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De nombreuses techniques de dégivrage sont rapportées dans la littérature. Laforte et al. [16] ont identifié et classé ces méthodes dans le cas des lignes électriques en quatre catégories : - Les méthodes thermiques basées sur la fonte de la glace

- Les méthodes mécaniques basées sur la rupture de la glace - Les méthodes passives basées sur les forces naturelles

- Diverses méthodes non classables dans les trois catégories précédentes

Cette classification nous paraît adaptée à d’autres applications. Plus généralement, ces mé- thodes peuvent être séparées en deux catégories : les méthodes actives d’une part et les méthodes passives d’autre part. Nous proposons ci-après un descriptif non exhaustif.

3.2.1 Méthodes actives Méthodes thermiques

Parmi les méthodes actives, Laforte et al. [16] ont rapporté huit différentes techniques de dégivrage thermique. Certaines sont applicables aux matériaux conducteurs et consistent en l’échauffement de ces derniers par effet Joule. Ces techniques nécessitent l’utilisation d’une quantité importante d’énergie, et malgré leur efficacité élevée elles ne peuvent être utilisées ni en permanence, ni sur de grandes surfaces.

Deux techniques thermiques sont utilisées en aéronautique pour dégivrer les avions en vol ou au sol. La première consiste en l’utilisation de flux de gaz à haute température pour retirer la glace des bords d’attaque des ailes. La seconde consiste en l’utilisation d’un mélange non corrosif de glycol et d’eau chaude. L’application de ce liquide permet de diminuer le point

3.2. Méthodes de dégivrage

de nucléation de l’eau et d’éviter la formation et l’accumulation de givre. Ces techniques, bien que très efficaces, paraissent difficiles à mettre en œuvre pour d’autres applications que l’aéronautique. En effet, la première nécessite une source d’énergie capable de produire des flux de gaz à haute température ainsi que des matériaux suffisamment résistants et l’efficacité de la seconde méthode est limitée dans le temps.

Pour les éoliennes, des techniques de chauffage électrique sont utilisées. L’objectif est de former un mince film d’eau liquide entre les pales et la glace pour qu’elle se retire simplement grâce à leur rotation [164]. L’énergie utilisée est relativement négligeable par rapport au gain de productivité [165]. Mais, le marché des éoliennes étant encore limité, beaucoup des dispositifs de ce type sont toujours des prototypes. De plus, dans des conditions de froid extrêmes, le système peut s’avérer insuffisant.

Concernant les panneaux solaires, Jelle [163] a évoqué plusieurs solutions, notamment l’utilisa- tion de câbles électriques chauffants. Mais cette solution, acceptable sous certaines conditions, paraît peu viable au vu de sa consommation importante d’énergie.

Méthodes mécaniques

Dans le cas des lignes à haute tension, il existe une technique utilisant un dispositif placé directement sur le câble électrique capable de briser et de retirer la glace en roulant sur celui-ci [16].

Sur les avions, il existe des boudins de dégivrage constitués de corps gonflables, périodi- quement activés par des pompes pneumatiques, capables de briser le givre sur les bords d’attaque [38, 46, 51]. Des dispositifs similaires sont utilisés sur les éoliennes. Une fois brisée, la glace est retirée par la force centrifuge [165].

3.2.2 Méthodes passives

Les méthodes passives se définissent comme ne nécessitant pas d’apport d’énergies externes autres que celles des forces naturelles comme le vent, la gravité, les radiations et les variations de température [16].

Dans le cas des éoliennes, l’utilisation d’une peinture noire permet un échauffement de la surface. Cette méthode a été testée au Canada par Maissan [166] et a montré une bonne efficacité dans le cas où la couche de glace est relativement fine. Mais, elle ne fonctionne que si les périodes de givre alternent avec d’autres où la température est supérieure à 0°C ou si l’ensoleillement est suffisamment important [165]. Dans de nombreux cas, cette méthode seule n’est pas suffisante.

Une autre technique consiste à réduire ou empêcher l’adhésion de la glace sur les surfaces grâce à un fin film de lubrifiant. Cette technique est possible par l’imprégnation en excès

d’un solide texturé ou poreux. Ensuite, la présence de forces externes comme la gravité ou le vent, permet de retirer la glace formée par dessus le film, dont l’adhésion à la surface est réduite [167]. L’efficacité de cette méthode est limitée dans le temps car la couche de lubrifiant finit par disparaître.

Citons aussi l’utilisation de produit chimique pour diminuer le point de congélation de l’eau. Il s’agit de la méthode précédemment décrite comme active pour l’aéronautique et utilisant un mélange de glycol et d’eau chaude mais, cette fois utilisée en prévention. Pour cela, le mélange est rendu plus visqueux. Mais ce produit nécessite d’être appliqué à chaque fois que les conditions l’exigent [16] et demande donc une anticipation des conditions météorologiques.

