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IX.2 Ecoulements d´ecoll´es incompressibles ´

IX.2.2 Marche descendante

Dans cette section, seuls les ´ecoulements au-dessus d’une marche descendante sont consid´er´es. Cet ´ecoulement repr´esente l’archetype d’un ´ecoulement fortement non-parall`ele.

IX.2.2.1 Contexte & histoire

Un ´ecoulement d´ecoll´e engendr´e par un fluide qui passe au-dessus d’une marche descendante est d’un grand int´erˆet pour diverses raisons, `a commencer pour des applications de type ing´enieur (autour d’un profil d’aile `a forte incidence, dans une tuy`ere ainsi que dans une cavit´e). De tr`es nombreuses ´etudes ont ´et´e men´ees sur la marche descendante depuis plus de 30 ans (par exemple Goldstein et al. [71] ; Denham & Patrick [50] ; Armaly et al. [16] et Adams & Johnson [4]). Mˆeme si la marche descendante est un exemple extrˆeme d’´ecoulement d´ecoll´e, c’est un cas mod`ele bien utile `a la compr´ehension de la dynamique des ´ecoulements d´ecoll´es. En effet, un ´ecoulement d´ecoll´e peut ˆetre cr´e´e soit par un important gradient de pression (voir la section pr´ec´edente) soit par une variation brusque de la g´eom´etrie mais dans les deux cas la topologie de l’´ecoulement d´ecoll´e reste tr`es semblable. Deuxi`emement, d’un point de vue fondamental, il est capital de mieux comprendre les diff´erents m´ecanismes d’instabilit´e et de transition vers la turbulence d’´ecoulements fortement non-parall`eles. Les m´ecanismes de transition d’´ecoulements comme les ´ecoulements dans un canal ou un tuyau commencent `a ˆetre mieux compris, tandis que cette question reste parfaitement ouverte pour les ´ecoulements non-parall`eles. Dans ce contexte, l’´ecoulement au-dessus d’une marche descendante est un prototype non-trivial d’´ecoulement non- parall`ele avec une g´eom´etrie restant relativement simple, permettant l’´etude des m´ecanismes de transition vers la turbulence (Kaiktsis et al. [85–87] ; Gresho et al. [72] ; Fortin et al. [64] ; Barkley et al. [19] ; Tylli [172] ; Kaiktsis & Monkewitz [88] et Beaudoin et al. [22]).

Shear-layer Recirculation zone Reattachment zone Time averaged dividing streamline h Ue x y δ

Fig. IX.15 – Sch´ema repr´esentant la topologie de l’´ecoulement sur une marche descendante. Inspir´e de [55].

Les connaissances actuelles sur la dynamique d’un ´ecoulement au-dessus d’une marche des- cendante sont tr`es partielles et aucun consensus n’existe mˆeme sur la nature des instabilit´es (convectives ou absolues) [85–88]. La figureIX.15 d´ecrit de fa¸con sch´ematique la physique d’un ´ecoulement derri`ere une marche descendante. La dynamique `a bas nombre de Reynolds d’un tel ´ecoulement est principalement compos´ee de deux ph´enom`enes d’origine distincte. La premi`ere source d’instationnarit´e est li´ee `a la nature inflexionnelle du profil de vitesse longitudinale dans la zone de la couche de m´elange. Il est tr`es clairement ´etabli qu’au sein de la couche de m´elange se d´eveloppe des instabilit´es de type Kelvin-Helmholtz (KH) qui sont en partie `a l’origine de la transition vers la turbulence de l’´ecoulement. Ces instabilit´es locales de nature convective poss`edent des ´echelles de longueur petites devant les ´echelles de l’´ecoulement (par exemple de-

vant l’´epaisseur de vorticit´e : δω(x) = UM(x)− Um(x)/ maxy | ∂U /∂y |), ce qui correspond

g´en´eralement `a des hautes fr´equences pour l’´ecoulement : St=f δω/U0 = 0.2 [55].

Cependant, les ´ecoulements d´ecoll´es puis rattach´es exhibent le plus souvent aussi un com- portement instationnaire `a basse fr´equence, St ≃ 0.05 [55], (ces fr´equences sont au moins d’un ordre de grandeur plus basses que celles de la turbulence et correspondent `a des ´echelles spa- tiales plus grandes que celles mises en jeu dans l’instabilit´e de KH). Bien que ce ph´enom`ene soit fr´equemment observ´e (ou simul´e) depuis plusieurs ann´ees, il n’est actuellement pas parfaitement compris. Le sc´enario de Ehrenstein & Gallaire [59], qui attribuent l’origine de la basse fr´equence dans un ´ecoulement d´ecoll´e derri`ere une bosse `a du flapping, pourrait n´eanmoins ˆetre une voie prometteuse. L L L h Η h+H 0 i z x y z 0

Fig.IX.16 – Sch´ema pr´esentant le type de marche consid´er´ee avec ces diff´erentes cotes. Tir´e de [19].

