes durant la locomotion (Weerdesteyn et al., 2008), peu d’études se sont intéressées à l’équilibre des personnes hémiparétiques lors de la marche sans perturbation externe. L’équilibre durant la marche des personnes après un AVC est instable en comparaison des personnes en santé (Hak et al., 2013; Kao et al., 2014). En effet, une diminution de l’équilibre dans les directions médiolatérale (Hak et al., 2013; Kao et al., 2014) et

antéropostérieure (Hak et al., 2013) est observée chez des personnes hémiparétiques comparativement à des personnes en santé lorsque les deux groupes marchent à vitesse confortable. Lorsque les personnes hémiparétiques et en santé marchaient à la même vitesse, De Bujanda et al. (2004) ont constaté que les personnes hémiparétiques avaient des accélérations latérales du tronc plus élevées vers le côté parétique, indiquant une plus grande difficulté à contrôler la vélocité du transfert du poids du corps vers le membre inférieur parétique que non parétique. Les résultats de Nott et al. (2014) ont montré des changements plus grands et plus variables des moments externes s’exerçant sur le CM (momentum angulaire du corps) dans le plan médiolatéral durant l’appui unipodal parétique chez les personnes hémiparétiques comparativement à des personnes en santé marchant à des vitesses similaires. Ces changements sont associés à un placement du pied plus large et plus variable (Nott et al., 2014). La difficulté à contrôler la BS et le CM, par un placement du pied, des accélérations ou un momentum du corps adéquats, traduit une diminution de l’équilibre dynamique chez les personnes hémiparétiques.

Le contrôle de l’équilibre des personnes hémiparétiques lors de la marche diffère selon le membre inférieur en appui. Nott et al. (2014) et De Bujanda et al. (2004) ont rapporté une plus grande difficulté à maintenir l’équilibre lors de l’appui parétique que lors de l’appui non parétique. De plus, un plus grand déplacement antéropostérieur et une plus grande variabilité de la position médiolatérale du CP sous le membre inférieur non parétique ont été observés (Chisholm et al., 2011). Cette asymétrie de contrôle de l’équilibre est associée à la sévérité des déficits sensorimoteurs (Chisholm et al., 2011; Nott et al., 2014) et à l’asymétrie de la durée d’appui unipodal (De Bujanda et al., 2004). Ces résultats peuvent expliquer en partie la grande proportion de chutes latérales des personnes hémiparétiques (Weerdesteyn et al., 2008). Toutefois, l’asymétrie du CP dans l’étude de Chisholm et al. (2011) suggère aussi des difficultés de propulsion vers l’avant et d’équilibre lors de l’oscillation du membre inférieur parétique.

Relations entre la vitesse de marche, l’asymétrie du patron de marche et l’équilibre chez les personnes hémiparétiques

Bien que le temps plus long passé en double appui, l’augmentation de la largeur de pas, ainsi que la diminution de la durée d’appui unipodal parétique puissent être associés à une réduction de la vitesse de marche (Balasubramanian et al., 2010; Patterson et al., 2010b), ces changements spatiotemporels seraient aussi liés à un déficit de contrôle de l’équilibre (Bowen et al., 2001; Chen et al., 2005; Patterson et al., 2010b). La capacité des personnes hémiparétiques à marcher plus rapidement qu’à la vitesse réduite qu’elles utilisent spontanément a été souvent démontrée (Beaman et al., 2010; Capó-Lugo et al., 2012; Hacmon et al., 2012; Hsu et al., 2003; Jonsdottir et al., 2009; Krasovsky et al., 2013; Lamontagne et al., 2004). Certains auteurs ont montré qu’une marche plus rapide améliorait certains paramètres de la marche par exemple une augmentation de la longueur de pas (Capó-Lugo et al., 2012; Lamontagne et al., 2004). De plus, la variabilité de la position du CP, principalement sous le pied non parétique, est un facteur qui prédit la vitesse de marche ; en effet, une plus petite variabilité antéropostérieure et une plus grande variabilité médiolatérale de la position du CP sont associées à une vitesse de marche rapide (Mizelle et al., 2006). Considérant la réserve qui existe et le bénéfice de marcher plus rapidement à divers niveaux, il est indiqué de se questionner sur les raisons qui empêchent les personnes hémiparétiques de marcher plus rapidement et pourquoi elles optent pour une vitesse de marche réduite comparativement à des personnes en santé du même âge (Chen et al., 2005; Hacmon et al., 2012; Jonsdottir et al., 2009; Milot et al., 2007; Nadeau et al., 2013; Olney et al., 1996). Il est possible que l’équilibre soit une de ces raisons : si les personnes hémiparétiques réduisent encore plus leur vitesse, leur stabilité se détériore (Kao et al., 2014). Même si elles utilisent une vitesse de marche confortable réduite pour optimiser le contrôle de leur équilibre, elles restent encore relativement instables comparativement à des personnes en santé (Hak et al., 2013; Kao et al., 2014). Cette diminution de leur vitesse de marche pourrait leur procurer une réserve fonctionnelle qui pourrait les aider à réagir à des perturbations externes inattendues et ainsi permettre une récupération de l’équilibre et éviter une chute.

