• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2. Recension des écrits 6!

2.6 Modifications du patron de marche selon les conditions environnantes 38!

2.6.2 Charge placée sur un segment corporel 42!

L’ajout d’une charge sur une jambe durant la marche est une approche utilisée par les cliniciens pour entraîner leurs patients dans le but d’augmenter le travail des muscles proximaux afin d’améliorer leurs capacités locomotrices (Alabdulwahab et al., 2015; Kollen et al., 2000; Lam et al., 2009a; Park et al., 2014). En effet, le placement d’une charge sur la partie distale de la jambe augmente le niveau d’effort aux articulations proximales (hanche > genou) en modifiant la masse et les propriétés inertielles des membres inférieurs (Noble et al., 2006). Cette approche fonctionnelle peut donc être considérée comme un entraînement orienté sur la tâche, ce qui est pertinent pour améliorer les capacités de marche des personnes hémiparétiques (Langhorne et al., 2011).

Quelques études se sont intéressées à déterminer l’effet de l’ajout d’une charge à la cheville sur le patron de marche chez des personnes en santé (Browning et al., 2007; Noble et al., 2006; Royer et al., 2005; Smith et al., 2007), des personnes avec une amputation transtibiale (Selles et al., 2004) ou après un AVC (Bonnyaud et al., 2013; Duclos et al., 2014; Khanna et al., 2010; Regnaux et al., 2008).

Concernant les effets de la charge sur la cinématique de la marche des personnes en santé, on rapporte une augmentation du temps d’oscillation du membre inférieur chargé et réciproquement du temps d’appui du côté non chargé (Browning et al., 2007; Noble et al.,

2006; Royer et al., 2005; Smith et al., 2007). En termes de moments articulaires, la plupart des études ont mis en évidence une augmentation des moments à la hanche et au genou. Plus spécifiquement les moments fléchisseur de hanche et extenseur du genou augmentaient au début de l’oscillation, au moment de lever la charge (Browning et al., 2007; Noble et al., 2006; Smith et al., 2007), alors que le moment en extension de hanche et celui en flexion du genou augmentaient en fin d’oscillation, pour ralentir la charge (Browning et al., 2007; Noble et al., 2006; Smith et al., 2007). Des résultats similaires ont été rapportés chez des personnes avec une amputation transtibiale avec toutefois des modifications limitées de la cinématique, mais une augmentation des moments (Selles et al., 2004).

La vitesse de marche est une variable importante dans l’étude de l’effet de la charge puisqu’elle influence les accélérations linéaires et angulaires des segments. L’augmentation de la masse du segment par la charge et sa distribution distale sur le segment (au niveau de la cheville) requièrent une plus grande force au niveau des articulations proximales pour déplacer cette charge. De plus grandes accélérations associées à une vitesse de marche plus rapide vont également augmenter cette force au niveau proximal.

Chez les personnes hémiparétiques marchant au sol avec une charge à la cheville parétique, les résultats de Duclos et al. (2014) ont montré une augmentation de la vitesse de marche, de la longueur du pas parétique (chargé) et des excursions angulaires de la hanche, principalement en extension, tandis qu’aucun changement des paramètres spatiotemporels et cinématiques n’a été observé dans l’étude de Khanna et al. (2010). Les personnes hémiparétiques ont également augmenté leurs moments et leurs puissances musculaires à la hanche au début de la phase d’appui et au genou à la fin de la phase d’oscillation du côté parétique (Duclos et al., 2014), ce comportement se rapprochant de celui des personnes en santé. Toutefois, contrairement à ces dernières, les personnes hémiparétiques ne présentent pas de changement cinétique au début de la phase d’oscillation (Duclos et al., 2014). Il faut cependant noter que dans cette dernière étude, les effets d’une charge à la cheville parétique sur le patron de marche, bien que significatifs, étaient de taille petite à modérée et montraient une grande variabilité inter-sujet, particulièrement à la hanche (Duclos et al., 2014). Cette étude est la seule qui nous renseigne sur les effets de l’ajout d’une charge à la cheville

parétique sur la cinétique des membres inférieurs dans le plan sagittal chez des personnes hémiparétiques marchant au sol (Duclos et al., 2014).

Les effets de l’ajout d’une charge à la cheville sur le contrôle de l’équilibre sont inconnus. Les changements observés à la hanche suggèrent que l’équilibre pourrait être plus précaire parce que l’augmentation des moments à la hanche réduit la réserve de ces muscles pour assurer l’équilibre. De plus, l’oscillation du membre inférieur chargé pourrait même être un élément externe perturbateur de l’équilibre en augmentant l’inertie du membre inférieur. À l’inverse, la marche avec charge pourrait aider à stabiliser le sujet puisqu’elle ajoute une force verticale qui aide à l’équilibre. Il va de soi que ces effets sont assurément très dépendants de la vitesse de marche qui module ces effets.

En résumé, les personnes hémiparétiques suite à un AVC présentent des problèmes locomoteurs, tels qu’une diminution de la vitesse de marche et une asymétrie du patron de marche, et chutent fréquemment. Les évidences, peu nombreuses, ont montré que les personnes hémiparétiques avaient des difficultés à maintenir leur équilibre durant la marche comparativement aux personnes en santé du même âge. Alors que l’association entre les déficits d’équilibre et les chutes est relativement bien démontrée, la relation entre les modifications du patron de marche (asymétrie) et le contrôle de l’équilibre (précaire) reste à être documentée. Les personnes hémiparétiques sont capables de marcher plus rapidement et/ou plus symétriquement sur demande, mais elles ne le font pas spontanément dans leur quotidien. Pourraient-elles choisir cette façon de marcher parce qu’elle leur permet de mieux gérer leur équilibre!? Différentes approches en réadaptation visent à réduire les déficits sensorimoteurs des personnes hémiparétiques afin d’améliorer leur vitesse de marche, de réduire l’asymétrie locomotrice et de renforcer le membre inférieur parétique. Les effets de ces approches sur l’équilibre doivent aussi être déterminés afin d’aider les cliniciens dans le choix de ces interventions. Cette thèse vise donc à quantifier l’équilibre des personnes hémiparétiques dans différentes conditions affectant la marche.