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Maîtriser les effets globaux des politiques de stationnement

Quels sont aujourd’hui les enjeux globaux d’aménagement et de mobilité urbaine auxquels devraient répondre les politiques de stationnement ? Peut-on définir une gouvernance urbaine dont l’objectif serait d’assurer la cohérence des mesures techniques et réglementaires des politiques de stationnement, conçues à l’échelle de l’agglomération et déclinées dans chaque quartier selon leurs spécificités ? Quels en seraient les leviers d’actions ?

1. Les politiques de stationnement dans leur contexte : contribuer à des enjeux globaux d’aménagement et de mobilité

L’histoire des politiques de stationnement conduites dans les agglomérations françaises et européennes révèle les enjeux d’aménagement et d’urbanisme que les collectivités locales ont exprimé dans leurs documents de planification urbaine (SCOT, PDU, PLU, etc.).

Ces enjeux ont concerné, parallèlement ou successivement :

− l’accessibilité des zones urbaines centrales, liée aux politiques de limitation de la durée de stationnement (zones bleues), de stationnement payant pendant la journée et d’aménagement de parkings publics, qui facilitent le stationnement de courte ou moyenne durée des visiteurs ;

− le rééquilibrage des flux de circulation entre les modes de déplacements qui combine :

• les effets dissuasifs du stationnement payant dans le centre-ville (pour les pendulaires domicile-travail en automobile), avec une tarification spécifique pour les résidents sur voirie. Celle-ci les incite à ne pas utiliser leur voiture pendant les heures payantes, en conservant le même emplacement durant la nuit ; son efficacité est aujourd’hui remise en question (voir plus loin) ;

• les effets incitatifs des parcs relais près des gares et terminus des transports urbains en périphérie (pour l’usage des transports publics) ;

− les politiques de stationnement résidentiel qui mettent en œuvre des tarifs réduits de stationnement sur voirie pour les habitants, et qui réduisent le nombre minimal

de places de stationnement exigibles dans les constructions privées par les règlements d’urbanisme.

Aujourd’hui, les collectivités locales souhaitent « reconquérir » l’espace public accaparé par l’automobile en conciliant le plus souvent deux objectifs :

− préserver la desserte des immeubles, les espaces de livraison pour la logistique urbaine (voir glossaire) et le stationnement des professionnels mobiles, liés au dynamisme économique et à l’attractivité commerciale de la ville ;

− réaménager les espaces publics de proximité pour favoriser la vie collective à l’échelle du quartier, ce qui conduit à limiter l’espace dévolu à la circulation et au stationnement des véhicules au profit de la marche à pied, du vélo, d’espaces de rencontres, d’un paysage urbain de qualité…

L’adaptation des politiques de stationnement s’inscrit dans une logique de système (ce que l’on fait à un endroit a des répercussions dans d’autres lieux) et dans des tissus existants. Faute d’anticipation lors de la conception des nouveaux quartiers, l’aménagement de ces espaces publics implique le plus souvent la suppression ou le transfert de places de stationnement jusqu’alors implantées sur la voirie. Ces ajustements sont en général mal acceptés par les populations riveraines qui perdent un avantage acquis sans percevoir immédiatement les bénéfices. Comme on le soulignera dans la suite du rapport, les collectivités doivent gérer les impacts du stationnement résidentiel sur l’aménagement et la qualité de la vie (voitures ventouses).

2. Finalité et périmètre d’une politique du stationnement

Considérées comme un instrument d’aménagement et d’urbanisme, les politiques de stationnement ne peuvent plus être conçues et gérées par la seule juxtaposition de règles de police spéciale de la circulation et du stationnement, d’aménagement de parcs publics de stationnement et de normes de stationnement privé inscrites dans les règlements d’urbanisme, avec des compétences éclatées entre de multiples autorités locales.

Ces politiques doivent répondre à une double vision de l’action publique. D’une part, elles s’insèrent dans l’organisation des déplacements à l’échelle du bassin de mobilité et notamment des objectifs de report modal et de limitation d’usage de l’automobile individuelle. D’autre part, elles résultent de l’aménagement de l’espace urbain à l’échelle des territoires de proximité (sur voirie/hors voirie) et notamment du stationnement lié aux livraisons et aux professionnels mobiles.

