• Aucun résultat trouvé

Méthodes d’observation et d’analyse actuelles

Les phénomènes physiques décrits dans la section précédente ont permis le développement de différentes méthodes d’observations et d’analyses. Cette partie ne prétend pas être une description

6L’origine des symétries de la matrice d’absorption est illustrée dans la thèse de Lopez Ariste (1999).

7Cet effet est décrit pour la première fois par Christian Doppler en 1842 dans l’article « Über das farbige Licht

der Doppelsterne und einige andere Gestirne des Himmels », faux dans un premier temps et corrigé par l’auteur par la suite. L’expression complète de l’effet Doppler lumineux fait intervenir nécessairement un calcul relativiste.

détaillée et exhaustive de toutes ces méthodes. L’objectif est de montrer rapidement au lecteur comment le signal est effectivement mesuré et interprété en terme de contraintes astrophysiques.

1.3.1 Les différents types d’observations polarimétriques

Le champ magnétique est présent dans toute la séquence principale. Une grande variété de stratégies observationnelles a été développée selon les différents types d’étoiles. Les deux techniques principales, toutes deux spectro-polarimétriques par nature, sont la spectro-polarimétrie dans les raies métalliques et la polarimétrie dans les raies élargies.

Spectro-polarimétrie dans les raies métalliques

Les raies d’absorption dues aux éléments métalliques sont assez nombreuses dans les spectres optiques de type tardif. Comme chaque raie est une mesure indépendante de l’effet Zeeman, c’est potentiellement la source d’information concernant le champ magnétique (et l’abondance métal-lique) la plus intéressante. Il est effectivement possible d’avoir accès à ce signal en utilisant les spectrographes haute résolution équipés d’analyseur de polarisation. De tels instruments, comme MuSiCos (Donati et al. 1999) ou ESPaDOnS (Donati 2004) analysent la lumière incidente grâce à des éléments optiques retardateurs mobiles et des séparateurs de polarisations orthogonales. Les spectres polarisés sont enregistrés de manière indépendante et donne accès aux paramètres de Stokes I(λ), Q(λ), U (λ), V (λ).

La spectro-polarimétrie dans les raies métalliques a l’avantage de fournir toutes les informa-tions spectrales conventionnelles (i.e. profil de raie pour étudier l’abondance, la convection, l’atmo-sphère...) en complément des contraintes sur le champ magnétique. Cet outil est indispensable pour l’étude des connections entre la structure magnétique et les autres grandeurs stellaires.

La sensibilité de la spectro-polarimétrie métallique est dépendante de la température effective de l’étoile (qui influe sur la densité et la profondeur des raies) ainsi que de la vitesse de rotation (qui étale les raies sur plusieurs pixels). Cette technique est particulièrement adaptée aux étoiles froides avec une faible vitesse de rotation projetée. Ces observations sont à la base des récentes études sur les topologies magnétiques, comme les reconstructions Zeeman Doppler Imaging (Kochukhov et al. 2004).

La polarimétrie dans les raies élargies

Dans le cas des étoiles dont le spectre est moins riche en raies métalliques et présentant une vitesse de rotation plus élevée, la polarisation Zeeman est fortement diluée en longueur d’onde et l’utilité des raies métalliques en est fortement diminuée. Une alternative est d’utiliser un faible nombre de raies sélectionnées parmi les plus profondes (c’est-à-dire principalement les raies Hy-drogène et Hélium élargies par effet Stark). Comme ces raies sont intrinsèquement insensibles à la rotation, les contraintes sur la résolution spectrale sont fortement relâchées. Il est possible d’utiliser les spectrographes à moyenne et basse résolution. Des instruments capables de mesurer la polari-sation sont actuellement en service (comme FORS1 sur le VLT, Appenzeller et al. 1998). Les

instruments les plus récents obtiennent les spectres de plusieurs objets du champ simultanément (Bagnulo et al. 2002), ouvrant la voie à des relevés systématiques plus étendus.

1.3.2 Le rôle des moments magnétiques et la déconvolution L.S.D

Les profils de Stokes représentent la plus riche source d’information sur le champ magnétique stellaire. Néanmoins, leur interprétation directe est lourde en temps de calcul et nécessite la com-paraison itérative avec les résultats issus de simulations numériques complexes. Historiquement, les profils ont été décrits en terme de moments magnétiques (Mathys 1999). Sous certaines hypothèses (étoile sphérique, loi d’assombrissement centre-bord connue...), les différents moments du spectre autour d’une transition peuvent être reliés à une grandeur du champ magnétique intégrée sur l’hé-misphère visible. La variation avec la phase stellaire de ces observables renseigne sur la structure magnétique d’une étoile individuelle, sous la contrainte d’une topologie simple (superposition de multipôles). Il est aussi possible de réaliser des inter-comparaisons statistiques entre les moments sur un échantillon d’un grand nombre d’étoiles.