De fa¸con un peu caricaturale, il existe deux familles d’´ecoulements au-dessus d’une marche. La premi`ere famille rel`eve des ´ecoulements de type ouvert, c’est-`a-dire o`u il n’existe pas de paroi au-dessus de la marche (s’il existe une paroi, elle est « suffisamment » loin pour qu’elle n’ait pas d’influence sur l’´ecoulement au voisinage de la marche elle-mˆeme). Typiquement si l’on consid`ere une marche d’une hauteur h, la distance H entre la marche et une ´eventuelle paroi sup´erieure est telle que H ≥ [9 − 10] h. L’autre famille de marche rel`eve plutˆot des marches confin´ees o`u la distance de la marche `a une paroi sup´erieure est de l’ordre de h (< 9 h). Par la suite, seule la seconde famille de marche sera ´etudi´ee, en particulier lorsque H = h. La figureIX.16 pr´esente le type de marche que nous allons consid´erer. Cette configuration de marche descendante a d´ej`a ´et´e largement ´etudi´ee par Armaly et al. [16], Kaiktsis et al. [86,87] et Barkley et al. [19] pour une large gamme de nombres de Reynolds et pour un rapport d’expansion ER = (H + h)/h compris entre 1 et 3. La figureIX.17pr´ecise la g´eom´etrie ´etudi´ee ainsi que ces diff´erentes cotes. Par la suite, nos r´esultats seront compar´es aux r´esultats issus du papier de Barkley et al. [19] (2002). L’objectif principal de l’article de Barkley et al. est d’´etudier l’´evolution de la topologie et d’analyser la dynamique de l’´ecoulement dans une configuration tridimensionnelle pour une gamme de Reynolds Re ∈ [100; 1350], avec pour finalit´e de d´eterminer les conditions de la tridimensionnalisation de l’´ecoulement. Pour cela, une m´ethode num´erique de haute pr´ecision, bas´ee sur les ´el´ements spectraux est utilis´ee pour discr´etiser et r´esoudre les ´equations de Navier- Stokes 2D et 3D dans la configuration de la marche pr´esent´ee dans la figureIX.17. L’´ecoulement est dimensionn´e par le nombre de Reynolds bas´e sur la hauteur de la marche h et la vitesse maximale Umax(x = 0, y = 1/2H) : Re= hUmax/ν. La taille du domaine est Li= h, 15h≤ L0 ≤

55h et H = h. On impose des conditions aux limites p´eriodiques suivant z. Le type de condition aux limites fix´e en amont (x =−Li, 0≤ y ≤ H) est un param`etre important dont la solution

Fig.IX.17 –Evolution de la vitesse longitudinale pour une marche descendante `a diff´erents nombres de Reynolds Re = 150, 450, 750, 1050. Tir´e de [19].

Les r´esultats pr´esent´es par Barkley et al. sont semblables `a ceux observ´es exp´erimentalement par Armaly et al. [16]. A partir d’un nombre de Reynolds de 300, l’´ecoulement poss`ede deux zones d´ecoll´ees, une ´evidente imm´ediatement en aval de la marche et une seconde zone sur la paroi sup´erieure. Ce second d´ecollement est engendr´e par la d´eviation des lignes de courant li´ee au recollement du premier bulbe, ce qui engendre localement un gradient de pression adverse suffisant pour engendrer le second bulbe. La figureIX.17 illustre ce propos.

Afin de d´eterminer pr´ecis´ement les points de d´ecollement et de recollement, le coefficient de frottement Cf =−2ν∂U/∂y.ny/U

2

max est trac´e o`u ny = 1 pour la paroi sup´erieure et ny =−1

pour la paroi inf´erieure. La figureIX.18 montre la calcul de l’´evolution du Cf pour deux types

de grille diff´erentes (grossi`ere et fine).

La figure IX.19 synth´etise les diff´erentes simulations num´eriques men´ees par Barkley et al. pour une gamme de nombres de Reynolds au travers de la donn´ee des diff´erents points de d´ecollement (x2) et de recollement (x1 et x3). Cette figure nous permet une comparaison relati-

vement pr´ecise de nos r´esultats.

Fig.IX.18 –Evolution du coefficient de frot- tement sur la paroi sup´erieure (a) et inf´erieure (b) pour une marche descendante `a Re = 750. Tir´e de [19].