Les politiques de stationnement sont d’abord explicitées dans les documents de planification urbaine. Le PDU vise à assurer « l’organisation du stationnement sur la voirie et dans les parcs publics de stationnement ». Le PLU fixe quant à lui les règles de stationnement applicables aux aménagements des terrains privés. Il peut en outre définir des « orientations d’aménagement et de programmation » (OAP) qui précisent les principales caractéristiques des voies et espaces publics (voir annexe 6).

Pour leur mise en œuvre, les politiques de stationnement peuvent combiner :

− des actions d’aménagement et de réglementation de l’espace public, qui délimitent les espaces affectés aux différentes formes de stationnement réglementé sur voirie et qui permettent le développement d’offres complémentaires de mobilité : vélos en libre-service, autopartage, recharges électriques… ;

− des actions d’aménagement de parkings publics hors voirie ;

− des actions de régulation d’usage de l’espace privé, telles que les règles de stationnement des documents d’urbanisme ou des conventions d’usage collectif de certains parkings privés1 ;

− des actions de gestion technique telles que les systèmes d’observation et de suivi du stationnement dans l’agglomération, la mise en place des moyens de tarifi-cation et de contrôle du stationnement réglementé (parcmètres, fourrière, etc.), la chaîne d’information (jalonnement des parkings, information des usagers, etc.).

Selon la FNAUT Île-de-France, des outils plus efficaces présenteraient les avantages suivants2 :

− renforcement de la cohérence des politiques locales de déplacement incitant au report vers d’autres modes de transport ou vers des zones de stationnement à privilégier ;

− augmentation de la disponibilité des places à un instant T, donc diminution du nombre de véhicules en circulation cherchant une place et des stationnements en double file pénalisant la circulation des bus ;

− augmentation des recettes issues du stationnement, notamment la part du produit des amendes qui revient au STIF (Syndicat des transports d’Île-de-France), pour financer des opérations de qualité de service (environ 130 millions d’euros en 2013).

Conçue dans cette perspective économique et sociale, qui dépasse les seules logiques de police de la circulation ou services urbains, l’activité de conception, d’aménagement et de gestion du stationnement urbain pourrait donc être considérée comme une politique adaptée à et par chaque agglomération, destinée à la mise en œuvre des objectifs d’aménagement et de déplacements définis par les collectivités territoriales.

Le champ couvert par cette politique serait ainsi plus large que celui défini par Christian Philip (proposition de loi, Assemblée nationale, novembre 2004)3 et par Louis Nègre (rapport de novembre 2011)4. Il concernerait notamment toutes les formes

(1) Les modalités contractuelles de « mutualisation » de parkings privés sont complexes et encore expérimentales.

(2) Association des usagers des transports FNAUT Île-de-France, communiqué de juillet 2013.

(3) Proposition de loi n° 1941 relative à la dépénalisation et la décentralisation du stationnement payant sur voirie, 24 novembre 2004, www.assemblee-nationale.fr/12/propositions/pion1941.asp.

(4) Nègre L. (2011), Rapport sur la dépénalisation et la décentralisation du stationnement, novembre, www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000728/0000.pdf. Dans le document de la Fédération nationale des métiers du stationnement (établi en 2007 et dont le dispositif législatif est en partie repris par Louis Nègre), le service public local du stationnement est défini comme

« une activité qui consiste à fournir une prestation de service à l’automobiliste dans et en dehors de

d’usage de l’espace public par les véhicules dédiés au transport individuel ou collectif de personnes ou de marchandises (motorisés ou simplement mécanisés), qu’il s’agisse d’arrêts (livraisons ou assimilés), de stationnement réservé, de stationnement réglementé sur voirie (gratuit, à durée limitée ou payant) et dans les parcs publics. Il couvrirait un périmètre large pour appréhender les effets systémiques de la chaîne de déplacement (parcs relais, pôles d’échanges, rabattements) et pour assurer la coordination avec l’offre privée.

3. Une nouvelle politique du stationnement