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La dépénalisation du stationnement : une première étape

Actuellement, si la tarification du stationnement relève de la compétence des collec-tivités territoriales et peut s’adapter aux spécificités locales, la sanction du non-respect de la réglementation du stationnement de surface relève du droit pénal. Cela signifie d’une part que le montant de l’amende pour stationnement non acquitté est uniforme sur le territoire national et ne peut être modulé par les collectivités en fonction des spécificités locales. En conséquence, dans les grandes agglomérations, le système de stationnement n’est pas dissuasif : la différence entre le montant de l’amende et le tarif du stationnement est trop faible pour inciter les automobilistes à payer leur stationnement : stationner toute une journée en s’acquittant du montant de son stationnement peut coûter plus cher que de stationner sur le même emplacement toute la journée de manière frauduleuse en réglant une amende de 17 euros. Dans les plus petites villes, l’enjeu tient plutôt au décalage entre le tarif horaire du stationnement, généralement peu élevé, et le montant de l’amende très élevé en proportion.

La dépénalisation du stationnement payant, inscrite dans la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, conduit à supprimer le caractère contraventionnel du stationnement impayé au profit d’une redevance d’occupation du domaine public. Cette redevance pourrait être acquittée selon deux modalités : soit spontanément au début du stationnement, selon le barème fixé par la

collectivité ; soit a posteriori, selon un forfait « post-stationnement » qui ne pourrait être supérieur au montant correspondant à l'application du barème précédent à une journée de stationnement ou à une durée plus courte selon les dispositions du barème en vigueur dans la zone considérée.

Le montant du forfait de post-stationnement est fixé par la commune ou le groupement de collectivités compétent en matière de stationnement. Il peut ainsi être adapté aux spécificités de chaque territoire. Conformément à la loi, le produit des forfaits est affecté au financement des transports collectifs ou respectueux de l’environnement et à la circulation routière. En revanche, le produit du paiement immédiat de la redevance de stationnement, dont le montant tient compte de l’ensemble des coûts nécessaires à la collecte du produit de la redevance de stationnement, peut servir à financer la politique de stationnement.

Toutefois, les règles de police du stationnement ne se limitent pas au seul station-nement payant ou à durée limitée, mais comprennent également des interdictions permanentes (stationnement gênant, dangereux ou abusif) et du stationnement réservé (de façon temporaire ou permanente) à certaines catégories d’usages ou d’usagers (livraisons, personnes à mobilité réduite,…). Ainsi, deux systèmes d’organisation du contrôle du stationnement devront toujours cohabiter dans une même rue ou un même quartier : celui de la redevance d’occupation du domaine public (dépénalisée) et celui des interdictions de stationner (sanction pénale).

L’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles1 (première lecture au Sénat, juin 2013 et à l’Assemblée nationale, juillet 2013 ; deuxième lecture au Sénat, octobre 2013 – article 36 bis, deuxième lecture à l’Assemblée nationale, décembre 2013) a permis l’adoption d’un amendement qui dépénalise le stationnement sur voirie en permettant aux collectivités locales (commune, EPCI ou syndicat mixte compétent pour l’organisation des trans-ports urbains) d’instituer une redevance de stationnement (redevance d’occupation du domaine public), acquittée spontanément au début du stationnement, ou a posteriori selon un forfait de post-stationnement.

Par ailleurs, les articles 36 et 37 prévoient le transfert automatique du pouvoir de police de la circulation et du stationnement du maire au président de l’EPCI à fiscalité propre, compétent en matière de voirie, sauf opposition dans un délai défini par la loi.

Ces dispositions ont été revues et précisées à la lumière du rapport de la mission d’évaluation des conséquences de la dépénalisation du stationnement établi en juillet 2013 à la demande du Premier ministre2. Ce rapport analyse les incidences juridiques, organisationnelles, financières et techniques de la dépénalisation du stationnement

(1) Projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, modifié par l’Assemblée nationale en première lecture le 23 juillet 2013, www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0190.asp, et adopté par le Sénat en seconde lecture le 7 octobre 2013, www.senat.fr/petite-loi-ameli/2012-2013/860.html.

(2) Par lettre du 5 juin 2013, le Premier ministre a demandé à l’Inspection générale des services judiciaires (IGSJ), à l’Inspection générale de l’administration (IGA), à l’Inspection générale des finances (IGF) et au Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) de conduire une mission d’évaluation des conséquences de la dépénalisation du stationnement. Le rapport est disponible à l’adresse suivante :

www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/134000464/index.shtml.

payant ; il propose un dispositif législatif global permettant la bonne mise en œuvre de la réforme (voir annexe 6 du présent rapport).

Ces dispositions, qui ne sont pas encore définitivement adoptées par le législateur, transformeront en profondeur les modalités de gestion du station-nement, et seront l’occasion pour les collectivités locales d’insuffler une dynamique nouvelle à leur politique de stationnement. Elles ne règlent pas pour autant tous les dysfonctionnements observés.

En premier lieu, ces dispositions s’appliqueraient dans les espaces de stationnement à durée limitée ou tarifée (centres urbains et pôles multifonctionnels, notamment) mais pas dans les quartiers monofonctionnels moins denses (par exemple, les quartiers de banlieue à forte dominante résidentielle), où le stationnement réglementé (payant ou en zones bleues) n’apparaît pas justifié.

En outre, les règles de police du stationnement ne se limitent pas au seul stationnement payant ou à durée limitée, mais comprennent également des interdictions permanentes (stationnement gênant, dangereux ou abusif) et du stationnement réservé (de façon temporaire ou permanente) à certaines catégories d’usages ou d’usagers (livraisons, personnes à mobilité réduite, etc.). La dépénalisation du stationnement entraîne la cohabitation de deux systèmes d’organisation du contrôle du stationnement dans une même rue ou un même quartier : celui de la redevance d’occupation du domaine public (dépénalisée) et celui des interdictions de stationner (sanction pénale). Toute incohérence entre les deux catégories de contrôle − leur fréquence et la sanction pécuniaire ou le paiement d’un forfait qui en résulte − entraîne un risque de report du stationnement autorisé vers du stationnement gênant, dangereux ou abusif, comme en témoigne l’expérience de dépénalisation menée à Bruxelles.

Il sera donc primordial, dans les travaux préparatoires à la mise en œuvre de la dépénalisation, de prendre des mesures permettant de concilier ces deux catégories de contrôle (équipes d’îlotiers mixtes, multi-compétences des agents et des policiers municipaux, etc.).

En tout état de cause, le contrôle du respect des règles du stationnement sur l’espace public ne représente qu’une des difficultés. D’autres enseignements sont à tirer de ce diagnostic général sur les politiques de stationnement, pour répondre aux objectifs des collectivités et aux difficultés pratiques qu’elles rencontrent. La dépénalisation du stationnement est une première étape importante, elle ne saurait être considérée comme un aboutissement.

Pour résumer, l’organisation du stationnement (instruments juridiques et techniques disponibles) peut être réexaminée selon trois perspectives complémentaires :

− la maîtrise des effets globaux du stationnement sur l’aménagement de l’espace et sur la répartition modale des déplacements ;

− la pertinence de l’usage des espaces publics et privés affectés au stationnement, selon les caractéristiques des territoires ;

− le renouvellement des instruments techniques et réglementaires pour assurer une mise en œuvre efficiente du système.

Ces trois perspectives sont l’objet des chapitres suivants.

Chapitre 2

Maîtriser les effets globaux