Fig. IX.19 – Evolution des diff´erents points de d´ecollement et recollement en fonction du nombre de Reynolds pour une marche descen- dante `a Re = 750. Tir´e de [19].

Apr`es avoir men´e diff´erentes simulations num´eriques pour une g´eom´etrie bidimensionnelle, Barkley et al. ont r´ealis´e quelques simulations num´eriques tridimensionnelles. Ces simulations montrent qu’`a partir d’un certain nombre de Reynolds critique Rec = 748 l’´ecoulement devient

tridimensionnel avec une longueur d’onde optimale proche de λc = 6.9h. Ces r´esultats confirment

les observations exp´erimentales mais la valeur du nombre de Reynolds correspondant `a l’appa- rition de la tridimensionnalit´e est diff´erente (Armaly et al. [16] Rec ≃ 300 ; Kaiktsis et al. [86]

Rec = 525 ; Williams & Baker [177] Rec ≃ 300). Cette dispersion des r´esultats semble principa-

lement due, dans l’exp´erience, `a l’influence des effets de parois lat´erales qui tridimensionnalisent l’´ecoulement de fa¸con plus pr´ecoce. Barkley et al. ont ensuite men´e une ´etude de stabilit´e glo- bale de l’´ecoulement de base (la solution 2D du probl`eme) pour une large gamme de nombre de Reynolds Re∈ [100; 1050]. Ces r´esultats confirment pr´ecis´ement les simulations num´eriques : le nombre de Reynolds critique est bien retrouv´e et ils montrent que le premier mode instable est un mode stationnaire tridimensionnel. Barkley et al. indiquent que l’´ecoulement est lin´eairement stable vis-`a-vis d’une perturbation 2D jusqu’`a Re = 1500, ce r´esultat n’est d’ailleurs pas en accord avec certains r´esultats issus de la litt´erature [72].

IX.2.2.2 M´ethode num´erique

La m´ethode num´erique utilis´ee ici est celle d´ecrite sectionIX.1.2 dans la partie consacr´ee `a la cavit´e entraˆın´ee.

IX.2.2.3 Simulation num´erique du champ de base

L’objectif de cette ´etude ´etant d’´etudier la stabilit´e lin´eaire globale d’un ´ecoulement en aval d’une marche descendante, la premi`ere ´etape est de calculer avec le plus de pr´ecision possible le champ de base. Celui-ci est bidimensionnel et stationnaire. Les r´esultats obtenus sont compar´es `

a ceux de Barkley et al.. La figureIX.20pr´esente sous la forme de ronds de couleur caract´erisant les abscisses x1, x2et x3de diff´erents points de d´ecollement et recollement pour une large gamme

de nombres de Reynolds. Les r´esultats obtenus par notre code de simulation num´erique sont en excellent accord avec les r´esultats de Barkley et al.. Les figuresIX.21-(a,b) donnent l’´evolution du coefficient de frottement Cf en fonction de x pour respectivement la paroi sup´erieure et inf´erieure.

L’accord quantitatif vis-`a-vis des r´esultats de Barkley et al. (figureIX.18) est excellent.

x/h R e 5 10 15 20 25 30 35 200 400 600 800 1000 1200 X3 X1 X2

Fig. IX.20 – Evolution des diff´erents points de´ d´ecollement et recollement en fonction du nombre de Reynolds pour une marche descendante `a Re = 750. Les symboles de couleur sont les r´esultats des simulations r´ealis´ees par le code DNS 2D du laboratoire. x/h Cf 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 -0.002 0 0.002 0.004 0.006 (a) X3 X2 x/h Cf 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 -0.004 -0.002 0 0.002 0.004 (b) x1

Fig. IX.21 – Evolution du coefficient de frotte-´ ment sur la paroi sup´erieure (a) et inf´erieure (b) pour une marche descendante `a Re = 750.

La figure IX.22 pr´esente l’´evolution de la vitesse longitudinale U (x, y) ainsi que quelques lignes de courant. Cette figure est `a comparer avec celle obtenue par Barkley et al. (fig.IX.17- (c)). On constate un tr`es bon accord qualitatif6.

X Y 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 -1 -0.5 0 0.5 1 U: -0.150 -0.071 0.009 0.088 0.167 0.247 0.326 0.405 0.484 0.564 0.643 0.722 0.802 0.881 0.960

Fig.IX.22 –Lignes iso-vitesse longitudinale U (x, y) et lignes de courant pour une marche descendante `

a Re = 750.

6Nous ne pouvons pas conclure `a un bon accord quantitatif au vue de la seule figureIX.17-(c). Cependant,

l’accord sur les positions de d´ecollement et recollement ainsi que l’´evolution du Cf(x) peut nous permettre de

penser que nous avons aussi un excellent accord quantitatif. 125