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Une des applications essentielles de la spectroscopie de rotation est la détermina- tion de la structure des molécules. Les informations sur la structure de la molécule ou du complexe étudié dépendent des masses des atomes et de leurs positions dans la molécule, autrement dit en se basant sur les valeurs des moments d’inertie (Ia, Ib, Ic), afin de calculer les distances interatomiques, les angles de liaisons et les

angles dièdres.

Il existe différentes façons de considérer la géométrie des molécules, dont les principales sont :

— re: c’est la géométrie à l’équilibre au potentiel minimum. Elle est obtenue par des calculs de chimie quantique DFT etab initio. Sa détermination expéri- mentale est presque impossible puisqu’elle demande beaucoup d’informations et de conditions.

— rs : c’est la géométrie de substitution. Elle est obtenue par l’utilisation des équations de Kraitchman qui nécessitent les constantes de rotation de l’espèce mère et de chaque espèce monosubstituée.

2.5.1

La structure à l’équilibre r

e

La structure à l’équilibre re est la structure correspondant à l’énergie potentielle minimale, dans laquelle toutes les vibrations sont gelées. Déterminer une structure

re à partir de donnes expérimentales n’est pas simple. L’analyse des spectres de l’espèce mère et tous ses isotopologues dans les états fondamentaux et excités est nécessaire. Quand cela n’est pas possible, on peut avoir recours à des calculs de chimie quantique, à des niveaux de théorie très élevés (tel que CCSD(T)), afin de calculer les contributions harmoniques et anharmoniques des différents modes de vibration. Pour les molécules et complexes de nos études, il est illusoire de pouvoir obtenir toutes les informations permettant de calculer une telle structure.

2.5.2

La structure effective r

0

La structure r0 est la structure des molécules dans l’état fondamental de vibration. Elle est obtenue par ajustement de n paramètres structuraux (distances, angles de liaison, et angles dièdres) à un jeu de m moments d’inertie (avec m > n) provenant de l’étude de l’espèce mère et des espèces mono- et polysubstituées.

La méthode suppose que la structure de la molécule n’est pas modifiée sous l’effet des substitutions. Cela est d’autant plus vrai que l’atome substitué est lourd, par exemple 12C ↔ 13C, 16O ↔ 18O. En revanche, remplacer un atome d’hydrogène par un atome de deutérium de masse double modifie très sensiblement la structure moléculaire, surtout si l’atome est impliqué dans une liaison hydrogène, ainsi que l’ont mis en évidence Melandri et al. [77] dans leur étude sur le complexe cyclobutanone-eau (effet Ubbelohde).

Enfin, si l’observation en abondance naturelle de molécules contenant un atome 18O ou13C est possible, cela ne l’est pas pour le deutérium, dont la proportion est seulement de 0.015%. Les constantes de rotation des espèces substituées H ↔ D étant manquantes, les paramètres structuraux impliquant des atomes d’hydrogène

ne peuvent souvent être ajustés et on a recours à ceux issus des optimisations de structure par calcul de chimie quantique.

Nous avons utilisé le programme STRFIT écrit par Kisiel [78] afin d’ajuster la structure r0 des complexes. Nous avons supposé que la structure r0 des molécules (myrténal, verbénone, fenchone) ne variait pas sous l’effet de l’hydratation. Cette structure a été figée dans l’ajustement. Afin d’éviter les erreurs de report à partir des structures publiées [31, 56], nous les avons réajustées à partir des constantes disponibles et avons obtenu une matrice Z à compléter avec les paramètres définis- sant les positions des atomes (oxygène, hydrogène) des molécules d’eau. Nous avons également fait l’hypothèse que chaque molécule d’eau conservait sa structure r0. Aussi avons-nous fixé les longueurs de liaisons r0(O−H) et l’angle ∠(HOH) à ceux obtenus par De Lucia et al. [79], soit r0(O−H)=0,965 Å et ∠0(HOH)=104,78 °. Hormis ces paramètres structuraux, tous ceux concernant les atomes d’hydrogène ont été fixés aux valeurs obtenues par calcul de chimie quantique, généralement au niveau MP2/6-311++G(d,p). Les paramètres ajustés sont ceux définissant la position du ou des atomes d’oxygène des molécules d’eau. Ils seront précisés pour chaque détermination de structure.

2.5.3

La structure de substitution rs

La structure de substitution est obtenue à partir des coordonnées de chaque atome qui a pu être substitué dans la molécule. Cette structure est purement expérimentale dans la mesure où elle ne fait intervenir que la masse de la molécule et les constantes de rotation de la molécule mère et de chaque molécule monosubstituée. La détermination repose sur les équations de Kraitchman [80]. Les moments d’inertie principaux de la molécule mère sont désignés par (Ix, Iy, Iz), et ceux de la molécule isotopiquement substituée par (Ix0, Iy0, Iz0). La masse d’un atome substitué peut s’écrire sous la forme (m + ∆m), où m est la masse de l’atome parent. Cette variation permet d’écrire le moment d’inertie sous la forme :

Ix0 = Ix+ ∆m(y2+ z2) − (y∆m)2 M + ∆m(z∆m)2 M + ∆m = Ix+ µ(y 2+ z2) (2.31)

Ixy0 = −µxy (2.32) et de même pour Iyy0 et Izz0 par permutation circulaire des coordonnées x, y et z,

avec µ est la masse réduite et M la masse de la molécule :

µ = M · ∆m

M + ∆m (2.33)

Les équations obtenues par Kraitchman sur la position de l’atome substitué dépendent de la symétrie de la molécule. Pour une molécule asymétrique, on utilise au lieu du moment d’inertie I le second moment d’inertie P défini par :

Px= 1 2(−Ix+ Iy+ Iz) = X mi· x2i (2.34) Py= X mi· y2i (2.35) Px= X mi· z2i (2.36)

Les coordonnées d’un atome substitué peuvent être obtenues dans ce cas à partir des modèles dérivés de Kraitchman suivants :

|x| = " ∆Px µ 1 + ∆Py Ix− Iy ! 1 + ∆Pz Ix− Iz !#12 (2.37) |y| = " ∆Py µ 1 + ∆Pz Iy− Iz ! 1 + ∆Px Iy− Ix !#12 (2.38) |z| = " ∆Pz µ 1 + ∆Px Iz− Ix ! 1 + ∆Py Iz− Iy !#12 (2.39) Cette méthode, dans les cas où l’atome est proche du centre de masse ou d’un des axes d’inertie, peut conduire à des coordonnées imaginaires, si le terme entre crochets des équations 2.37 à 2.39 est négatif. Dans ce cas, il est impossible de déterminer la position de l’atome.

En outre, pour déterminer la structure moléculaire complète, il est nécessaire de disposer des constantes de rotation de toutes les molécules où un seul atome est substitué à la fois. Cela n’est pas toujours possible. Nous avons déjà mentionné que

le spectre des espèces deutérées n’étaient pas observables en abondance naturelle. Pour nos hydrates, il est également impossible d’observer en abondance naturelle les spectres où les atomes de carbone 13 et d’oxygène 18 de la molécule sont substitués.

L’incertitude sur les coordonnées est donnée par la formule empirique de Costain [81] :

δz = 0,0015 Å

2

| z | (2.40)

Ainsi, plus la coordonnée est petite, plus l’incertitude est importante. Elle est souvent sous estimée. La méthode ne fournissant que la valeur absolue des coordonnées, leur signes sont attribués par comparaison avec ceux donnés par les structures de chimie quantique. Il n’y a en général pas d’ambiguïté.