• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2. Recension des écrits 6!

2.5 Équilibre des personnes hémiparétiques suite à un AVC 29!

2.5.3 Marche avec perturbations externes (cognitives et physiques) 35!

Double tâche (cognitive et motrice)

Les situations en double tâche associant la locomotion et les fonctions cognitives (ex. : parler tout en marchant; traverser une rue en gérant la distance à faire et le trafic) sont très fréquentes dans la vie quotidienne et sont des conditions à risque de chutes pour les personnes après un AVC (Weerdesteyn et al., 2008). Bien que les personnes hémiparétiques puissent prioriser la tâche cognitive par rapport à la marche (Plummer-D'Amato et al., 2010) ou privilégier une stratégie posturale lors du franchissement d’obstacles (Smulders et al., 2012), leur stratégie est le plus souvent inadéquate ou elles ne sont pas capables de suivre les instructions de priorisation (Harley et al., 2009; Yogev-Seligmann et al., 2008) : par exemple, elles privilégient la tâche cognitive, alors que leur équilibre est précaire, ce qu’elles devraient donc favoriser (Yogev-Seligmann et al., 2008). L’utilisation d’une stratégie où la tâche motrice n’est pas priorisée augmenterait le risque de chutes, déjà présent à cause de déficits sensorimoteurs, mais aussi à cause d’une utilisation inadéquate des ressources attentionnelles limitées, de la diminution des fonctions exécutives et de la capacité réduite à diviser l’attention (Yogev-Seligmann et al., 2008).

Franchissement d’un obstacle

Le franchissement d’obstacles au sol est un élément de l’environnement qui nécessite une modification du patron de marche et de l’équilibre des personnes en santé et hémiparétiques. Ces dernières présentent une élévation plus grande des orteils parétiques

relativement à l’obstacle que les personnes en santé du même âge lors du franchissement d’obstacle avec le membre inférieur parétique en premier (Said et al., 2001). Il est avancé que cette stratégie pourrait leur permettre de s’assurer de ne pas heurter l’obstacle et donc de réduire le risque de contact des orteils dès le début de la tâche, ce qui représente une menace pour leur équilibre (Said et al., 2001). De plus, les personnes avec un AVC minimiseraient les pertes d’équilibre en diminuant la vélocité antéropostérieure du CM et en maintenant le CM proche du talon non parétique en appui. La diminution de la vélocité antéropostérieure du CM réduirait le mouvement antérieur du CM, rendant plus facile la récupération de l‘équilibre et diminuant les chances de chutes vers l’avant (Said et al., 2008). Toutefois, de plus petits pas après l’obstacle engendreraient pour ces personnes un risque de perte d’équilibre vers l’avant (Said et al., 2008). Dans le plan frontal, la valeur maximale de vélocité médiolatérale du CM en direction du membre inférieur parétique (qui franchit l’obstacle) a tendance à augmenter, ce qui indiquerait un équilibre précaire (Said et al., 2008). De grandes vélocités pourraient refléter une difficulté à décélérer le CM géré durant le double appui par la charge et décharge relative des membres inférieurs. Lors du franchissement d’obstacles avec le membre inférieur non parétique en premier, les personnes avec un AVC seraient plus instables durant l’appui sur le membre inférieur parétique, comparativement à des personnes en santé, comme l’indique une plus grande distance entre le CM global et le CP sous le pied en appui (Said et al., 2008). La vitesse de marche réduite compenserait partiellement la difficulté à contrôler la position du CM et du CP et l’instabilité que cette difficulté engendre. De plus, lors de l’oscillation du membre inférieur parétique suiveur, la diminution de l’élévation des orteils et de la flexion du genou parétique favorise les risques d’accrochage du membre inférieur parétique sur l’obstacle, augmentant ainsi le risque de chute (Said et al., 2005).

Glissade et trébuchement

Lors de perturbations de type glissade provoquées par un mouvement rapide vers l’avant d’une plate-forme (sous un pied) ou d’un tapis roulant (sous les deux pieds), entre 71 et 100 % des participants hémiparétiques présentent des pertes d’équilibre vers l’arrière (Kajrolkar et al., 2014), alors que la proportion des pertes d’équilibre lors de trébuchement naturel ou sous forme de perturbation n’est pas rapportée pour cette population. Cependant,

Burpee et al. (2015) ont pu analyser en moyenne une dizaine de trébuchements naturels durant une session de marche sur tapis roulant de 20 minutes.

Lorsque des glissades ou des trébuchements sont provoqués, les personnes hémiparétiques ont besoin de plusieurs pas pour récupérer leur équilibre et elles utilisent le plus souvent le membre inférieur non parétique pour effectuer le pas de récupération (Martinez et al., 2013; Patel et al., 2015). Elles montrent aussi des difficultés d’initiation et d’exécution du pas de récupération et un manque de stabilité par un support de poids inadéquat non seulement du membre inférieur durant le pas de récupération, mais aussi du membre inférieur lors du contact au sol du pas de récupération (Hak et al., 2013; Inness et al., 2014; Krasovsky et al., 2013; Nonnekes et al., 2010; Patel et al., 2015). L’instabilité est caractérisée par une position et une vélocité du CM augmentées vers l’arrière dans le cas de glissades (Hak et al., 2013; Kajrolkar et al., 2014).

En cas de glissades, la stratégie efficace est une marche rapide avec des pas courts (Bhatt et al., 2005; Espy et al., 2010). L’instabilité plus importante observée chez les personnes hémiparétiques lors de glissades pourrait donc être associée au fait que leur vitesse de marche est plus lente et que leurs pas plus courts ne soient pas assez rapides pour placer le CP suffisamment en avant du CM pour rétablir leur équilibre contrairement aux personnes en santé. Dans le même ordre d’idée, Burpee et al. (2015) ont avancé que certains déficits au membre inférieur parétique pourraient expliquer les trébuchements à la marche présents chez certaines personnes hémiparétiques. Ces auteurs ont observé une plus grande flexion plantaire de la cheville, une vélocité plus lente de la flexion du genou au décollement des orteils et un plus grand moment d’extension du genou en fin d’appui chez les personnes qui trébuchent comparativement à celles qui ne trébuchent pas (Burpee et al., 2015). Ces déficits allongeraient le membre inférieur durant l’oscillation et empêcheraient ainsi une élévation des orteils adéquate, essentielle pour éviter de buter sur le sol (Burpee et al., 2015). Dans l’étude de Krasovsky et al. (2013), la stratégie utilisée par les personnes hémiparétiques pour répondre à la perturbation de type trébuchement est d’abaisser le membre inférieur perturbé (non parétique), c.-à-d. en le rapprochant du sol avec une diminution de la longueur et de la durée du pas, alors que les personnes en santé font une élévation du membre inférieur avec une durée d’oscillation plus longue et une longueur de pas identique ou plus grande. La difficulté à

contrôler l’équilibre lors de l’appui sur le membre inférieur parétique pourrait expliquer le choix d’une stratégie (abaissement du membre inférieur) qui réduirait la durée de cet appui et favoriserait ainsi le maintien de l’équilibre.

Il est important de noter que la majorité de ces études ont rapporté que, malgré un très bon niveau de récupération fonctionnelle et un faible risque de chutes, les personnes hémiparétiques présentaient des difficultés d’équilibre face à des perturbations volontaires, naturelles ou induites, lors de la marche (Burpee et al., 2015; Hak et al., 2013; Inness et al., 2014; Krasovsky et al., 2013; Nonnekes et al., 2010; Patel et al., 2015).

2.6 Modifications du patron de marche selon les conditions