L’asymétrie du patron de marche des personnes hémiparétiques est un élément qui pourrait également expliquer les déséquilibres et les chutes associées. À l’inverse, elle pourrait

augmenter leur équilibre, par le fait, par exemple, de passer plus de temps en appui sur le membre inférieur non parétique. Concernant la relation entre l’asymétrie du patron de marche et l’équilibre, la méthode d’évaluation de l’équilibre diffère entre les études. Certaines d’entre elles ont quantifié l’équilibre en position debout, soit par des mesures du CP sous les pieds (Hendrickson et al., 2014; Nardone et al., 2009), soit avec l’échelle d’équilibre de Berg (Bovonsunthonchai et al., 2011; Lewek et al., 2014), et non durant la marche. Hendrickson et al. (2014) ont analysé la contribution de chaque membre inférieur au contrôle postural debout en mesurant la variation de la position antéropostérieure du CP. Ces auteurs ont montré que l’asymétrie de la contribution des membres inférieurs au contrôle postural, réduite du côté parétique et augmentée du côté non parétique, était reliée significativement à l’asymétrie de la longueur de pas et des durées d’appui et d’oscillation (Hendrickson et al., 2014). Lewek et al. (2014) ont aussi trouvé une corrélation négative entre l’asymétrie spatiotemporelle et le score sur l’échelle de Berg, c.-à-d. plus l’asymétrie à la marche est grande, plus l’équilibre clinique est précaire. Au contraire, aucune association entre ce score et l’asymétrie des forces de réaction antéropostérieure et verticale durant la marche n’a été observée (Bovonsunthonchai et al., 2011).

L’asymétrie de la position médiolatérale du CP en position debout, c.-à-d. l’asymétrie de mise en charge sur les membres inférieurs, est corrélée négativement à la vitesse de marche et la cadence et positivement à la durée d’appui unipodal non parétique (Nardone et al., 2009; Tasseel-Ponche et al., 2015). Cela signifie que les personnes hémiparétiques avec une durée d’appui unipodal non parétique plus longue durant la marche sont celles qui sont les plus asymétriques en position debout (Nardone et al., 2009). D’autres auteurs ont également démontré que les personnes hémiparétiques présentant une plus grande asymétrie de la phase d’appui unipodal étaient celles qui avaient le plus de difficulté à maintenir leur équilibre durant la marche, mesuré par les déplacements du CP (Chisholm et al., 2011) ou les accélérations du tronc (De Bujanda et al., 2004).

Les caractéristiques spatiotemporelles et cinétiques (ex. : la propulsion du membre inférieur vers l’avant) de la marche peuvent témoigner d’un déficit de contrôle de l’équilibre lors de marche, car elles déterminent le placement du pied et la surface de la BS, ainsi que la position du CP. Comme mentionné précédemment, cette position permet le contrôle des

accélérations du CM qui est un déterminant du contrôle de l’équilibre (MacKinnon et al., 1993; Patla, 2003; Winter, 1995). On s’attend par exemple à ce qu’une asymétrie de longueur de pas rende l’équilibre des personnes hémiparétiques plus précaire parce que leur BS est raccourcie lors du pas le plus court. De façon similaire, une asymétrie des moments abducteurs de hanche avec une faiblesse du côté parétique pourrait rendre l’équilibre plus précaire durant la phase d’appui parétique puisque les muscles abducteurs de hanche ont un rôle important pour assurer la stabilité du bassin et l’équilibre de l’individu dans le plan frontal durant la phase d’appui (Anderson et al., 2003; Eng et al., 1995; Kim et al., 2004).