3.2.3 Le cas des surfaces superhydrophobes

Il est suggéré par la littérature que les surfaces superhydrophobes sont prometteuses en tant que surfaces antigivre passives, ou encore pour réduire considérablement l’énergie utilisée par les méthodes actives. En effet, la surface de contact entre le solide et l’eau et les échanges thermiques sont minimisés lorsque la surface est superhydrophobe.

Formation et propagation du givre sur les surfaces superhydrophobes

La formation du givre sur les surfaces est un phénomène complexe d’autant plus difficile à comprendre lorsqu’il a lieu sur des surfaces superhydrophobes [17]. Il a été montré que sur ce type de surface, la formation de givre apparait en premier lieu sur les bords des surfaces [67,68]. En effet, c’est là où se concentrent des défauts aidant à vaincre les barrières énergétiques de la nucléation. Ensuite, le givre se propage dans toutes les directions et en particulier vers le centre de l’échantillon. Nous avons observé ces caractéristiques sur nos échantillons comme l’illustre la Figure 3.2. Nous avons déposé sur une surface superhydrophobe cinq gouttes d’eau en différents points de la surface. Ainsi, nous avons observé la propagation du givre depuis les bords de l’échantillon jusqu’en son centre. Lorsque le front de givre touche une goutte d’eau liquide, alors elle gèle instantanément.

Notons qu’il est parfois possible d’observer la formation spontanée de givre à d’autres endroits que sur les bords de l’échantillon, ce phénomène est visible sur la Figure 3.2 dès 7 minutes à −15°C. Des défauts ou poussières sont susceptibles de fournir l’énergie nécessaire à la nucléation de l’eau. Mais, nous observons expérimentalement que dans la grande majorité des cas, la goutte située au centre de l’échantillon gèle au contact du front de givre provenant des bords.

La vitesse de propagation a été estimée comme inférieure sur les surfaces superhydrophobes par rapport à une surface classique. Cette diminution conséquente a été attribué à la faible surface en contact entre le solide superhydrophobe et l’eau [67].

3.2. Méthodes de dégivrage

FIGURE3.2 – Propagation du givre sur un film hydrophobe de FEP placé à −15°C dès t0.

Les forces d’adhésion de la glace sur les surfaces superhydrophobes

Les forces d’adhésion entre le givre et la surface solide représentent une question importante dans l’élaboration de surfaces antigivre. En effet, si le givre se forme, alors il peut être intéres- sant de pouvoir le retirer de manière passive simplement avec le vent ou la force centrifuge. Kulinich et al. [168] ont montré une corrélation entre les faibles CAH et des forces d’adhésion réduites. Cela peut s’expliquer par une surface de contact réduite entre le solide et la glace. Dans leur étude, des forces d’adhésion six fois inférieures pour les surfaces superhydrophobes ont été mesurées. Autre exemple, Ménini et al. [169] ont élaboré un revêtement de PTFE sur aluminium montrant des propriétés antigivre avec des forces d’adhésion quatre fois inférieures à l’aluminium non traité.

Enfin, Mobarakeh et al. [170] ont étudié les forces d’adhésion de la glace sur une surface recouverte d’hexamethyldisiloxane après plusieurs cycles de givrage et dégivrage. Ils ont ainsi observé une augmentation des forces d’adhésion après plusieurs cycles à cause d’une diminution simultanée des angles de contact. Ces résultats sont reportés sur la Figure 3.3 proposée par Zhang et al. [17] d’après les résultats de Mobarakeh et al. [170]. Cela montre la corrélation de ces deux paramètres, mais aussi la probable fragilité de ces surfaces avec le temps ou par rapport aux différentes méthodes de dégivrage.

FIGURE3.3 – Variations des forces d’adhésion et des angles de contact en fonction du nombre

de cycle de givrage/dégivrage sur une surface superhydrophobe d’hexamethyldisiloxane. Figure tirée de [17] d’après les résultats de [170].

Le retard de gel sur les surfaces superhydrophobes

Le retard de gel sur les surfaces antigivre est une question centrale pour beaucoup d’appli- cations. Il est connu que ce retard est augmenté sur les surfaces superhydrophobes car le transfert thermique entre l’eau et la surface froide est diminué par l’air piégé dans les aspérités et cavités de surface [17]. En effet, Liu et al. [171] ont mesuré des retards de gel de plus de 7 minutes à −10,4°C sur des surfaces superhydrophobes de silicium traité par plasma fluoré. Tourkine et al. [62] ont observé une augmentation du retard de gel de plus de 120 secondes à −8°C sur des surfaces superhydrophobes rugueuses de cuivre recouvertes d’un revêtement hydrophobe, voir Figure 3.4. Puis, Singh et al. [172] ont également observé une augmentation du retard de gel d’environ 1 minute à −10°C sur des films minces d’argent superhydrophobes par rapport à des surfaces chimiquement identiques mais non rugueuses.

Finalement, les retards de gel rapportés par la littérature sont limités à quelques minutes seulement pour une température d’environ −10°C. Nous présentons dans la partie suivante nos résultats expérimentaux en commençant par commenter la mouillabilité des films à −15°C.