La déconvolution L.S.D

Jusqu’aux années 1970, les principaux niveaux d’incertitudes associés aux mesures de champs magnétiques étaient d’environ 250 Gauss. Pratiquement, cela limitait l’étude des étoiles magnétiques aux objets possédant les champs les plus intenses, biaisant ainsi très probablement les études statis-tiques. Avec l’introduction de la méthode de déconvolution par les moindres carrés, (L.S.D, Donati et al. 1997) il est devenu possible d’utiliser un grand nombre de raies simultanément et d’augmen-ter ainsi significativement la précision sur le champ magnétique longitudinal (Wade et al. 2000; Shorlin et al. 2002). La méthode L.S.D est intrinsèquement une méthode de spectro-polarimétrie des raies métalliques. Le spectre est automatiquement modélisé en lumière naturelle et circulaire en supposant un effet Zeeman faible (pas de polarisation linéaire) et un modèle de convolution. Le couple de profils I et V qui reproduit le mieux l’intégralité des raies étudiées est utilisé pour déterminer le champ longitudinal moyen (moment magnétique le plus utilisé).

1.3.3 L’imagerie par effet Doppler

L’imagerie par effet Doppler a été introduite par Goncharskij et al. (1982). En se basant sur une série de spectres obtenus à différentes phases rotationnelles φ, il devient possible de reconstruire la carte d’intensité par une inversion généralisée du type :

(λ, φ)→ (latidude, longitude) (1.12)

L’assombrissement centre-bord (pour l’observateur, l’intensité d’un point n’est pas constante au cours de la rotation) et la largeur naturelle des raies (brouillage de la relation λ → Yo) compliquent l’inversion et la rendent fortement non-linéaire. Pratiquement, la carte reconstruite n’est pas une carte d’intensité mais directement une carte d’abondance ou de température.

Historique et résultats récents

Cette technique a démontré sa capacité unique pour construire des cartes d’abondance de l’at-mosphère stellaire. Elle a ensuite été étendue à la reconstruction de la topologie magnétique à partir de l’évolution temporelle des moments magnétiques. Bien que cette analyse se limitait souvent à contraindre une topologie paramétrique simple (superposition de multipôles, Bagnulo et al. 2000), elle a permis les premières études de la diffusion des espèces en présence de champ. Néanmoins, l’in-dépendance et la non simultanéité des deux reconstructions posent de nombreux problèmes. Ainsi la structure magnétique, en influençant le profil en I, peut « mimer » la présence d’une tache d’abondance ou de température.

Par la suite, l’évolution de la précision des mesures et des moyens de calculs ont permis la reconstruction conjointe du champ magnétique et de l’abondance. Ces techniques sont basées sur l’ajustement itératif de plusieurs paramètres de Stokes, c’est la Zeeman Doppler Imaging (ZDI, Semel 1989; Donati et al. 1989). La sensibilité à l’orientation locale du champ magnétique est détaillée par Donati & Brown (1997). L’utilisation de l’ensemble des paramètres I,Q,U,V est à la base d’un autre algorithme (Magnétique Doppler Imaging, MDI, Piskunov 1998a; Piskunov & Kochukhov 2002).

Depuis quelques années, ces méthodes sont utilisées de manière routinière et la plupart des proto-types de la classe Ap ont été reconstruits (Kochukhov et al. 2004, 2002; Lueftinger et al. 2003). Des auteurs ont aussi montré la possibilité d’utiliser des méthodes similaires pour cartographier les oscillations des roAp (Kochukhov 2004).

Limites de l’imagerie par effet Doppler

Les problèmes mal conditionnés peuvent être décomposés en deux catégories selon qu’ils pos-sèdent une ou plusieurs solutions. Dans les deux cas, l’inversion nécessite de faire intervenir une régularisation mais son rôle est différent. Dans le premier cas, la régularisation prémunit simple-ment contre « l’oubli » de certaines régions de la surface à cause d’une couverture rotationnelle incomplète. Dans le second cas, la régularisation restreint les multiples solutions à une seule et il est alors important que la régularisation soit basée sur des arguments physiques (par exemple une décomposition multipolaire du champ). Il n’a jamais été prouvé que l’imagerie Doppler appartenait à la première catégorie (la moins dangereuse), mais de nombreuses simulations numériques ont mon-tré que l’inversion convergeait systématiquement vers la bonne carte en augmentant la qualité des observables (Piskunov & Kochukhov 2002). De plus, les algorithmes retrouvent la solution en partant de conditions initiales très différentes. Néanmoins, la présence de contraintes géométriques directes, c’est-à-dire non issues d’une reconstruction, est l’unique manière de conclure définitivement sur la véracité des cartes obtenues.

En plus des limitations qualitatives, l’imagerie Doppler possède des limitations intrinsèques. Ainsi certaines configurations sont complètement dégénérées, à cause des symétries du problème. Par exemple, il est impossible de reconstruire une étoile dont l’axe de rotation pointe vers l’observateur ou lui est perpendiculaire. En pratique, avec un rapport signal-à-bruit fini, les configurations proches des états dégénérés sont délicates à reconstruire. Enfin, la qualité de la carte obtenue n’est pas constante sur la surface. Les points passant aux limbes de l’hémisphère visible sont plus difficilement

contraints, car ils contribuent beaucoup moins au spectre intégré (Jankov & Foing 1992; Jankov et al. 2001).